LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
CM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 4 mars 2021
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 158 F-D
Pourvoi n° G 19-22.830
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 MARS 2021
La société [...] , société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° G 19-22.830 contre l'arrêt rendu le 17 juillet 2019 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile section 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. J... G...,
2°/ à Mme X... G...,
3°/ à M. M... G...,
tous trois domiciliés [...] ,
4°/ à M. S... R..., domicilié [...] ,
5°/ à M. S... O..., domicilié [...] ,
6°/ à M. S... K..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Alta Rocca,
7°/ au procureur général près la cour d'appel de Bastia, domicilié en son parquet général [...],
8°/ à la société Vatel Capital, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
9°/ à la société caisse régionale du Crédit agricole mutuel de la Corse, société coopérative de crédit, dont le siège est [...] ,
10°/ à la société Invefimo, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
11°/ à la société Mer et Pierres de Corse, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société [...] , de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. J... G..., Mme X... G..., M. M... G..., M. S... R..., M. S... O..., M. S... K..., en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire la société Alta Rocca, la société Vatel Capital et de de la société caisse régionale du Crédit agricole mutuel de la Corse, et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 janvier 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 17 juillet 2019, RG n° 19/00298), un tribunal de commerce a prononcé le redressement judiciaire de la société Alta Rocca, ultérieurement converti en liquidation judiciaire. Cette société exploitait un fonds de commerce d'hôtellerie situé dans un immeuble appartenant à la SCI Saint-Pierre, elle-même placée en liquidation judiciaire, M. K... ayant été désigné en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire des deux sociétés.
2. Par ordonnance du 11 mars 2019, le juge commissaire du tribunal de commerce en charge de la procédure à l'égard de la société Alta Rocca a autorisé la cession des actifs mobiliers dépendant de la liquidation de cette société au profit conjoint de la société Vatel capital et de MM. R... et O....
3. Par déclaration du 21 mars 2019, un appel de cette ordonnance a été relevé au nom de la société en formation A [...] .
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société [...] fait grief à l'arrêt de la déclarer irrecevable en son appel principal, alors « que la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir est susceptible de régularisation jusqu'au moment où le juge statue ; que l'irrégularité affectant la recevabilité d'une déclaration d'appel effectuée pour le compte d'une société en formation qui n'avait pas à cette date d'existence légale est couverte par l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés avant que le juge statue ; qu'en déclarant irrecevables les déclarations d'appel formées par la société [...] aux motifs que « l'irrégularité des actes d'appel tenant à l'inexistence de la personne morale qui a engagé la procédure constitue une irrégularité de fond qui ne peut être couverte » et que « l'immatriculation de la société, dès lors qu'elle est postérieure à l'expiration du délai d'appel, ne pouvait en aucun cas régulariser l'irrégularité qui affecte la saisine de la cour », c'est-à-dire en considérant que la qualité à agir de la société [...] n'était pas susceptible de régularisation en cours d'instance malgré son immatriculation intervenue le 6 mai 2019, soit avant que le juge statue, la cour d'appel a violé l'article 126 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte des articles 117 et 121 du code de procédure civile qu'une procédure engagée par une partie dépourvue de personnalité juridique est entachée d'une irrégularité de fond qui ne peut être couverte.
6. Ayant constaté qu'il n'était pas contesté que la société [...] , société en formation, ne disposait pas de la personnalité morale et n'avait pas d'existence légale lorsqu'elle a formalisé, par l'intermédiaire de Mme W... N..., sa représentante, la déclaration d'appel du 21 mars 2019, la cour d'appel en a exactement déduit, sans méconnaître l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'était indifférente la circonstance que la société ait été immatriculée au registre du commerce et des sociétés à compter du 6 mai 2019, postérieurement à l'appel, et qu'aux termes d'un procès-verbal de l'assemblée générale du même jour, les associés aient approuvé tous les actes et engagements pris au nom et pour le compte de la société par les fondateurs.
7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société [...] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [...] et la condamne à payer à la caisse régionale du Crédit agricole mutuel de la Corse, à M. J... G..., à Mme X... G..., à M. M... G..., à M. S... R..., à M. S... O..., à M. S... K..., en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Alta Rocca, et à la société Vatel capital, la somme globale de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société [...]
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société [...] irrecevable en son appel principal ;
AUX MOTIFS QUE la société [...] , société en formation, ne disposait pas de la personnalité morale et n'avait pas d'existence légale, lorsqu'elle a formalisé, par l'intermédiaire de Mme W... N..., sa représentante, la déclaration d'appel du 21 mars 2019 ; que l'irrégularité de l'acte d'appel tenant à l'inexistence de la personne morale qui a engagé la procédure constitue une irrégularité de fond qui ne peut être couverte ; qu'il est donc indifférent que désormais la société ait été immatriculée au registre du commerce et des sociétés à compter du 6 mai 2019 et qu'aux termes d'un procès-verbal de l'assemblée générale du même jour, les associés aient approuvé « tous les actes et engagements pris au nom et pour le compte de la société par les fondateurs » ; que l'immatriculation de la société, dès lors qu'elle est postérieure à l'expiration du délai d'appel, ne pouvait d'ailleurs en aucun cas régulariser l'irrégularité qui affecte la saisine de la cour, que sans avoir à examiner les autres moyens soulevés (...), il y a donc lieu de déclarer la société [...] , qui ne disposait pas de la personnalité morale, irrecevable en son appel ;
ALORS QUE la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir est susceptible de régularisation jusqu'au moment où le juge statue ; que l'irrégularité affectant la recevabilité d'une déclaration d'appel effectuée pour le compte d'une société en formation qui n'avait pas à cette date d'existence légale est couverte par l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés avant que le juge statue ; qu'en déclarant irrecevable la déclaration d'appel formée par la société [...] aux motifs que « l'irrégularité de l'acte d'appel tenant à l'inexistence de la personne morale qui a engagé la procédure constitue une irrégularité de fond qui ne peut être couverte » et que « l'immatriculation de la société, dès lors qu'elle est postérieure à l'expiration du délai d'appel, ne pouvait en aucun cas régulariser l'irrégularité qui affecte la saisine de la cour », c'est-à-dire en considérant que la qualité à agir de la société [...] n'était pas susceptible de régularisation en cours d'instance malgré son immatriculation intervenue le 6 mai 2019, soit avant que le juge statue, la cour d'appel a violé l'article 126 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.