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04/03/2021 | FRANCE | N°19-21580

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 mars 2021, 19-21580


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 mars 2021

Cassation sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 155 F-D

Pourvoi n° Z 19-21.580

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 MARS 2021

La société Cofic, société à responsabilité limitée, dont

le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Z 19-21.580 contre l'arrêt rendu le 22 novembre 2016 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civil...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 mars 2021

Cassation sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 155 F-D

Pourvoi n° Z 19-21.580

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 4 MARS 2021

La société Cofic, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Z 19-21.580 contre l'arrêt rendu le 22 novembre 2016 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la communauté d'agglomération de l'espace sud de la Martinique (CAESM), dont le siège est [...] , venant aux droits du syndicat intercommunal du centre et du sud de la Martinique (SICSM), prise en la personne de son président en exercice Q... E...,

2°/ à la commune du Diamant, représentée par son maire en exercice, domicilié [...] ,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Maunand, conseiller, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Cofic, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la communauté d'agglomération de l'espace sud de la Martinique, de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la commune du Diamant, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 20 janvier 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Maunand, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 22 novembre 2016), au cours de l'année 1977, une station d'épuration ainsi qu'un château d‘eau ont été construits sur une parcelle située lieudit [...] , cadastrée section [...] puis [...] et actuellement [...] .

2. La propriété de ce terrain était revendiquée par la SAEG, aux droits de laquelle vient la société Cofic, suivant acte de fusion-absorption du 3 décembre 1998.

3. Estimant être victime d'une voie de fait sur sa parcelle, la société Cofic a assigné le 16 octobre 2007, en réparation, la commune du Diamant devant un tribunal de grande instance. Celle-ci a attrait en intervention forcée devant cette juridiction, le 7 juillet 2009, le syndicat intercommunal du centre et du sud de la Martinique (le syndicat intercommunal), auquel elle prétendait avoir transféré les compétences d'assainissement sur le terrain de la société Cofic.

4. Par jugement du 20 avril 2010, le tribunal a dit que la prise de possession du terrain appartenant à la société Cofic est constitutive d'une voie de fait imputable à la commune du Diamant, a rejeté la demande tendant à voir constater que la compétence assainissement a été transférée au syndicat intercommunal, ainsi que le moyen tiré de la déchéance quadriennale opposé par la commune du Diamant à la demande d'indemnisation présentée par la société Cofic. Il a, avant dire droit, ordonné une expertise sur l'évaluation du préjudice.

5. Par jugement du 19 novembre 2013, le tribunal a condamné la commune du Diamant à payer à la société Cofic une certaine somme à titre d'indemnisation de la voie de fait commise sur la parcelle appartenant à celle-ci outre les intérêts.

6. Le 12 juin 2014, le syndicat intercommunal a interjeté appel du jugement du 19 novembre 2013.

7. Par ordonnance du 4 juin 2015, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables l'appel du syndicat intercommunal, et par suite, l'appel incident de la commune du Diamant et constaté le dessaisissement de la cour.

8. Statuant sur déféré, la cour d'appel a, par arrêt du 22 novembre 2016, infirmé l'ordonnance et déclaré l'appel du syndicat intercommunal recevable.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses quatrième et sixième branches, ci-après annexé

9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. La société Cofic fait grief à l'arrêt infirmatif de déclarer recevable l'appel relevé par le syndicat intercommunal, alors « qu'en l'absence de succombance, la partie qui n'a fait l'objet d'aucune condamnation n'a pas intérêt à faire appel du jugement ; qu'en considérant que l'intérêt à agir du SICSM serait démontré quand elle constatait que l'indemnisation de la voie de fait litigieuse avait été mise à la charge de la commune du Diamant, seule condamnée, et que le SICSM était partie défaillante en première instance, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 546 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 546 du code de procédure civile :

11. Aux termes de ce texte, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt si elle n'y a pas renoncé.

12. L'intérêt à interjeter appel a pour mesure la succombance, qui réside dans le fait de ne pas avoir obtenu satisfaction sur un ou plusieurs chefs de demande présentés en première instance.

13. Pour déclarer recevable l'appel formé par le syndicat intercommunal, l'arrêt retient que les appelants justifient devant la cour que, par décision du 23 octobre 2003, le conseil municipal a décidé d'approuver le transfert de la compétence « assainissement » au syndicat intercommunal. Il ajoute qu'aux termes des articles L. 1321-1 et L. 1321-2 du code général des collectivités territoriales, le transfert de compétence d'une commune à un syndicat intercommunal entraîne de plein droit la mise à disposition des biens meubles et immeubles utilisés pour l'exercice de cette compétence, la collectivité bénéficiaire assumant l'ensemble des obligations de la commune.

14. Il relève, en outre, que le jugement entrepris a condamné la commune du Diamant au paiement de dommages-intérêts en réparation d'une voie de fait commise sur une parcelle appartenant à la société Cofic et sur laquelle la ville a fait édifier une station d'épuration et en déduit qu'au regard de ces éléments, l'intérêt à agir du syndicat intercommunal est démontré, puisque ce dernier est destiné à assumer la condamnation prononcée à l'encontre de la ville du Diamant, sauf infirmation du jugement par la cour lorsqu'elle statuera sur le fond.

15. Qu'en statuant ainsi, alors que le jugement entrepris n'avait prononcé aucune condamnation à l'encontre du syndicat intercommunal et que ce dernier, qui n'était pas comparant en première instance, n'avait formulé aucune demande devant le tribunal, ce dont il résultait que le syndicat intercommunal n'avait aucun intérêt à interjeter appel, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

16. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

17. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

18. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 11, 12 et 15 que le syndicat intercommunal ne justifie d'aucun intérêt à interjeter appel du jugement du 19 novembre 2013. Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état et de déclarer irrecevable l'appel formé par le syndicat intercommunal du centre et du sud de la Martinique contre le jugement du 19 novembre 2013, rendu par le tribunal de grande instance de Fort-de-France.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

INFIRME l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 4 juin 2015 ;

DÉCLARE IRRECEVABLE l'appel formé par le syndicat intercommunal du centre et du sud de la Martinique contre le jugement du 19 novembre 2013 rendu par le tribunal de grande instance de Fort-de-France ;

Condamne la communauté d'agglomération de l'espace sud de la Martinique, venant aux droits du syndicat intercommunal du centre et du sud de la Martinique, et la commune du Diamant aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Cofic

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif d'AVOIR déclaré l'appel relevé par le SICSM à l'encontre du jugement du 19 novembre 2013 recevable ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 546 du code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé ; qu'il est établi que le SICSM a été mis en cause, à la demande du tribunal, dans la procédure ayant donné lieu au jugement entrepris, mais qu'il a été partie défaillante ; que le conseiller de la mise en état a jugé son appel irrecevable au motif qu'il n'avait pas intérêt à agir, n'ayant fait l'objet d'aucune condamnation par le tribunal et la demande de la commune du Diamant relative au transfert de compétence au profit du Syndicat en matière d'assainissement ayant été rejetée par le jugement du 20 avril 2010 ; que la commue du Diamant et le SICSM justifient devant la cour que, par décision du 23 octobre 2003, le conseil municipal a décidé d'approuver le transfert de la compétence assainissement au SICSM ; qu'aux termes des articles L 1321-1 et 1321-2 du code général des collectivités territoriales, le transfert de compétence d'une commue à un syndicat intercommunal entraîne de plein droit la mise à disposition des biens meubles et immeubles utilisés pour l'exercice de cette compétence, la collectivité bénéficiaire assumant l'ensemble des obligations de la commune ; que le jugement entrepris a condamné la commune du Diamant au paiement de dommages et intérêts en réparation d'une voie de fait commise sur une parcelle appartenant à la SARL Cofic et sur laquelle la commune a fait édifier une station d'épuration ; qu'au regard de ces éléments, l'intérêt à agir du SICSM est démontré, puisque le syndicat est destiné à assumer la condamnation prononcée à l'encontre de la commune du Diamant, sauf infirmation du jugement par la cour lorsqu'elle statuera sur le fond ; qu'il est certain que le respect des dispositions légales relatives à l'organisation des collectivités publiques constitue un intérêt supérieur pour le SICSM, même s'il n'a pas été condamné en première instance ; qu'enfin il n'est pas démontré que le jugement du 20 avril 2010, aux termes duquel la demande de la commune relative à la constatation du transfert de compétence a été rejetée, n'est plus susceptible d'appel ; qu'en effet il n'est pas justifié de sa signification et les dispositions de l'article 528-1 du code de procédure civile ne sont pas applicables à ce jugement mixte ; que l'appel relevé par le SICSM serait donc recevable ; que l'ordonnance déférée est dès lors infirmée ;

1°) ALORS QU' en l'absence de succombance, la partie qui n'a fait l'objet d'aucune condamnation n'a pas intérêt à faire appel du jugement ; qu'en considérant que l'intérêt à agir du SICSM serait démontré quand elle constatait que l'indemnisation de la voie de fait litigieuse avait été mise à la charge de la commune du Diamant, seule condamnée, et que le SICSM était partie défaillante en première instance, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 546 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche ; que pour infirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré irrecevable l'appel du SICSM au motif, notamment, que la demande de la commune du Diamant relative au transfert de compétence au profit du SICM avait été rejetée par le jugement du 20 avril 2010, la cour d'appel a retenu que la commune du Diamant et le SICSM justifiaient devant elle du transfert de compétence et qu'il n'était pas démontré que le jugement du 20 avril 2010 n'était plus susceptible d'appel ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause ;

3°) ALORS QUE l'intérêt à agir s'entend d'un intérêt direct et personnel ; qu'un syndicat intercommunal prétendument bénéficiaire d'un transfert de compétence n'a pas vocation à veiller de façon abstraite au respect de la loi indépendamment de son intérêt propre ; qu'en justifiant l'intérêt du SICSM à faire appel d'un jugement ne lui faisant pas grief par le motif selon lequel le respect des dispositions légales relatives à l'organisation des collectivités publiques constitue un intérêt supérieur pour lui, même s'il n'a pas été condamné en première instance, la cour d'appel a violé les articles 31 et 546 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en se fondant, pour déclarer recevable l'appel interjeté par le SICSM, sur le fait que ce dernier était destiné à assumer la condamnation prononcée à l'encontre de la commune du Diamant, tandis que le SICSM se bornait à indiquer dans ses conclusions le risque d'un éventuel recours en garantie de la commune du Diamant (requête du SICSM, page 3, §1 et pénult.), la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

5°) ALORS QUE le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé ; qu'en cas de transfert de compétence, la mise à la disposition au profit de la collectivité bénéficiaire est constatée par un procès-verbal établi contradictoirement entre les représentants de la collectivité antérieurement compétente et de la collectivité bénéficiaire ; que ce procès-verbal précise la consistance, la situation juridique, l'état des biens et l'évaluation de la remise en état de ceux-ci ; qu'en se fondant, pour dire que le SICSM avait intérêt à interjeter appel, sur le motif selon lequel le SICSM était destiné à assumer la condamnation prononcée contre la commune du Diamant en raison du transfert de la compétence assainissement qui aurait entraîné de plein droit la mise à disposition des biens meubles et immeubles utilisés pour l'exercice de cette compétence ainsi que le transfert de l'ensemble des obligations de la commune sans constater qu'un procès-verbal contradictoire aurait été signé entre les parties pour donner effet à la mise à disposition, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L1321-1 du code général des collectivités territoriales ensemble l'article 546 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen opérant des conclusions de la société COFIC, assorti d'offre de preuves, faisant valoir que la fermeture de la station de la Chéry était prévue depuis 2003 et qu'elle était effectivement désaffectée de sorte que c'est bien la commune qui était responsable de la voie de fait subie par COFIC (conclusions d'appel de COFIC, page 11), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-21580
Date de la décision : 04/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 mar. 2021, pourvoi n°19-21580


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Didier et Pinet, SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.21580
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