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03/03/2021 | FRANCE | N°19-22549

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mars 2021, 19-22549


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MA

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 mars 2021

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 283 F-D

Pourvoi n° C 19-22.549

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 MARS 2021

La société Alaji, société par actions simplifiée, do

nt le siège est [...] , a formé le pourvoi n° C 19-22.549 contre l'arrêt rendu le 19 juin 2019 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, sectio...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MA

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 mars 2021

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 283 F-D

Pourvoi n° C 19-22.549

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 MARS 2021

La société Alaji, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° C 19-22.549 contre l'arrêt rendu le 19 juin 2019 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à Mme Y... V..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Alaji, de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de Mme V..., après débats en l'audience publique du 13 janvier 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 19 juin 2019), Mme V... a été engagée le 24 novembre 1986 par l'association Alaji en qualité de formatrice. Son contrat a été transféré le 1er janvier 2013 à la société Alaji (la société).

2. Le 25 février 2016, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux motifs qu'elle avait fait l'objet d'un déclassement professionnel et d'un harcèlement moral.

3. Suite à son arrêt de travail, une visite médicale de reprise a été organisée le 16 avril 2018. A l'issue de cette visite, la salariée a été déclarée inapte à son poste de travail.

4. La société a convoqué la salariée, par lettre du 25 mai 2018, à un entretien préalable au licenciement fixé au 5 juin 2018. Elle a été licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement le 11 juin 2018.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, de prononcer la résolution judiciaire du contrat la liant à elle et de la condamner à verser à la salariée diverses sommes à titre d'indemnités de rupture et dommages-intérêts pour licenciement nul, alors « que les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; que la société Alaji contestait formellement avoir privé Mme V... de prime de fin d'année faisant valoir qu'il n'existait aucune obligation de verser une telle prime ; qu'elle contestait également avoir opposé un refus à une demande de formation de la salariée faisant valoir que suite à l'avis défavorable du Fongecif, elle avait fait toutes démarches auprès de l'Opca Agefos Pme sans que celles-ci n'aboutissent en raison des atermoiements de la salariée ; qu'elle contestait avoir exercé la moindre pression sur la salariée pour obtenir la signature d'une rupture conventionnelle faisant valoir que les deux parties étaient entrées en négociations mais que celles-ci n'avaient pas abouti ; qu'en retenant comme établis le non-paiement d'une prime de fin d'année, le refus de formation et les pressions aux fins d'obtenir que Mme V... accepte une rupture conventionnelle, après avoir relevé que ces faits n'étaient pas contestés par la société Alaji, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

6. Pour condamner la société au titre d'un harcèlement moral, la cour d'appel a retenu qu'elle ne contestait pas avoir refusé la formation de reconversion de la salariée.

7. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que la société soutenait qu'elle n'avait pas refusé cette formation à la salariée, la cour d'appel, qui a modifié les termes du litige, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne Mme V... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Alaji

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Alaji à payer à Mme V... la somme de 7500 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, d'AVOIR en conséquence prononcé la résolution judiciaire du contrat liant Mme V... à la société Alaji et condamné cette dernière à verser à Mme V... diverses sommes à titre d'indemnités de rupture et dommages et intérêts pour licenciement nul, outre une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sa condamnation aux dépens de la procédure de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;
Mme Y... V... expose qu'elle a été soumise à des faits de harcèlement moral se caractérisant par :
-des modifications unilatérales du contenu de son poste matérialisant une déqualification ;
-le retrait de son véhicule de fonction ;
-l'absence de versement d'une prime de fin d'année ;
-un refus de formation lui permettant une reconversion professionnelle ;
-des pressions aux fins qu'elle accepte une rupture conventionnelle ;
Qu'en conséquence ses conditions de travail se sont dégradées, et que cette dégradation a causé une altération de son état de santé aboutissant à une inaptitude à son poste.
-Sur les modifications unilatérales du contenu de son poste matérialisant une déqualification. Il ressort des pièces du dossier que Mme Y... V... avait, antérieurement au 1er janvier 2013, la co-responsabilité du « Pole développement public-privé » ; qu'il ressort de la fiche relative à ce poste que celui-ci correspondait à une fonction de conception et de mise en place de dispositifs de formation, le titulaire devant «répondre aux objectifs fixés par la Direction Générale en termes d'objectifs et de résultat » ; que, dans l'organisation de la SAS ALAJI postérieure au 1er janvier 2013, elle est devenue « chargée de développement d'ingénierie » dans le pôle « Recherche développement ingénierie » ; qu'elle s'est alors trouvé à équivalence de poste avec Mmes I... Q... et S... J... qui occupaient précédemment les postes d'assistante commerciale et assistante de formation. Si la SAS ALAJI apporte des attestations établies par Mmes D..., Q..., J... et R... termes desquelles les fonctions de Mme V...'ont pas été modifiées à la suite du transfert de l'association ALAJI vers la SAS ALAJI, il ressort d'une attestation établie par Mme W... B... que « Mme V... perdu progressivement ses responsabilités d'encadrement pour être relayée (sic) à un poste de formatrice ».

Il ressort donc de ce qui précède que, dans les derniers mois de sa présence dans l'entreprise, Mme Y... V... n'exerçait plus une fonction de conception et d'encadrement mais une fonction de formatrice, fonction subordonnée à celle qu'elle était censée exercer.
Le fait est donc établi et doit être retenu.
-Sur le retrait du véhicule de fonction.
Ce fait n'est pas contesté par la SAS ALAJI ; il sera donc retenu.
-Sur l'absence de versement d'une prime de fin d'année en 2013.
Ce fait n'est pas contesté par la SAS ALAJI ; il sera donc retenu.
-Sur le refus de formation lui permettant une reconversion professionnelle.
Ce fait n'est pas contesté par la SAS ALAJI ; il sera donc retenu.
-Sur les « pressions » faites sur Mme Y... V... aux fins qu'elle accepte une rupture conventionnelle.
Il ressort du dossier et il n'est pas contesté que la SAS ALAJI a proposé à Mme Y... V... le 13 avril et le 31 juillet 2015 une procédure de rupture conventionnelle du contrat de travail.
Ce fait n'est pas contesté par la SAS ALAJI ; il sera donc retenu.
-Sur l'état de santé de Mme Y... V.... Il ressort d'un certificat établi le 21 septembre 2015 par le Docteur T... O... que Mme Y... V... était suivie à compter du début de l'année 2013 pour un syndrome dépressif ; que, par décision du 10 octobre 2016, la CPAM de la Meuse a reconnu ce syndrome au titre de la législation sur les maladies professionnelles sur le fondement d'un avis motivé du Comité régional de reconnaissance des maladie professionnelles dont il n'est pas démontré qu'il a été annulé.
Il ressort donc de ce qui précède que Mme Y... V... présente des éléments de fait qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
S'agissant du contenu du poste de Mme Y... V..., la SAS ALAJI soutient que la mission de formation était une partie des missions remplies par la salariée, laquelle ne correspondait pas à la totalité de son activité, et qu'elle exerçait par ailleurs des tâches de conception et de gestion de dossier ; toutefois, si la qualification conventionnelle de Mme V... pouvaient l'amener à exercer des missions de formation, ces fonctions consistent, aux termes des dispositions de la convention collective applicable, à « élaborer des diagnostics et à négocier les conclusions opérationnelles des études et projets soumis à l'organisme, en assumant les responsabilités pédagogiques, techniques et économiques qui en découlent » ; S'il ressort du dossier que Mme V..., dans les derniers mois de son exercice professionnel, n'exerçait pas une mission de formation à plein temps, la SAS ALAJI ne démontre pas qu'elle assumait d'autres fonctions définies dans la fiche de poste «chargé de développement et d'ingénierie » ; Mme V... s'était vu confier l'élaboration d'une formation et qu'elle avait gardé des contacts avec des clients afin de procéder à l'analyse de leurs besoins en vue d'élaborer des formations, ce document est imprécis sur la période qu'il concerne, les mentions « depuis 2013 j'ai bien été témoin de nombreux appels téléphoniques passées à son bureau » ou « j'ai également assisté à des rencontres avec le FONGECIF en présence de Mme V... » sont insuffisantes pour démontrer que ces prérogatives ont été exercées sur toute la durée de la relation contractuelle avec la SAS ALAJI. En conséquence, cette dernière ne démontre pas que le retrait de fonctions constatée est étrangère à tout harcèlement moral.

S'agissant de l'absence de versement d'une prime de fin d'année en 2013, la SAS ALAJI ne la conteste pas ; elle n'apporte aucun élément sur les critères qui ont présidé à l'octroi de cette prime ; en conséquence, la SAS ALAJI ne démontre pas que la décision sur ce point est étrangère à tout harcèlement moral.
Compte tenu de ce qui précède, et au regard des éléments médicaux du dossier, il y a lieu de constater que Mme Y... V... a subi de la part de son employeur la SAS ALAJI des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; le préjudice subi du fait du harcèlement moral ne se confond pas avec celui subi du fait de la rupture du contrat de travail ; il sera donc fait droit à la demande d'indemnisation à hauteur de 7500 euros, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.
-Sur la demande de résiliation judiciaire.
Les faits de harcèlement moral étant établis, il convient de constater que la SAS ALAJI a manqué de façon grave à son obligation contractuelle de sécurité à l'encontre de Mme Y... V....
La SAS ALAJI soutient que la saisine de la juridiction prud'homale est tardive, en ce que la situation qu'elle dénonce n'a pas empêché la poursuite de la relation de travail durant trois ans. Toutefois, il ressort des éléments décrits plus haut que le retrait de fonctions s'est effectué progressivement de janvier 2013 au premier semestre 2015, que Mme Y... V... s'est trouvé en arrêt maladie à compter du 27 juillet 2015, situation ayant abouti à une inaptitude avec impossibilité de reclassement dans l'entreprise ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale le 25 février 2016 ;
Il ressort de ces éléments que l'évolution de la situation de Mme V... a eu pour effet d'empêcher la poursuite de la relation contractuelle.
Dès lors, il convient de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ; la décision entreprise sera infirmée sur ce point.
La résiliation judiciaire étant prononcée sur la base de faits de harcèlement moral, il convient de dire que la rupture produit les effets d'un licenciement nul.
- Sur l'indemnité de préavis.
Il ressort de la convention collective applicable que la durée de préavis est de trois mois ;
La rémunération mensuelle moyenne brute de Mme Y... V... était de 3870,66 euros ;
Le montant dû par la SAS ALAJI est de 11611,98 euros ;
Il n'est pas contesté que Mme V... a perçu la somme de 7736 euros ;
Il sera fait droit à la demande, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.
-Sur l'indemnité pour licenciement nul.
Mme Y... V... avait 61 ans lorsqu'elle a quitté l'entreprise ;
Elle avait une ancienneté de 32 ans ;
Elle n'apporte pas d'éléments relatifs à sa situation professionnelle et matérielle postérieure à son départ de l'entreprise ;
Il sera donc fait droit à la demande sur ce point à hauteur de 65000 euros.
La SAS ALAJI, qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme Y... V... l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés ; il sera fait droit à cette demande à hauteur de 4000 euros au titre des procédures de première instance et d'appel »

1/ ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties; que la société Alaji contestait formellement avoir privé Mme V... de prime de fin d'année faisant valoir qu'il n'existait aucune obligation de verser une telle prime (conclusions d'appel de l'exposante p 32) ; qu'elle contestait également avoir opposé un refus à une demande de formation de la salariée faisant valoir que suite à l'avis défavorable du Fongecif, elle avait fait toutes démarches auprès de l'Opca Agefos Pme sans que celles-ci n'aboutissent en raison des atermoiements de la salariée (conclusions d'appel de l'exposante p 33-34) ; qu'elle contestait avoir exercé la moindre pression sur la salariée pour obtenir la signature d'une rupture conventionnelle faisant valoir que les deux parties étaient entrées en négociations mais que celles-ci n'avaient pas abouti (conclusions d'appel de l'exposante p 35-37) ; qu'en retenant comme établis le non-paiement d'une prime de fin d'année, le refus de formation et les pressions aux fins d'obtenir que Mme V... accepte une rupture conventionnelle, après avoir relevé que ces faits n'étaient pas contestés par la société Alaji, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2/ ALORS QU'en se bornant à constater que la société Alaji avait proposé à Mme V... les 13 avril et 31 juillet 2015 une procédure de rupture conventionnelle du contrat de travail, pour en déduire que les pressions aux fins qu'elle accepte une rupture conventionnelle alléguées par la salariée étaient établies, sans cependant caractériser la moindre pression exercée par la société Alaji, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1154-1 du code du travail ;

3/ ALORS QUE lorsque le salarié a établi des éléments de fait laissant supposer des faits de harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner les justifications apportées par l'employeur ; qu'en l'espèce la société Alaji faisait valoir que le retrait du véhicule de fonction de Mme V... au mois de novembre 2014 avait concerné tous les cadres du service Pôle Recherche et Développement et qu'il était intervenu avec l'accord de Mme V... dans le cadre d'un avenant à son contrat de travail signé le 27 octobre 2014 et moyennant le versement d'une contrepartie financière(conclusions d'appel de l'exposante p 30) ; qu'en s'abstenant d'examiner cette justification exclusive de tout harcèlement moral résultant de la suppression du véhicule de fonction, la cour d'appel a violé l'article L 1154-1 du code du travail ;

4/ ALORS QUE toute décision de justice doit se suffire à elle-même ; qu'en retenant que « Mme V... s'était vu confier l'élaboration d'une formation et qu'elle avait gardé des contacts avec des clients afin de procéder à l'analyse de leurs besoins en vue d'élaborer des formations, ce document est imprécis sur la période qu'il concerne, les mentions « depuis 2013 j'ai bien été témoin de nombreux appels téléphoniques passées à son bureau » ou « j'ai également assisté à des rencontres avec le FONGECIF en présence de Mme V... » sont insuffisantes pour démontrer que ces prérogatives ont été exercées sur toute la durée de la relation contractuelle avec la SAS ALAJI »pour en déduire que la société Alaji ne démontrait pas que Mme V... assumait d'autres fonctions définies dans sa fiche de poste que celles de formatrice, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inintelligibles, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5/ ALORS EN OUTRE QUE lorsque le salarié a établi des éléments de fait laissant supposer des faits de harcèlement moral, il appartient à l'employeur de justifier que ces faits, et ceux-là seuls, sont étrangers à tout harcèlement moral ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé matériellement établi par la salariée le fait que «dans les derniers mois de sa présence dans l'entreprise, elle n'exerçait plus une fonction de conception et d'encadrement mais une fonction de formatrice, fonction subordonnée à celle qu'elle était censée exercer » (arrêt p 9, § 1er) ; qu'elle a ensuite constaté que l'employeur établissait que « dans les derniers mois de son exercice professionnel, elle n'exerçait pas une mission de formation à plein temps » (arrêt p 10), § 1er) ; que le débat était donc circonscrit aux fonctions exercées par la salariée dans les derniers mois de la relation contractuelle; qu'en retenant qu'il n'était pas démontré par la société que d'autres fonctions définies dans la fiche de poste de « chargé de développement et d'ingénierie » avaient été exercées par Mme V... « sur toute la durée de la relation contractuelle avec la SAS ALAJI », la cour d'appel a violé l'article L 1154-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Alaji à payer à Mme V... les sommes de 3875,50 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 1161,12 euros au titre des congés payés afférents, 65000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les procédure de première instance et d'appel et d'AVOIR condamné la société Alaji aux dépens de la procédure de première instance et d'appel

AUX MOTIFS QUE « La résiliation judiciaire étant prononcée sur la base de faits de harcèlement moral, il convient de dire que la rupture produit les effets d'un licenciement nul.-Sur l'indemnité de préavis.
Il ressort de la convention collective applicable que la durée de préavis est de trois mois ;
La rémunération mensuelle moyenne brute de Mme Y... V... était de 3870,66 euros ;
Le montant dû par la SAS ALAJI est de 11611,98 euros ;
Il n'est pas contesté que Mme V... perçu la somme de 7736 euros ;
Il sera fait droit à la demande, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point.
-Sur l'indemnité pour licenciement nul.
Mme Y... V... avait 61 ans lorsqu'elle a quitté l'entreprise ;
Elle avait une ancienneté de 32 ans ;
Elle n'apporte pas d'éléments relatifs à sa situation professionnelle et matérielle postérieure à son départ de l'entreprise ;
Il sera donc fait droit à la demande sur ce point à hauteur de 65000 euros.
La SAS ALAJI, qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme Y... V... l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a exposés ; il sera fait droit à cette demande à hauteur de 4000 euros au titre des procédures de première instance et d'appel »

ALORS QUE la société avait fait valoir que dans le cadre de son licenciement pour inaptitude, Mme V... avait perçu les sommes de 75424,95 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement, 7736,48 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 11170,05 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés qui devraient se compenser avec les sommes éventuellement allouées par la cour d'appel sur le fondement du prononcé de la résiliation judiciaire aux torts de l'employeur (conclusions d'appel de l'exposante p61) ; qu'en accordant à la salariée les sommes de 3875,50 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 1161,12 euros au titre des congés payés afférents et 65000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul après avoir seulement déduit la somme de 7736,48 euros perçue par la salariée à titre d'indemnité compensatrice de préavis, sans se prononcer sur le sort de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité compensatrice de congés payés perçues par Mme V..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-22549
Date de la décision : 03/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 19 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mar. 2021, pourvoi n°19-22549


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.22549
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