LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 17 février 2021
Cassation partielle
M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 166 F-D
Pourvoi n° C 19-13.119
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 17 FÉVRIER 2021
1°/ la société MMA IARD, société anonyme, venant aux droits de la société Covea Risks,
2°/ la société MMA IARD assurances mutuelles, société anonyme, venant aux droits de la société Covea Risks,
toutes deux ayant leur siège [...] ,
3°/ la société Excellis, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° C 19-13.119 contre l'arrêt rendu le 28 décembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre, section 2), dans le litige les opposant :
1°/ à M. H... L..., domicilié [...] ,
2°/ à M. J... G..., domicilié [...] ,
3°/ à M. E... I..., domicilié [...] ,
4°/ à Mme A... V..., domiciliée [...] ,
défendeurs à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat des sociétés MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles et Excellis, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de MM. G..., I... et de Mme V..., et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte aux sociétés MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles et Excellis du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. L....
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 décembre 2018), en 2008 et 2009, MM. G... et I... et Mme V... ont apporté à des sociétés en participation, dans le cadre d'un programme de défiscalisation conçu par la société DOM-TOM défiscalisation qui leur avait été recommandé par la société Excellis, des fonds destinés à l'acquisition de centrales photovoltaïques, leur installation et leur location à des sociétés d'exploitation, puis ont imputé sur le montant de leur impôt sur le revenu, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, des réductions d'impôt du fait de ces investissements.
3. L'administration fiscale ayant remis en cause ces réductions d'impôt, MM. G... et I... et Mme V..., estimant que la société Excellis avait manqué à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde, ont assigné celle-ci, ainsi que son assureur, la société Covea Risks, aux droits de laquelle sont venues les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles (les sociétés MMA), en réparation de préjudices correspondant aux suppléments d'impôt sur le revenu et aux intérêts de retard et majorations mis à leur charge.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. Les sociétés MMA et la société Excellis font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer les sommes de 41 495 euros à M. G..., de 14 331 euros à M. I... et de 41 557 euros à Mme V..., alors « que le paiement de l'impôt mis à la charge d'un contribuable à la suite d'une rectification fiscale ne constitue pas un dommage indemnisable sauf lorsqu'il est établi que, dûment informé, il n'aurait pas été exposé au paiement de l'impôt rappelé ou aurait acquitté un impôt moindre ; que, pour condamner la société Excellis et ses assureurs de responsabilité à indemniser les investisseurs à hauteur des sommes respectives de 41 495 euros, 14 331 euros, et 41 557 euros, la cour d'appel a énoncé que, dès lors que sans la faute de la société Excellis, les investisseurs n'auraient pas opté pour le placement proposé, le préjudice équivaut au montant de la rectification fiscale outre les pénalités et intérêts de retard ; qu'en statuant ainsi, quand le paiement de l'impôt mis à la charge des contribuables ne constituait pas à lui seul un préjudice indemnisable, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :
5. Il résulte de ce texte que le paiement de l'impôt mis à la charge d'un contribuable à la suite d'une rectification fiscale ne constitue pas un dommage indemnisable sauf s'il est établi que, dûment informé ou dûment conseillé, il n'aurait pas été exposé au paiement de l'impôt rappelé ou aurait acquitté un impôt moindre.
6. Pour condamner la société Excellis et les sociétés MMA à payer à MM. G... et I... et à Mme V... des sommes correspondant aux suppléments d'impôt sur le revenu et aux intérêts et majorations de retard mis à leur charge, après avoir retenu que la société Excellis avait manqué à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde, l'arrêt retient que, sans la faute de cette société, les investisseurs n'auraient pas opté pour le placement proposé.
7. En statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions, MM. G... et I... et Mme V... se bornaient à soutenir que, si la société Excellis avait satisfait à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde, ils n'auraient pas réalisé les investissements litigieux, sans alléguer qu'ils auraient disposé d'une solution alternative leur permettant d'échapper au paiement de l'impôt supplémentaire mis à leur charge à la suite de la rectification fiscale, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne solidairement les sociétés MMA et la société Excellis à payer à M. G... la somme de 41 495 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2013 sur la somme de 35 027 euros et à compter de l'arrêt pour le surplus, à M. I... la somme de 14 331 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2013 sur la somme de 12 228 euros et à compter de l'arrêt pour le surplus et à Mme V... la somme de 41 557 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2013 sur la somme de 36 396 euros et à compter de l'arrêt pour le surplus, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 28 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne MM. G... et I... et Mme V... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. G... et I... et Mme V... et les condamne à payer aux sociétés MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles et Excellis la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept février deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour les sociétés MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles et Excellis.
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR condamné solidairement la société anonyme MMA lard venant aux droits de la société Covea Risks, la société d'assurance mutuelle à cotisations fixes MMA lard assurances mutuelles ainsi que la société à responsabilité limitée à associé unique Excellis à payer à M. J... G..., 41 495 euros, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 mars 2013 sur 35 027 euros et à compter de cet arrêt pour le surplus, à M. E... I..., 14 331 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12 avril 2013 sur la somme de 12 228 euros et à compter de cet arrêt pour le surplus, et à Mme A... V..., 41 557 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 mars 2013 sur 36 396 euros et à compter de cet arrêt pour le surplus ;
AUX MOTIFS QUE « le motif du redressement fiscal est pour chaque investisseur, énoncé de manière précise en ces termes - voir cotes 3-1 c), 3-2 b), 3-3 b) et 3-4 b) : "Au regard des attestations fournies par la société DTD, [le montant de l'investissement outre-mer litigieux] recouvre non seulement la valeur intrinsèque du bien et les frais de mise à disposition mais également, des prestations relatives à l'entretien et au service après-vente des biens./La prétention à une réduction d'impôt basée sur l'intégralité de cette somme est donc en contradiction avec les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts./Ce dernier précise en effet que l'investissement mis à la disposition de l'entreprise exploitante dans le cadre d'un contrat de location ne doit prévoir aucune prestation annexe autres que celles strictement nécessaires et accessoires à la mise à la disposition du bien./Au surplus, les prestations liées au service après-vente et à la maintenance des matériels sont expressément exclues du dispositif conformément à l'instruction administrative 5-B-2-07 n° 15 du 30 janvier 2007, n° 16. En conclusion : "Les investissements allégués ne répondent pas aux conditions légales prévues à l'article 199 undecies B pour bénéficier des réductions d'impôts./Leur prix de revient, non justifié, est sans corrélation avec le montant d'investissement total allégué et ces investissements, non mis en capacité de fonctionner de manière autonome, n'ont revêtu aucun intérêt économique ou environnemental pour la Martinique./En conséquence, vous ne pouvez bénéficier de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B au titre de votre programme d'investissement 2009. " [surligné par la cour] ; qu'il suit de là que le redressement a non seulement trait au montant de l'imposition mais également, à la base de calcul utilisée pour déterminer celle-ci, cette base s'étant ainsi avérée être techniquement erronée ; que, de ce premier point de vue, le conseil en investissement livré à chacun des investisseurs concernés apparaît donc être fautif ; qu'il ressort par ailleurs des éléments du dossier et de la discussion des parties, que la société Excellis s'est bornée à recueillir un dossier de présentation du dispositif Girardin Industriel à caractère très général et une plaquette de présentation à caractère publicitaire outres des consultations établies par un cabinet d'avocats sur l'intérêt de ce dispositif et qu'elle apparaît être dans l'incapacité de produire une analyse objective, critique et circonstanciée de cet investissement au regard des objectifs fiscaux recherchés par chacun des investisseurs concernés compte tenu de la structure de son patrimoine ; que, par cette approche non circonstanciée et imprécise de la situation et des objectifs de chacun de ses mandants, la société Excellis apparaît avoir nécessairement failli non seulement à son devoir d'information et de conseil mais également de mise en garde de chacun des investisseurs s'étant adressé à elle au mépris de ces obligations de conseil en investissements financiers ainsi que l'ont pertinemment retenu les premiers juges du chef de MM. E... I... et J... G... et de Mme A... V... dont les motifs sont adoptés ; que, de tout ce qui précède, le jugement entrepris sera donc confirmé ; que, sur l'indemnisation des préjudices allégués, la société Excellis ainsi que les sociétés MMA lard et MMA Assurance observent que : - les préjudices allégués ne sont pas justifiés dès lors que les investisseurs réclamants se sont constitués parties civiles dans le cadre de la procédure pénale visant le monteur (M. M... U...) et qu'ils ont obtenu la condamnation de ce dernier à les indemniser à hauteur du montant de leur investissement ; - ils ne peuvent en effet solliciter dans le cadre de cette instance, l'indemnisation d'un préjudice pour lequel ils ont déjà obtenu gain de cause dans le cadre d'une autre procédure quand bien même ils n'auraient pas en l'état, recouvré le montant des condamnations sauf à leur accorder une double indemnisation, ce qui constituerait un enrichissement sans cause ; - ils ne sauraient être considérés comme des débiteurs de substitution du seul fait de l'insolvabilité des responsables de leur préjudice ; - devant les premiers juges, ces investisseurs se sont prévalus d'un préjudice financier et d'un préjudice moral lié au redressement fiscal dont ils ont fait l'objet à hauteur de 51 205 euros (M. J... G...), 18 235 euros (M. E... I...) et 51 279 euros (Mme A... V...) ; - les premiers juges ont à tort retenu que la perte d'un abattement fiscal ou du bénéfice d'une défiscalisation telle que prévue par la loi Girardin Industriel est un préjudice indemnisable ; - selon en effet la position de l'administration fiscale, le montage proposé ne remplissait pas les conditions d'application du dispositif de la loi Girardin Industriel ; - le redressement opéré ne tend donc, qu'à replacer les contribuables concernés dans la situation qui aurait été la leur en l'absence d'investissement ; - faire dans ces conditions droit à la demande d'indemnisation contribuerait à un enrichissement sans cause alors que la fonction de la responsabilité civile est uniquement de replacer les victimes dans la situation qui aurait été la leur, si aucune faute n'avait été commise et non pas, de leur procurer une situation meilleure ; - le principal d'un impôt ne constitue pas un préjudice et le jugement entrepris doit être infirmé ; qu'ils ajoutent que : - à supposer que le principe d'un préjudice indemnisable soit retenu, il ne peut résulter que de la perte de chance de n'avoir pas souscrit l'opération litigieuse, faute d'avoir été bien conseillé et d'avoir été suffisamment informé pour décider de ne pas opter pour l'opération incriminée et ainsi de rechercher un autre moyen de défiscalisation ; - le taux retenu par les premiers juges au titre de la perte de chance à hauteur de 70% de l'avantage fiscal espéré est largement disproportionné au vu de la légèreté des investisseurs par ailleurs relevé ; - les intérêts de retard acquittés par les contribuables ne constituent pas un préjudice indemnisable puisqu'ils ont pour objet de compenser l'érosion monétaire subie par l'administration fiscale faute d'avoir perçu le montant correspondant à la réduction fiscale ; - quoi qu'il en soit, les intimés ne démontrent pas avoir sollicité l'exécution de la garantie octroyée par la société Lynx Industries et se sont ainsi délibérément privés d'une chance de récupérer les sommes réclamées par l'administration fiscale ; - il n'y a pas davantage lieu de prendre en considération les montants avancés par les victimes pour assurer leur défense face à l'administration fiscale puisque le redressement fiscal dont elles ont fait l'objet ne trouve pas son origine dans un manquement de la société Excellis à son obligation d'information et de conseil ; - le montant du préjudice moral est enfin arbitrairement forfaitisé à 20 % du montant du préjudice financier allégué sans pour autant être justifié ; que MM. J... G... et E... I... ainsi que Mme A... V... répondent que : - les redressements fiscaux qui leur ont été appliqués sont directement liés aux manquements imputables à la société Excellis ; - leur préjudice doit donc être intégralement réparé ; - si en effet, la société Excellis avait suffisamment vérifié la fiabilité du montage proposé et celle du monteur, ils n'auraient pas investi dans le produit DTD ; - leur préjudice est constitué par le montant escompté de la réduction d'impôts remise en cause par l'administration fiscale, les intérêts de retard et les pénalités imposées par l'administration fiscale dans le cadre du redressement ; - ce préjudice est définitif puisque l'administration leur a adressé un avis d'imposition complémentaire au titre des années 2007, 2008 et 2009 ; - quoi qu'il en soit, la perte de chance peut parfaitement correspondre à 100 % des sommes perdues et tel est précisément le cas dans les circonstances de cette espèce, dans la mesure où la société Excellis les a orientés vers un placement présenté comme étant "proche du risque zéro"-, - ils doivent ainsi, être indemnisés à hauteur du montant de leur redressement ; - quoi qu'il en soit, leur préjudice moral respectif peut être raisonnablement évalué à 20 % des sommes à recouvrer ; que, vu le principe de réparation intégrale, il est de principe que lorsque plusieurs causes concourent à la réalisation du dommage, elles sont toutes réputées comme étant la cause de celui-ci qu'il s'agisse de la faute ultime ou de la faute initiale conformément à la théorie de l'équivalence des conditions ; qu'en l'espèce, la faute du monteur admise par la juridiction pénale n'exclut pas celle établie et imputée pour les motifs ci-avant à la société Excellis dès lors qu'il est constant que sans la faute de cette société, les investisseurs n'auraient pas opté pour le placement proposé ; que c'est donc de manière légitime que les parties réclamantes sollicitent l'indemnisation de leur préjudice équivalent au montant de la rectification fiscale outre les pénalités et intérêts de retard ; que, ne démentant pas les propos de leurs adversaires expliquant qu'ils ont souscrits des investissements de type Girardin avec d'autres fournisseurs au cours de la même période, les appelants ne sont pas fondés à obtenir l'indemnisation de préjudice moral du fait du redressement fiscal dont ils ont été destinataires, faute de justifier de ce préjudice par des éléments précis, tangibles et objectifs. Ils seront pour cette raison, déboutés de ce chef de demande ; que, sur le mérite de la demande formée contre les sociétés MMA et MMA Assurances, la faute de la société Excellis ayant été retenue pour les motifs ci-avant exposés, sa responsabilité professionnelle, au sens du contrat d'assurance souscrit, est engagée ; que les sociétés MMA et MMA Assurances expliquent être cependant en droit d'opposer au titre qui invoque le bénéfice de la police d'assurance souscrite, le montant de la franchise contractuelle de 15 000 euros restant à la charge de l'assuré en cas de condamnation de ce dernier tels que stipulé dans la police d'assurances applicable s'agissant d'opérations industrielles et immobilières de défiscalisation dans les DOM-TOM ; que MM. J... G... et E... I... ainsi que Mme A... V... répondent que la franchise alléguée ne doit pas avoir pour effet de les priver d'une couverture d'assurance sauf à contrevenir au principe indemnitaire du droit des assurances ; qu'ils précisent que faute pour les sociétés d'assurance en cause de démontrer avoir proposé une franchise adaptée, elles doivent être condamnées solidairement avec la société Excellis à indemniser les investisseurs réclamants de leur entier préjudice ; qu'ayant agi en qualité de conseiller en investissement financier, la société Excellis était en vertu de l'article L. 541-3 du code monétaire et financier, soumise à une obligation d'assurance responsabilité civile contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile en cas de manquement à ses obligations processionnelles ; que la franchise contractuelle stipulée dans la police souscrite n'est donc pas opposable aux tiers lésés et l'assureur ne peut donc déduire son montant de l'indemnité susceptible d'être versée à ces deniers » ;
1°/ ALORS QUE le paiement de l'impôt mis à la charge d'un contribuable à la suite d'une rectification fiscale ne constitue pas un dommage indemnisable sauf lorsqu'il est établi que, dûment informé, il n'aurait pas été exposé au paiement de l'impôt rappelé ou aurait acquitté un impôt moindre ; que, pour condamner la société Excellis et ses assureurs de responsabilité à indemniser les investisseurs à hauteur des sommes respectives de 41 euros, 14 331 euros, et 41 557 euros, la cour d'appel a énoncé que, dès lors que sans la faute de la société Excellis, les investisseurs n'auraient pas opté pour le placement proposé, le préjudice équivaut au montant de la rectification fiscale outre les pénalités et intérêts de retard ; qu'en statuant ainsi, quand le paiement de l'impôt mis à la charge des contribuables ne constituait pas à lui seul un préjudice indemnisable, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ ALORS, en toute hypothèse, QUE le caractère certain du préjudice allégué par le client d'un conseiller en investissement ne se déduit pas du manquement de ce dernier à son obligation d'information ou de conseil ; que, dans leurs écritures d'appel (concl., p. 38), la société Excellis et ses assureurs ont fait valoir que les investisseurs ont reçu, en contrepartie de leur investissement, des parts dans les sociétés en participation gérées par la société DTD, et sont devenus associés de ces sociétés, et qu'ils ne peuvent invoquer un quelconque préjudice dès lors qu'ils sont bien titulaires de ces parts sociales et qu'ils bénéficient d'une contrepartie à leur investissement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur ces éléments, propres à établir l'absence de préjudice subi par les investisseurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°/ ALORS QUE le caractère certain du préjudice allégué par le client d'un conseiller en investissement ne se déduit pas du manquement de ce dernier à son obligation d'information ou de conseil ; que, dans leurs écritures d'appel (concl., p. 39), la société Excellis et ses assureurs ont fait valoir que les intérêts de retard acquittés par les contribuables ne constituent pas un préjudice indemnisable, de telles sommes ayant pour objet la compensation de l'érosion monétaire subie par l'administration fiscale du fait de l'absence de versement de la somme correspondant à la réduction fiscale ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur ce point, propres à établir l'absence de préjudice subi à ce titre par les investisseurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
4°/ ALORS QUE le préjudice né du manquement du conseiller en investissement à son obligation d'information et de conseil, ainsi qu'à son obligation de mise en garde, s'analyse en la perte d'une chance de ne pas contracter ; que, pour condamner la société Excellis et ses assureurs de responsabilité à indemniser les investisseurs à hauteur des sommes respectives de 41 495 euros, 14 331 euros, et 41 557 euros, avec intérêts, la cour d'appel a considéré que le préjudice équivaut au montant de la rectification fiscale outre les pénalités et intérêts de retard ; qu'en statuant ainsi, après avoir imputé à la société Excellis un manquement à son devoir d'information et de conseil, ainsi que de mise en garde, lequel était seulement à l'origine d'une perte de chance de ne pas souscrire l'investissement, dont la réparation devait être mesurée à la chance perdue et ne pouvait être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée, la cour d'appel a encore violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
5°/ ALORS QU'en assurance de responsabilité civile, sauf disposition légale contraire, les franchises contractuellement mises à la charge de l'assuré sont opposables à la victime ; qu'en retenant, cependant, que la franchise contractuelle stipulée dans la police souscrite n'est pas opposable aux tiers lésés et l'assureur ne peut donc déduire son montant de l'indemnité susceptible d'être versée à ces deniers, la cour d'appel a violé les articles L. 112-6 et L. 121-1 du code des assurances ;
6°/ ALORS QUE, dans leurs écritures d'appel (concl., p. 35), la société Excellis et ses assureurs ont invoqué les manquements imputables aux investissements, tels que relevés par les premiers juges, qui ont souligné qu'ils « ont eux-mêmes fait preuve de légèreté » ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.