Demande d'avis
n°F 20-70.005
Juridiction : le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt
FP6
Avis du 11 février 2021
n° 15001 P+I
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
COUR DE CASSATION
_________________________
Chambre sociale
Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile.
La Cour de cassation a reçu le 18 novembre 2020, une demande d'avis formée le 22 octobre 2020 par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt, dans une instance opposant M. R... à la société Ventoris services.
La chambre sociale de la Cour de cassation a rendu le présent avis sur le rapport de Mme Monge, conseiller, et les observations écrites et orales de Mme Roques, avocat général référendaire.
Énoncé de la demande d'avis
1. La demande est ainsi formulée :
« - Le congé exceptionnel de l'article L. 3142-1 du code du travail est-il rémunéré dans le cadre du portage salarial au regard des articles L.1254-1 et suivants du code du travail traitant du portage salarial ?
- Dans ce cas, n'est-ce pas en contradiction avec l'article L.1254-21-II du code du travail qui précise que les périodes sans prestations à une entreprise ne sont pas rémunérées ?
- Dans le cas contraire, l'acquisition de congés payés prévue par l'article L.3142-2 du code du travail est-elle compatible avec l'absence de rémunération des congés ? »
Examen de la demande d'avis
2. Ces questions de droit, qui sont nouvelles et qui présentent une difficulté sérieuse, sont susceptibles de se poser dans de nombreux litiges. La demande d'avis est dès lors recevable.
3. Selon l'article L. 3111-1 du code du travail, les dispositions relatives aux congés sont applicables aux entreprises de droit privé ainsi qu'à leurs salariés.
4. Il en résulte qu'en l'absence de dispositions légales contraires, elles sont applicables aux entreprises de portage salarial ainsi qu'aux salariés portés.
5. Selon l'article L. 3142-1 du code du travail, dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014, tout salarié bénéficie, sur justification et à l'occasion de certains événements familiaux, d'une autorisation exceptionnelle d'absence.
6. Selon l'article L. 3142-2 du code du travail, les jours d'absence pour événements familiaux n'entraînent pas de réduction de la rémunération. Ils sont assimilés à du temps de travail effectif pour la détermination de la durée du congé annuel.
7. Aux termes de l'article L. 1254-21 II du code du travail, les périodes sans prestation à une entreprise cliente ne sont pas rémunérées.
8. Il résulte de la combinaison de ces différents textes que le salarié porté qui effectue une prestation pour une entreprise cliente lorsque survient un des événements familiaux ouvrant droit à une autorisation exceptionnelle d'absence bénéficie de jours d'absence dans les conditions prévues par la loi et sans réduction de sa rémunération, et que ces jours d'absence, assimilés à du temps de travail effectif, sont pris en compte pour la détermination de la durée du congé annuel.
En conséquence, la Cour :
EST D'AVIS QUE :
1°/ Les jours d'absence prévus pour certains événements familiaux dont est susceptible de bénéficier un salarié porté qui effectue une prestation pour une entreprise cliente lorsque surviennent ces événements ne peuvent entraîner une réduction de la rémunération de celui-ci et sont pris en compte pour la détermination de la durée du congé annuel.
2°/ Le salarié porté ne pouvant prétendre à un congé à l'occasion d'un événement familial que si cet événement survient alors qu'il effectue une prestation pour une entreprise cliente, les dispositions de l'article L. 1254-21, II, du code du travail n'ont pas vocation à s'appliquer dans cette hypothèse.
3°/ La réponse apportée à la première question rend la troisième question sans objet.
Fait à Paris et mis à disposition au greffe de la Cour le 11 février 2021, après examen de la demande d'avis lors de la séance du 3 février 2021 où étaient présents, conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire : M. Cathala, président, Mme Monge, conseiller rapporteur, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Ala, Prieur, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, Mme Pontonnier, greffier de chambre ;
Le présent avis est signé par le conseiller rapporteur, le président et le greffier de chambre.