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10/02/2021 | FRANCE | N°19-22453

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 février 2021, 19-22453


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 février 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 195 F-D

Pourvoi n° Y 19-22.453

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 FÉVRIER 2021

M. D... R..., domicilié [...] , a formé le po

urvoi n° Y 19-22.453 contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le litige l'opposant :...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 février 2021

Rejet

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 195 F-D

Pourvoi n° Y 19-22.453

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 FÉVRIER 2021

M. D... R..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-22.453 contre l'arrêt rendu le 30 janvier 2019 par la cour d'appel de Montpellier (4e A chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Apave Sudeurope, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ à Pôle emploi Languedoc Occitanie, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Richard, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. R..., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Apave Sudeurope, après débats en l'audience publique du 15 décembre 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Richard, conseiller rapporteur, Mme Mariette, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 30 janvier 2019), M. R..., engagé par la société Apave Sudeurope le 4 août en qualité d'ingénieur, a été licencié pour faute grave le 2 septembre 2014.

2. Il a contesté son licenciement devant la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement pour faute grave était fondé et de le débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en se bornant à retenir, pour juger fondé le licenciement pour faute grave de M. R..., que ''les faits reprochés au salarié en date du 19 mars et du 4 juin 2014 sont avérés et constituent un manquement grave aux obligations du contrat de travail'', sans toutefois constater que les manquements reprochés à M. R... rendaient impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°/ que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que M. R... avait été embauché par la société Apave Sudeurope le 4 août 1986 en qualité d'ingénieur, que la société Apave Sudeurope savait que M. R... dispensait ponctuellement des formations auprès de l'ENSAM depuis 2007, en plus de son activité salariée, et que M. R... avait une autonomie dans la gestion de son emploi du temps ; que dès lors, en se bornant à retenir, pour juger fondé le licenciement pour faute grave de M. R... notifié le 2 septembre 2014, que M. R... avait omis d'informer son employeur de deux dates des formations dispensées auprès de l'ENSAM, et que M. R... avait demandé le remboursement de frais de repas et kilométriques injustifiés pour ces deux dates, cependant que de tels manquements, reprochés à un salarié ayant vingt-huit ans d'ancienneté, organisant en toute autonomie son emploi du temps, et dont l'employeur était informé qu'il exerçait ponctuellement une activité complémentaire de formateur pour un tiers, ne pouvaient suffire à caractériser une faute grave du salarié rendant impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

3°/ que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en se bornant à retenir, pour juger fondé le licenciement pour faute grave de M. R... notifié le 2 septembre 2014, que M. R... avait omis d'informer son employeur de deux dates des formations dispensées auprès de l'ENSAM, et que M. R... avait demandé le remboursement de frais de repas et kilométriques injustifiés pour ces deux dates, sans toutefois rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si un tel licenciement prononcé à l'encontre d'un salarié justifiant d'une ancienneté de vingt-huit ans, alors qu'aucun reproche ne lui avait jamais été adressé auparavant, constituait une sanction disproportionnée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. Ayant relevé, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que le salarié avait dissimulé volontairement des activités de formation effectuées à titre privé et formulé des demandes de remboursement de frais injustifiées et ainsi commis des manquements aux obligations de son contrat de travail, la cour d'appel, qui a fait ressortir que le salarié avait commis une faute rendant impossible son maintien dans l'entreprise, a pu en déduire que le licenciement pour faute grave était justifié.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. R... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Mariette, conseiller en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour M. R...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement pour faute grave de M. R... était fondé et débouté M. R... de ses demandes,

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du débat, est motivée ainsi qu'il suit : " Monsieur, Suite à l'entretien préalable que nous avons eu le jeudi 14 août 2014, en présence de M. A... Y..., nous avons le regret de vous signifier par la présente votre licenciement pour faute grave. Les raisons qui motivent cette décision et qui vous ont été exposées à cette occasion sont, nous vous le rappelons, les suivantes : En date du 21 juillet 2014, nous avons reçu un courriel émanant du Chef de Service de l'[...], nous confirmant vos interventions auprès de cette même école : le 19 mars 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00 et Le 4 juin 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00. Les deux interventions étant réalisées pendant votre temps de travail et sans aucune autorisation de votre hiérarchie, nous avons alors vérifié vos déclaratifs de compte rendu d'activité sur ces deux journées pour lesquelles vous avez déclaré : - Le 19/03/2014 : une visite chez le client MEUBLES IKEA SAS à Montpellier avec une demande de remboursement d'indemnités de déplacement kilométrique (25 km) ainsi qu'un remboursement d'un frais de repas. – Le 04/06/2014 : une visite auprès du lycée privé polyvalent [...] avec une demande de remboursement de frais de repas. Une visite auprès du Palais de Justice de Montpellier avec une demande de remboursement d'indemnités kilométriques (25 km). Une visite auprès de M. M... situé à Saint Clément de Rivière. Au cours de notre entretien, vous avez : • reconnu avoir dispensé des cours rémunérés auprès de l'[...] les 19 mars et 4 juin 2014. • confirmé ne pas vous être rendu en visite chez les clients cités ci-dessus. • reconnu avoir déclaré sur vos CRA des heures de chantiers fictives sur le 19 mars et 4 juin 2014. Par ailleurs vous nous avez précisé avoir dispensé dans les mêmes conditions deux journées de cours à l'[...] en 2013. Information confirmée par cette même école. Cette conduite inacceptable qui est incompatible avec vos fonctions constitue des déclarations mensongères, une rédaction de faux documents (CRA), un remboursement de frais non justifié et un non-respect de votre obligation contractuelle de loyauté et de bonne foi vis à vis de l'entreprise. Enfin, dans le cadre des audits réalisés par la COFRAC pour valider nos accréditations, celles-ci pourraient être remises en cause, générant ainsi une perte d'activité importante pour l'entreprise et par voie de fait, privé d'emploi un nombre important de salariés de l'entreprise. " ; que selon les dispositions de l'article L 1232-1 du Code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse ; que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que l'article L 1332-4 du Code du travail dispose qu' "Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à Rengagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; qu'en l'espèce, les faits prétendument fautifs ont eu lieu le 19 mars et le 4 juin 2014 et l'employeur a convoqué M. R... à un entretien préalable en date du 5 août 2014 ; que toutefois, s'il est constaté que la société avait connaissance de la qualité de formateur du salarié auprès de l'ENSAM depuis 2007 et qu'un des supérieurs hiérarchiques de M. R... était intervenu dans la même structure la veille des interventions reprochées à ce dernier, il n'en résulte pas que l'entreprise ou M. O..., le supérieur, étaient informés de l'existence des formations dispensées par M. R... pour le 19 mars et le 4 juin 2014 ; que par mail du 21 juillet 2014, la chef du service des formations de l'ENSAM notifiait à la SAS Apave SudEurope que M. R... avait réalisé deux interventions de 7 heures, une le 19 mars 2014 et l'autre le 4 juin 2014 ; qu'ainsi, il apparaît que la SAS Apave SudEurope a invoqué la faute grave en respectant le délai de prescription de deux mois, dès lors que cette dernière n'a pu avoir une connaissance exacte de la réalité, de la nature et des faits reprochés, que seulement après réception du mail du 21 juillet 2014, que par la suite M. R... a passé un entretien préalable au licenciement le 14 août 2014 et a été licencié le 2 septembre 2014 ; que sur la faute grave, l'employeur entend apporter la preuve des faits imputés au salarié à partir notamment de comptes rendus d'activité, d'attestations et d'un mail ; que par mail du 21 juillet 2014, la chef du service des formations de l'ENSAM notifiait à la SAS Apave SudEurope : " ... les heures d'intervention de D... R... pour la HMONP : 19 mars 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00 4 juin 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00 " ; que l'employeur produit les comptes-rendus d'activité de M. R... pour les journées du 19 mars et du 4 juin 2014 sur lesquels il est inscrit que le 19 mars, le salarié avait fait 25 km pour se rendre chez le client IKEA ainsi que le nombre 1 dans la case "repas" et que le 4 juin, M. R... avait fait également 25 km, qu'il y avait eu "exécution'' sur les chantiers du lycée privé polyvalent Nevers et du palais de justice rue Foch et "préparation diag documentation" pour le client M. M... ainsi que la mention "1" dans la case repas ; qu'enfin, la SAS Apave SudEurope fournit des attestations desquelles il ressort que : - pour M. O..., ingénieur en bâtiment, " Il m'arrive de donner des journées de cours à l'ENSAM à Montpellier... Cette prestation est rémunérée. Lorsque je dois intervenir... j'en informe ma hiérarchie par une demande officielle de jour de congé ou de RTT, qui est validée par mon supérieur " ; - pour M. I..., directeur d'exploitation, " ... je n'avais pas connaissance du fait qu'il donnait des cours... Il ne m'a pas fait part d'une demande sur le sujet et il ne l'a pas formalisé dans son emploi du temps" ; - pour M. P..., directeur d'exploitation, " ... je confirme qu'il est demandé à chaque intervenant d'établir ses comptes rendus d'activité par ordre chronologique pour des raisons de facturation client et de suivi de chaque affaire " ; que lesdits propos sont confirmés dans l'attestation de M. I..., directeur d'exploitation et de M. H..., directeur d'agence ; que pour sa défense, M. R... dit qu'il intervenait auprès de l'ENSAM depuis 2007 à la demande de la SAS Apave SudEurope ; qu'il précise que ses interventions n'étaient pas incompatibles avec l'exercice de ses fonctions et qu'en qualité de cadre, il gérait ses missions et son emploi du temps de manière autonome ; que sur les comptes-rendus d'activité, le salarié affirme qu'ils ne sont pas faux et indique, pour le 19 mars 2014, avoir donné une formation puis avoir par la suite travaillé sur le dossier IKEA et pour le 4 juin 2014, avoir dispensé une formation, puis avoir travaillé sur trois dossiers ; qu'il indique également que le listing chronologique des tâches n'est pas mentionné dans le guide de référence pour l'établissement des comptes rendus d'activité ; que le salarié produit l'attestation de son ancien responsable, M. Q..., ingénieur qui affirme qu'il savait que M. R... dispensait des formations et précise "Ce dernier enseignait de façon ponctuelle à titre privé à l'école d'Architecture de Montpellier" ; qu'il fournit également l'attestation de Mme J..., intendante du lycée [...] qui affirme que " Le mercredi 4 juin 2014, j'ai rencontré sur ma demande M. D... R... S... à 17 h sur le chantier D du lycée Nevers Montpellier pour une réunion de mise en place du chantier... ; qu'enfin, le salarié fait état d'une photocopie de son agenda qui, pour le 4 juin 2014 mentionne à 17 h "Nevers" et plus bas sans précision horaire " + palais justice 0,5 + M... 0,25 " et pour le 19 mars 2014 "Au bureau préparer réunion IKEA" de 17h à 18h30 ; que de l'ensemble de ses documents, il ressort que si la société savait que M. R... dispensait ponctuellement des formations auprès de l'ENSAM, ces dernières se faisaient à titre privé sans aucun lien avec la société et nécessitaient la pose d'un jour de congé et l'autorisation d'un supérieur ; que de plus, il est constaté que M. R... avait travaillé sur des dossiers après avoir donné une formation sur l'ensemble de la journée, qu'il s'était déplacé au lycée Nevers le 4 juin 2014 et qu'il inscrivait sur ses comptes rendus d'activité des déplacements, des repas ainsi que l'"exécution" de dossier ; que toutefois, si M. R... avait une autonomie dans la gestion de son emploi du temps, cela ne lui permettait pas de demander l'indemnisation de 25 km le 19 mars 2014 alors qu'il ne s'était rendu chez aucun client, l'indemnisation de deux repas alors qu'il était à ces heures en formation et de s'abstenir de l'autorisation de ses supérieurs quant aux 14 heures de formation donnée durant la journée du 19 mars et du 4 juin 2014 ; que de plus, les formations se terminant à 17 heures, il est difficile d'imaginer que le salarié était le 19 mars 2014 à cette même heure à son bureau ; qu'ainsi, s'il n'est pas démontré que M. R... n'a pas effectué les activités reportées dans ses comptes rendus d'activité et qu'en conséquence le risque de perte d'activité importante pour l'entreprise résultant des audits opérés par la COFRAC est nul, il apparaît qu'au regard du principe de loyauté et des obligations issues du contrat de travail, il appartenait à M. R... d'informer sa hiérarchie de ses activités de formateur pour les interventions du 19 mars et du 4 juin 2014 et de ne pas réclamer l'indemnisation de frais kilométriques et de repas inexistants ; que les faits reprochés au salarié en date du 19 mars et du 4 juin 2014 sont avérés et constituent un manquement grave aux obligations du contrat de travail, du fait de la dissimulation volontaire des activités de formation à titre privé à la hiérarchie et des demandes de remboursements de frais injustifiées ; qu'en conséquence, le licenciement pour faute grave de M. R... est fondé.

ALORS QUE 1°), la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant que les formations dispensées par M. R... auprès de l'ENSAM, en plus de son activité salariée, nécessitait l'autorisation de son employeur, et que M. R... ne pouvait s'abstenir d'obtenir l'autorisation de ses supérieurs quant aux 14 heures de formation données durant la journée du 19 mars et du 4 juin 2014 (arrêt, p. 8), cependant qu'il ressortait de ses constatations que l'employeur savait que M. R... dispensait ponctuellement des formations auprès de l'ENSAM, que M. R... avait une autonomie dans la gestion de son emploi du temps, et qu'il n'était pas démontré que M. R... n'avait pas effectué les activités reportées dans ses comptes rendus d'activité (arrêt p. 9), ce dont il résultait que M. R... pouvait librement organiser ses journées de travail pour exercer, en plus de son activité salariée, son activité complémentaire de formateur, la cour d'appel s'est contredite et a violé l'article 455 du code de procédure civile,

ALORS QUE 2°), la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en retenant que « les faits reprochés au salarié en date du 19 mars et du 4 juin 2014 (
) constituent un manquement grave aux obligations du contrat de travail, du fait de la dissimulation volontaire des activités de formation à titre privé à la hiérarchie » (arrêt, p. 9), après avoir constaté que la société savait depuis 2007 que M. R... dispensait ponctuellement des formations auprès de l'ENSAM (arrêt, p. 6 et 8), la cour d'appel s'est contredite et a violé l'article 455 du code de procédure civile,

ALORS QUE 3°), M. R... faisait valoir dans ses conclusions reprises oralement devant la cour d'appel que, s'agissant des frais de repas, il n'avait jamais demandé le remboursement de ses repas et qu'une indemnité forfaitaire était accordée à tous les salariés pour les jours travaillés (conclusions d'appel, p. 10) ; que dès lors, en s'abstenant de répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement pour faute grave de M. R... était fondé et débouté M. R... de ses demandes,

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement, qui fixe les limites du débat, est motivée ainsi qu'il suit : " Monsieur, Suite à l'entretien préalable que nous avons eu le jeudi 14 août 2014, en présence de M. A... Y..., nous avons le regret de vous signifier par la présente votre licenciement pour faute grave. Les raisons qui motivent cette décision et qui vous ont été exposées à cette occasion sont, nous vous le rappelons, les suivantes : En date du 21 juillet 2014, nous avons reçu un courriel émanant du Chef de Service de l'[...], nous confirmant vos interventions auprès de cette même école : le 19 mars 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00 et Le 4 juin 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00. Les deux interventions étant réalisées pendant votre temps de travail et sans aucune autorisation de votre hiérarchie, nous avons alors vérifié vos déclaratifs de compte rendu d'activité sur ces deux journées pour lesquelles vous avez déclaré : - Le 19/03/2014 : une visite chez le client MEUBLES IKEA SAS à Montpellier avec une demande de remboursement d'indemnités de déplacement kilométrique (25 km) ainsi qu'un remboursement d'un frais de repas. – Le 04/06/2014 : une visite auprès du lycée privé polyvalent [...] avec une demande de remboursement de frais de repas. Une visite auprès du Palais de Justice de Montpellier avec une demande de remboursement d'indemnités kilométriques (25 km). Une visite auprès de M. M... situé à Saint Clément de Rivière. Au cours de notre entretien, vous avez : • reconnu avoir dispensé des cours rémunérés auprès de l'[...] les 19 mars et 4 juin 2014. • confirmé ne pas vous être rendu en visite chez les clients cités ci-dessus. • reconnu avoir déclaré sur vos CRA des heures de chantiers fictives sur le 19 mars et 4 juin 2014. Par ailleurs vous nous avez précisé avoir dispensé dans les mêmes conditions deux journées de cours à l'[...] en 2013. Information confirmée par cette même école. Cette conduite inacceptable qui est incompatible avec vos fonctions constitue des déclarations mensongères, une rédaction de faux documents (CRA), un remboursement de frais non justifié et un non-respect de votre obligation contractuelle de loyauté et de bonne foi vis à vis de l'entreprise. Enfin, dans le cadre des audits réalisés par la COFRAC pour valider nos accréditations, celles-ci pourraient être remises en cause, générant ainsi une perte d'activité importante pour l'entreprise et par voie de fait, privé d'emploi un nombre important de salariés de l'entreprise. " ; que selon les dispositions de l'article L 1232-1 du Code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse ; que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail rendant impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que l'article L 1332-4 du Code du travail dispose qu' "Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à Rengagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; qu'en l'espèce, les faits prétendument fautifs ont eu lieu le 19 mars et le 4 juin 2014 et l'employeur a convoqué M. R... à un entretien préalable en date du 5 août 2014 ; que toutefois, s'il est constaté que la société avait connaissance de la qualité de formateur du salarié auprès de l'ENSAM depuis 2007 et qu'un des supérieurs hiérarchiques de M. R... était intervenu dans la même structure la veille des interventions reprochées à ce dernier, il n'en résulte pas que l'entreprise ou M. O..., le supérieur, étaient informés de l'existence des formations dispensées par M. R... pour le 19 mars et le 4 juin 2014 ; que par mail du 21 juillet 2014, la chef du service des formations de l'ENSAM notifiait à la SAS Apave SudEurope que M. R... avait réalisé deux interventions de 7 heures, une le 19 mars 2014 et l'autre le 4 juin 2014 ; qu'ainsi, il apparaît que la SAS Apave SudEurope a invoqué la faute grave en respectant le délai de prescription de deux mois, dès lors que cette dernière n'a pu avoir une connaissance exacte de la réalité, de la nature et des faits reprochés, que seulement après réception du mail du 21 juillet 2014, que par la suite M. R... a passé un entretien préalable au licenciement le 14 août 2014 et a été licencié le 2 septembre 2014 ; que sur la faute grave, l'employeur entend apporter la preuve des faits imputés au salarié à partir notamment de comptes rendus d'activité, d'attestations et d'un mail ; que par mail du 21 juillet 2014, la chef du service des formations de l'ENSAM notifiait à la SAS Apave SudEurope : " ... les heures d'intervention de D... R... pour la HMONP : 19 mars 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00 4 juin 2014 de 9h00 à 12h00 et de 13h00 à 17h00 " ; que l'employeur produit les comptes-rendus d'activité de M. R... pour les journées du 19 mars et du 4 juin 2014 sur lesquels il est inscrit que le 19 mars, le salarié avait fait 25 km pour se rendre chez le client IKEA ainsi que le nombre 1 dans la case "repas" et que le 4 juin, M. R... avait fait également 25 km, qu'il y avait eu "exécution'' sur les chantiers du lycée privé polyvalent Nevers et du palais de justice rue Foch et "préparation diag documentation" pour le client M. M... ainsi que la mention "1" dans la case repas ; qu'enfin, la SAS Apave SudEurope fournit des attestations desquelles il ressort que : - pour M. O..., ingénieur en bâtiment, " Il m'arrive de donner des journées de cours à l'ENSAM à Montpellier... Cette prestation est rémunérée. Lorsque je dois intervenir...j'en informe ma hiérarchie par une demande officielle de jour de congé ou de RTT, qui est validée par mon supérieur " ; - pour M. I..., directeur d'exploitation, " ... je n'avais pas connaissance du fait qu'il donnait des cours... Il ne m'a pas fait part d'une demande sur le sujet et il ne l'a pas formalisé dans son emploi du temps " ; - pour M. P..., directeur d'exploitation, " ... je confirme qu'il est demandé à chaque intervenant d'établir ses comptes rendus d'activité par ordre chronologique pour des raisons de facturation client et de suivi de chaque affaire " ; que lesdits propos sont confirmés dans l'attestation de M. I..., directeur d'exploitation et de M. H..., directeur d'agence ; que pour sa défense, M. R... dit qu'il intervenait auprès de l'ENSAM depuis 2007 à la demande de la SAS Apave SudEurope ; qu'il précise que ses interventions n'étaient pas incompatibles avec l'exercice de ses fonctions et qu'en qualité de cadre, il gérait ses missions et son emploi du temps de manière autonome ; que sur les comptes-rendus d'activité, le salarié affirme qu'ils ne sont pas faux et indique, pour le 19 mars 2014, avoir donné une formation puis avoir par la suite travaillé sur le dossier IKEA et pour le 4 juin 2014, avoir dispensé une formation, puis avoir travaillé sur trois dossiers ; qu'il indique également que le listing chronologique des tâches n'est pas mentionné dans le guide de référence pour l'établissement des comptes rendus d'activité ; que le salarié produit l'attestation de son ancien responsable, M. Q..., ingénieur qui affirme qu'il savait que M. R... dispensait des formations et précise "Ce dernier enseignait de façon ponctuelle à titre privé à l'école d'Architecture de Montpellier" ; qu'il fournit également l'attestation de Mme J..., intendante du lycée [...] qui affirme que " Le mercredi 4 juin 2014, j'ai rencontré sur ma demande M. D... R... S... à 17 h sur le chantier D du lycée Nevers Montpellier pour une réunion de mise en place du chantier... ; qu'enfin, le salarié fait état d'une photocopie de son agenda qui, pour le 4 juin 2014 mentionne à 17 h "Nevers" et plus bas sans précision horaire " + palais justice 0,5 + M... 0,25 " et pour le 19 mars 2014 "Au bureau préparer réunion IKEA" de 17h à 18h30 ; que de l'ensemble de ses documents, il ressort que si la société savait que M. R... dispensait ponctuellement des formations auprès de l'ENSAM, ces dernières se faisaient à titre privé sans aucun lien avec la société et nécessitaient la pose d'un jour de congé et l'autorisation d'un supérieur ; que de plus, il est constaté que M. R... avait travaillé sur des dossiers après avoir donné une formation sur l'ensemble de la journée, qu'il s'était déplacé au lycée Nevers le 4 juin 2014 et qu'il inscrivait sur ses comptes rendus d'activité des déplacements, des repas ainsi que l'"exécution" de dossier ; que toutefois, si M. R... avait une autonomie dans la gestion de son emploi du temps, cela ne lui permettait pas de demander l'indemnisation de 25 km le 19 mars 2014 alors qu'il ne s'était rendu chez aucun client, l'indemnisation de deux repas alors qu'il était à ces heures en formation et de s'abstenir de l'autorisation de ses supérieurs quant aux 14 heures de formation donnée durant la journée du 19 mars et du 4 juin 2014 ; que de plus, les formations se terminant à 17 heures, il est difficile d'imaginer que le salarié était le 19 mars 2014 à cette même heure à son bureau ; qu'ainsi, s'il n'est pas démontré que M. R... n'a pas effectué les activités reportées dans ses comptes rendus d'activité et qu'en conséquence le risque de perte d'activité importante pour l'entreprise résultant des audits opérés par la COFRAC est nul, il apparaît qu'au regard du principe de loyauté et des obligations issues du contrat de travail, il appartenait à M. R... d'informer sa hiérarchie de ses activités de formateur pour les interventions du 19 mars et du 4 juin 2014 et de ne pas réclamer l'indemnisation de frais kilométriques et de repas inexistants ; que les faits reprochés au salarié en date du 19 mars et du 4 juin 2014 sont avérés et constituent un manquement grave aux obligations du contrat de travail, du fait de la dissimulation volontaire des activités de formation à titre privé à la hiérarchie et des demandes de remboursements de frais injustifiées ; qu'en conséquence, le licenciement pour faute grave de M. R... est fondé ;

ALORS QUE 1°), la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en se bornant à retenir, pour juger fondé le licenciement pour faute grave de M. R..., que « les faits reprochés au salarié en date du 19 mars et du 4 juin 2014 sont avérés et constituent un manquement grave aux obligations du contrat de travail » (arrêt, p. 9), sans toutefois constater que les manquements reprochés à M. R... rendaient impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L1234-1, L1234-5 et L1234-9 du code du travail ;

ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE 2°), la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que M. R... avait été embauché par la société Apave Sudeurope le 4 août 1986 en qualité d'ingénieur (arrêt, p. 2), que la société Apave Sudeurope savait que M. R... dispensait ponctuellement des formations auprès de l'ENSAM depuis 2007, en plus de son activité salariée, et que M. R... avait une autonomie dans la gestion de son emploi du temps (arrêt, p. 6 et 8) ; que dès lors, en se bornant à retenir, pour juger fondé le licenciement pour faute grave de M. R... notifié le 2 septembre 2014, que M. R... avait omis d'informer son employeur de deux dates des formations dispensées auprès de l'ENSAM, et que M. R... avait demandé le remboursement de frais de repas et kilométriques injustifiés pour ces deux dates, cependant que de tels manquements, reprochés à un salarié ayant 28 ans d'ancienneté, organisant en toute autonomie son emploi du temps, et dont l'employeur était informé qu'il exerçait ponctuellement une activité complémentaire de formateur pour un tiers, ne pouvaient suffire à caractériser une faute grave du salarié rendant impossible son maintien dans l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L1234-1, L1234-5 et L1234-9 du code du travail ;

ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE 3°), la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputable au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en se bornant à retenir, pour juger fondé le licenciement pour faute grave de M. R... notifié le 2 septembre 2014, que M. R... avait omis d'informer son employeur de deux dates des formations dispensées auprès de l'ENSAM, et que M. R... avait demandé le remboursement de frais de repas et kilométriques injustifiés pour ces deux dates, sans toutefois rechercher, comme elle y était pourtant invitée (conclusions, p. 11), si un tel licenciement prononcé à l'encontre d'un salarié justifiant d'une ancienneté de 28 ans, alors qu'aucun reproche ne lui avait jamais été adressé auparavant, constituait une sanction disproportionnée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L1234-1, L1234-5 et L1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-22453
Date de la décision : 10/02/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 30 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 fév. 2021, pourvoi n°19-22453


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.22453
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