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03/02/2021 | FRANCE | N°19-21153

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 février 2021, 19-21153


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 180 F-D

Pourvoi n° K 19-21.153

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

M. D... V... , domicilié [...] , a

formé le pourvoi n° K 19-21.153 contre l'arrêt rendu le 13 juin 2019 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 1), dans le litige l'op...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 180 F-D

Pourvoi n° K 19-21.153

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

M. D... V... , domicilié [...] , a formé le pourvoi n° K 19-21.153 contre l'arrêt rendu le 13 juin 2019 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à la société GMM, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. V... , de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société GMM, après débats en l'audience publique du 9 décembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 13 juin 2019), M. V... a été engagé à compter du 2 mai 1995 par la société GMM en qualité de technicien méthodes, puis a été promu à compter du 1er janvier 2012 au poste de responsable industriel, au statut cadre. La relation de travail était soumise à la convention collective départementale de la métallurgie de l'Orne.

2. Ayant démissionné par lettre du 14 janvier 2016, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes au titre des heures supplémentaires, des repos compensateurs, des contreparties obligatoires en repos et du travail dissimulé, alors « qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en considérant que les éléments produits par le salarié étaient insuffisants, quand elle a constaté que celui-ci a produit un décompte et des témoignages, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve des horaires effectués sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

4. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

5. Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

6. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

7. Pour débouter le salarié de ses demandes au titre des heures supplémentaires, des repos compensateurs, des contreparties obligatoires en repos et du travail dissimulé, l'arrêt retient que le décompte produit par l'intéressé au soutien de sa demande d'heures supplémentaires, qui ne comporte aucun horaire journalier précis de début ou de fin de travail, voire des pauses, et spécialement celui des samedis et dimanches qui sont contestées par l'employeur, ne permet pas d'étayer la demande du salarié car il est impossible de se figurer comment il est parvenu au nombre d'heures travaillées retenu par semaine, et en tout cas pas avec les autres pièces produites par le salarié (photographie de l'intéressé un dimanche, témoignages de son épouse et de ses collègues MM. P... et N...).

8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations, d'une part que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, d'autre part, que ce dernier ne produisait aucun élément de contrôle de la durée du travail, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.
Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

9. Le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande de dommages-intérêts au titre du non-respect des durées maximales de travail et de temps de repos, alors « que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur ; qu'en déboutant le salarié alors qu'il ne résulte pas de ses constatations que l'employeur avait apporté les preuves qui lui incombait, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-34, L. 3121-35 et L. 3121-36 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, des articles L. 3121-18, L. 3121-20, L. 3121-22 du code du travail et de l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code :

10. Selon ce texte, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

11. Il en résulte que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur.

12. Pour débouter le salarié de cette demande de dommages-intérêts, l'arrêt retient que le rejet de la réclamation du salarié au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs entraîne celui des demandes au titre du non-respect des durées maximales de travail et temps de repos.

13. En statuant ainsi, sans constater que l'employeur justifiait avoir respecté les durées maximales de travail prévues par le droit interne, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche, le quatrième moyen, pris en sa première branche et le cinquième moyen, réunis

Enoncé du moyen

14. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral et de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail, alors :

« 1°/ que la cassation à intervenir au premier moyen entraînera par voie de conséquence la censure du chef de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre du manquement à l'obligation de sécurité en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°/ que la cassation à intervenir au premier et/ou au deuxième moyen entraînera par voie de conséquence la censure du chef de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts au titre du harcèlement moral en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

3°/ que la cassation à intervenir sur l'un au moins des précédents moyens emportera censure de l'arrêt en ses dispositions relatives à la rupture et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

15. La cassation à intervenir sur les premier et deuxième moyens entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif ayant rejeté les demandes de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et pour harcèlement moral, et donc de celles relatives à qualification de la rupture du contrat de travail et aux indemnités subséquentes, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevable la demande reconventionnelle en dommages-intérêts présentée par l'employeur, l'arrêt rendu le 13 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne la société GMM aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société GMM et la condamne à payer à M. V... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. V...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes au titre des heures supplémentaires, des repos compensateurs, des contreparties obligatoires en repos et du travail dissimulé.

AUX MOTIFS QUE M. V... qui réclame un rappel d'heures supplémentaires de 58 508,50 euros pour la période 2014-2015-2016, expose, en termes très généraux, avoir été « contraint de travailler très tôt le matin jusque très tard le soir, très souvent le week-end, des dizaines et des quinzaines de jours d'affilée sans aucun repos » ; la cour ne partage pas l'appréciation du conseil de prud'hommes sur les éléments fournis par le salarié à l'appui de sa réclamation, spécialement son décompte (pièce 12) qui mentionne le nombre de jours travaillés, les jours de congés ou fériés, le nombre global de samedis ou dimanches ainsi qu'un volume global d'heures travaillées par semaine qui est extrêmement variable d'une semaine à l'autre. Le salarié dit avoir établi ce décompte par référence à des "relevés de solde annuels jours travaillés" pour les années 2012 à 2013 (pièces 2,3 et 4) qui comptabilisent le nombre de jours travaillés ; compte tenu de la problématique soulevée par M. V... sur la surcharge de travail à l'occasion de l'exécution mais aussi de la rupture du contrat de travail, il est crucial qu'il mette l'employeur qui le croyait soumis à un forfait jour valide en mesure de répondre par ses propres éléments sur ses horaires de travail ; or la cour considère que ce décompte qui ne comporte aucun horaire journalier précis de début ou de fin de travail, voire des pauses et spécialement ceux du samedi ou du dimanche qui sont contestés par l'employeur ne permet pas d'étayer la demande du salarié car il est impossible de se figurer comment il est parvenu au nombre d'heures travaillées retenu par semaine et en tout cas pas avec les autres pièces telles qu'une photo du salarié en bleu de travail prétendument prise le dimanche ou les témoignages de son épouse, de son collègue M. P... qui a collaboré avec lui de 2012 à début 2015 comme responsable logistique qui fait état d'une amplitude de 5 h le matin à 19 h le soir ou de M. N... qui lui atteste de ses propres horaires de 7 h à 17 h 30 et d'une forte augmentation de la charge de travail mais à partir de 2017 ; sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties sur la licéité du moyen de preuve tiré de l'extraction de données de l'ordinateur professionnel de M. V... ou du temps consacré à des activités extra-professionnelles, la cour rejette sa demande au titre des heures supplémentaires ; que sur les repos compensateurs et les contreparties obligatoires en repos : le rejet de la demande au titre des heures supplémentaires entraîne le débouté de la demande au titre des repos compensateurs ; que sur l'indemnité pour travail dissimulé : le débouté au titre des heures supplémentaires entraîne le rejet de la demande au titre de l'indemnité pour travail dissimulé.

1° ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en considérant que les éléments produits par le salarié étaient insuffisants, quand elle a constaté que celui-ci a produit un décompte et des témoignages, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve des horaires effectués sur le seul salarié, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail.

2° ALORS QUE la cour d'appel, après avoir dit que la convention de forfait était inopposable au salarié en raison du manquement de l'employeur à ses obligations de contrôle et de respect des heures de travail, a jugé les pièces produites par le salarié insuffisantes au prétexte que l'employeur le croyait soumis à un forfait jour valide ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a méconnu l'adage selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

3° ALORS QUE le salarié a soutenu et établi que l'employeur avait reconnu l'accomplissement d'heures supplémentaires, y compris les samedi et dimanche, ainsi qu'il résultait notamment des fiches de pointage produites par l'employeur lui-même ; qu'en déboutant le salarié de l'intégralité de ses demandes, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du non-respect des durées maximales de travail et de temps de repos.

AUX MOTIFS QUE le rejet de la réclamation au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs entraîne celui des demandes au titre du non-respect des durées maximales de travail et de temps de repos.

1° ALORS QUE la cassation à intervenir au premier moyen entrainera par voie de conséquence la censure du chef de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du non-respect des durées maximales de travail et de temps de repos en application de l'article 624 du code de procédure civile.

2° ALORS QUE la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur ; qu'en déboutant le salarié alors qu'il ne résulte pas de ses constatations que l'employeur avait apporté les preuves qui lui incombait, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-34, L. 3121-35 et L. 3121-36 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, des articles L3121-18, L3121-20, L3121-22 du code du travail et de l'article 1353 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de sécurité.

AUX MOTIFS supposés QUE le rejet de la réclamation au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs entraîne celui des demandes au titre du non-respect des durées maximales de travail et de temps de repos.

1° ALORS QUE la cassation à intervenir au premier moyen entrainera par voie de conséquence la censure du chef de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de sécurité en application de l'article 624 du code de procédure civile.

2° ALORS QU'en déboutant le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du manquement à l'obligation de sécurité sans motifs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral.

AUX MOTIFS propres QU'à la suite d'un long rappel des textes et de la jurisprudence applicables, c'est dans le cadre de la discussion sur la prise d'acte que le salarié aborde le harcèlement moral qui sont sa surcharge de travail empiétant sur sa vie, le stress et la pression sans pour autant invoquer des faits précis ; M. V... a été débouté de toutes ses demandes relatives au temps de travail de sorte que les éléments médicaux invoqués en particulier l'attestation de la psychologue sur son burn out ni les arrêts de travail ne caractérisent d'agissements répétés susceptibles de constituer un harcèlement moral.

AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE M. V... a dû effectuer un nombre d'heures de travail au-delà des limites légales pour qu'il puisse assumer ses responsabilités et faire en sorte de répondre aux attentes de son employeur ; cet état de fait entraîne la nullité du forfait jours et la reconnaissance de l'imputabilité de la rupture aux torts de l'employeur ; cependant, M. V... ne met pas en évidence une volonté délibérée de l'employeur de mettre en place des méthodes de direction coercitives à son égard ; M. V... estimait que sa charge de travail lui imposait d'effectuer un nombre d'heures important pour faire face à ses échéances ; le fait que l'employeur accepte que son salarié effectue un volume d'heures de travail très important jusqu'à le laisser dégrader sa santé constitue un manquement évident à son obligation de veiller à la santé physique et mentale de son salarié ; ce manquement est sanctionné par l'imputabilité de la rupture du contrat de travail ; il sera jugé que cela ne constitue pas, en outre, un harcèlement moral qui puisse être indemnisé à ce titre.

1° ALORS QUE la cassation à intervenir au premier et/ou au deuxième moyen entrainera par voie de conséquence la censure du chef de dispositif ayant débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral en application de l'article 624 du code de procédure civile.

2° ALORS QUE la preuve d'un harcèlement moral ne pèse pas sur le salarié ; que le harcèlement moral est constitué indépendamment de l'intention de son auteur ; qu'en déboutant le salarié aux motifs, à les supposés adoptés, que le salarié ne met pas en évidence une volonté délibérée de l'employeur de mettre en place des méthodes de direction coercitives à son égard, la cour d'appel a violé les articles L. 1152 1 et L. 1154 1 du code du travail.

3° ALORS QUE la cour d'appel a retenu que l'employeur ne justifiait pas de la tenue des entretiens annuels sur le temps de travail tandis que le salarié exposait avoir consulté un psychologue pour burn out et avoir fait l'objet d'arrêts de travail ; qu'en déboutant le salarié de sa demande, quand il lui appartenait de se prononcer sur l'intégralité des éléments de fait pour rechercher si, dans leur ensemble, ces éléments laissaient supposer l'existence d'un harcèlement, la cour d'appel a violé les articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail.

AUX MOTIFS QUE M. V... soutient qu'il a mis un terme au contrat de travail en raison de sa charge de travail, son épuisement, sa vie personnelle inexistante et qu'il doit être retenu que sa lettre du 14 novembre 2016 doit être qualifiée, sur le fondement de l'article 12 du code de procédure civile, de prise d'acte de la rupture et non d'une démission ; il sollicite la condamnation de la société GMM à hauteur de 146 176,56 euros net à titre de dommages et intérêts soit 24 mois de salaire net pour licenciement nul subsidiairement pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse compte tenu de son statut de cadre et de son ancienneté considérable (21 ans et 9 mois) ; une démission ne peut résulter que d'une manifestation claire et non équivoque de volonté de la part du salarié ; à supposer que la lettre adressée par M. V... soit considéré comme une démission compte tenu des reproches faits à l'employeur, elle ne produira pour autant les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse puisque tous les griefs articulés à l'encontre de l'employeur ont été écartés.

ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'un au moins des précédents moyens emportera censure de l'arrêt en ses dispositions relatives à la rupture et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-21153
Date de la décision : 03/02/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 13 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 fév. 2021, pourvoi n°19-21153


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (président)
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.21153
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