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27/01/2021 | FRANCE | N°19-23572

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 janvier 2021, 19-23572


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 janvier 2021

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 124 F-D

Pourvoi n° Q 19-23.572

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 JANVIER 2021

1°/ Le syndicat CGT Adecco, dont le siège e

st [...] ,

2°/ le syndicat CGT Interim, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° Q 19-23.572 contre le jugement rendu le 4 octobre 201...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 janvier 2021

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 124 F-D

Pourvoi n° Q 19-23.572

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 JANVIER 2021

1°/ Le syndicat CGT Adecco, dont le siège est [...] ,

2°/ le syndicat CGT Interim, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° Q 19-23.572 contre le jugement rendu le 4 octobre 2019 par le tribunal d'instance de Villeurbanne (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Adecco France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ à la Fédération nationale encadrement commerce et services, dont le siège est [...] ,

3°/ à la Fédération des services CFDT, dont le siège est [...] ,

4°/ à la Fédération CFTC commerce et services, dont le siège est [...] ,

5°/ à la Fédération des employés et cadres Force ouvrière, dont le siège est [...] ,

6°/ à la Fédération des commerces et services UNSA, dont le siège est [...] ,

7°/ au syndicat Solidaires Interim, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat des syndicats CGT Adecco et CGT Interim, de la SARL Cabinet Briard, avocat de la Fédération nationale encadrement commerce et services, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Adecco France, après débats en l'audience publique du 2 décembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Lanoue, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Villeurbanne, 4 octobre 2019), la société Adecco France (la société), société de travail temporaire qui déploie son activité sur tout le territoire national et compte au 31 mars 2019 un effectif global de personnel permanent et intérimaire de 179 572 équivalents temps pleins et dont les mandats des délégués du personnel et membres des comités d'établissement arrivaient à leur terme le 6 juillet 2020 a, conformément à l'ordonnance du 22 septembre 2017, engagé le processus en vue de la préparation des élections des nouvelles institutions représentatives du personnel pour la mise en place, au plus tard le 1er janvier 2020, du comité social et économique (CSE). Un accord dit de « structuration » du 27 février 2019 a fixé le nombre et le périmètre des quatre établissements distincts, correspondant aux quatre « directions opérationnelles », au sein desquels devait se dérouler l'élection. À la suite de réunions de négociation et préparation, un accord préélectoral a été conclu le 23 avril 2019, signé à la double majorité prévue à l'article L. 2314-6 du code du travail par les organisations syndicales CFDT, CGT FO et Solidaires Interim. L'accord préélectoral a fixé le premier tour des élections du 30 octobre 2019 au 13 novembre 2019 et le second tour du 4 au 18 décembre 2019. L'affichage des listes électorales, liste d'électeurs et d'éligibles, a été effectué dans chaque établissement le 4 septembre 2019, date prévue à l'article 6-4 de l'accord préélectoral.

2. Considérant que le défaut de mention du statut des salariés (permanents, intérimaires, intérimaires en contrat à durée indéterminée intérimaire (CDII)), et de l'ancienneté exprimée en nombre d'heures de mission pour les salariés intérimaires rendait les listes affichées inexploitables et incontrôlables pour les organisations syndicales et les salariés eux-mêmes et que ces listes comprenaient des salariés détenant une délégation particulière d'autorité permettant de les assimiler à l'employeur qui auraient dû en être exclus, le syndicat CGT Adecco a, le 6 septembre 2019, saisi le tribunal d'instance. Le syndicat CGT Interim est intervenu volontairement dans la procédure.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. Le syndicat CGT Adecco et le syndicat CGT Interim (les syndicats) font grief au jugement de les débouter de leurs demandes en contestation de la régularité des listes électorales concernant les mentions qui doivent y figurer et de condamnation sous astreinte de la société à publier des listes électorales rectificatives conformes, alors :

« 1°/ que les listes électorales doivent comporter les mentions permettant le contrôle de leur régularité ; que pour débouter les syndicats de leur demande en contestation de la régularité des listes électorales, le tribunal a retenu que les listes affichées par la société sont conformes à la jurisprudence et au protocole préélectoral puisqu'elles comportent les mentions obligatoires d'âge, d'appartenance à l'entreprise, d'ancienneté, du collège électoral, de l'éligibilité et du statut du salarié (permanent ou intérimaire) ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si le contrôle de ces listes n'avait pas été rendu impossible d'une part en raison de la dissémination des nombreuses agences sur le territoire national, d'autre part du fait que les listes communiquées aux organisations syndicales ne mentionnaient pas le statut des salariés, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2314-20 et L. 2314-22 du code du travail, ensemble, de l'article 6 du protocole préélectoral du 23 avril 2019 ;

2°/ que selon l'article 6-4 du protocole préélectoral du 23 avril 2019, doivent figurer sur les listes électorales ''le nom et le prénom de l'électeur, sa date de naissance, son ancienneté, son collège électoral ainsi que la mention de son éligibilité'' ; que selon l'article 6-2 relatif à l'électorat et l'éligibilité des travailleurs intérimaires, sont électeurs les salariés qui justifient de ''455 heures de mission au cours des 12 mois précédant la date du premier tour du scrutin (correspondant à 3 mois d'ancienneté)'', sont éligibles les salariés qui justifient de ''910 heures de mission au cours des 18 mois précédant la date du 1er tour de scrutin (correspondant à 6 mois d'ancienneté)'' ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'ancienneté étant déterminée en fonction du nombre de missions effectuées par les salariés intérimaires, le nombre de missions doit figurer sur les listes électorales, cette mention permettant seule de vérifier la régularité des listes, à l'exclusion de la date d'entrée dans l'entreprise ; qu'en décidant le contraire, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2314-20 et L. 2314-22 du code du travail, ensemble l'article 6 de l'accord préélectoral du 23 avril 2019. »

Réponse de la Cour

4. Les seules mentions qui doivent figurer obligatoirement sur la liste électorale des salariés travaillant dans l'entreprise sont l'âge, l'appartenance à l'entreprise et l'ancienneté dans celle-ci qui déterminent la qualité d'électeur et permettent le contrôle de la régularité des listes électorales.

5. Le tribunal a, d'abord, constaté que si les conditions d'électorat et d'éligibilité des salariés intérimaires étaient définies à l'article 6.2 du protocole préélectoral du 23 avril 2019, signé sans réserves par le syndicat CGT Adecco, en référence à un nombre d'heures de mission conformément aux dispositions de l'article L. 2314-20 du code du travail, l'article 6.4 du protocole définissant le contenu des listes électorales stipulait clairement que c'était l'ancienneté qui devait être mentionnée et que c'était en toute connaissance de cause que les dispositions de cet article, non sujettes à interprétation, avaient été adoptées par les signataires dont le syndicat CGT Adecco qui n'était pas fondé à en contester ou en interpréter les termes.

6. Le tribunal a, ensuite, relevé qu'il résultait de l'examen des pièces produites que les listes électorales affichées par la société comportaient les mentions obligatoires d'âge, d'appartenance à l'entreprise et d'ancienneté, les mentions complémentaires du collège électoral et d'éligibilité prévues à l'article 6.4 du protocole préélectoral du 23 avril 2019, complétées à l'initiative de l'employeur de la mention du statut du salarié.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. Les syndicats font grief au jugement de les débouter de leurs demandes tendant à voir ordonner l'exclusion de tous les salariés cadres détenant une délégation particulière d'autorité permettant de les assimiler à l'employeur et, parmi eux, les directeurs d'agence ou responsables de site et à ordonner à la société, sous astreinte, la fourniture de nouvelles listes électorales rectifiées pour tous les établissements et collèges concernés, alors :

« 1°/ que ne peuvent exercer un mandat de représentation du personnel les salariés qui, soit disposent d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d'être assimilés au chef d'entreprise, soit représentent effectivement l'employeur devant les institutions représentatives du personnel ; qu'en refusant d'écarter des listes électorales les directeurs d'agence et responsables de site quand il constatait que ces cadres étaient habilités à embaucher et à licencier, fût-ce partiellement, les salariés intérimaires, lesquels représentent plus de 95 % de l'effectif global de l'entreprise, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 2314-18 et L. 2314-19 du code du travail ;

2°/ que tout jugement doit être motivé, l'absence de motifs équivalant à leur absence ; qu'en affirmant que les pouvoirs d'embauche et disciplinaire des directeurs d'agence ou responsables de site ne concernaient que les travailleurs intérimaires, et étaient limités pour les intérimaires en CDII et restreints pour les salariés intérimaires en mission, sans indiquer sur quels documents il se fondait, le tribunal a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

9. Ne peuvent exercer un mandat de représentation les salariés qui, soit disposent d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d'être assimilés au chef d'entreprise, soit représentent effectivement l'employeur devant les institutions représentatives du personnel.

10. Le tribunal a, d'abord, décidé exactement que l'existence d'une délégation écrite particulière d'autorité ne pouvait résulter de la seule description d'une fiche de poste.

11. Ayant, ensuite, relevé que les attributions du directeur d'agence étaient limitées pour les intérimaires en CDII à l'identification du candidat dont le recrutement est validé par une commission nationale de l'entreprise et en cas de sanction ou licenciement à l'aval préalable de la direction juridique ou du directeur de zone, qu'elles étaient restreintes pour les salariés intérimaires en mission, le recrutement étant réalisé par tous les permanents de l'agence et l'éventuelle mesure disciplinaire conditionnée par la demande de l'entreprise utilisatrice, et inexistantes en matière de recrutement et licenciement des salariés permanents, le tribunal a pu en déduire, par une décision motivée, qu'elles ne permettaient pas de l'assimiler au chef d'entreprise auprès du personnel.

12. En conséquence, le moyen n'est fondé en aucune de ses branches.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour les syndicats CGTAdecco et CGT Interim

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté les syndicats CGT Adecco et CGT Interim de leurs demandes en contestation de la régularité des listes électorales concernant les mentions qui doivent y figurer et de condamnation sous astreinte de la société Adecco France de publier des listes électorales rectificatives conformes ;

AUX MOTIFS QUE sur la régularité des listes électorales concernant les mentions qui doivent y figurer : qu'en l'absence de dispositions législatives réglementant les conditions d'établissement et le contenu des listes électorales, la jurisprudence a posé comme principe (Cass. soc. 20 mars 2002, n° 00-60.176) que les seules mentions qui doivent figurer obligatoirement sur la liste électorale des salariés travaillant dans l'entreprise sont : l'âge, l'appartenance à l'entreprise et l'ancienneté dans celle-ci qui déterminent la qualité d'électeur et permettent le contrôle de la régularité des listes électorales ; qu'en application de l'article L. 2314-28 du code du travail les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales, conclu conformément à l'article L .2314-6. Cet accord respecte les principes généraux du droit électoral ; que si les conditions d'électorat et d'éligibilité des salariés intérimaires sont définies à l'article 6.2 du protocole préélectoral en référence à un nombre d'heures de mission conformément aux dispositions de l'article L .2314-20 du code du travail, l'article 6.4 du protocole qui définit le contenu des listes électorales stipule clairement que c'est l'ancienneté qui doit être mentionnée, les partenaires sociaux dont le syndicat CGT Adecco, signataire du protocole ayant pris la précaution de rappeler dans le préambule du protocole que celui-ci a été signé après négociations et plusieurs réunions en tenant compte à la fois des spécificités de la profession du travail temporaire et de l'organisation de l'entreprise, et en rappelant concernant les personnels intérimaires (article 6.3 du protocole) les difficultés pour déterminer la liste des salariés remplissant les conditions d'électorat au jour du premier tour de scrutin ; que c'est donc en toute connaissance de cause que les dispositions de l'article 6.4 du protocole qui ne sont pas sujettes à interprétation ont été adoptées par les signataires dont le syndicat CGT Adecco qui n'est pas fondé à en contester ou en interpréter les termes ; que le protocole préélectoral du 23 avril 2019, dont la validité ne fait l'objet d'aucune contestation et qui est signé sans réserves par le syndicat CGT Adecco prévoit en son article 6.4 concernant l'affichage des listes électorales que les listes seront affichées sur les panneaux d'information au plus tard le 4 septembre 2019 dans chaque agence ou établissement et que figurent sur ces listes le nom et le prénom de l'électeur, sa date de naissance, son ancienneté, l'âge, l'appartenance à l'entreprise et l'ancienneté ainsi que la mention de son éligibilité ; qu'il résulte de l'examen des pièces produites que les listes électorales affichées le 4 septembre comportent le nom et le prénom de l'électeur, sa date de naissance, son ancienneté, son collège électoral ainsi que la mention de son éligibilité, mentions conformes tant aux exigences de la jurisprudence qu'aux stipulations de l'article 6.4 du protocole préélectoral auxquelles l'employeur a ajouté l'indication du statut du salarié ; qu'ainsi les listes électorales affichées par la société Adecco France sont conformes aux exigences de la jurisprudence et au protocole préélectoral puisqu'elles contiennent les mentions obligatoires d'âge, d'appartenance à l'entreprise et d'ancienneté déterminées par la jurisprudence, les mentions complémentaires du collège électoral et d'éligibilité prévues à l'article 6.4 du protocole préélectoral du 23 avril 2019, complétées à l'initiative de l'employeur de la mention du statut du salarié ce que reconnaît l'ensemble des autres organisations syndicales comparantes à savoir la Fédération Nationale Encadrement Commerces et Services (CFE-CGC), la Fédération des Services CFDT, la Fédération CFTC des Commerces et Services et la Fédération Commerces et Services UNSA (FCS-UNSA) ; que les syndicats CGT Adecco et CGT Interim seront en conséquence déboutés de leurs demandes en contestation de la régularité des listes électorales concernant les mentions qui doivent y figurer et de condamnation sous astreinte de 10.000,00 euros par jour de retard de la société Adecco France de publier des listes électorales rectificatives conformes ;

1°) ALORS QUE les listes électorales doivent comporter les mentions permettant le contrôle de leur régularité ; que pour débouter les syndicats CGT Adecco France et CGT Interim de leur demande en contestation de la régularité des listes électorales, le tribunal a retenu que les listes affichées par la société Adecco France sont conformes à la jurisprudence et au protocole préélectoral puisqu'elles comportent les mentions obligatoires d'âge, d'appartenance à l'entreprise, d'ancienneté, du collège électoral, de l'éligibilité et du statut du salarié (permanent ou intérimaire) ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si le contrôle de ces listes n'avait pas été rendu impossible d'une part en raison de la dissémination des nombreuses agences sur le territoire national, d'autre part du fait que les listes communiquées aux organisations syndicales ne mentionnaient pas le statut des salariés, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2314-20 et L. 2314-22 du code du travail, ensemble, de l'article 6 du protocole préélectoral du 23 avril 2019 ;

2°) ALORS QUE selon l'article 6-4 du protocole préélectoral du 23 avril 2019, doivent figurer sur les listes électorales « le nom et le prénom de l'électeur, sa date de naissance, son ancienneté, son collège électoral ainsi que la mention de son éligibilité » ; que selon l'article 6-2 relatif à l'électorat et l'éligibilité des travailleurs intérimaires, sont électeurs les salariés qui justifient de « 455 heures de mission au cours des 12 mois précédant la date du premier tour du scrutin (correspondant à 3 mois d'ancienneté), sont éligibles les salariés qui justifient de « 910 heures de mission au cours des 18 mois précédant la date du 1er tour de scrutin (correspondant à 6 mois d'ancienneté) » ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'ancienneté étant déterminée en fonction du nombre de missions effectuées par les salariés intérimaires, le nombre de missions doit figurer sur les listes électorales, cette mention permettant seule de vérifier la régularité des listes, à l'exclusion de la date d'entrée dans l'entreprise ; qu'en décidant le contraire, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2314-20 et L. 2314-22 du code du travail, ensemble l'article 6 de l'accord préélectoral du 23 avril 2019.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le pourvoi fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté les syndicats CGT Adecco et CGT Interim de leurs demandes tendant à voir ordonner l'exclusion de tous les salariés cadres détenant une délégation particulière d'autorité permettant de les assimiler à l'employeur et, parmi eux, les directeurs d'agence ou responsables de site et à ordonner à la société Adecco France, sous astreinte, la fourniture de nouvelles listes électorales rectifiées pour tous les établissements et collèges concernés ;

AUX MOTIFS QUE sur la régularité des listes électorales au regard de l'électorat et de l'éligibilité des cadres disposant d'une délégation particulière d'autorité les assimilant à l'employeur ; que tout salarié qui en application de l'article 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 dispose d'un droit constitutionnel de participer par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises dispose pour exercer ce droit du droit de voter pour ses représentants ou de candidater aux élections ; que les articles L. 2314-18 et L. 2314-19 du code du travail posent le principe du droit des salariés à être électeurs et éligibles et les conditions purement formelles à remplir pour bénéficier de ces droits ; que la Cour de cassation dont la jurisprudence est constante, envisage de façon particulièrement restrictive l'exclusion de l'éligibilité et de l'électorat des salariés qui doivent être assimilés au chef d'entreprise et vise les salariés qui soit disposent d'une délégation de pouvoir écrite particulière, soit représentent le chef d'entreprise devant les institutions représentatives du personnel (Cass. soc. 6 février 2002, n° 00-60.488 ; Cass. soc. 20 mars 2013 n° 12-11.702 ; Cass. soc. 15 mai 2019 n° 18-19.862) ; que pour solliciter l'exclusion de l'électorat des directeurs d'agence et directeurs ou responsables de site les demandeurs soutiennent que ces derniers au nombre d'environ 700, bénéficient d'une délégation particulière d'autorité permettant de les assimiler à l'employeur ; qu'il est cependant contraire aux principes posés par la jurisprudence citée supra de soutenir que cette délégation n'a pas été écrite, la Cour de cassation retenant au contraire systématiquement la nécessité de justifier d'une « délégation écrite particulière » ce que les demandeurs reconnaissent cependant implicitement en invoquant la fiche de poste des directeurs d'agence pour faire valoir que ces cadres peuvent embaucher leurs collaborateurs et exercer le pouvoir disciplinaire de manière autonome ; qu'il doit être relevé que les pièces produites signées de directeurs d'agence ou responsables de site, contrats de travail (pièces 6 et 6 bis), lettres de convocation à l'entretien préalable, de rupture (pièces 7, 8, 9, 9 bis, 11, 12 et 12 bis) concernent exclusivement des salariés intérimaires à l'exclusion de tout permanent ; que ces éléments de preuve au demeurant fragmentaires concernent un nombre très limité de situations en regard d'un effectif de plus de 179.000 salariés et un effectif de 700 cadres directeurs d'agence ou responsables de site visés par la demande, et ne sauraient justifier l'exclusion en masse de 700 cadres des listes électorales et donc la privation d'un droit constitutionnel sans examen de la situation individuelle de chacun des salariés concernés ; que la preuve de l'existence d'une délégation particulière d'autorité établie par écrit permettant d'assimiler un cadre à un chef d'entreprise ne peut résulter de la seule description d'une fiche de poste qui en l'espèce détermine des attributions que le directeur d'agence tient de sa position hiérarchique mais qui le place sous l'autorité hiérarchique d'un directeur de zone ; que ces attributions sont limitées pour les intérimaires en CDII à l'identification du candidat dont le recrutement est validé par une commission nationale de l'entreprise et en cas de sanction ou licenciement à l'aval préalable de la direction Juridique ou du Directeur de zone. Elles sont restreintes pour les salariés intérimaires en mission, le recrutement étant réalisé par tous les permanents de l'agence et l'éventuelle mesure disciplinaire est conditionnée par la demande de l'entreprise utilisatrice. Elles sont inexistantes en matière de recrutement et licenciement des salariés permanents ; qu'ainsi l'ensemble de ces attributions ne permettent pas d'assimiler le directeur d'agence au chef d'entreprise auprès du personnel ; que les syndicats demandeurs invoquent l'existence d'une dizaine de situations justifiées par leurs pièces 6 à 12 bis qui établissent qu'a pu être signé par un petit nombre (3 ou 4) de directeurs d'agence un contrat de travail, une lettre de convocation à un entretien préalable ou une lettre de licenciement concernant exclusivement des salariés intérimaires. Mais le fait d'exercer une partie de l'autorité hiérarchique ou pour un cadre salarié permanent de signer des contrats de placement d'intérimaires au travers d'un processus codifié est insuffisant à établir que ce salarié cadre possède une délégation d'autorité qui lui permette d'être assimilé au chef d'entreprise et constituer une clause d'exclusion susceptible d'être appliquée à 700 cadres dont il n'est pas établi qu'ils ont également tous exercé de telles prérogatives ; que le syndicat CGT Adecco et CGT Interim échouent dans la charge qui leur incombe de démontrer pour chacun des cadres concernés par la demande d'exclusion, soit qu'il bénéficie d'une délégation de pouvoir écrite particulière de nature à établir qu'il peut être assimilé au chef d'entreprise, soit qu'il représente le chef d'entreprise devant les institutions représentatives du personnel ; qu'il convient en conséquence de débouter le syndicat CGT Adecco et la CGT Interim de leurs demandes tendant à voir ordonner l'exclusion de tous les salariés cadres détenant une délégation particulière d'autorité permettant de les assimiler à l'employeur et parmi eux, les directeurs d'agence et les directeurs ou responsables de site, à ordonner à la société Adecco France, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard, la fourniture de nouvelles listes électorales rectifiées pour tous les établissements et collèges concernés ;

1°) ALORS QUE ne peuvent exercer un mandat de représentation du personnel les salariés qui, soit disposent d'une délégation écrite particulière d'autorité leur permettant d'être assimilés au chef d'entreprise, soit représentent effectivement l'employeur devant les institutions représentatives du personnel ; qu'en refusant d'écarter des listes électorales les directeurs d'agence et responsables de site quand il constatait que ces cadres étaient habilités à embaucher et à licencier, fût-ce partiellement, les salariés intérimaires, lesquels représentent plus de 95 % de l'effectif global de l'entreprise, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 2314-18 et L. 2314-19 du code du travail ;

2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé, l'absence de motifs équivalant à leur absence ; qu'en affirmant que les pouvoirs d'embauche et disciplinaire des directeurs d'agence ou responsables de site ne concernaient que les travailleurs intérimaires, et étaient limités pour les intérimaires en CDII et restreints pour les salariés intérimaires en mission, sans indiquer sur quels documents il se fondait, le tribunal a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-23572
Date de la décision : 27/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Villeurbanne, 04 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jan. 2021, pourvoi n°19-23572


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.23572
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