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27/01/2021 | FRANCE | N°18-22551

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 janvier 2021, 18-22551


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 janvier 2021

Rejet

Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 76 F-D

Pourvoi n° J 18-22.551

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 27 JANVIER 2021

La

société Aquaged, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Solustep, a formé le pourvoi n° J 18-2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 janvier 2021

Rejet

Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 76 F-D

Pourvoi n° J 18-22.551

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 27 JANVIER 2021

La société Aquaged, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Solustep, a formé le pourvoi n° J 18-22.551 contre l'arrêt rendu le 21 juin 2018 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. R... O..., domicilié [...] ,

2°/ à la société Aquapap distribution, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Aquaged, venant aux droits de la société Solustep, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. O..., de la SCP Boulloche, avocat de la société Aquapap distribution, après débats en l'audience publique du 1er décembre 2020 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 21 juin 2018) rendu en référé, la société Solustep a pour activité la fabrication et la vente de nutriments destinés aux stations d'épuration d'eaux industrielles. Le 27 février 2009, M. O... a été nommé en qualité de membre de son conseil d'administration et a été embauché, le 1er avril 2009, en qualité de directeur salarié. Il a démissionné et mis un terme à ses fonctions le 15 septembre 2014 et a quitté l'entreprise à l'issue de son préavis, le 31 octobre 2014.

2. Durant l'exercice de ses fonctions, M. O... a pris une participation de 50 %, ultérieurement ramenée à 25 %, dans le capital de la société Aquapap distribution (la société Aquapap), créée en septembre 2010, avec pour objet l'achat, la vente, la représentation, le conseil afférent à tous produits consommables et matériels à destination des industriels, des professionnels, des collectivités et, éventuellement, des particuliers.

3. Le 7 novembre 2016, la société Solustep, soutenant être la victime d'actes de concurrence déloyale imputables à M. O... et à la société Aquapap, les a assignés en référé afin de voir ordonner une mesure d'expertise sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La société Aquaged, venant aux droits de la société Solustep, fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à l'organisation d'une mesure d'expertise in futurum, alors :

« 1°/ que le requérant à une mesure d'instruction avant tout procès ne peut se voir reprocher de ne pas avoir rapporté la preuve des faits que la mesure d'expertise projetée a pour objet d'établir ; qu'en ayant débouté la société Solustep de sa demande visant à l'organisation d'une mesure d'expertise destinée à établir les actes de concurrence déloyale que la société Aquapap et M. O... lui avaient faits, au motif que la société Solustep n'établissaient pas ces actes de concurrence déloyale, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

2°/ que de simples indices de concurrence déloyale justifient l'organisation d'une mesure d'expertise avant tout procès ; qu'ayant relevé que les sociétés Aquapap et Solustep fournissaient toutes deux des nutriments de bactéries de station d'épuration à la société Cascades, que celle-ci avait cessé toute relation d'affaires avec l'exposante juste après la démission de M. O... en octobre 2014, lequel était, entre 2010 et 2014, à la fois salarié et administrateur de la société Solustep, sans en déduire une suspicion de concurrence déloyale de nature à justifier l'organisation d'une mesure d'expertise avant tout procès, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

3°/ que le cadre dirigeant d'une société, titulaire en sus d'un mandat social, est tenu d'un devoir de loyauté absolu qui lui interdit de travailler ou de développer une activité concurrente dans une autre société ; qu'en ayant écarté tout acte de concurrence déloyale imputable à M. O... entre 2010 et 2014, après avoir constaté qu'il cumulait les fonctions d'administrateur et de salarié de la société Solustep pendant cette période et qu'il avait pourtant, pendant le même temps, développé et travaillé pour la société Aquapap, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

4°/ que l'interruption de toute activité commerciale avec un ancien client, juste après le départ d'un salarié de l'entreprise, constitue un indice de concurrence déloyale ; qu'en ayant écarté tout fait de concurrence déloyale à la charge de M. O..., au motif que l'arrêt des relations commerciales entre les sociétés Solustep et Cascades s'était produit en décembre 2014, soit juste avant la démission de M. O..., la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

5°/ que le secret des affaires ne constitue pas un obstacle à l'organisation d'une mesure d'instruction in futurum ; qu'en ayant, par adoption des motifs du premier juge, jugé que la mesure d'expertise sollicitée portait atteinte au secret des affaires et était insuffisamment limitée, quand, en appel, la société Solustep avait sollicité la communication de documents strictement nécessaires à la preuve des actes de concurrence déloyale imputés à la société Aquapap et à M. O..., la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

6°/ que le risque de dépérissement des preuves ne constitue pas une condition du jeu de l'article 145 du code de procédure civile ; qu'en ayant retenu à la charge de l'exposante, par adoption des motifs du premier juge, le fait de ne pas avoir allégué un risque de dépérissement des preuves à l'appui de sa demande de mesure d'instruction avant tout procès, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Après avoir énoncé qu'il n'incombait pas à la société Solustep de rapporter la preuve d'actes de concurrence déloyale effectivement commis entre le mois de septembre 2010 et le mois d'octobre 2014 mais d'établir l'existence de circonstances fondant légitimement des soupçons de concurrence déloyale, l'arrêt retient que cette société n'apporte pas la preuve, notamment comptable, de ce que, pendant la période considérée, son activité aurait connu des vicissitudes pouvant être reliées, non seulement à l'activité imputée à M. O..., au mépris de l'obligation de loyauté à laquelle il était tenu, mais surtout à l'exploitation fautive qu'en aurait faite la société Aquapap. Il relève également que la société Solustep n'apporte pas d'élément au soutien de ses allégations selon lesquelles la société Aquapap aurait noué des relations commerciales concurrentes avec dix de ses clients, l'expert comptable de la société Aquapap indiquant n'avoir relevé aucune transaction de cette société avec ces entreprises. Il retient ensuite, s'agissant plus particulièrement des relations entretenues avec la société Cascades, que le dirigeant de la société Aquapap était, avant la société Solustep, en relations d'affaires avec ce client et que celui-ci n'a donc pas été détourné par la société Aquapap dans le cadre d'une concurrence déloyale. L'arrêt retient encore que si, pendant le temps de sa relation de travail salarié, en qualité de cadre dirigeant, avec la société Solustep, M. O... est devenu associé de la société Aquapap dans le courant du dernier trimestre 2010 et lui a aussi fourni des prestations de travail entre 2011 et 2015, il n'est pas établi, compte tenu du large domaine d'activité de la société Aquapap, que cette activité parallèle de M. O... ait été exercée dans un domaine directement concurrent de la société Solustep.

6. Ayant ainsi procédé à une analyse détaillée des faits de la cause, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de nature à étayer des soupçons sérieux de concurrence déloyale imputable à la société Aquapap et à M. O..., que la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les cinquième et sixième branches, a retenu que, faute d'éléments suffisants, il n'existait pas de motif légitime justifiant que soit ordonnée la mesure d'instruction demandée.

7. Le moyen, pour partie inopérant, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Aquaged, venant aux droits de la société Solustep, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Aquaged, venant aux droits de la société Solustep, et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Aquapap distribution et la somme de 3 000 euros à M. O... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour la société Aquaged, venant aux droits de la société Solustep.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé l'ordonnance de référé du 28 février 2017, en ce qu'elle avait débouté la société Solustep (devenue la société Aquaged) de ses demandes, dirigées contre M. O... et la société Aquapap, tendant à l'organisation d'une mesure d'expertise in futurum ;

AUX MOTIFS QU'en application des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile, des mesures d'instruction peuvent être ordonnées s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige. La société SOLUSTEP se prévaut d'une activité concurrente et déloyale poursuivie à son encontre, entre septembre 2010 et le 31 octobre 2014 par la société AQUAPAP et M. O.... Si la mise en oeuvre des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile n'impose pas à la société SOLUSTEP de rapporter la preuve des actes de concurrence déloyale invoqués, il lui appartient néanmoins de fournir des éléments à ce sujet caractérisant un motif légitime justifiant de recourir à ces dispositions et de porter atteinte au secret des affaires. Le principe de la liberté du commerce autorise le commerçant à gérer à sa convenance son entreprise sur un marché concurrentiel et lui confère la liberté d'attirer la clientèle, y compris de ses concurrents, sans engager sa responsabilité, sous réserve du respect des usages loyaux du commerce. Ainsi, est constitutif de concurrence déloyale le fait de détourner la clientèle d'un concurrent, de nuire à ses intérêts par des moyens contraires à la loi, aux usages ou à l'honnêteté professionnelle. L'activité déclarée par la société SOLUSTEP auprès du registre du commerce et des sociétés porte sur l'achat, la fabrication, la vente, l'importation, l'exportation de tous produits chimiques, matériels, fournitures et services s'y rapportant, et en particulier la production et la commercialisation de solutions nutritionnelles pour stations d'épuration d'eaux usées. L'activité figurant au titre de l'immatriculation de la société AQUAPAP est quant à elle, l'achat, la vente, la représentation, le conseil afférent à tous produits consommables et matériels à destination des industriels, professionnels, collectivités et éventuellement particuliers. Sur son site internet, sa présentation propose des produits chimiques (agents de blanchiment, nettoyants industriels, lubrifiants, fluides d'usinage, traitement de surface, anti-tartre, anti-mousse, fongicides, ignifuges) et des services dans les domaines des eaux industrielles, du process, du traitement de surface, du développement et de l'assistance technique. Si l'activité ainsi décrite ne cible pas spécifiquement la production et la commercialisation de nourriture pour les bactéries en station d'épuration, la société AQUAPAP reconnaît la fourniture de tels produits à un client commun à la société SOLUSTEP, la société CASCADES. Si les fiches techniques démontrent que ces produits sont élaborés à partir des mêmes composants (azote et phosphore), elles révèlent aussi que leur formulation est différente, le ratio de leur mélange étant de 5 chez AQUAPAP et 2 chez SOLUSTEP. Cette dernière ne justifie au demeurant d'aucune protection de ses produits de nature à interdire la production de produits similaires et le document technique sur lequel elle fonde son argumentation, daté du mois de décembre 2014, est postérieur au départ de M. O... de la société SOLUSTEP sans qu'il soit astreint au respect d'une clause de non concurrence, la mention « version n° 2 » portée sur ce document ne permettant pas de déduire que la date de la version n° 1 serait, elle, antérieure à ce départ. Il ressort d'échanges de courriels produits par la société AQUAPAP, que son dirigeant, M. I..., se trouvait déjà en relation d'affaires avec la société CASCADES avant la société SOLUSTEP et que c'est lui qui a mis en relation les sociétés CASCADES et DUPUY, actionnaire de SOLUSTEP, en 2006, par l'intermédiaire de M. O.... Dès lors, il n'apparaît pas que ce client ait été détourné par la société AQUAPAP au titre d'une suspicion de concurrence déloyale. Il sera au surplus relevé que le siège social de la société SOLUSTEP est situé dans les Ardennes, que la société AQUAPAP a son siège social en Isère et que la société CASCADES est implantée dans la même zone géographique à [...] en Savoie. Alors que la société SOLUSTEP prétend avoir perdu son client CASCADES, le schéma du flux d'affaires entre les deux sociétés, visé par le commissaire aux comptes, permet de constater que l'arrêt des relations ne serait intervenu qu'à compter du mois de décembre 2014, soit postérieurement au départ de M. O..., mais qu'entre décembre 2010 et décembre 2014, elles se sont poursuivies selon un volume d'affaires régulier. La société SOLUSTEP qui invoque les relations commerciales concurrentes établies par la société AQUAPAP avec dix autres de ses clients, n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations alors que l'expert-comptable de la société AQUAPAP indique n'avoir relevé aucune transaction avec ces sociétés. Il n'est pas contesté et ressort des pièces produites que pendant le temps de sa relation de travail salarié avec la société SOLUSTEP, M. O..., cadre dirigeant de cette dernière, est devenu associé au sein de la société AQUAPAP dans le courant du dernier trimestre 2010 et a également fourni à cette dernière des prestations de travail entre 2011 et 2015. Les notes d'honoraires et les factures produites à ce titre font état pour les premières d'apport d'affaires et de support technique sur produits chimiques, et pour les secondes de recherche de commettants pour des produits de process minéral et organique en phase aqueuse, de recherche de fournisseurs d'oxyde de titane et de recherche d'un additif pour le blanchiment de la pâte à papier. Compte tenu du large domaine d'activité de la société AQUAPAP, ces seuls éléments n'indiquent pas que l'activité parallèle de M. O... a porté atteinte aux intérêts de la société SOLUSTEP, en se situant dans un domaine directement concurrent au sien.

La société SOLUSTEP ne fournit aucun élément, notamment comptable, permettant de constater que sa propre activité a connu entre septembre 2010 et octobre 2014 des vicissitudes pouvant être reliées non seulement à l'activité déloyale imputée à M. O..., dont il sera relevé qu'il était tenu à une obligation de loyauté comme membre de son conseil d'administration, mais surtout à l'exploitation déloyale qu'en aurait faite la société AQUAPAP. Ainsi, il n'existe pas d'éléments suffisants de nature à étayer des soupçons sérieux de concurrence déloyale imputable à la société AQUAPAP et à M. O... justifiant qu'il soit porté atteinte au secret des affaires de la première par les mesures d'investigation sollicitées. En conséquence, la décision du premier juge sera confirmée ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Sur la demande visant AOUAPAP et M O... : Attendu que la demande est rédigée en termes très généraux (se faire remettre toute pièce que l'expert jugera utile, prendre copie des factures, des devis et commandes de trois clients dénommés et aussi des ventes et devis d'un produit concurrent AQP N) ; que cette demande générale se heurte donc à l'exigence de précision et de limitation, et surtout à celui du secret des affaires, la production des pièces conduisant inéluctablement à la communication des formules, des prix et marges ; qu'il n'est par ailleurs pas excipé ou justifié en plus de risque de déperdition de preuves en la matière. Qu'en l'espèce la société AQUAPAP fait légalement mais marginalement concurrence à la société SOLUSTEP depuis 2010 ; qu'elle a le droit légitime de créer un produit en concurrence à ceux de la société SOLUSTEP ; qu'un client comme la société CASCADES a le droit de diversifier son approvisionnement et que nul ne peut prétendre, à moins d'avoir signé un contrat d'exclusivité, en avoir le monopole ; que l'activité de prestations de Monsieur O... auprès de la société AQUAPAP, au regard des pièces produites, n'était pas en concurrence envers son activité auprès de la société SOLUSTEP, et ce dernier n'y a d'ailleurs jamais trouvé à redire et ne l'a jamais sanctionnée ce qui était en son pouvoir ; que Monsieur O... a cédé ses parts dans la société AQUAPAP à la création de la société N BIO-SOLUTIONS, coupant ainsi court à toute éventuelle suspicion de concurrence déloyale postérieure. En conséquence le juge des référés ne peut que constater que les critères stricts de l'article 145 du code de procédure civile ne sont pas réunis et qu'il convient de débouter la société SOLUSTEP de ses demandes. Attendu que la nature de l'affaire permet de laisser à chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles et de laisser les dépens à charge de la société SOLUSTEP ;

1° ALORS QUE le requérant à une mesure d'instruction avant tout procès ne peut se voir reprocher de ne pas avoir rapporté la preuve des faits que la mesure d'expertise projetée a pour objet d'établir ; qu'en ayant débouté la société Solustep de sa demande visant à l'organisation d'une mesure d'expertise destinée à établir les actes de concurrence déloyale que la société Aquapap et M. O... lui avaient faits, au motif que la société Solustep n'établissaient pas ces actes de concurrence déloyale, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

2° ALORS QUE de simples indices de concurrence déloyale justifient l'organisation d'une mesure d'expertise avant tout procès ; qu'ayant relevé que les sociétés Aquapap et Solustep fournissaient toutes deux des nutriments de bactéries de station d'épuration à la société Cascades, que celle-ci avait cessé toute relation d'affaires avec l'exposante juste après la démission de M. O... en octobre 2014, lequel était, entre 2010 et 2014, à la fois salarié et administrateur de la société Solustep, sans en déduire une suspicion de concurrence déloyale de nature à justifier l'organisation d'une mesure d'expertise avant tout procès, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

3° ALORS QUE le cadre dirigeant d'une société, titulaire en sus d'un mandat social, est tenu d'un devoir de loyauté absolu qui lui interdit de travailler ou de développer une activité concurrente dans une autre société ; qu'en ayant écarté tout acte de concurrence déloyale imputable à M. O... entre 2010 et 2014, après avoir constaté qu'il cumulait les fonctions d'administrateur et de salarié de la société Solustep pendant cette période et qu'il avait pourtant, pendant le même temps, développé et travaillé pour la société Aquapap, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

4° ALORS QUE l'interruption de toute activité commerciale avec un ancien client, juste après le départ d'un salarié de l'entreprise, constitue un indice de concurrence déloyale ; qu'en ayant écarté tout fait de concurrence déloyale à la charge de M. O..., au motif que l'arrêt des relations commerciales entre les sociétés Solustep et Cascades s'était produit en décembre 2014, soit juste après la démission de M. O..., la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

5° ALORS QUE le secret des affaires ne constitue pas un obstacle à l'organisation d'une mesure d'instruction in futurum ; qu'en ayant, par adoption des motifs du premier juge, jugé que la mesure d'expertise sollicitée portait atteinte au secret des affaires et était insuffisamment limitée, quand, en appel, la société Solustep avait sollicité la communication des documents strictement nécessaires à la preuve des actes de concurrence déloyale imputés à la société Aquapap et à M. O..., la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

6° ALORS QUE le risque de dépérissement des preuves ne constitue pas une condition du jeu de l'article 145 du code de procédure civile ; qu'en ayant retenu à la charge de l'exposante, par adoption des motifs du premier juge, le fait de ne pas avoir allégué un risque de dépérissement des preuves

à l'appui de sa demande de mesure d'instruction avant tout procès, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-22551
Date de la décision : 27/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 21 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 jan. 2021, pourvoi n°18-22551


Composition du Tribunal
Président : Mme Darbois (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Boulloche, SCP L. Poulet-Odent

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:18.22551
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