LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CH.B
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 janvier 2021
Rejet
M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 55 F-D
Pourvoi n° V 19-15.274
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 JANVIER 2021
M. C... O..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 19-15.274 contre l'arrêt rendu le 14 février 2019 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. D... S..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire judiciaire de la société Château des Aveylans,
2°/ à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, société coopérative à capital et personnel variables, dont le siège est [...] ,
3°/ à la société Château des Aveylans, société civile d'exploitation agricole, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fevre, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. O..., de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fevre, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 14 février 2019), à l'occasion de l'acquisition d'un domaine agricole, la SCEA Château des Aveylans ayant pour gérant M. O..., a ouvert un compte courant dans les livres de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque).
2. En raison d'un solde débiteur, la banque a clôturé ce compte et a assigné la société débitrice en paiement.
3. La société Château des Aveylans a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires. M. S..., désigné en qualité de liquidateur, a été assigné par la banque. M. O... est intervenu volontairement à l'instance pour obtenir, à titre principal, l'annulation d'un prêt de 451 000 euros consenti par la banque à la société en raison d'un défaut d'autorisation préalable du conseil d'administration de l'établissement de crédit.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. M. O... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son intervention volontaire, alors :
« 1°/ que l'intervention est recevable dès lors qu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ; que pour déclarer irrecevable l'intervention volontaire de M. O... tendant à faire prononcer la nullité du prêt consenti le 2 septembre 2003 par la caisse à la société Château des Aveylans, l'arrêt attaqué retient que "la convention du 2 septembre 2003 portant sur une acquisition par la société en liquidation judiciaire de matériel végétal, de droits de plantation, de matériel de cave et de culture, grâce à un financement par prêt du crédit agricole n'a aucun lien avec les prétentions originaires" ; qu'en subordonnant ainsi la recevabilité de l'intervention à la condition qu'elle présente "un lien avec les prétentions originaires", quand il suffisait qu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, la cour d'appel a ajouté à l'article 325 du code de procédure civile une condition qui n'y figure pas, et l'a partant violé par refus d'application ;
2°/ que l'intervention est recevable dès lors qu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ; que pour dire que "la convention du 2 septembre 2003 portant sur une acquisition par la société en liquidation judiciaire de matériel végétal, de droits de plantation, de matériel de cave et de culture, grâce à un financement par prêt du crédit agricole n'a aucun lien avec les prétentions originaires", l'arrêt attaqué se borne à relever que "l'action introduite par la banque concerne uniquement le solde débiteur du compte courant de la société Château des Aveylans, non pas le paiement de sommes dues au titre d'un prêt ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que le solde du prêt du 2 septembre 2003 avait été inscrit au débit du compte courant de la société Château des Aveylans, la cour d'appel, qui s'est fondée sur un motif radicalement inopérant, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 325 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Il ne résulte ni de l'arrêt, ni de ses conclusions que M. O... ait soutenu devant la cour d'appel que son intervention volontaire se rattachait aux prétentions des parties par un lien suffisant tenant au fait que le solde du prêt dont il demandait l'annulation avait été inscrit au débit du compte courant de la société débitrice, de sorte que le moyen est nouveau. Mélangé de fait et de droit, il n'est donc pas recevable.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. O... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. O... et le condamne à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. O....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'intervention volontaire de M. O... tendant à faire prononcer la nullité du prêt de 451 000 euros irrecevable ;
Aux motifs que « M. O... fait valoir qu'il est recevable en sa qualité d'associé personnellement tenu au passif de poursuivre la nullité du prêt. La banque objecte que l'article 1857 du code civil ne rend pas cette intervention volontaire recevable. S'il est exact que les associés ne peuvent se prévaloir de l'obligation aux dettes sociales instituée au profit des tiers, il est par contre certain que la déclaration de créance au passif, et son admission, dispensent le créancier de justifier des vaines poursuites de la société débitrice, exigées par l'article 1858 du code civil, ce qui donne à l'associé intérêt à agir. Il reste cependant que l'intervention volontaire doit se rattacher par un lien suffisant aux prétentions des parties. Or, l'action introduite par la banque concerne uniquement le solde débiteur du compte courant de la s.c.e.a. « château des Aveylans », non pas le paiement de sommes dues au titre d'un prêt. Dès lors, la convention du 2 septembre 2003 portant sur une acquisition par la société en liquidation judiciaire de matériel végétal, de droits de plantation, de matériel de cave et de culture, grâce à un financement par prêt du crédit agricole n'a aucun lien avec les prétentions originaires et l'intervention volontaire de M. O... tendant à faire prononcer la nullité de ce prêt est irrecevable » ;
Alors, d'une part, que l'intervention est recevable dès lors qu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ; que pour déclarer irrecevable l'intervention volontaire de M. O... tendant à faire prononcer la nullité du prêt consenti le 2 septembre 2003 par la CRCAM du Languedoc à la société Château des Aveylans, l'arrêt attaqué retient que « la convention du 2 septembre 2003 portant sur une acquisition par la société en liquidation judiciaire de matériel végétal, de droits de plantation, de matériel de cave et de culture, grâce à un financement par prêt du crédit agricole n'a aucun lien avec les prétentions originaires » (arrêt p. 5, § 7) ; qu'en subordonnant ainsi la recevabilité de l'intervention à la condition qu'elle présente « un lien avec les prétentions originaires », quand il suffisait qu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, la cour d'appel a ajouté à l'article 325 du code de procédure civile une condition qui n'y figure pas, et l'a partant violé par refus d'application ;
Alors, d'autre part, et en tout état de cause, que l'intervention est recevable dès lors qu'elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant ; que pour dire que « la convention du 2 septembre 2003 portant sur une acquisition par la société en liquidation judiciaire de matériel végétal, de droits de plantation, de matériel de cave et de culture, grâce à un financement par prêt du crédit agricole n'a aucun lien avec les prétentions originaires », l'arrêt attaqué se borne à relever que « l'action introduite par la banque concerne uniquement le solde débiteur du compte courant de la société château des Aveylans, non pas le paiement de sommes dues au titre d'un prêt (arrêt p. 5, § 7) ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que le solde du prêt du 2 septembre 2003 avait été inscrit au débit du compte courant de la société Château des Ayvelans, la cour d'appel, qui s'est fondée sur un motif radicalement inopérant, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 325 du code de procédure civile.