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20/01/2021 | FRANCE | N°18-14767

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 janvier 2021, 18-14767


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2021

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 52 F-D

Pourvoi n° Y 18-14.767

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 JANVIER 2021

1°/ M. J...

B...,

2°/ Mme Q... S..., épouse B...,

domiciliés tous deux [...], [...],

ont formé le pourvoi n° Y 18-14.767 contre l'arrêt rendu le 23 novembre...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2021

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 52 F-D

Pourvoi n° Y 18-14.767

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 20 JANVIER 2021

1°/ M. J... B...,

2°/ Mme Q... S..., épouse B...,

domiciliés tous deux [...], [...],

ont formé le pourvoi n° Y 18-14.767 contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2017 par la cour d'appel de Chambéry (2e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes, dont le siège est [...], [...], venant aux droits et obligations de la Banque populaire des Alpes, défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fevre, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. et Mme B..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes, après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fevre, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 23 novembre 2017), M. et Mme B... se sont, chacun, rendu caution, le 4 avril 2008, de tous engagements souscrits par la société Avernet France, dont M. B... est le gérant, dans la limite de 20 000 euros au profit de la société Banque populaire des Alpes, devenue Banque populaire Auvergne Rhône Alpes (la banque).

2. Le 12 mars 2009, M. B... s'est rendu caution d'un prêt de 55 000 euros consenti par la banque à la société dans la limite de 31 625 euros.

3. La société Avernet France ayant été mise en redressement, puis en liquidation judiciaires, la banque a assigné en paiement M. et Mme B... qui ont recherché sa responsabilité.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième, quatrième et cinquième branches

Enoncé du moyen

4. M. et Mme B... font grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande reconventionnelle fondée sur une faute de la banque lors de l'octroi des prêts litigieux et de les condamner, en leur qualité de caution, à payer à la banque, s'agissant personnellement de M. B..., la somme en principal de 22 431,77 euros, et, solidairement, la somme en principal de 20 000 euros, alors :

« 2°/ que le banquier dispensateur de crédit est tenu d'une obligation d'information et de conseil tant à l'égard de l'emprunteur que de la caution ; que si l'engagement de caution est souscrit par une personne non avertie, la banque est tenue de la mettre en garde contre le risque d'un endettement excessif ; qu'en se fondant, pour écarter la responsabilité de la banque, sur les circonstances inopérantes retenues par des motifs non contredits que « la caution demandée à M. B... a engagé le dirigeant même de la société bénéficiaire du prêt et que ce dernier était parfaitement au courant de la situation de la société » et que « la garantie Oseo a été demandée et obtenue par la banque au moment de la signature du prêt de telle sorte qu'un organisme supplémentaire a pu analyser la situation de la société Avernet France avant de s'engager », ce qui n'était pas de nature à exonérer la banque de son obligation d'information, de conseil et de mise en garde à l'égard de la caution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

4°/ que le seul statut de dirigeant de la société cautionnée ne suffit pas à caractériser la qualité de caution avertie et donc à exclure le devoir de mise en garde qui pèse sur les établissements de crédit au bénéfice des cautions non averties à raison des risques d'endettement nés de l'octroi du prêt ; qu'en se bornant à relever, par motifs non contredits, que les époux B... « étaient les mieux placés, comme gérant et comme comptable, pour apprécier le bien-fondé de remettre de l'argent frais dans la trésorerie de la société Avernet France, sans s'assurer qu'ils présentaient les compétences nécessaires pour apprécier la portée des obligations contractées par rapport à leurs capacités de remboursement, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à établir sa qualité de caution avertie et n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

5°/ que le défaut de réponse à conclusion équivaut à un défaut de motifs ; que les exposants faisaient valoir, en cause d'appel leur caractère profane et la faute de la banque dans l'octroi des contrats de prêts et des cautionnement successifs en raison d'un défaut de mise en garde sur cette « situation irrémédiablement compromise » ; qu'en s'abstenant purement et simplement de répondre à ce moyen fondé sur le devoir de mise en garde incombant à la banque en raison du risque d'endettement excessif auquel ils s'exposaient, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Il ne résulte ni de l'arrêt, ni de leurs conclusions que M. et Mme B..., qui se sont bornés à rechercher la responsabilité de la banque pour avoir accordé à la société Avernet France des crédits fautifs, aient soutenu que la banque avait manqué à leur égard à des obligations d'information, de mise en garde ou de conseil.

6. Le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, dès lors que les manquements invoqués par les deuxième, quatrième et cinquième branches constituent des fautes distinctes de celles invoquées devant la cour d'appel, n'est donc pas recevable.

Et sur le moyen pris en ses première et troisième branches

Enoncé du moyen

7. M. et Mme B... font le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que le banquier dispensateur de crédit engage sa responsabilité lorsqu'il accorde à une société un prêt dont il connaît, en raison de multiples apports en trésorerie antérieurs, la situation financièrement périlleuse ; qu'en se bornant à affirmer par des motifs adoptés, pour écarter toute faute de la banque, qu'en « ouvrant une procédure de redressement judiciaire moins de trois mois plus tard puis en arrêtant un plan de redressement un an après, le tribunal de commerce de céans a pu lui-même estimer plausible un redressement de l'entreprise », sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas commis une faute en accordant des prêts successifs ayant pour seule finalité de couvrir un découvert intarissable, de sorte que la banque avait accordé un crédit ruineux et encourait une responsabilité de ce chef, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ que le banquier dispensateur de crédit engage sa responsabilité lorsqu'il accorde à une société un prêt dont il connaît, en raison de multiples apports en trésorerie antérieurs, la situation financièrement périlleuse ; qu'en se bornant à affirmer par des motifs adoptés, pour écarter toute faute de la banque, qu'en « ouvrant une procédure de redressement judiciaire moins de trois mois plus tard puis en arrêtant un plan de redressement un an après, le tribunal de commerce de céans a pu lui-même estimer plausible un redressement de l'entreprise », sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas commis une faute en accordant des prêts successifs ayant pour seule finalité de couvrir un découvert intarissable, de sorte que la banque avait accordé un crédit ruineux et encourait une responsabilité de ce chef, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la cour

8. Dans leurs conclusions d'appel, M. et Mme B..., s'ils faisaient valoir, pour retenir la responsabilité de la banque, que celle-ci avait consenti à la société Avernet France des crédits fautifs, soit parce que la situation de cette société était déjà irrémédiablement compromise au moment de leur octroi et que la banque ne pouvait l'ignorer, soit parce que les crédits accordés étaient ruineux, n'invoquaient pas, au préalable, l'existence d'une fraude ou d'une immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou encore une prise de garanties disproportionnées, seuls cas dans lesquels l'article L. 650-1 du code de commerce permet à une caution d'engager la responsabilité d'un établissement de crédit du fait des concours consentis, lorsqu'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires a été ensuite ouverte, comme en l'espèce. Ils ne peuvent, dès lors, se borner à reprocher à la cour d'appel d'avoir écarté toute faute dans l'octroi des crédits à la société Avernet France, l'existence d'une telle faute, serait-elle établie, n'étant pas suffisante pour engager la responsabilité de la banque.

9. Le moyen est donc inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme B... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme B... et les condamne à payer à la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. et Mme B....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté les parties de leur demande reconventionnelle fondée sur une faute de la banque lors de l'octroi des prêts litigieux et de les avoir, en conséquence, condamnés en leur qualité de caution, à payer à la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES, s'agissant personnellement de M. J... B... à la somme de 22 431,77 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 08 avril 2013, avec capitalisation des intérêts par années entières ; et, solidairement, à la somme de 20 000 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 08 avril 2013 ainsi qu'à la somme de 500 euros à titre d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

AUX MOTIFS QUE « Sur le devoir d'information de la Banque ; L'article L. 313-22 du Code monétaire et financier impose aux établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, fiais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement ; Le défaut d'accomplissement de la formalité emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information ; Selon une jurisprudence constante, au demeurant invoquée par Monsieur B... au soutien de sa demande (Cass. Com. 9 février 2016 n° 14-22.179 n° 145 FS - P+B), il doit en premier lieu être constaté que la caution prétend ne pas avoir reçu les lettres d'information annuelle qui doivent lui être adressées ; cette condition préalable est remplie puisque Monsieur B... indique dans ses écritures qu'il a découvert cette lettre dans le cadre de l'instance en appel ; il fait valoir que la Lyonnaise de Banque n'apporte pas la preuve de l'avoir dûment informé par l'envoi de ladite information ; il développe le moyen selon lequel il n'est aucunement démontré que le courrier daté du 20 février 2009, versé au débat, ait été envoyé et réceptionné ; La banque produit un courrier du 20 février 2009, reprenant le détail des engagements au 31 décembre 2008 : - caution tous engagements n° 111909 signé le 4 avril 2008 pour un montant de 20.000 €, - caution de prêt n° 094060 signée le 5 décembre 2005 pour un montant de 14.000 €, - caution de prêt n° 098350 signée le 30 juin 2006 pour un montant de 36.500 € ; Ce document isolé, et non corroboré par un autre élément de preuve d'expédition ou de réception, ne suffit pas à démontrer que la Banque populaire des Alpes (aujourd'hui dénommée Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes) a satisfait à son obligation d'information. Dès lors, l'établissement bancaire sera déchu de tous intérêts au titre du découvert bancaire, des prêts de 14.000 € et de 36.500 €, et du prêt de 55.000 € ; Sur la justification de la créance de la Banque : La Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes justifie au dossier du montant de sa créance : - au titre du solde débiteur du compte courant pour 24.994,42 €, - au titre du prêt du 13 mars 2009 d'un montant initial de 55.000 € pour 52.955,48 €, outre intérêts au taux contractuel, - au titre du prêt du 5 décembre 2005 d'un montant initial de 14.000 € pour 2.165,74 €, outre intérêts au taux contractuel, - au titre du prêt du 30 juin 2006 d'un montant initial de 36.500 € pour 2.196,04 €, outre intérêts au taux contractuel ; Sur la procédure abusive : Le droit d'agir en justice ne dégénère en abus que s'il procède d'une erreur grossière équipollente au dol ou s'il révèle une intention de nuire, ce qui n'est pas démontré en l'espèce ; Il y a donc lieu de rejeter la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive de Monsieur et Madame B... à l'égard de la Banque Populaire des Alpes ; Monsieur et Madame B... ne démontrent pas qu'ils aient eu à subir un préjudice autre que celui pour lequel ils ont formé leur demande principale ; Il n'est pas plus démontré en quoi la Banque Populaire des Alpes aurait intentionnellement cherché à nuire aux époux B... ; En conséquence, Monsieur et Madame B... seront déboutés de ce chef de demande ; Sur les frais irrépétibles : L'équité justifie la condamnation de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes à la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi que sa condamnation aux dépens, dont distraction au profit de Maître Grolée, Avocat, au sens de l'article 699 du Code de procédure civile ».

ET AUX MOTIFS REPUTÉS ADOPTÉS QUE « Sur la prescription de l'action de la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES résultant de l'acte d'engagement de caution solidaire et omnibus du 4 avril 2008 : Attendu qu'un solde débiteur sur un compte ayant obtenu tacitement l'autorisation de découvert n'est exigible que s'il est dénoncé par le prêteur ; Attendu que, le cautionnement étant accessoire à un engagement principal, la prescription ne peut courir qu'à compter du moment où la créance en compte courant est devenue exigible, soit au jour de l'ouverture de la liquidation judiciaire, à savoir le 19 mars 2013 ; Attendu que, l'assignation étant du 2 septembre 2013, il convient de dire que la prescription de 5 ans est loin d'être acquise à cette date ; Attendu qu'il convient donc de déclarer recevable la demande de la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES sollicitant la condamnation des époux B..., au titre de leur cautionnement du 4 avril 2008, s'appliquant au découvert en compte courant de la SARL AVERNET FRANCE ; Sur le respect des dispositions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier et de l'article 47 II alinéa 3 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 : Sur la demande au titre du cautionnement de 20.000 € consentie par les époux B... s'appliquant au découvert en compte-courant : Attendu que la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES justifie avoir adressé le 20 février 2009 à chacun des époux B... un courrier leur rappelant leur cautionnement de 20.000 € du 4 avril 2008 et leur détaillant l'ensemble des engagements de la SARL AVERNET France ; Attendu que la jurisprudence admet qu'en envoi par courrier simple est suffisant et qu'il s'agit d'envois annuels et systématiques ; Attendu que pour l'année 2010, il n'est pas justifié de l'envoi de cette information mais que cela ne conduirait qu'à expurger les intérêts prélevés sur le compte le 07 avril 2009, soit la somme de 906,09 €, et ne permettra pas de ramener le solde du compte-courant au jour du redressement judiciaire (24 994,42 euros) à un montant moindre que celui de leur cautionnement ; Attendu qu'il est de jurisprudence constante que l'occurrence d'un découvert bancaire ne peut être assimilé à un incident de paiement puisque l'opération faisant naître le découvert ne fait l'objet d'aucun rejet, ni incident donnant lieu à régularisation ; que suite au redressement judiciaire de la SARL AVERNET France (8 juin 2009), les époux B... ont été informés de la défaillance de cette société, dès le 07 juillet 2009 ; Sur la demande au titre du cautionnement consenti par M. J... B... s'appliquant au prêt professionnel n° 07088525 en date du 12 mars 2009 : Attendu que la demande au titre de ce cautionnement s'applique concernant la créance principale à 50 % du capital restant dû, soit la somme de 22 431,77 € au 19 mars 2013 ; Attendu que la BANQUE POPULAIRE DES ALPES ne justifie pas avoir satisfait à son obligation d'information et que dès lors, seuls les intérêts au taux légal sur cette somme pourront s'appliquer à compter du 08 avril 2013, date de réception de la mise en demeure ; Sur la responsabilité de la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES à l'égard de AA. J... B... lors de l'attribution du prêt de 55 000 € à la Société AVERNET France ; Attendu que le prêt de consolidation d'un montant de 55 000 €, accordé le 12 mars 2009, était destiné à couvrir un découvert bancaire de la Société AVERNET FRANCE qui devenait « structurel » ; Attendu que, au vu des relevés de compte fournis par note en délibéré, cet apport en trésorerie a permis à la Société AVERNET FRANCE très rapidement de bénéficier d'un nouveau découvert et que le gérant, M. J... B..., a rapidement utilisé cette facilité ; Attendu que l'analyse des relevés fournis par note en délibéré ne permet pas de relever d'incidents de paiement non régularisés entre le début de l'année 2009 et le 12 mars de la même année ; Attendu que les époux B... ne font pas la preuve de ce que la situation de la Société AVERNET FRANCE était irrémédiablement compromise au moment de la consolidation de sa situation financière, alors qu'ils étaient les mieux placés, comme gérant et comme comptable ; pour apprécier le bien-fondé de remettre de l'argent frais dans la trésorerie de la Société AVERNET FRANCE ; Attendu que la caution demandée à M. J... B... a engagé le dirigeant même de la société bénéficiaire du prêt et que ce dernier était parfaitement au courant de la situation de sa société ; Attendu que la garantie OSEO a été demandée et obtenue par la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES au moment de la signature du prêt de telle sorte qu'un organisme supplémentaire a pu analyser la situation de la société AVERNET FRANCE avant de s'engager ; Attendu que, en ouvrant une procédure de redressement judiciaire moins de trois mois plus tard puis en arrêtant un plan de redressement un an après, le tribunal de commerce de céans a pu lui-même estimer plausible un redressement de l'entreprise ; Attendu qu'il convient d'écarter la qualification d'irrémédiablement compromise pour la situation de la Société AVERNET FRANCE lors de la signature du prêt en cause ; Attendu qu'il convient donc de débouter les époux B... : - de leur demande reconventionnelle fondée sur une éventuelle faute de LA SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES - et, par conséquent, de leur demande d'indemnisation au titre de la procédure abusive ; Sur le montant des condamnations : Attendu qu'il résulte des motivations précédentes et après vérification des décomptes produits, que les demandes de la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES doivent être déclarées bien fondées : A l'égard de M. J... B... et Mme Q... B..., concernant les cautionnements du 4 avril 2008, s'appliquant au découvert en compte-courant de la Société AVERNET FRANCE : - de la somme de 20.000 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 08 avril 2013, date de réception de la mise en demeure, A l'égard de M. J... B..., concernant le cautionnement 12 mars 2009, s'appliquant à 50 % de l'encours restant dû du prêt de 55.000 euros consenti à la même date à la société AVERNET France : de la somme de 22.431,77 € outre les intérêts au taux légal à compter du 08 avril 2013, date de réception de la mise en demeure ; Sur les autres demandes : Attendu qu'il est équitable de condamner les époux B... solidairement à verser à la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES la somme 500 € à titre d'indemnité en application des dispositions de l'article 700 du CPC ; Attendu que la prétendue résistance abusive des époux B... n'est pas caractérisée ; qu'il convient de débouter la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES de cette demande ; Attendu qu'il convient d'ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, cette mesure étant nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire ; Que les dépens doivent être laissés à la charge des époux B... qui perdent leur procès ».

1°) ALORS, de première part, QUE le banquier dispensateur de crédit engage sa responsabilité lorsqu'il accorde à une société un prêt dont il connaît, en raison de multiples apports en trésorerie antérieurs, la situation financièrement périlleuse ; qu'en écartant toute responsabilité de la banque cependant qu'elle retient, par motifs adoptés, que les contrats de prêts étaient destinés à « couvrir un découvert bancaire de la Société AVERNET France qui devenait "structurel" » (jugement, p. 5 § 13), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ces constatations, violant ainsi l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2°) ALORS, de deuxième part, QUE le banquier dispensateur de crédit est tenu d'une obligation d'information et de conseil tant à l'égard de l'emprunteur que de la caution ; que si l'engagement de caution est souscrit par une personne non avertie, la banque est tenue de la mettre en garde contre le risque d'un endettement excessif ; qu'en se fondant, pour écarter la responsabilité de la banque, sur les circonstances inopérantes retenues par des motifs non contredits que « la caution demandée à M. J... B... a engagé le dirigeant même de la société bénéficiaire du prêt et que ce dernier était parfaitement au courant de la situation de la société » (jugement p. 6 § 2) et que « la garantie OSEO a été demandée et obtenue par la SA BANQUE POPULAIRE DES ALPES au moment de la signature du prêt de telle sorte qu'un organisme supplémentaire a pu analyser la situation de la société AVERNET France avant de s'engager » (jugement p. 6 § 3), ce qui n'était pas de nature à exonérer la banque de son obligation d'information, de conseil et de mise en garde à l'égard de la caution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°) ALORS, de troisième part, QUE le banquier dispensateur de crédit engage sa responsabilité lorsqu'il accorde à une société un prêt dont il connaît, en raison de multiples apports en trésorerie antérieurs, la situation financièrement périlleuse ; qu'en se bornant à affirmer par des motifs adoptés, pour écarter toute faute de la banque, qu'en « ouvrant une procédure de redressement judiciaire moins de trois mois plus tard puis en arrêtant un plan de redressement un an après, le tribunal de commerce de céans a pu lui-même estimer plausible un redressement de l'entreprise » (p. 6 § 4), sans rechercher, comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas commis une faute en accordant des prêts successifs ayant pour seule finalité de couvrir un découvert intarissable, de sorte que la banque avait accordé un crédit ruineux et encourait une responsabilité de ce chef, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

4°) ALORS, de quatrième part et en toute hypothèse, QUE le seul statut de dirigeant de la société cautionnée ne suffit pas à caractériser la qualité de caution avertie et donc à exclure le devoir de mise en garde qui pèse sur les établissements de crédit au bénéfice des cautions non averties à raison des risques d'endettement nés de l'octroi du prêt ; qu'en se bornant à relever, par motifs non contredits, que les époux B... « étaient les mieux placés, comme gérant et comme comptable, pour apprécier le bien-fondé de remettre de l'argent frais dans la trésorerie de la Société AVERNET FRANCE » (jugement, p. 6 § 1), sans s'assurer qu'ils présentaient les compétences nécessaires pour apprécier la portée des obligations contractées par rapport à leurs capacités de remboursement, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à établir sa qualité de caution avertie et n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

5°) ALORS, de cinquième part et en tout état de cause, QUE le défaut de réponse à conclusion équivaut à un défaut de motifs ; que les exposants faisaient valoir, en cause d'appel leur caractère profane et la faute de la banque dans l'octroi des contrats de prêts et des cautionnement successifs en raison d'un défaut de mise en garde sur cette « situation irrémédiablement compromise » ; qu'en s'abstenant purement et simplement de répondre à ce moyen fondé sur le devoir de mise en garde incombant à la banque en raison du risque d'endettement excessif auquel ils s'exposaient, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-14767
Date de la décision : 20/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 23 novembre 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 jan. 2021, pourvoi n°18-14767


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:18.14767
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