LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 6 janvier 2021
Cassation
Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1 F-D
Pourvoi n° B 18-26.109
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 JANVIER 2021
La société Simone teinturerie de luxe, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 18-26.109 contre l'arrêt rendu le 18 octobre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant à M. U... T..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Gilibert, conseiller, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de la société Simone teinturerie de luxe, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. T..., après débats en l'audience publique du 10 novembre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Gilibert, conseiller rapporteur, Mme Valéry, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué, (Paris, 18 octobre 2018), M. T... engagé en qualité de chauffeur livreur préparateur à compter du 21 juin 2006 par la société Simone teinturerie de luxe, a été licencié pour faute grave le 16 avril 2015.
2. Les parties ont conclu une transaction le 5 mai 2015. Contestant la validité de celle-ci, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.
Examen des moyens
Sur le premier moyen pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. L'employeur fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du protocole transactionnel du 5 mai 2015 pour défaut de concessions réciproques et de le condamner à payer au salarié diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail, alors « que l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte ; que le juge qui apprécie la validité de la transaction ne peut, sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à cette transaction, trancher le litige qu'elle avait pour objet de clore en se livrant à un examen des éléments de fait et plus particulièrement des éléments extrinsèques à la transaction et à la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de l'arrêt que le licenciement de M. T... avait été prononcé au motif d'une absence de pointage, ce qui constituait un comportement fautif dont le juge ne pouvait apprécier la réalité sans se livrer à un examen des faits ; que, dès lors, en retenant, pour prononcer la nullité de la transaction conclue par les parties, qu'il résultait des éléments produits que des difficultés de pointage avaient été soulevées par le salarié avant son licenciement et par courrier de l'inspection du travail et en conclure que "l'attribution au salarié d'une somme inférieure à celle à laquelle il aurait pu prétendre au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et aux jours de congés payés non pris, ne peut en toute hypothèse constituer de la part de l'employeur les concessions réelles et appréciables subordonnant la validité de l'accord transactionnel", ce qui revenait à apprécier le bien-fondé du motif invoqué dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles 2044 et 2052 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-47 du 18 novembre 2016. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 2044 et 2052 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 :
4. Il résulte de ces textes que l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte. Si, pour déterminer si ces concessions sont réelles, le juge peut restituer aux faits, tels qu'ils ont été énoncés par l'employeur dans la lettre de licenciement, leur véritable qualification, il ne peut, sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à la transaction, trancher le litige que cette transaction avait pour objet de clore en se livrant à l'examen des éléments de fait et de preuve.
5. Pour déclarer nulle la transaction et condamner l'employeur à payer diverses sommes à titre de rappels de salaires, congés payés, dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, indemnités de rupture et dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'attribution au salarié d'une somme inférieure à celle à laquelle il aurait pu prétendre au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et aux jours de congés payés non pris, ne peut constituer de la part de l'employeur les concessions réelles et appréciables subordonnant la validité de l'accord transactionnel.
6. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a apprécié le caractère dérisoire de la concession au regard du licenciement dont il ne lui appartenait pas de vérifier le bien-fondé, a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. T... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat aux Conseils, pour la société Simone teinturerie de luxe.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du protocole transactionnel du 5 mai 2015, signé entre la société Simone Teinturerie de Luxe et M. T..., pour défaut de concessions réciproques et en conséquence d'AVOIR condamné l'employeur à payer à M. T..., les sommes de 843,66 € à titre de rappel sur minimum conventionnels, 84,66 € de congés payés y afférents, 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, 4 525,24 € au titre des 66 jours de congés payés, 1 952,88 € au titre du rappel de salaires sur les mois d'octobre et novembre 2013, 195,28 € au titre des congés payés y afférents, 709 € au titre des congés payés déduits en octobre 2013, 1 500 € à titre de dommages intérêts pour défaut d'exécution loyale du contrat de travail, 3 178,50 € au titre de l'indemnité de préavis, 317,85 € au titre des congés payés y afférents, 2 807,67 € au titre de l'indemnité légale de licenciement, 15 800 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, d'AVOIR condamné M. T... à rembourser à l'employeur la somme de 7 992 € versée lors du protocole transactionnel du 5 mai 2015, d'AVOIR ordonné la compensation entre ces condamnations, d'AVOIR ordonné à l'employeur la remise des bulletins de paie et des documents rectifiés, d'AVOIR condamné l'employeur à rembourser aux organismes sociaux les indemnités versées à M. T... dans la limite de quatre mois, d'AVOIR condamné l'employeur au paiement des dépens d'appel ;
AUX MOTIFS QUE Sur la recevabilité des demandes et la validité du protocole d'accord ; Sur l'absence de concessions réciproques ; M. T... conteste également la validité de la transaction signée au motif d'une absence de concessions réciproques ; que la transaction litigieuse a été conclue entre les parties, alors que la première procédure initiée par M. T..., afin de solliciter le paiement de ses congés et rappels de salaires, était pendante devant le conseil de Prud'hommes, et alors que M. T... avait été licencié pour faute ; qu'aux termes du protocole d'accord transactionnel signé entre la société Simone et M. T..., les concessions faites par M. T... étaient la renonciation à contester tant le principe de son licenciement que le motif de celui-ci, et le désistement de la procédure engagée devant le conseil de prud'hommes pour rappel de salaires et paiement de congés payés, ce qu'il a fait par courrier du 20 juillet 2015 ; que la concession de la société Simone consistait à verser à titre forfaitaire la somme de 7 992 € à M. T..., représentant l'ensemble des préjudices invoqués par celui-ci toutes causes confondues, en paiement de tout préjudice lié à la perte de son emploi et de l'ensemble des avantages liés à l'exécution de son contrat de travail ; que les demandes présentées par M. T... lors de la saisine du conseil de prud'hommes le 22 janvier 2015, s'élevaient déjà à la somme totale de 11 461 €, alors que ces prétentions ne comprenaient pas les demandes relatives à son licenciement pour faute, qui s'est produit postérieurement à cette saisine ; qu'au regard des sommes sollicitées devant le conseil de prud'hommes par M. T... au titre des rappels de salaires et des 66 jours de congés non pris, et du fait que le licenciement du salarié pour faute grave reposait sur une absence de pointage, alors même que ces difficultés de pointage étaient soulevées par M. T... lui-même avant sa procédure de licenciement, et qu'un courrier de l'inspection du travail avait été adressé à ce sujet à l'employeur le 19 mars 2015, soit 10 jours avant la convocation à l'entretien préalable, il apparaît que l'attribution au salarié d'une somme inférieure à celle à laquelle il aurait pu prétendre au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et aux jours de congés payés non pris, ne peut en toute hypothèse constituer de la part de l'employeur les concessions réelles et appréciables subordonnant la validité de l'accord transactionnel ; que dans ces conditions, il y a lieu de déclarer nul et de nul effet le protocole transactionnel du 5 mai 2015, de le déclarer inopposable à M. T..., et de ce fait, de déclarer recevables les demandes de celui-ci formées devant la cour ;
Sur l'obligation de loyauté ; M. T... sollicite des dommages intérêts à l'encontre de son employeur, pour manquement à l'obligation de loyauté, au vu du déroulement de son contrat de travail depuis l'année 2012, date de l'arrivée du nouveau gérant, et des nombreux courriers envoyés à son employeur pour faire respecter ses droits ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. T... a envoyé de très nombreux courriers recommandés à son employeur pour demander le respect de ses droits à congés, les raisons des retenues sur salaires et faire part des problèmes de pointage, et qu'en réponse au courrier de l'inspection du travail du 19 mars 2015 sollicitant l'employeur pour les difficultés rencontrées par M. T..., celui-ci a été convoqué par courrier du 30 mars 2015 à un entretien préalable au licenciement pour non-respect du pointage ; qu'il apparaît donc que la société Simone n'a pas réagi aux demandes répétées de son salarié, celui-ci ayant dû solliciter à de très nombreuses reprises son employeur pour l'exécution de ses droits, notamment à congés ; qu'il y a donc lieu de lui accorder la somme de 1 500 € à titre de dommages intérêts pour défaut d'exécution loyale de son contrat de travail ;
Sur le paiement des congés payés ; que l'article L.3141-5 rappelle que sont considérées comme périodes de travail effectif pour la détermination de la durée du congé : 5° Les périodes, dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an, pendant lesquelles l'exécution du contrat de travail est suspendue pour cause d'accident du travail ou de maladie professionnelle ; que M. T... sollicite le paiement de 66 jours de congés au titre de la période de son accident du travail du 18 juillet 2012 au 11 octobre 2013 ; qu'il verse aux débats de nombreux courriers adressés au cours de l'année 2013 et 2014 à son employeur pour lui demander la prise de ces jours de congés, et le refus de l'employeur par courrier du 24 juillet 2014 de la prise de ces congés au cours du mois d'août 2014 ; que la société Simone indique que M. T... aurait pris ses jours de congés en octobre et décembre 2013, lors de son retour ; que toutefois, il résulte d'un courrier du 11 octobre 2013, et d'un courrier du 16 septembre 2014, adressés par M. T... à son employeur, que le salarié s'est présenté le 11 octobre 2013 dans l'entreprise, à la fin de son congé maladie, et qu'aucune visite médicale de reprise ne lui a été proposée ; qu'il a alors refusé de prendre des congés payés dans l'attente de cette visite son contrat de travail était toujours suspendu ; que la société Simone ne verse par ailleurs aucun décompte des jours de congés payés qu'aurait pris M. T... sur la période d'octobre 2013 à octobre 2014, malgré les demandes du conseil de M. T... par courrier du 10 octobre 2014 ; que l'employeur ne démontrant pas que M. T... a effectivement bénéficié de ses jours de congés, il y a lieu de condamner la société Simone à lui verser la somme de 4 525,24 € au titre des 66 jours de congés payés acquis durant son arrêt de travail lié à son accident de travail du 18 juillet 2012 au mois de juillet 2013 ;
Sur les salaires d'octobre et novembre 2013 ; M. T... sollicite le paiement des congés payés déduits par l'employeur sur les mois d'octobre et novembre 2013, en indiquant que la société Simone, qui connaissait la date de son retour d'arrêt de travail, n'a pas prévu de visite médicale de reprise, et l'a placé en congés dans l'attente de cette visite, alors que la carence dans la prise de rendez-vous ne peut lui être imputée ; que la société Simone soutient que M. T... était d'accord pour la prise de ces 30 jours de congés en octobre et novembre 2013 ; que toutefois, cet accord est démenti par les courriers adressés par M. T... à son employeur les 11 octobre 2013 et 16 septembre 2014, et rappelés ci-dessus ; quant aux retenues sur salaire, la société indique qu'il s'agit d'heures non travaillées par le salarié, sans en justifier, malgré les courriers de M. T... du 16 septembre 2014, et de son conseil du 10 octobre 2014, contestant ces retenues ; qu'il y a donc lieu de condamner la société Simone à lui verser la somme de 709 € au titre des congés payés imposés, et la somme de 1 952,88 € au titre du rappel de salaires sur les mois d'octobre et novembre 2013, outre la somme de 195,28 € au titre des congés payés y afférents ;
Sur le rappel de salaire minimum conventionnel ; M. T... sollicite l'application du salaire minimum en vertu de l'avenant 42 à l'annexe 1 de la convention collective, sa qualification de chauffeur livreur VL correspondant à un coefficient 150, alors que son contrat de travail mentionne un coefficient 130 ; que la société Simone soutient que la convention collective applicable est celle de la filière « pressing, laverie » et non celle de « la location de linge, blanchisserie », sans en justifier par aucune pièce ; que toutefois, le contrat de travail de M. T... mentionne la convention collective de la blanchisserie, et ses bulletins de paie celle de « la blanchisserie, laverie, nettoyage à sec, pressing », qui correspond en outre à l'activité principale de la société Simone ; que cette convention collective comporte un avenant 42 qui mentionne que les chauffeurs livreurs VL se voient appliquer un coefficient de 150, et que ce poste est de niveau III, coefficient 3.1 pour les agents de distribution ou de service VL ; qu'il n'est pas contestable que M. T..., dont le contrat de travail indique un coefficient de 130, s'est vu attribuer un salaire inférieur au salaire conventionnel minimum de sa catégorie ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement du conseil des prud'hommes sur ce point, et de condamner la société Simone à lui verser la somme de 843,66 € de ce chef, outre les congés payés y afférents à hauteur de 84,36 € ;
Sur le bien-fondé du licenciement ; la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 16 avril 2015 notifie à M. T... son licenciement pour faute grave au motif du non-respect de l'obligation de pointage ; que cette lettre précise : "en dépit de nos multiples rappels, vous avez persisté à ne pas pointer chaque matin, au moment de votre arrivée et chaque soir lors de votre départ. Cette procédure a été établie afin de permettre le bon fonctionnement de notre entreprise. Malgré l'avertissement que nous vous avons notifié le 25 février 2015 pour vous rappeler cette procédure, vous avez persisté à ne pas pointer" ; que M. T... conteste son licenciement pour faute grave fondé sur le non-respect de l'obligation de pointage ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que la société Simone a adressé à l'inspection du travail un courrier daté du 26 février 2015, qui indique que M. T... n'effectue qu'un seul pointage lors de son arrivée à l'atelier, mais aucun pointage le soir ; que ces propos sont en contradiction avec la lettre de licenciement, qui mentionne que M. T... ne pointe ni le matin, ni le soir ; que le courrier de M. T... du 9 mars 2015, adressé à son employeur, précise qu'il conteste l'avertissement donné le 26 février 2015, car il ne peut pointer le soir avant de quitter l'établissement pour partir en tournée, sinon ces heures ne seront pas payées, et parce que son collègue de tournée le dépose chez lui en fin de journée, sans repasser à l'atelier ; que la société Simone lui a répondu dans un courrier du 18 mars 2015, que les heures seraient comptées jusqu'à la livraison du dernier hôtel en se basant sur l'heure de départ plus 2h00, et qu'ensuite, il s'agit de temps de trajet ; que par courrier du 19 mars 2015, l'inspection du travail a indiqué à la société Simone que "la simple prise en compte des heures badgées entre l'arrivée à l'atelier et le départ en tournée ne refléterait pas la totalité des heures travaillées dans la journée, puisqu'une partie importante des heures est réalisée à l'extérieur de l'établissement. De plus, certains salariés ne reviennent pas à l'atelier après leur tournée. M T... déclare pour son cas, que le collègue avec qui il effectue la tournée, le dépose à son domicile à la fin de la tournée, avant de rentrer chez lui avec le véhicule de l'entreprise. Enfin, l'heure de la fin de la tournée n'est pas forcément compatible avec les horaires d'ouverture de l'atelier. Ainsi le salarié ne peut pas badger si sa tournée se termine après l'heure de fermeture de l'atelier. Vous voudrez bien répondre de manière précise à ces remarques" ; que sans répondre à l'inspection du travail, la société Simone a convoqué M. T... à un entretien préalable par courrier du 30 mars 2015, soit 10 jours après réception du courrier de l'inspection du travail ; que, par ailleurs, la société [...] ne justifie d'aucune pièce à l'appui de l'absence de pointage de son salarié, en terme de fréquences notamment ; qu'enfin, M. T... fournit une attestation de M. C... B..., salarié de la société Simone, en date du 9 décembre 2015, indiquant que le gérant de la société Simone exige que les salariés pointent à la sortie à 18h30 - 19h00 avant le départ pour faire la livraison du soir, sans tenir compte du nombre d'heures qu'il fallait pour effectuer et terminer cette tournée, ce qui amenait à terminer la tournée vers 21h30, voir plus ; qu'il y a donc lieu, au vu de l'ensemble de ces éléments, de constater que la faute grave invoquée n'est pas justifiée ; que par ailleurs, le motif du licenciement, soit l'absence de pointage, faisant l'objet d'une demande d'explication très récente par l'inspection du travail, et étant liée à l'organisation du travail mise en place par l'employeur, qui aboutissait à ne pas décompter l'ensemble des heures effectuées par les salariés en leur demandant de pointer avant de faire la tournée du soir, il y a lieu de constater que le licenciement de M. T... est également sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les demandes indemnitaires, qu'au vu de l'absence de cause réelle et sérieuse au licenciement, il y a lieu d'accorder à M. T... les sommes suivantes : - indemnité de préavis de 2 mois : 3 178,50 € - congés payés y afférents : 317,85 € ; - indemnité légale de licenciement: 2 807,67 € au vu de l'ancienneté de 8,8 années ; que par ailleurs, M. T... justifie qu'il était à l'ARE du 19 mai 2015 au 15 juin 2016 au moins, et qu'il n'a pu retrouver un emploi du fait de son âge (56 ans lors du licenciement), alors qu'il a 5 enfants, dont un mineur ; qu'il y a donc lieu de lui accorder une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 15 800 € ; qu'il y aura lieu de condamner M T... à rembourser la somme de 7 992 € versée lors du protocole transactionnel par la société Simone, et d'ordonner la compensation entre ces sommes ; qu'une somme de 1 500 € sera allouée à M. U... T... au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel ;
1°) ALORS QUE l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte ; que le juge qui apprécie la validité de la transaction ne peut, sans heurter l'autorité de chose jugée attachée à cette transaction, trancher le litige qu'elle avait pour objet de clore en se livrant à un examen des éléments de fait et plus particulièrement des éléments extrinsèques à la transaction et à la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de l'arrêt que le licenciement de M. T... avait été prononcé au motif d'une absence de pointage, ce qui constituait un comportement fautif dont le juge ne pouvait apprécier la réalité sans se livrer à un examen des faits ; que, dès lors, en retenant, pour prononcer la nullité de la transaction conclue par les parties, qu'il résultait des éléments produits que des difficultés de pointage avaient été soulevées par le salarié avant son licenciement et par courrier de l'inspection du travail et en conclure que « l'attribution au salarié d'une somme inférieure à celle à laquelle il aurait pu prétendre au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et aux jours de congés payés non pris, ne peut en toute hypothèse constituer de la part de l'employeur les concessions réelles et appréciables subordonnant la validité de l'accord transactionnel », ce qui revenait à apprécier le bien-fondé du motif invoqué dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles 2044 et 2052 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-47 du 18 novembre 2016 ;
2°) ALORS QUE l'existence de concessions réciproques doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte ; que, dès lors, en se prononçant sur la validité de la transaction au regard des demandes présentées par M. T... lors de la saisine du conseil de prud'hommes le 22 janvier 2015, relatives à l'exécution du contrat de travail et s'élevant à la somme de 11 461 €, quand la transaction avait été signée trois mois plus tard, le 5 mai 2015, la cour d'appel a, de plus fort, violé les articles 2044 et 2052 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-47 du 18 novembre 2016 ;
3°) ALORS QU'enfin, tout jugement doit être motivé à peine de nullité, de sorte que les juges du fond ne peuvent statuer en omettant de procéder à une analyse, ne serait-ce que sommaire, des pièces qui leur sont soumises ; qu'il résultait des éléments versés aux débats que la société Simone, dans un soucis de compromis, avait fait droit au moins pour partie aux réclamations salariales de M. T..., pendant la période comprise entre la saisine de la juridiction prud'homale et la signature du protocole transactionnel ; qu'en omettant de se prononcer sur ces éléments déterminants quant à la réalité des concessions réciproques des parties et la validité de la transaction, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Simone à payer à M. T... des dommages-intérêts pour défaut d'exécution loyale du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE M. T... sollicite des dommages intérêts à l'encontre de son employeur, pour manquement à l'obligation de loyauté, au vu du déroulement de son contrat de travail depuis l'année 2012, date de l'arrivée du nouveau gérant, et des nombreux courriers envoyés à son employeur pour faire respecter ses droits ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que M. T... a envoyé de très nombreux courriers recommandés à son employeur pour demander le respect de ses droits à congés, les raisons des retenues sur salaires et faire part des problèmes de pointage, et qu'en réponse au courrier de l'inspection du travail du 19 mars 2015 sollicitant l'employeur pour les difficultés rencontrées par M. T..., celui-ci a été convoqué par courrier du 30 mars 2015 à un entretien préalable au licenciement pour non-respect du pointage ; qu'il apparaît donc que la société Simone n'a pas réagi aux demandes répétées de son salarié, celui-ci ayant dû solliciter à de très nombreuses reprises son employeur pour l'exécution de ses droits, notamment à congés ; qu'il y a donc lieu de lui accorder la somme de 1 500 € à titre de dommages intérêts pour défaut d'exécution loyale de son contrat de travail ;
1°) ALORS QUE l'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond ; qu'il incombe au salarié de justifier du préjudice allégué ; que, pour condamner la société Simone à indemniser M. T... pour défaut d'exécution loyale de son contrat de travail, la cour d'appel a retenu qu'il résulte des pièces versées aux débats que le salarié a envoyé de très nombreux courriers de réclamation à son employeur et qu'en réponse au courrier de l'inspection du travail à son employeur, il a été licencié ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'existence d'un préjudice distinct de celui résultant du non-paiement de ce qui lui était dû ou de la perte de son emploi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1222-1 du code du travail et des articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité, de sorte que les juges du fond ne peuvent statuer en omettant de procéder à une analyse, ne serait-ce que sommaire, des pièces qui leur sont soumises ; qu'il résultait des éléments versés aux débats que la société Simone avait fourni les explications demandées à l'inspection du travail par courrier du 26 février 2015 et répondu à M. T... par courrier du 18 mars 2015 pour lui rappeler ses obligations en matière de pointage ; que la cour d'appel, qui a reproché à la société Simone de ne pas avoir réagi aux demandes de M. T..., sans examiner, ni analyser les pièces qui établissaient que l'employeur avait écrit à l'inspection du travail et à son salarié, a ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Simone à payer à M. T... la somme de 843,66 € à titre de rappel de salaire sur minimum conventionnel outre congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE M. T... sollicite l'application du salaire minimum en vertu de l'avenant 42 à l'annexe 1 de la convention collective, sa qualification de chauffeur livreur VL correspondant à un coefficient 150, alors que son contrat de travail mentionne un coefficient de 130 ; que la société Simone soutient que la convention collective applicable est celle de la filière « pressing, laverie » et non celle de « la location de linge, blanchisserie », sans en justifier par aucune pièce ; que toutefois, le contrat de travail de M. T... mentionne la convention collective de la blanchisserie, et ses bulletins de paie celle de « la blanchisserie, laverie, nettoyage à sec, pressing », qui correspond en outre à l'activité principale de la société Simone ; que cette convention collective comporte un avenant 42 qui mentionne que les chauffeurs livreurs VL se voient appliquer un coefficient de 150, et que ce poste est de niveau III, coefficient 3.1 pour les agents de distribution ou de service VL ; qu'il n'est pas contestable que M. T..., dont le contrat de travail indique un coefficient de 130, s'est vu attribuer un salaire inférieur au salaire conventionnel minimum de sa catégorie ; qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes sur ce point, et de condamner la société Simone à lui verser la somme de 843,66 € de ce chef outre les congés payés y afférents à hauteur de 84,36 € ;
ALORS QUE le juge, tenu de motiver sa décision, ne peut statuer par simple voie de simple affirmation ; que, saisi d'une contestation sur la convention collective applicable dans l'entreprise, il appartient au juge de justifier de sa décision d'appliquer une convention plutôt qu'une autre ; que, si M. T... revendiquait l'application de l'avenant 42 à l'annexe 1 de la convention collective interrégionale de la blanchisserie, laverie, location de linge, nettoyage, pressing et teinturerie, la société Simone soutenait que la convention applicable était celle de la filière pressing et laverie ; qu'en affirmant de façon péremptoire, sans autre analyse, que la convention revendiquée par le salarié correspond à l'activité principale de la société Simone, pour faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Simone à payer à M. T... les sommes de 3 178,50 € au titre de l'indemnité de préavis, 317,85 € au titre des congés payés y afférents, 2 807,67 € au titre de l'indemnité légale de licenciement, 15 800 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 16 avril 2015 notifie à M. T... son licenciement pour faute grave au motif du non-respect de l'obligation de pointage ; que cette lettre précise : "en dépit de nos multiples rappels, vous avez persisté à ne pas pointer chaque matin, au moment de votre arrivée et chaque soir lors de votre départ. Cette procédure a été établie afin de permettre le bon fonctionnement de notre entreprise. Malgré l'avertissement que nous vous avons notifié le 25 février 2015 pour vous rappeler cette procédure, vous avez persisté à ne pas pointer" ; que M. T... conteste son licenciement pour faute grave fondé sur le non-respect de l'obligation de pointage ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que la société Simone a adressé à l'inspection du travail un courrier daté du 26 février 2015, qui indique que M. T... n'effectue qu'un seul pointage lors de son arrivée à l'atelier, mais aucun pointage le soir ; que ces propos sont en contradiction avec la lettre de licenciement, qui mentionne que M. T... ne pointe ni le matin, ni le soir ; que le courrier de M. T... du 9 mars 2015, adressé à son employeur, précise qu'il conteste l'avertissement donné le 26 février 2015, car il ne peut pointer le soir avant de quitter l'établissement pour partir en tournée, sinon ces heures ne seront pas payées, et parce que son collègue de tournée le dépose chez lui en fin de journée, sans repasser à l'atelier ; que la société Simone lui a répondu dans un courrier du 18 mars 2015, que les heures seraient comptées jusqu'à la livraison du dernier hôtel en se basant sur l'heure de départ plus 2h00, et qu'ensuite, il s'agit de temps de trajet ; que par courrier du 19 mars 2015, l'inspection du travail a indiqué à la société Simone que "la simple prise en compte des heures badgées entre l'arrivée à l'atelier et le départ en tournée ne refléterait pas la totalité des heures travaillées dans la journée, puisqu'une partie importante des heures est réalisée à l'extérieur de l'établissement. De plus, certains salariés ne reviennent pas à l'atelier après leur tournée. M T... déclare pour son cas, que le collègue avec qui il effectue la tournée, le dépose à son domicile à la fin de la tournée, avant de rentrer chez lui avec le véhicule de l'entreprise. Enfin, l'heure de la fin de la tournée n'est pas forcément compatible avec les horaires d'ouverture de l'atelier. Ainsi le salarié ne peut pas badger si sa tournée se termine après l'heure de fermeture de l'atelier. Vous voudrez bien répondre de manière précise à ces remarques" ; que sans répondre à l'inspection du travail, la société Simone a convoqué M. T... à un entretien préalable par courrier du 30 mars 2015, soit 10 jours après réception du courrier de l'inspection du travail ; que, par ailleurs, la société [...] ne justifie d'aucune pièce à l'appui de l'absence de pointage de son salarié, en terme de fréquences notamment ; qu'enfin, M. T... fournit une attestation de M. C... B..., salarié de la société Simone, en date du 9 décembre 2015, indiquant que le gérant de la société Simone exige que les salariés pointent à la sortie à 18h30 - 19h00 avant le départ pour faire la livraison du soir, sans tenir compte du nombre d'heures qu'il fallait pour effectuer et terminer cette tournée, ce qui amenait à terminer la tournée vers 21h30, voir plus ; qu'il y a donc lieu, au vu de l'ensemble de ces éléments, de constater que la faute grave invoquée n'est pas justifiée ; que par ailleurs, le motif du licenciement, soit l'absence de pointage, faisant l'objet d'une demande d'explication très récente par l'inspection du travail, et étant liée à l'organisation du travail mise en place par l'employeur, qui aboutissait à ne pas décompter l'ensemble des heures effectuées par les salariés en leur demandant de pointer avant de faire la tournée du soir, il y a lieu de constater que le licenciement de M. T... est également sans cause réelle et sérieuse ; Sur les demandes indemnitaires ; qu'au vu de l'absence de cause réelle et sérieuse au licenciement, il y a lieu d'accorder à M. T... les sommes suivantes : - indemnité de préavis de 2 mois : 3 178,50 € - congés payés y afférents : 317,85 € ; - indemnité légale de licenciement: 2 807,67 € au vu de l'ancienneté de 8,8 années ; que par ailleurs, M. T... justifie qu'il était à l'ARE du 19 mai 2015 au 15 juin 2016 au moins, et qu'il n'a pu retrouver un emploi du fait de son âge (56 ans lors du licenciement), alors qu'il a 5 enfants, dont un mineur ; qu'il y a donc lieu de lui accorder une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 15 800 € ;
1°) ALORS QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que M. T... a fait l'objet d'un avertissement daté du 25 février 2015, dénonçant le refus persistant du salarié, malgré de nombreux rappels, de respecter la procédure de pointage prévue par le règlement intérieur et que la société Simone a non seulement fourni les explications demandées sur cette question de pointage à l'inspection du travail, par courrier du 26 février 2015, mais encore a répondu aux réclamations du salarié par courrier du 18 mars 2015 ; que, dès lors, en reprochant à la société Simone, pour écarter la faute grave, d'avoir convoqué M. T... à un entretien préalable par courrier du 30 mars 2015, sans avoir répondu au nouveau courrier de l'inspection du travail daté du 19 mars 2015, la cour d'appel a violé les articles L.1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 du code du travail ;
2°) ALORS QU' il était acquis aux débats que le salarié refusait de pointer avant le départ pour faire la tournée du soir ; que, dès lors, en reprochant à l'employeur de ne pas avoir produit de pièce justifiant d'une absence de pointage pourtant non contestée par le salarié, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le salarié ne saurait s'exonérer d'une procédure de pointage des horaires de travail prévue par le règlement intérieur de l'entreprise, en prétextant ne pas être réglé de toutes les heures de travail exécutées ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt, d'une part, que M. T..., qui justifiait son refus de pointer avant son départ de la tournée du soir en prétextant ne pas être payé de toutes ses heures de travail, admettait néanmoins que son collègue le déposait directement chez lui à la fin de la tournée du soir, sans repasser à l'atelier, et, d'autre part, que la société Simone indiquait dans un courrier daté du 18 mars 2015 que les heures étaient comptées jusqu'à la livraison du dernier hôtel en se basant sur l'heure de départ plus deux heures et qu'ensuite, il s'agissait d'un temps de trajet ; qu'en écartant cependant la faute grave, au motif que l'organisation du travail mise en place par l'employeur aboutissait à ne pas décompter l'ensemble des heures effectuées par les salariés sur la base d'une attestation vague et imprécise et en l'absence de toute demande de M. T... en paiement d'heures de travail non réglées, la cour d'appel a violé les articles L.1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 du code du travail.