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16/12/2020 | FRANCE | N°19-16722

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2020, 19-16722


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1214 F-D

Pourvoi n° U 19-16.722

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

La société Ligapal, société à responsabilit

é limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° U 19-16.722 contre l'arrêt rendu le 20 mars 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre soci...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1214 F-D

Pourvoi n° U 19-16.722

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

La société Ligapal, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° U 19-16.722 contre l'arrêt rendu le 20 mars 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme X... P..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

Mme P... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation également annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Ligapal, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme P..., après débats en l'audience publique du 4 novembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 20 mars 2019), Mme P... a été engagée, le 3 novembre 2004, par la société Ligapal (la société), pour exercer les fonctions de secrétaire-comptable. Son salaire brut contractuel s'élevait à la somme de 1 761,65 euros. La convention collective applicable est celle des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la Marne. Ses fonctions et sa rémunération ayant progressé, la salariée est devenue, à compter du mois de janvier 2011, assistante de gestion, statut agent de maîtrise, niveau IV, échelon 3, coefficient 285, pour percevoir à compter de janvier 2013 un salaire brut mensuel d'un montant de 3 448,99 euros pour 151,67 heures de travail.

2. Le 12 avril 2016, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire du contrat de travail ainsi qu'en paiement d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour préjudice moral et de rappel de salaires.

3. La salariée a été licenciée pour faute grave par lettre du 11 mai 2016.

Examen des moyens

Sur les premier, deuxième et troisième moyens du pourvoi incident, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. La société fait grief à l'arrêt de dire que la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail était fondée et qu'elle produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail par le salarié ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite de l'exécution du contrat ; qu'en l'espèce, il ressort des motifs retenus par les juges d'appel que Mme P... a elle-même établi les éléments produits au soutien de sa prétention pour réclamer le statut de cadre, de sorte que ces éléments étaient impropres à formaliser la volonté de l'employeur de lui attribuer ledit statut ; qu'en jugeant au contraire que la résiliation judiciaire était fondée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi les articles 1103 et 1224 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail ;

2°/ qu'il incombe au salarié qui poursuit la résiliation judiciaire de son contrat de travail de prouver loyalement que les faits qu'il reproche à l'employeur sont constitutifs de manquements aux obligations du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il ressort des propres motifs de la cour d'appel que Mme P... échouait à démontrer qu'elle occupait un "poste de commandement" et qu'elle exerçait le moindre encadrement du personnel ; qu'il résulte, au contraire, des pièces inopérantes produites par la salariée qu'elle s'était substituée à l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction pour revendiquer le statut cadre; qu'en jugeant cependant que, la résiliation judiciaire du contrat de travail était fondée en s'abstenant de vérifier, comme elle y était expressément invitée, si Mme P... ne s'était pas elle-même octroyée la qualité de cadre revendiquée en procédant à des falsifications et en provoquant, à dessein, des retards de communication des documents comptables la concernant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103 et 1224 du code civil, L. 1221-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble l'article 1353 du code civil et le principe de la loyauté de la preuve ;

3°/ qu'il appartient aux juges du fond de caractériser la matérialité et la gravité du manquement imputé à l'employeur à l'appui de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il s'infère des constatations de l'arrêt que Mme P... s'est octroyée unilatéralement des augmentations de salaires substantielles ; qu'en jugeant cependant que la prise d'acte de la rupture était fondée alors que la gravité de la faute de la salariée l'empêchait de poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles 1103 et 1224 du code civil, les articles L. 1221-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble le principe de loyauté contractuelle. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel, qui a retenu que, par une délégation de pouvoirs du 2 juin 2014, le gérant de la société avait donné tout pouvoir à la salariée en tant que cadre assistante de gestion pour signer pour lui et en son nom tout formulaire et document nécessaire à la gestion de l'entreprise, et que, par ailleurs, la société avait souscrit en janvier 2014 un contrat collectif ouvrant le bénéfice de certains droits aux salariés, souscription dans laquelle la salariée était désignée en tant que cadre, de sorte qu'elle devait bénéficier de la qualité de cadre à compter du mois de janvier 2014 ainsi que du salaire correspondant, ce dont elle a déduit que l'employeur, en se refusant finalement à contractualiser ce surclassement, avait commis un manquement grave qui avait empêché la salariée de poursuivre l'exécution du contrat de travail, a, par ces seuls motifs, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, légalement justifié sa décision.

Sur le second moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

7. La société fait grief à l'arrêt de dire que la salariée devait être classée cadre, coefficient 135 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 étendue, à compter du 1er janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016, date de son licenciement pour faute grave, pour un salaire mensuel en brut d'un montant de 5 000 euros pour un temps plein, de la condamner à lui payer certaines sommes au titre de la rupture, alors :

« 1°/ que pour déterminer la classification d'un salarié au regard des textes conventionnels applicables, le juge doit examiner les fonctions réellement exercées par le demandeur en considération des dispositions conventionnelles applicables ; qu'il incombe au salarié qui réclame le bénéfice d'une classification conventionnelle de rapporter la preuve qu'il exerce réellement les fonctions alléguées ; qu'en l'espèce, aucune pièce produite par la salariée n'établissait qu'elle exerçait le moindre encadrement du personnel "nécessaire" au bénéfice de la qualité de cadre, de sorte qu'elle ne pouvait ni bénéficier de ce statut, ni de l'augmentation de salaire subséquente ; qu'en faisant cependant droit à la demande de la salariée et juger qu'elle aurait "droit à un salaire de 5 000 euros" la cour d'appel a violé la convention collective départementale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la Marne, ensemble le contrat de travail signé par les parties le 3 novembre 2004 ;

2°/ que la contradiction de motifs vaut défaut de motifs ; qu'en l'espèce, en jugeant que "la société Ligapal a accordé à Mme P..., en marge de tout document contractuel et des fonctions correspondantes, la qualification de cadre", cependant qu'elle constatait qu'un tel commandement nécessaire à cette qualification n'était pas exercé par l'intéressé, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs contradictoires en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que la cassation sur le premier moyen entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif critiqués par le second moyen se rapportant aux conséquences indemnitaires de la rupture ainsi qu'aux diverses condamnations y afférent. »

Réponse de la Cour

8. D'abord, la cour d'appel ayant retenu, d'une part que la société avait accordé à la salariée, en marge de tout document contractuel et des fonctions correspondantes, la qualification de cadre, ce qui résultait notamment de la délégation de pouvoirs du 2 juin 2014 aux termes de laquelle le gérant de la société lui avait donné tout pouvoir en tant que cadre assistante de gestion pour signer pour lui et en son nom tout formulaire et document nécessaire à la gestion de l'entreprise, d'autre part qu'au vu de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 à laquelle renvoyait, en son article 101, la convention collective applicable des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la Marne en ce qui concerne les ingénieurs et cadres, la salariée pouvait prétendre au coefficient 135 et que la société versait des salaires supérieurs aux minima garantis, le moyen n'est pas fondé en ses deux premières branches.

9. Ensuite, le rejet du premier moyen rend sans objet la troisième branche du moyen qui tend à une cassation par voie de conséquence.

10. Dès lors, le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi principal et le pourvoi incident ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt.

Le conseiller rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Ligapal

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail était fondée et qu'elle produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE :

" 2°) Sur la demande en résiliation judiciaire du contrat de travail :

Cette demande a été introduite devant la juridiction prud'homale avant- le prononcé du licenciement de sorte qu'il incombe à la cour de statuer d'abord sur le bien-fondé de cette demande.

Le litige porte sur le bénéfice de la qualité de cadre.

C'est à bon droit que la salariée expose que le bénéfice d'une telle qualité n'est pas conditionnée, contrairement à ce qu'a jugé le conseil, de prud'hommes, à la signature de documents contractuels et peut résulter soit de l'exercice effectif de telles fonctions soit de la volonté de surclassement de l'employeur.

La convention collective applicable précitée renvoie, en son article 101, en ce qui concerne, les ingénieurs et cadres, à la convention collective de la métallurgie du 13 mars 1972 qui régit ces catégories professionnelles.

Indépendamment des conditions de diplômes posées à l'article 21 de la convention collective du 13 mars 1972, dont il n'est ni démontré ni même soutenu qu'elles aient été remplies par Mme P..., un salarié peut également être classé cadre s'il exerce les fonctions de position II ou de position III A, B ou C définies conventionnellement.

Ces fonctions requièrent toutes une affectation à "un poste de commandement" qui suppose nécessairement l'encadrement de personnel.

La salariée ne justifie d'aucun élément démontrant que, dans les faits, elle exerçait un tel encadrement.

Les attestations de collègues et les courriels produits ne permettent pas de distinguer ce qui relève de la qualification revendiquée de ce qui entrait dans ses attributions d'agent de maîtrise, assistante de gestion et en comptabilité, directement rattachée à la direction.

Les fiches de postes émises par la salariée au soutien de ses prétentions, contestées par l'employeur, proviennent d'elle-même et ne sont pas confortées par d'autres éléments probants.

En revanche, la société Ligapal a accordé à Mme P..., en marge de tout document contractuel et des fonctions correspondantes, la qualification de cadre.

En effet, par une délégation de pouvoirs du 2 juin 2014, le gérant de la société Ligapal a "donn[éJ tout pouvoir à Mme P..., salariée de l'entreprise en tant que cadre assistante de gestion pour signer pour moi et mon nom tout formulaire et document nécessaire à la gestion de l'entreprise",

La société Ligapal, qui avait par ailleurs souscrit auprès d'un assureur, le 30 janvier 2014, un contrat collectif à adhésion obligatoire ouvrant le bénéfice de diverses prestations à son personnel, avait, à cette occasion, expressément désigné "cadre" Mme P..., dans la rubrique dédiée au "statut (cadre ou non cadre)".

Par un message électronique émanant cette fois d'une mutualité le 11 juin. 2014, il était écrit au gérant de la société : " Vous nous avez confirm[é] que depuis le 1er janvier 2010, Mme P... devait être en catégorie cadre. Or nous n 'avons reçu aucun salaire pour cette personne pour les années 2010, 2011 et 2012", l'organisme insistant pour obtenir les renseignements souhaités par un courriel du 17 juin 20'14.
Mme P... a également envoyé un courriel le 5 juin 2014 au gérant de la société rédigé en ces termes : "Suite à notre conversation téléphonique avec Mme P..., je vous confirme accepter le passage de cette dernière en tant que cadre niveau 5 échelon 2 coefficient 325 au Is'' janvier 2010 (convention collective de la métallurgie). Je vous prie de régulariser cette situation et de nom transmettre les papiers de régularisation (...)".

Ce courriel qui ne visait qu'à préparer la signature d'un avenant contractuel emportant reconnaissance de la qualité de cadre a été adressé par Mme P..., dans le contexte qui a été rappelé, au gérant de la société Ligapal et conforte sa thèse selon laquelle ce dernier, qui s'est finalement refusé à contractualiser le surclassement, lui avait reconnu cette qualité.

Mme P... devait donc, comme elle le demande, bénéficier de cotte qualité à compter du mois de janvier 2014 ainsi que du salaire correspondant.
L'employeur a commis un manquement grave qui a empêché la salariée de poursuivre l'exécution du contrat de travail, celle-ci ayant été placée en arrêt pour maladie dès qu'il lui a demandé des explications et l'a privée de sa qualification.

Elle a d'ailleurs immédiatement saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Le comportement de l'employeur emporte rupture du contrat de travail dont les effets sont ceux d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui dispense d'examiner le bien-fondé du licenciement pour faute grave et emporte infirmation du jugement " ;

1°) ALORS, de première part, QUE la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail par le salarié ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite de l'exécution du contrat ; qu'en l'espèce, il ressort des motifs retenus par les juges d'appel que Mme P... a elle-même établi les éléments produits au soutien de sa prétention pour réclamer le statut de cadre, de sorte que ces éléments étaient impropres à formaliser la volonté de l'employeur de lui attribuer ledit statut ; qu'en jugeant au contraire que la résiliation judiciaire était fondée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi les articles 1103 et 1224 du code civil, ensemble les articles L. 1221-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail ;

2°) ALORS, de deuxième part, QU'il incombe au salarié qui poursuit la résiliation judiciaire de son contrat de travail de prouver loyalement que les faits qu'il reproche à l'employeur sont constitutifs de manquements aux obligations du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il ressort des propres motifs de la cour d'appel que Mme P... échouait à démontrer qu'elle occupait un " poste de commandement " et qu'elle exerçait le moindre encadrement du personnel ; qu'il résulte, au contraire, des pièces inopérantes produites par la salariée qu'elle s'était substituée à l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction pour revendiquer le statut cadre ; qu'en jugeant cependant que, la résiliation judiciaire du contrat de travail était fondée en s'abstenant de vérifier, comme elle y était expressément invitée, si Mme P... ne s'était pas elle-même octroyée la qualité de cadre revendiquée en procédant à des falsifications et en provoquant, à dessein, des retards de communication des documents comptables la concernant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103 et 1224 du code civil, L. 1221-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble l'article 1353 du code civil et le principe de la loyauté de la preuve ;

3°) ALORS, de troisième part, QU'il appartient aux juges du fond de caractériser la matérialité et la gravité du manquement imputé à l'employeur à l'appui de la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'en l'espèce, il s'infère des constatations de l'arrêt que Mme P... s'est octroyée unilatéralement des augmentations de salaires substantielles ; qu'en jugeant cependant que la prise d'acte de la rupture était fondée alors que la gravité de la faute de la salariée l'empêchait de poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles 1103 et 1224 du code civil, les articles L. 1221-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail, ensemble le principe de loyauté contractuelle ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR dit que Mme P... devait être classée cadre, coefficient 135 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 étendue, à compter du 1er janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016, date de son licenciement pour faute grave, pour un salaire mensuel en brut d'un montant de 5.000 euros pour un temps plein ; d'AVOIR condamné la société Ligapal à payer à Mme P... les sommes suivantes au titre de la rupture : 35.000 euros pour dommages-intérêts au titre de la résiliation judiciaire qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt, 20.500 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt, 15.000 euros au titre du préavis avec intérêt au taux légal à compter du 20 avril 2016 ; d'AVOIR ordonné l'établissement et la remise par la société Ligapal à Mme P... d'un bulletin de salaire, d'un reçu pour solde de tout compte et de l'attestation Pôle emploi rectifiés conformément au présent arrêt ; d'AVOIR condamné la société Ligapal à payer à Mme P... la somme de 2.200 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE :

" 3°/ Sur les conséquences financières de la résiliation judiciaire :

A - Sur la détermination du salaire mensuel dû :

La liquidation des conséquences financières suppose de déterminer le salaire auquel pouvait prétendre Mme P....

Elle réclame un salaire annuel de 101.642,68 euros sur la base de la qualité de "cadre niveau 5 échelon 2 coefficient 325".

Or, il apparaît résulter de l'article 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 que ce coefficient n'existe pas.

Le coefficient maximum ouvert au cadre qui travaille une durée mensuelle de 151,67 heures est de 135, position II.

Les coefficients supérieurs vont jusqu'à240 mais supposent que le salarié soit au forfait annuel en heures ou en jours, ce qui n'était pas le cas de Mme P....

Or, selon l'article L.3121-42 du code du travail, en sa version alors applicable, une convention de forfait ne peut être conclue qu'avec des cadres bénéficiant d'une autonomie dans la fixation de leur horaire de travail et dans le mode d'organisation de leur travail.

Il en résulte qu'un cadre, dont il n'est pas démontré qu'il dispose d'une telle autonomie, ne peut prétendre se voir attribuer un coefficient de rémunération réservé aux cadres autonomes, comme la Cour de cassation l'a d'ailleurs jugé (Soc., 21 novembre 2012, pourvoi n° 11-10.829).

Mme P... ne pouvait donc prétendre en toute hypothèse qu'au, coefficient 135.

Ce coefficient donne droit, selon le dernier accord du 20 janvier 2017 étendu et relatif aux salaires minimaux garantis poux les ingénieurs et cadres, à un salaire annuel brut d'un montant de 37.491 euros, soit une somme inférieure à celle que percevait la salariée en sa qualité d'agent de maîtrise, coefficient 285, étant souligné que ce coefficient n'est pas le plus élevé dans la catégorie des agents de maîtrise.
Il s'en déduit que la société Ligapal verse des salaires supérieurs aux minima garantis, la salariée ayant perçu, lorsqu'elle était agent de maîtrise, coefficient 285, une rémunération annuelle supérieure d'environ 10.000 euros au minimum conventionnel correspondant à cette classification, et étant souligné qu'elle a perçu en 2012, selon attestation du comptable, une rémunération annuelle de 52.860 euros.

Mme P... ne fournit toutefois strictement aucun élément sur le salaire que l'employeur aurait dû lui verser à raison de la qualité de cadre, coefficient 135.

Elle se contente de revendiquer un salaire brut mensuel de 8.470,22 euros qui n'apparaît pas sérieux.

Aucune des pièces versées n'établit que l'employeur aurait consenti à un tel salaire qui excède d'ailleurs très largement le minimum garanti pour les emplois de cadres du plus haut niveau, position III C, de la convention collective, comme le souligne à juste titre la société Ligapal.

La cour estime, compte tenu de ce qui précède, que le salaire brut mensuel dû à Mme P... à compter de janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016 pour la qualité de cadre, coefficient 135, aurait été d'un montant de 5.000 euros pour un temps plein de 151,67 heures.

B - Sur l'indemnisation de la rupture :

Mme P..., née en 1980, bénéficiait d'une ancienneté d'une durée de onze années et six mois à la date du licenciement le 11 mai 2016, son préavis n'ayant pu être exécuté en raison du motif de la rupture.

Il lui sera accordé, au titre de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 35.000 euros, soit sept mois de salaire, le barème d'indemnisation n'étant pas applicable à la date de la rupture.

L'article 29 de la convention collective du 13 mars 1972 précitée lui donne droit à une indemnité conventionnelle fixée comme suit :
"- pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté : 1/5 de mois par année d'ancienneté ;
- pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5 de mois par année d'ancienneté".

Soit : [1.000 euros (correspondant à 1/5ème de 5.000 euros) x 7] + [3.000 euros (correspondant à 3/5ème de 5 000 euros) x 4,5] = 20,500 euros.

Le préavis, aux termes de l'article 27 de la convention collective, est de trois mois pour un cadre de plus de deux ans d'ancienneté, soit une somme de 15.000 euros, outre les congés payés.

Ces sommes seront assorties dos intérêts- au taux légal comme le réclame la salariée, dans les conditions du dispositif selon qu'elles ont la nature d'une indemnité (les deux premières) ou un caractère salarial (la troisième).
Mme P... invoque également un préjudice au titre de la violation de l'obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail.

Elle ne démontre toutefois pas en quoi l'employeur, en lui imputant à tort la rupture, lui a causé un préjudice effectif et distinct de celui réparé par les indemnités qui précèdent de sorte que cette demande sera rejetée.

4°/ Sur les retenues sur salaires et indemnités journalières en mars, avril et mai 2016 :

En dépit de l'absence d'explications des parties sur ce point, la cour comprend que l'employeur a retenu sur les salaires des mois de mars et avril 2016 les sommes d'un montant de 2.562,58 euros en déduisant de la somme de 6.011,57 euros, montant du salaire brut au paiement duquel la salariée avait fait procéder par le comptable jusque-là, celle de 3,448,99 euros, correspondant au salaire brut pour le coefficient 285 de la catégorie agent de maîtrise.

Or, elle avait droit à un salaire de 5.000 euros de sorte que les sommes retenues par l'employeur en dessous de ce salaire doivent être payées à la salariée, soit un montant global de 3.102,02 euros ([5.000 - 3.448,99] x 2).

Par ailleurs, il résulte du reçu pour solde de tout compte que l'employeur a procédé à une retenue de la somme de 849,64 euros en.net au titre des indemnités journalières du 27 avril au 18 mai 2016 dans le paiement desquelles il était subrogé.

Quant à la retenue invoquée de la somme de 946,17 euros au titre du salaire de mai 2016 sur laquelle Mme P... ne fournit ni calcul ni explication, elle apparait implicitement admise par l'employeur puisque celui-ci ne formule une demande en répétition de l'indu que pour les années 2014 et 2015.

En dépit de l'absence d'explications des parties sur ce point, la cour comprend que ces retenues ont été calculées en partant à tort du principe que la salariée n'avait droit qu'à un salaire brut mensuel d'un montant de 3.448,99 euros, ce qui lui donne droit, sur ces périodes, à la somme globale 600 euros en brut issue d'une proratisation et fixée par la-cour dans l'exercice de son pouvoir souverain.

La société Ligapal sera donc condamnée à payer ces sommes à la salariée.

5°) Sur les congés pavés :

Mme P... réclame également la somme de 6.130,32 euros au titre "des congés payés acquis" qu'elle n'explicite pas en précisant, par exemple, le nombre de jours pris au cours de la période de référence.

La salariée demande, on réalité, une indemnité compensatrice de congés payés au motif qu'elle n'a pu prendre tous ses congés avant la résiliation du contrat de travail mais il résulte de l'examen des bulletins de salaire qu'il lui restait dix jours '"'de congés payés sur les trente ouverte par le contrat de travail.
En appliquant la règle de calcul la plus favorable sur la période de référence (règle du dixième du fait de l'accomplissement d'heures supplémentaires de façon non systématique) qui va en principe du 1er juin 2015 au 31 mai 2016, et application faite d'un salaire brut mensuel de 5,000 euros majoré par des heures supplémentaires dans les conditions ci-dessous, il sera accordé à la salariée la somme de 300 euros.

[
]

7°/ Sur la demande de rectification des bulletins de salaire et des documents de fin de contrat
Elle sera ordonnée conformément au dispositif.

Le prononcé d'une astreinte n'apparaît pas nécessaire.

8°/ Sur les frais irrépétibles :

Il est équitable de condamner la société Ligapal, qui sera déboutée de ce chef ayant succombé, à payer à Mme P... la somme de 2.200 euros au titre des irais irrépétibles de première instance et d'appel.

Quant aux dépens de première instance et d'appel, ils seront supportés par la société Ligapal, en ce compris les frais d'exécution nécessaires " ;

1°) ALORS, d'une part, QUE pour déterminer la classification d'un salarié au regard des textes conventionnels applicables, le juge doit examiner les fonctions réellement exercées par le demandeur en considération des dispositions conventionnelles applicables ; qu'il incombe au salarié qui réclame le bénéfice d'une classification conventionnelle de rapporter la preuve qu'il exerce réellement les fonctions alléguées ; qu'en l'espèce, aucune pièce produite par Mme P... n'établissait qu'elle exerçait le moindre encadrement du personnel " nécessaire " au bénéfice de la qualité de cadre, de sorte qu'elle ne pouvait ni bénéficier de ce statut, ni de l'augmentation de salaire subséquente ; qu'en faisant cependant droit à la demande de la salariée et juger qu'elle aurait " droit à un salaire de 5.000 euros " (arrêt, p. 7 § 3) la cour d'appel a violé la convention collective départementale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la Marne, ensemble le contrat de travail signé par les parties le 3 novembre 2004 ;

2°) Alors, d'autre part, QUE la contradiction de motifs vaut défaut de motifs ; qu'en l'espèce, en jugeant que " la société Ligapal a accordé à Mme P..., en marge de tout document contractuel et des fonctions correspondantes, la qualification de cadre " (arrêt, p. 5 § 3), cependant qu'elle constatait qu'un tel commandement nécessaire à cette qualification n'était pas exercé par l'intéressé (arrêt, p. 4 in fine), la cour d'appel s'est déterminée par des motifs contradictoires en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, enfin et toute hypothèse, QUE la cassation sur le premier moyen entraîne, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif critiqués par le second moyen se rapportant aux conséquences indemnitaires de la rupture ainsi qu'aux diverses condamnations y afférant ;

Moyens produits, au pourvoi incident, par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme P...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que Mme P... devait être classée cadre selon la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 et d'AVOIR limité le salaire mensuel brut de la salariée, à compter du 1er janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016, à un montant de 5 000 euros pour un temps plein ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« 3°/ Sur les conséquences financières de la résiliation judiciaire :
A - Sur la détermination du salaire mensuel dû :
La liquidation des conséquences financières suppose de déterminer le salaire auquel pouvait prétendre Mme P....
Elle réclame un salaire annuel de 101.642,68 euros sur la base de la qualité de "cadre niveau 5 échelon 2 coefficient 325".
Or, il apparaît résulter de l'article 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 que ce coefficient n'existe pas.
Le coefficient maximum ouvert au cadre qui travaille une durée mensuelle de 151,67 heures est de 135, position II.
Les coefficients supérieurs vont jusqu'à 240 mais supposent que le salarié soit au forfait annuel en heures ou en jours, ce qui n'était pas le cas de Mme P....
Or, selon l'article L. 3121-42 du code du travail, en sa version alors applicable, une convention de forfait ne peut être conclue qu'avec des cadres bénéficiant d'une autonomie dans la fixation de leur horaire de travail et dans le mode d'organisation de leur travail.
Il en résulte qu'un cadre, dont il n'est pas démontré qu'il dispose d'une telle autonomie, ne peut prétendre se voir attribuer un coefficient de rémunération réservé aux cadres autonomes, comme la Cour de cassation l'a d'ailleurs jugé (Soc., 21 novembre 2012, pourvoi n° 11-10.829).
Mme P... ne pouvait donc prétendre en toute hypothèse qu'au coefficient 135.
Ce coefficient donne droit, selon le dernier accord du 20 janvier 2017 étendu et relatif aux salaires minimaux garantis pour les ingénieurs et cadres, à un salaire annuel brut d'un montant de 37.491 euros, soit une somme inférieure à celle que percevait la salariée en sa qualité d'agent de maîtrise, coefficient 285, étant souligné que ce coefficient n'est pas le plus élevé dans la catégorie des agents de maîtrise.
Il s'en déduit que la société Ligapal verse des salaires supérieurs aux minima garantis, la salariée ayant perçu, lorsqu'elle était agent de maîtrise, coefficient 285, une rémunération annuelle supérieure d'environ 10.000 euros au minimum conventionnel correspondant à cette classification, et étant souligné qu'elle a perçu en 2012, selon attestation du comptable, une rémunération annuelle de 52.860 euros.
Mme P... ne fournit toutefois strictement aucun élément sur le salaire que l'employeur aurait dû lui verser à raison de la qualité de cadre, coefficient 135.
Elle se contente de revendiquer un salaire brut mensuel de 8.470,22 euros qui n'apparaît pas sérieux.
Aucune des pièces versées n'établit que l'employeur aurait consenti à un tel salaire qui excède d'ailleurs très largement le minimum garanti pour les emplois de cadres du plus haut niveau, position III C, de la convention collective, comme le souligne à juste titre la société Ligapal.
La cour estime, compte tenu de ce qui précède, que le salaire brut mensuel dû à Mme P... à compter de janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016 pour la qualité de cadre, coefficient 135, aurait été d'un montant de 5.000 euros pour un temps plein de 151,67 heures. » ;

ALORS, en premier lieu, QUE la rémunération, contrepartie du travail du salarié, résulte en principe du contrat de travail sous, d'une part, du SMIC et, d'autre part, des avantages résultant des accords collectifs, des usages de l'entreprise ou des engagements unilatéraux de l'employeur ; qu'en l'absence d'accord collectif, d'usage, d'engagement unilatéral ou d'accord contractuel des parties, le juge se prononce sur la rémunération en fonction des éléments de la cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'en dernier lieu, Mme P... percevait un salaire mensuel brut de 6 011,75 euros ; qu'elle a également constaté que Mme P... ne fournissait strictement aucun élément sur le salaire que l'employeur aurait dû lui verser à raison de la qualité de cadre, coefficient 135 et qu'elle se contentait de revendiquer un salaire brut mensuel de 8 470,22 euros qui n'apparaît pas sérieux ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si l'importance, l'étendue et la diversité des fonctions et responsabilités de la salariée ne justifiaient pas le salaire qu'elle a perçu jusqu'au jour de son licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1 du code du travail et 1103 du code civil ;

ALORS, en second lieu, QU'une convention ou un accord collectif couvrant un champ territorial plus étroit s'applique prioritairement à la convention ou l'accord collectif couvrant un champ territorial plus large, sauf stipulation contraire de cette dernière convention ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la convention collective applicable est celle, départementale, des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la Marne ; que, pour décider que Mme P... devait être classée cadre, coefficient 135 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, à compter du 1er janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016, elle a cependant considéré que le salaire réclamé par la salariée l'était sur la base de la qualité de cadre niveau 5 échelon 2 coefficient 325 et qu'il apparaissait résulter de l'article 22 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972 que ce coefficient n'existe pas ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier que la classification de cadre niveau 5 échelon 2 coefficient 325 n'était pas prévue par la convention collective départementale des industries métallurgiques, mécaniques et connexes de la Marne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 2252-1 du code du travail, ensemble l'article 1103 du code civil.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à 20 500 euros et celui de l'indemnité compensatrice de préavis à 15 000 euros que la société LIGAPAL a été condamnée à payer à Mme P... ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« B - Sur l'indemnisation de la rupture :
Mme P..., née en 1980, bénéficiait d'une ancienneté d'une durée de onze années et six mois à la date du licenciement le 11 mai 2016, son préavis n'ayant pu être exécuté en raison du motif de la rupture.
Il lui sera accordé, au titre de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 35.000 euros, soit sept mois de salaire, le barème d'indemnisation d'indemnisation n'étant pas applicable à l a date de la rupture.
L'article 29 de la convention collective du 13 mars 1972 précitée lui donne droit à une indemnité conventionnelle fixée comme suit :
"- pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté : 1/5 de mois par année d'ancienneté ;
- pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5 de mois par année d'ancienneté".
Soit : [1.000 euros (correspondant à 1/5ème de 5.000 euros) x 7] + [3.000 euros (correspondant à 3/5ème de 5 000 euros) x 4,5] = 20.500 euros.
Le préavis, aux termes de l'article 27 de la convention collective, est de trois mois pour un cadre de plus de deux ans d'ancienneté, soit une somme de 15.000 euros, outre les congés payés.
Ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal comme le réclame la salariée, dans les conditions du dispositif selon qu'elles ont la nature d'une indemnité (les deux premières) ou un caractère salarial (la troisième).
Mme P... invoque également un préjudice "au titre de la violation de l'obligation de loyauté dans l'exécution du contrat de travail".
Elle ne démontre toutefois pas en quoi l'employeur, en lui imputant à tort la rupture, lui a causé un préjudice effectif et distinct de celui réparé par les indemnités qui précèdent de sorte que cette demande sera rejetée. » ;

ALORS, en premier lieu, QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; que la cassation s'étend également à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'ainsi, la cassation à intervenir sur le chef de dispositif relatif à la limitation du salaire mensuel brut de la salariée, à compter du 1er janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016, à un montant de 5 000 euros pour un temps plein entraînera la cassation du chef de dispositif relatif à la limitation du montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement et de l'indemnité compensatrice de préavis ;

ALORS, en second lieu et à titre subsidiaire, QUE, selon l'article 29 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, l'indemnité de licenciement est calculée sur la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels, dont l'ingénieur ou cadre a bénéficié au cours de ses douze derniers mois précédent la notification du licenciement ; qu'en l'espèce, pour fixer le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la cour d'appel s'est basée sur le seul salaire brut mensuel pour un temps plein de 151,67 heures ; qu'en statuant ainsi, sans tenir compte de tous les éléments contractuels de rémunération effectivement perçus par la salariée, la cour d'appel a violé les stipulations susvisées, ensemble l'article 1103 du code civil.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Mme P... à rembourser à la société LIGAPAL une somme, déduction à faire des cotisations applicables, au titre de la répétition de l'indu pour la créance de salaire, avec intérêt aux taux légal à compter du 20 avril 2016 ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué,

« 6°/ Sur la répétition de l'indû :
Il résulte de l'attestation destinée à Pôle emploi que l'employeur reconnaît que Mme P..., qui ne fournit pas d'autres éléments de nature à étayer, au sens de l'article L. 3171-4 du code du travail, le nombre d'heures supplémentaires accomplies, a, au cours des douze mois précédant le dernier jour travaillé, exercé ses fonctions dans les proportions suivantes :
- 180,67 heures en mai 2015 / 191,67 heures en juin 2015 / 211,67 heures en juillet 2015 / 164,67 heures en août 2015 / 195,67 heures en septembre 2015 /
203,67 heures en octobre 2015 / 189,67 heures en novembre 2015/ 190,67 heures en décembre 2015 / 171,67 heures en janvier 2016/ 175,67 heures en février 2016.

Ces heures majorent le salaire brut mensuel retenu d'un montant de 5.000 euros.
Du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, le salaire brut théorique mensuel de Mme P... aurait dû être de 5.000 euros, soit la somme globale de 120.000 euros (5000 x 12) qu'il y a lieu de majorer, dans les conditions précitées, pour tenir compte des heures supplémentaires, ce qui aboutit à la somme globale fixée par la cour, dans l'exercice de son pouvoir souverain, à 135.000 euros.
Il résulte des bulletins de salaire et des décomptes produits que Mme P... a fait procéder au calcul en brut d'un salaire de 77.457,88 euros en 2014 et de 92.156,97 euros en 2015 dont elle a perçu la partie en net.
La somme globale de 169.614,85 euros comprend les heures supplémentaires majorées.
La répétition de rémunérations indûment versées est ouverte à l'employeur en vertu des articles 1302 et 1302-1 du code civil.
Mme P... lui est donc redevable de la somme de 30.612,83 euros en brut, déduction à faire des cotisations applicables (169.614,85 – [135.000 + 3.102,02 + 600 + 300]). » ;

ALORS QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; que la cassation s'étend également à l'ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'ainsi, la cassation à intervenir sur le chef de dispositif relatif à la limitation du salaire mensuel brut de la salariée, à compter du 1er janvier 2014 jusqu'au 11 mai 2016, à un montant de 5 000euros pour un temps plein entraînera la cassation du chef de dispositif relatif à la condamnation de Mme P... à rembourser à la société LIGAPAL une somme au titre de la répétition de l'indu pour la créance de salaire.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-16722
Date de la décision : 16/12/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 20 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 déc. 2020, pourvoi n°19-16722


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.16722
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