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16/12/2020 | FRANCE | N°19-10231

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2020, 19-10231


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1205 F-D

Pourvoi n° P 19-10.231

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

L'association Le foyer de Cach

an, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° P 19-10.231 contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, ch...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1205 F-D

Pourvoi n° P 19-10.231

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

L'association Le foyer de Cachan, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° P 19-10.231 contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. B... A..., domicilié [...] ,

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

M. A... a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le demandeur au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Corre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'association Le foyer de Cachan, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de M. A..., et après débats en l'audience publique du 3 novembre 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Corre, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 novembre 2018), M. A..., engagé le 20 novembre 2012 par l'association Le foyer de Cachan en qualité de directeur des projets, a été nommé secrétaire général par avenant du 1er février 2013. Il a été licencié pour faute grave le 4 mai 2015.

2. M. A... a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel du salarié, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'association fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui payer diverses sommes à titre de rappel de salaire sur mise à pied, outre les congés payés afférents, à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, à titre d'indemnité de licenciement, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'ordonner le remboursement par l'association à Pôle emploi des indemnités de chômage dans la limite d'un mois d'indemnité, alors « que pour apprécier si le licenciement est fondé sur une faute grave, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des motifs énoncés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement, qui comportait plusieurs griefs, reprochait notamment à M. A... d'avoir tenu des propos diffamatoires à l'encontre de la Présidente de l'association auprès de trois administrateurs ; qu'il était expliqué qu'à la suite d'un entretien au cours duquel Mme K..., la Présidente de l'association, lui avait demandé de respecter l'autorité du directeur d'établissement, M. A... avait pris un rendez-vous en urgence avec trois membres du conseil d'administration de l'association, le 14 avril 2015, et avait affirmé à chacun d'entre eux que Mme K... était alcoolique, qu'elle tenait des propos violents et incohérents et qu'elle mettait l'association en danger ; que la lettre de licenciement précisait qu'il s'agissait de ''propos diffamatoires et injurieux'' ''révélant une réelle volonté de nuire'' et l'incapacité du salarié ''à prendre en compte le caractère dommageable que [ses] propos peuvent engendrer pour le devenir du Foyer'', de sorte que la gravité de ces faits avait contraint l'association à engager une procédure de licenciement et prononcer sa mise à pied à titre conservatoire dès le 16 avril 2015 ; qu'en s'abstenant d'examiner ce grief, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1232-6 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 :

5. Il résulte de ce texte que le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement.

6. Attendu que pour écarter l'existence d'une faute grave, l'arrêt retient que parmi les multiples griefs formulés dans les six pages que comportent la lettre de licenciement, aux termes de ses conclusions, l'association Le foyer reproche en définitive à M. A... d'avoir tenu des propos agressifs, humiliants, voire menaçants à de nombreux collaborateurs de l'établissement, d'avoir caché à la direction des informations de première importance concernant des événements graves, et d'avoir cherché à déstabiliser la direction pour tenter de prendre la place du directeur de l'établissement. L'arrêt retient aussi que l'employeur ne justifie pas d'élément contemporain ou antérieur au licenciement établissant que M. A... cherchait à prendre la place du directeur de l'établissement, et que le dernier grief n'est donc pas justifié.

7. En statuant ainsi, alors que la lettre de licenciement invoquait également la tenue par le salarié de propos diffamatoires et injurieux envers la présidente de l'association auprès de trois membres du conseil d'administration, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi incident éventuel formé par M. A... ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare l'appel recevable, l'arrêt rendu le 21 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties, dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. A... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour l'association Le foyer de Cachan

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. A... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné l'association Le Foyer de Cachan à payer à M. A... les sommes de 5.952,05 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied, outre 595,21 € de congés payés afférents, 35.080,75 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 3.508,07 € de congés payés afférents, 6.326,26 euros à titre d'indemnité de licenciement, 71.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, somme nette de tous prélèvements sociaux et 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et d'AVOIR ordonné le remboursement par l'association Le Foyer de Cachan à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à M. A... dans la limite d'un mois d'indemnité ;

AUX MOTFS QUE « L'employeur qui prend l'initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige. Les motifs avancés doivent être précis et matériellement vérifiables, des motifs imprécis équivalant à une absence de motif. Le licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est-à-dire être fondé sur des faits exacts, précis, objectifs et revêtant une certaine gravité. En cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise y compris pendant la durée du préavis. Elle justifie une mise à pied conservatoire. Alors que la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'incombe pas particulièrement à l'une ou l'autre des parties, il revient en revanche à l'employeur d'apporter la preuve de la faute grave qu'il reproche au salarié. S'il subsiste un doute concernant l'un des griefs invoqués par l'employeur ayant licencié un salarié pour faute grave, il profite au salarié. Lorsque que les faits sont établis mais qu'aucune faute grave n'est caractérisée, le juge du fond doit vérifier si les faits initialement qualifiés de faute grave par l'employeur constituent ou non une cause réelle et sérieuse de licenciement. Toutefois, aux termes de l'article 2.08.2.1 de la convention collective PSAEE applicable en la cause, hors le cas de faute grave ou lourde, le licenciement pour motif d'ordre personnel ne peut intervenir qu'après deux avertissements écrits. En l'espèce, parmi les multiples griefs formulés dans les six pages que comportent la lettre de licenciement, aux termes de ses conclusions, l'association Le Foyer de Cachan reproche en définitive à M. A... d'avoir : - tenu des propos agressifs, humiliants, voire menaçants à de nombreux collaborateurs de l'établissement, - caché à la direction des informations de première importance concernant des événements graves, - cherché à déstabiliser la direction pour tenter de prendre la place du directeur de l'établissement. La cour constate que l'employeur ne justifie pas d'éléments contemporains ou antérieurs au licenciement établissant que M. A... cherchait à prendre la place du directeur de l'établissement, M. X.... Le dernier grief n'est donc pas justifié. S'agissant du deuxième grief, il ressort des pièces versées aux débats qu'au moment où elle a décidé la mise à pied conservatoire et engagé la procédure de licenciement, l'association Le Foyer de Cachan n'était pas informée de l'agression dont avait été victime l'un des surveillants de l'internat qu'elle reproche à M. A... de n'avoir pas partagée. Par ailleurs, la cour constate que le problème de la circulation des informations concernant les événements émaillant la vie de l'internat et du lycée professionnel était une préoccupation partagée, y compris par le salarié qui s'en était lui-même inquiété à l'occasion de réunions pédagogiques. Enfin, l'association n'établit que l'intéressé avait pour obligation de rendre compte au directeur de l'établissement dont, en sa qualité de secrétaire général, il n'était pas le subordonné, de sorte qu'aucun manquement ne pouvait lui être imputé sur ce point. Quant au grief fondé sur l'existence de propos agressifs, humiliants, voire menaçants à l'encontre de nombreux collaborateurs de l'établissement dont l'association affirme - dans la lettre de licenciement - avoir eu connaissance après avoir appris, courant avril 2015, que trois salariées (une enseignante et deux éducatrices, Mesdames D..., O... et U...) ne voulaient plus travailler avec M. A..., les nombreuses attestations versées aux débats par l'employeur établissent, à compter du début de l'année 2015, l'intéressé s'était adressé à plusieurs reprises d'une manière agressive et inappropriée à plusieurs membres du personnel, ce qui avait provoqué une situation de mal-être chez certains d'entre eux. Ce constat n'est pas remis en cause par les attestations élogieuses produites par l'intéressé qui disposait incontestablement de qualités professionnelles et humaines ayant justifié son embauche et son évolution au sein de la structure. La cour constate en revanche que l'association Le Foyer de Cachan ne justifie pas que l'attitude imputée à M. A... imposait, au regard des responsabilités de secrétaire général qui étaient les siennes, de l'organisation de la structure et du contexte dans lesquels les propos avaient pu être tenus, de mettre immédiatement fin à son contrat de travail sans indemnité ni préavis. Or, en l'absence de faute grave ou lourde, la convention collective applicable interdisait au Foyer de Cachan de procéder à son licenciement pour un motif disciplinaire sans lui avoir préalablement notifié deux avertissements écrits. Par suite, le licenciement de M. A... est injustifié et le jugement qui l'a débouté de ses demandes indemnitaires doit être infirmé. S'agissant du préjudice résultant de la perte de l'emploi, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée, de l'âge de M. A..., de son ancienneté dans l'entreprise, de sa capacité à retrouver un emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, de l'absence d'information sur sa situation professionnelle ultérieure et des conséquences du licenciement à son égard tel que cela résulte des pièces communiquées et des explications fournies à la cour, l'association Le Foyer de Cachan sera condamnée à verser au salarié la somme de 71.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre l'indemnité de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et le rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire ainsi qu'il est précisé au dispositif. Faute d'établir l'existence d'un préjudice moral distinct de celui déjà réparé par l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et lié aux conditions vexatoires de la rupture, il y a lieu de débouter M. A... de cette demande. Lorsque le licenciement est indemnisé en application des articles L.1235-3 du code du travail comme c'est le cas en l'espèce, la juridiction ordonne d'office, même en l'absence de Pôle emploi à l'audience et sur le fondement des dispositions de l'article L.1235-4 du même code, le remboursement par l'employeur de toute ou partie des indemnités de chômage payées au salarié par les organismes concernés, du jour du licenciement au jour du jugement, et ce dans la limite de six mois. En l'espèce au vu des circonstances de la cause il convient de condamner l'employeur à rembourser les indemnités à concurrence de un mois. Le jugement rendu sera infirmé et complété en ce sens » ;

1. ALORS QUE pour apprécier si le licenciement est fondé sur une faute grave, le juge est tenu d'examiner l'ensemble des motifs énoncés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement, qui comportait plusieurs griefs, reprochait notamment à M. A... d'avoir tenu des propos diffamatoires à l'encontre de la Présidente de l'association auprès de trois administrateurs ; qu'il était expliqué qu'à la suite d'un entretien au cours duquel Mme K..., la Présidente de l'association, lui avait demandé de respecter l'autorité du Directeur d'établissement, M. A... avait pris un rendez-vous en urgence avec trois membres du conseil d'administration de l'association, le 14 avril 2015, et avait affirmé à chacun d'entre eux que Mme K... était alcoolique, qu'elle tenait des propos violents et incohérents et qu'elle mettait l'association en danger ; que la lettre de licenciement précisait qu'il s'agissait de « propos diffamatoires et injurieux » « révélant une réelle volonté de nuire » et l'incapacité du salarié « à prendre en compte le caractère dommageable que [ses] propos peuvent engendrer pour le devenir du Foyer », de sorte que la gravité de ces faits avait contraint l'association à engager une procédure de licenciement et prononcer sa mise à pied à titre conservatoire dès le 16 avril 2015 ; qu'en s'abstenant d'examiner ce grief, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2. ALORS QUE le licenciement peut être fondé, en tout ou partie, sur des faits fautifs découverts par l'employeur au cours de la procédure de licenciement ; que le juge ne peut en conséquence refuser d'examiner un grief énoncé dans la lettre de licenciement, au prétexte que l'employeur n'avait pas connaissance de ces faits avant l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en l'espèce, à l'appui du grief tiré de la dissimulation à la direction d'informations relatives à des évènements graves, l'association reprochait à M. A... de n'avoir informé ni le Directeur d'établissement, ni la Présidente de l'association, de l'agression d'un surveillant de l'internat par un groupe d'élèves et des mesures prises pour assurer son remplacement à la suite de la démission de ce surveillant ; qu'en écartant ce grief, au prétexte qu'au moment où elle a décidé la mise à pied conservatoire et engagé la procédure de licenciement, l'association Le Foyer de Cachan n'était pas informée de cette agression qu'elle reproche à M. A... de n'avoir pas partagée, la cour d'appel a encore violé les articles L. 1232-2, L. 1232-3 et L. 1232-6 du code du travail ;

3. ALORS QUE le juge est tenu d'examiner les griefs tels qu'ils sont exposés dans la lettre de licenciement ; que, dans la lettre de licenciement, il était reproché à M. A..., non pas seulement un manque de communication, mais d'avoir sciemment dissimulé l'agression dont un surveillant de l'internat avait été victime et la cause de la démission de ce surveillant, en mentant à la Présidente de l'association et contraignant les salariés au silence ; qu'en retenant encore, pour écarter ce grief, que le problème de la circulation des informations concernant les évènements émaillant la vie de l'internat et du lycée était une préoccupation partagée, y compris par M. A... qui s'en était lui-même inquiété à l'occasion de réunions pédagogiques, la cour d'appel s'est fondée sur un motif radicalement inopérant au regard du grief énoncé dans la lettre de licenciement, en violation des articles L. 1232-6, L. 1235-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

4. ALORS QUE le juge est tenu d'examiner, même sommairement, l'ensemble des éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétention et de préciser sur quelles pièces il fonde ses affirmations ; que l'association Le Foyer de Cachan avait produit aux débats les autorisations administratives dont M. X..., le Directeur d'établissement, était seul titulaire pour assurer la direction de l'établissement accueillant des élèves, ainsi qu'un organigramme d'octobre 2014 sur lequel que M. A... était placé sous l'autorité de M. X... pour ses activités en lien avec l'internat impliquant la prise en charge d'élèves ; qu'en affirmant cependant péremptoirement que l'association n'établit pas que M. A... avait pour obligation de rendre compte au directeur d'établissement dont, en sa qualité de secrétaire général, il n'était pas le subordonné, sans examiner ces pièces précitées, ni viser la pièce sur laquelle elle se fondait pour affirmer que M. A... n'était pas le subordonné du directeur d'établissement, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

5. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE le salarié, tenu d'exécuter le contrat de travail de bonne foi, doit collaborer avec les autres salariés et leur transmettre les informations utiles à l'exercice de leurs fonctions, même s'ils ne sont pas ses supérieurs hiérarchiques ; que la lettre de licenciement reprochait à M. A... d'avoir sciemment passé sous silence plusieurs faits importants qui étaient de nature à engager la responsabilité du directeur d'établissement, tels que l'organisation d'un stage de secourisme avec huit élèves internes en contrepartie de la promesse d'un travail rémunéré par l'association et l'agression d'un surveillant de l'internat par un groupe d'élèves ; que s'agissant de ce dernier fait, la lettre de licenciement précisait que M. A... avait fait pression sur une salariée ayant eu connaissance de cette agression et qui cherchait à obtenir des informations, afin de la réduire au silence ; qu'en écartant ce grief, au motif inopérant qu'il n'était pas établi que M. A... devait rendre compte au directeur de l'établissement dont il n'était pas le subordonné, sans rechercher si, indépendamment de toute obligation de rendre compte, M. A... n'était pas tenu d'informer le directeur d'établissement des faits importants concernant les élèves de l'établissement et s'il n'avait pas sciemment dissimulé des faits graves, la cour d'appel a violé les articles L. 1222-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

6. ALORS QUE le fait, pour un salarié investi d'une autorité sur les autres salariés de l'entreprise, de tenir de manière répétée des propos agressifs, humiliants ou menaçants constitue une faute rendant impossible la poursuite du contrat ; que face à un tel comportement, l'employeur qui est tenu d'une obligation de sécurité de résultat à l'égard du personnel de l'entreprise, doit prendre les dispositions qui s'imposent pour mettre fin à ces agissements, en prononçant le licenciement pour faute grave de l'intéressé ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que M. A... occupait le poste de Secrétaire général de l'association en contrepartie duquel il bénéficiait d'une rémunération mensuelle brute de plus de 11.600 euros et d'un logement de fonction sur le site ; qu'à ce poste, M. A... disposait d'un pouvoir hiérarchique sur une grande partie du personnel de l'association ; que la cour d'appel a constaté que l'association établissait, par « de nombreuses attestations versées aux débats », que M. A... s'était adressé « à plusieurs reprises d'une manière agressive et inappropriée à plusieurs membres du personnel », « ce qui avait provoqué une situation de mal-être chez certains d'entre eux » ; qu'en décidant néanmoins qu'il n'était pas établi qu'au regard des responsabilités de secrétaire général de M. A..., de l'organisation de la structure et du contexte dans lequel ces propos ont été tenus, ces faits imposaient de mettre fin immédiatement au contrat de travail sans préavis ni indemnité, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.

Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. A...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. A... de sa demande tendant à voir constater que la présidente de l'association Le Foyer de Cachan n'avait pas le pouvoir de le licencier ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'invoquant les dispositions des statuts de l'association Le Foyer de Cachan, le salarié soutient que la présidente n'avait pas le pouvoir de procéder à son licenciement ; que l'employeur lui oppose que cette dernière tenait bien des statuts le pouvoir de prendre cette décision et de la mettre en oeuvre ; que la notification du licenciement doit effectivement émaner de l'employeur ; que dans une association, le pouvoir de licencier appartient en principe au président de l'association, qui est le représentant légal auprès des tiers pour tous les actes de la vie sociale ; que lorsque tel est le cas, le licenciement prononcé par le président d'une association est sans cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, la cour constate que l'article 6 des statuts de l'association attribue compétence au conseil d'administration pour nommer le directeur sur proposition du président, et de mettre fin au contrat de travail de ce dernier ; qu'en revanche, ces statuts ne comportent aucune disposition spécifique relative au pouvoir de licencier le secrétaire général ; que de son côté, l'article 9 stipule que « le président représente l'association dans tous les actes de la vie civile » ; qu'il s'en déduit qu'il entrait bien dans les attributions du président de l'association de mettre en oeuvre la procédure de licenciement ;

ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QUE le conseil dit et juge que le licenciement est parfaitement régulier, puisqu'il constitue un acte de la vie civile, comme l'engagement de M. A..., et que l'article 9 de statuts du foyer de Cachan stipule que le président représente l'association dans tous les actes de la vie civile et que seul, selon l'article 6 des statuts, le licenciement du directeur de l'établissement doit faire l'objet d'une consultation du conseil d'administration ;

ALORS QU'on ne peut interpréter les clauses claires et précises d'un contrat ; qu'ayant constaté qu'aux termes de l'article 5 des statuts de l'association Le Foyer de Cachan, celle-ci était administrée par son conseil d'administration, en jugeant que son président, qui, aux termes de l'article 9 devait exécuter les décisions du conseil et ne disposait que du pourvoir de représenter l'association dans les actes de la vie civile, pouvait prononcer un licenciement, la cour d'appel a violé le principe susvisé, désormais énoncé à l'article 1192 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-10231
Date de la décision : 16/12/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 déc. 2020, pourvoi n°19-10231


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10231
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