La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/12/2020 | FRANCE | N°19-13503

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 02 décembre 2020, 19-13503


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 décembre 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 756 F-D

Pourvoi n° V 19-13.503

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 DÉCEMBRE 2020

1°/ Mme ZS... J..., épouse Y...,

2°/ M. V... Y...,

d

omiciliés tous deux [...], [...],

ont formé le pourvoi n° V 19-13.503 contre l'arrêt rendu le 18 décembre 2018 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre ci...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 décembre 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 756 F-D

Pourvoi n° V 19-13.503

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 2 DÉCEMBRE 2020

1°/ Mme ZS... J..., épouse Y...,

2°/ M. V... Y...,

domiciliés tous deux [...], [...],

ont formé le pourvoi n° V 19-13.503 contre l'arrêt rendu le 18 décembre 2018 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige les opposant à l'association Les fidèles de la petite église du Poitou, dont le siège est chez M. Q... I..., [...] , défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme Y..., de la SARL Corlay, avocat de l'association Les fidèles de la petite église du Poitou, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 décembre 2018), le 15 septembre 1873, une chapelle a constitué le lot n° 2 d'une donation-partage, aux termes d'un acte notarié précisant que « Le propriétaire du second lot ne pourra pas prétendre à la jouissance de la chapelle qui se trouve dans son lot ; elle devra rester libre pour l'exercice du culte qui s'y professe. »

2. A la suite de transmissions, ventes et donations, cette chapelle est désormais la propriété indivise, à hauteur de 75 %, de l'association Les fidèles de la petite église du Poitou, et à hauteur de 25 %, de M. U..., M. L..., Mme J..., et de M. et Mme Y....

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. M. et Mme Y... font grief à l'arrêt de leur enjoindre, sous astreinte, de restituer les clefs de la chapelle et de cesser d'y exercer le culte et de mettre à leur charge une indemnité d'occupation, alors :

« 1°/ que chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires ; qu'à défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal ; que la cour d'appel a constaté que la chapelle avait pour destination conventionnelle « l'exercice du culte qui s'y professe », ce culte étant celui dit de la Petite Eglise ; que pour enjoindre à M. et Mme Y... de remettre les clefs et de cesser d'y exercer le culte, la cour d'appel a jugé qu'ils exerçaient dans les lieux un culte empreint d'une dérive sectaire, non conforme à la destination du bien, tandis que l'association des Fidèles de la petite église du Poitou avait une activité conforme au culte litigieux ; qu'elle a constaté que le litige avait pour objet les dissensions existant entre les parties quant à l'exercice du « vrai culte », dont elle a par ailleurs constaté qu'il n'était pas défini par l'acte de donation-partage en instituant la charge ; qu'en acceptant de se faire juge de l'orthodoxie d'un culte dont elle a par ailleurs constaté qu'il n'était pas défini, la cour d'appel a outrepassé ses pouvoirs et violé l'article 815-9 du code civil ;

2°/ que chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires ; qu'à défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal ; que pour enjoindre à M. et Mme Y... de remettre les clefs et de cesser l'exercice du culte, la cour d'appel a indiqué que le culte qu'ils professaient était empreint d'une « dérive sectaire » ; qu'en n'indiquant pas en quoi le culte, tel qu'il était professé par M. et Mme Y..., n'était pas conforme au culte de la Petite Eglise auquel était destinée la chapelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-9 du code civil ;

3°/ que chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires ; qu'à défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal ; que pour retenir que l'association des Fidèles de la petite église du Poitou exerçait le « vrai culte », la cour d'appel a relevé que tel était son objet ; qu'en se déterminant au regard des statuts, et non de l'activité effective de l'association, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-9 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Après avoir exactement énoncé qu'aux termes de l'article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires, l'arrêt constate, d'abord, que M. et Mme Y... détiennent seuls les clefs de la chapelle et y organisent le culte chaque dimanche et en d'autres occasions, sans en permettre l'accès aux membres de l'association « Les fidèles de la petite église du Poitou », dont l'objet statutaire, dûment déclaré, est conforme à la destination de la chapelle. Il retient, ensuite, qu'ils ne démontrent pas en respecter eux-mêmes la destination, alors que la dérive sectaire de leur pratique depuis 2010 est dénoncée.

5. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a souverainement déduit que leur usage du bien indivis n'était ni conforme à sa destination ni compatible avec les droits des autres indivisaires, et a, ainsi, légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme Y... et les condamne solidairement à payer à l'association Les fidèles de la petite église du Poitou la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, signé par M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du 16 août 2016 ayant enjoint sous astreinte à M. et Mme Y... de restituer les clefs de la chapelle et de cesser d'y exercer le culte et mis à leur charge une indemnité d'occupation,

AUX MOTIFS QUE par application des dispositions de l'article 815-6 du Code civil, le président du tribunal de grande instance, saisi en la forme des référés, est compétent pour prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun de l'indivision ; que l'article 815-9 du Code civil dispose en outre que : "Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal » ; qu'il résulte des éléments plus hauts repris que la petite chapelle, cadastrée sous le numéro 648 de la section B dans le cadre de l'acte de donation-partage du 15 septembre 1873, est désormais un immeuble indivis, aux termes : - des actes des 24 février 9 mars 2012, par lesquels les consorts R... ont donné à l'association LES FIDÈLES DE LA PETITE EGLISE DU POITOU tous leurs droits successifs qui pourraient leur appartenir dans la chapelle ; d'un acte du 1er mars 2013, aux termes duquel Mmes A... F..., TH... F... et ZK... O... ont vendu à l'association LES FIDÈLES DE LA PETITE BOUSE DU POITOU tous leurs droits successifs qui pourraient leur appartenir dans la chapelle, soit ceux recueillis à la suite du décès d'IS... F..., fils de UW... X... et ceux suite au décès de M. D... X... ; - d'un acte en date du 29 septembre 2014 par lequel Mme N... W... née F..., propriétaire de ce bien à hauteur d'1/6 en sa qualité d'héritière de Mme M... F..., et d'1/12 dans la succession de M. D... X..., soit au total d'un quart indivis en pleine propriété, en a fait donation à 5 co-indivisaires, soit M. P... U..., M. G... L..., Mme UP... J... et M. et Mme PJ... et ZS... Y... ; que M. et Mme Y... ont ainsi statut de co-indivisaires du bien ; que s'agissant de la jouissance de la chapelle, il convient de relever que l'acte de donation partage en date du 15 septembre 1873 se borne à indiquer que "le propriétaire du second lot ne pourra pas prétendre à la jouissance de la chapelle qui se trouve dans son lot, elle devra rester libre pour l'exercice du culte qui s'y professe", sans autres précisions ; que le bénéficiaire de cette jouissance n'est nullement désigné expressément, même si les parties paraissent s'accorder sur la nature du culte professé ; qu'il apparaît en outre que la volonté de la donatrice ne se limitait pas à un exercice viager de la poursuite du culte réfractaire ; qu'il ressort des débats et du courrier de leur conseil en date du 08/07/2014 que M. et Mme Y... font partie des fidèles qui exercent leur culte dans ce lieu, au sein d'une association qui en détient les clefs conformément aux stipulations de 1873 ; qu'ils soutenaient alors ne pas détenir ces clefs à titre personnel ; que toutefois dans leurs dernières écritures, M. et Mme Y... soutiennent être possesseurs de bonne foi des clefs de la chapelle et du lieu de culte ; que par courrier en date du 06/02/2015 également versé aux débats, le conseil des appelants indiquait que M. et Mme Y... détenaient conjointement la clef de la chapelle au nom de l'association de fait qui organise le culte à la fois sur le fondement d'une coutume ancienne et, depuis 1873, en vertu d'un titre lui reconnaissant la jouissance des lieux ; qu'il est toutefois indiqué : "cette association n'est pas déclarée en préfecture sur le modèle de la loi de 1901 régissant les association puisqu'elle pré-existait à cette loi. IS... continue à fonctionner sur le modèle des anciens conseils de fabrique. IS... ne se prévaut pas de la personnalité morale." ; qu'est versée aux débats copie d'un document intitulé "statuts que devra suivre le conseil de fabrique", daté du 10/03/1960, précisant que le conseil est constitué de 17 membres : 1 président, 2 vices présidents, 1 secrétaire, 1 trésorier et 12 membres. Il est dit que le conseil est cependant légal à partir de 7 membres ; qu'il n'est toutefois justifié d'aucunes démarches ou déclaration du conseil de fabrique dans le respect des dispositions de la loi du 1er Juillet 1901 ; que l'article 2 de cet article dispose en effet que « les associations de personnes pourront se former librement sans autorisation ni déclaration préalable, mais elles ne jouiront de la capacité juridique que si elles se sont conformées aux dispositions de l'article 5 » ; que cet article précise que toute association qui voudra obtenir la capacité juridique prévue à l'article 6 (soit notamment ester en justice, recevoir des dons manuels, acquérir à titre onéreux, posséder et administrer.., les immeubles strictement nécessaires à l'accomplissement du but qu'elle se propose) devra être rendue publique par les soins de ses fondateurs, cela par déclaration préalable au représentant de l'Etat contre récépissé, puis par publication au journal officiel sur production de ce récépissé ; qu'il en résulte que le conseil de fabrique dont font état les appelants est dénué de personnalité morale, ce qui ne permet pas à M. et Mme Y... de soutenir qu'ils détiennent la clef de la chapelle en son nom, faute de la capacité de ce conseil de posséder et administrer ; que de même, si nombre des attestations versées par M. et Mme Y... indiquent que "les clefs ne leur appartiennent pas, elles leurs sont dédiées de génération en génération depuis 1873"(Mme S... B..., M. K... B...), ou "Les clefs de cette chapelle ont toujours été transmises de génération en génération depuis l'acte authentique de 1873
» (Mme M... B..., M. SJ... H...), ou encore qu'ils "ne se sont pas appropriés les clefs elles leurs sont dédiés, c'est une transmission de génération en génération" (Mme C... E...), les appelants ne justifient par aucune pièce des débats que la jouissance de la chapelle et de ses clefs leur soit personnellement dévolue, étant rappelé l'imprécision de l'acte de 1873 sur cette dévolution ; qu'il ne peut donc être soutenu, comme l'indique Mme BE... L... dans son attestation que "les clefs et la jouissance de la chapelle leurs ayant été transmises (à M. et Mme Y...) à la succession de leurs parents", faute de l'établir ; qu'il n'est pas contesté que M. et Mme Y... détiennent effectivement les clefs de la chapelle ; qu'ils y organisent le culte chaque dimanche et en d'autres occasions, sans que soit permis l'accès de la chapelle notamment aux membres de l'association LES FIDÈLES DE LA PETITE EGLISE DU POITOU ; qu'il apparaît que des dissensions dans l'exercice du culte sont apparues dès 2010, comme en témoigne l'envoi de courrier aux fidèles au mois de décembre 2010 ; que dans un cadre conflictuel, l'association LES FIDÈLES DE LA PETITE EGLISE DU POITOU a été créée et régulièrement déclarée le 06/04/2011 en préfecture où elle est identifiée sous le n° W791001596 ; que l'objet de l'association est ainsi défini à ses statuts en date du 23/07/2012 versés aux débats "dans le strict respect des dispositions de la loi du 9 décembre 1905: l'exercice public du culte de la Petite Eglise du Poitou" et "Subvenir aux frais et à l'entretien des lieux de culte et notamment de la chapelle de la [...] ou de tout autre lieu de culte qui pourrait lui être confié" ; que comme retenu par le premier juge, l'association LES FIDÈLES DE LA PETITE EGLISE DU POITOU a donc une activité conforme à la destination de la chapelle ; que les attestations qu'elle verse en sa pièce n° 39 ne respectent pas les prescriptions de l'article 202 du code de procédure civile dès lors qu'elles ne sont pas écrites de la main de leurs auteurs, leur valeur probante n'étant alors pas établie ; que par contre, il est démontré par les attestations régulières de Mme VR... JN..., Mme M... PV..., M. AX... JU..., Mme HC... CD..., M. QH... CZ..., M. U... CD..., Mme BE... JU..., M. NS... XH..., M. YI... FM..., Mme S... CZ..., M. YB... VK..., Mme AI... VK..., Mme XA... CD..., Mme BE... U..., versées par l'association intimée, que M. et Mme Y... disent les prières tous les dimanche ; que les attestations nombreuses versées d'autre part par M. et Mme Y... mettent en exergue notamment leur implication sans faille et leur engagement (Mme OE... H...), l'absence d'erreur de leur part (Mme G... NF... W...), leur grand dévouement (Mme GZ... NF...) ; que toutefois sont versées aux débats diverses autres attestations faisant état d'une modification par M. et Mme Y... de l'enseignement du catéchisme aux enfants, de la distribution de nouvelles prières qualifiées de "non conformes à nos traditions" (Madame VK...) ; que celle-ci indique : "notamment le rosaire miraculeux du divin décret d'amour, des prières en l'honneur de la croix glorieuse. Ces personnes ont eu des discours inquiétants auprès de NO.... Choquée par ces documents, j'ai effectué des recherches et trouvé que ces prières provenaient d'une secte." ; que Mme KC... GG... indique pour sa part : "la semaine précédant la communion, Mme Y... ZS... qui fait le catéchisme avec sa soeur Mme AV... TX... distribue aux enfants 40 feuilles imprimées avec de nouvelles prières qui nous paraissaient étranges : Le rosaire miraculeux du divin décret d'amour. Le chapelet de joie du divin décret d'amour. Le chemin de croix du divin décret d'amour. A partir de ces trois mots -divin décret d'amour" des recherches ont été faites sur internet, ce qui a permis de trouver le lien avec...une personne... OX... JO... qui fait partie d'une secte" ; que Mme IZ... RK... indique que son fils lui a également ramené de nouvelles prières sur des feuilles photocopiées à "divin décret d'amour" qui allaient à l'encontre de ses principes religieux ; que M. TA... B... précise que les prières et prospectus reçus à l'occasion de la communion de son fils ne correspondaient pas à notre religion et "à l'éducation religieuse que je souhaitais donner à mes enfants" ; que Mme PP... FM... dénonce également une dérive sectaire de la part des lecteurs de prières, précisant que les responsables du culte avaient remis aux enfants des documents à l'en-tête du "divin décret d'amour" et que "l'authenticité de nos prières n'est plus respectée" ; qu'au surplus, M. RT... CD... atteste que "M. Y... ne fait pas toujours toutes les consignes demander par les proches du défunt aux enterrements" ; qu'il convient au vu de l'ensemble de ces éléments de retenir que l'acte de donation partage est insuffisamment précis dans la définition du bénéficiaire de la jouissance de la chapelle pour que puisse être soutenu le démembrement de sa propriété ; qu'il existe en l'espèce et légalement une indivision dans le cadre de laquelle un désaccord est exprimé quant à l'usage de la jouissance du bien indivis ; que la date d'apparition de ce désaccord est indifférente, ainsi que les proportions de répartition des droits indivis ; que de même, le fait que le bien soit une chapelle et non une habitation ne contrevient nullement à l'application des dispositions des articles 815-6 et 815-9 du code civil plus haut rappelés ; que si n'est pas caractérisée ici, en dépit de la demande de l'association intimée, une situation d'urgence justifiant qu'il soit fait usage des dispositions de l'article 815-6 du code civil, l'application de l'article 815-9 du code civil a été justement retenue par le premier juge ; qu'en effet, tous les indivisaires ayant des droits de même nature, l'un d'entre eux ne peut user de la chose commune qu'à condition de ne pas porter atteinte aux droits égaux et réciproques des autres. Il en résulte que tout indivisaire est en droit de faire cesser les actes accomplis par l'un de ses co-indivisaires en violation de ses droits égaux et concurrents sur la chose indivise ; qu'il ne serait pas admissible en effet de se satisfaire d'une situation d'abus de droit, contrairement à ce qu'indiquait dans son attestation Mme XQ... Q... : "lorsque des personnes ne se retrouvent plus dans la petite église, ils la quittent, mais ne décident pas de changer les lois de celle-ci" ; qu'en l'espèce, M. et Mme Y... détiennent seuls les clefs de la chapelle et conservent d'usage exclusif de celle-ci, privant les autres indivisaires, dont l'association "LES FIDÈLES DE LA PETITE EGLISE DU POITOU", de l'accès à un lieu de culte qu'ils se devaient de partager ; qu'en outre, et alors que l'association intimée, dûment déclarée, justifie par ses statuts exercer une activité conforme à la destination de la chapelle, la dérive sectaire de la pratique de M. et Mme Y... est dénoncée ; que leur enjoindre de cesser l'exercice du culte en ce lieu particulier est alors justifié, comme retenu par le premier juge ; qu'au surplus, M. et Mme Y... ne peuvent dans ces circonstances soutenir être possesseurs de bonne foi et de manière paisible de la clef et de la chapelle, cela en contradiction avec leur statut de co-indivisaire qu'ils ne peuvent dénier ; que leur possession ne saurait alors être protégée surie fondement des dispositions de l'article 2278 du code civil,

1) ALORS QUE chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires ; qu'à défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal ; que la cour d'appel a constaté que la chapelle avait pour destination conventionnelle « l'exercice du culte qui s'y professe », ce culte étant celui dit de la Petite Eglise ; que pour enjoindre à M. et Mme Y... de remettre les clefs et de cesser d'y exercer le culte, la cour d'appel a jugé qu'ils exerçaient dans les lieux un culte empreint d'une dérive sectaire, non conforme à la destination du bien, tandis que l'association des Fidèles de la Petite Eglise du Poitou avait une activité conforme au culte litigieux ; qu'elle a constaté que le litige avait pour objet les dissensions existant entre les parties quant à l'exercice du « vrai culte », dont elle a par ailleurs constaté qu'il n'était pas défini par l'acte de donation-partage en instituant la charge ; qu'en acceptant de se faire juge de l'orthodoxie d'un culte dont elle a par ailleurs constaté qu'il n'était pas défini, la cour d'appel a outrepassé ses pouvoirs et violé l'article 815-9 du code civil ;

2) ALORS QUE chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires ; qu'à défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal ; que pour enjoindre à M. et Mme Y... de remettre les clefs et de cesser l'exercice du culte, la cour d'appel a indiqué que le culte qu'ils professaient était empreint d'une « dérive sectaire » ; qu'en n'indiquant pas en quoi le culte, tel qu'il était professé par M. et Mme Y..., n'était pas conforme au culte de la petite Eglise auquel était destinée la chapelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-9 du code civil ;

3) ALORS QUE chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires ; qu'à défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal ; que pour retenir que l'association des Fidèles de la Petite Eglise du Poitou exerçait le « vrai culte », la cour d'appel a relevé que tel était son objet ; qu'en se déterminant au regard des statuts, et non de l'activité effective de l'association, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-9 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-13503
Date de la décision : 02/12/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 18 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 02 déc. 2020, pourvoi n°19-13503


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SARL Corlay, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.13503
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award