LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 décembre 2020
Cassation partielle sans renvoi
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 736 F-D
Pourvoi n° K 18-25.197
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 2 DÉCEMBRE 2020
La société ADN informatique industrielle, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° K 18-25.197 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Caen (2e chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à la société ASPI, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Champalaune, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société ADN informatique industrielle, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société ASPI, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Champalaune, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 6 septembre 2018), rendu en matière de référés, la société ASPI, reprochant à la société ADN des faits de concurrence déloyale, a saisi le président d'un tribunal de commerce sur requête aux fins d'être autorisée, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, à procéder au siège social de la société ADN à la saisie de tous documents et fichiers informatiques de nature à établir les pratiques déloyales de celle-ci.
2. Par ordonnance du 11 juillet 2017, le président du tribunal de commerce a fait droit à la demande de saisie et a ordonné le séquestre par l'huissier de justice désigné des pièces appréhendées et leur conservation en son étude jusqu'à mainlevée du séquestre et/ou communication des pièces saisies ordonnée judiciairement. Les mesures ordonnées ont été exécutées le 19 juillet 2017.
3. Le 4 août 2017, la société ASPI a assigné en référé la société ADN, sur le fondement de l'article 872 du code de procédure civile, aux fins de mainlevée et communication des éléments et pièces placés sous séquestre. Reconventionnellement, la société ADN a demandé la rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
4. La société ADN fait grief à l'arrêt de statuer sur la demande de main-levée du séquestre et de la communication des documents saisis après avoir statué sur la demande de rétractation de l'ordonnance, alors « que l'instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet ; qu'est dès lors irrecevable la demande tendant à voir ordonner la mainlevée de la mesure de séquestre et la communication des documents saisis ; qu'en statuant sur ces demandes de la société ASPI en y faisant droit après avoir statué sur la demande de rétractation dont elle était saisie, la cour d'appel a violé l'article 497 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Ayant constaté que le juge des référés avait été saisi par la société ASPI d'une demande de mainlevée du séquestre des documents appréhendés en exécution de l'ordonnance sur requête rendue le 11 juillet 2017 et que la société ADN avait formé, à titre reconventionnel, une demande de rétractation de cette ordonnance, la cour d'appel, qui aurait dû en déduire que cette demande de la société ADN, formée devant un juge qui n'était pas le juge des requêtes, était irrecevable, devait en revanche se prononcer sur la demande de mainlevée dont elle était saisie à titre principal.
6. Le moyen, qui postule le contraire, manque en droit.
Sur le quatrième moyen
Enoncé du moyen
7. La société ADN fait grief à l'arrêt d'ordonner la main-levée du séquestre et la communication des documents saisis à la société ASPI, alors « que la demande de levée de séquestre ne tend à obtenir du juge qu'une mesure d'instruction complémentaire, destinée à assurer l'efficacité de la mesure ordonnée sur requête ; que, tout comme la mesure ordonnée sur requête, la mesure d'instruction complémentaire doit être nécessaire, proportionnée et ne pas affecter, notamment, le secret des affaires au-delà de ce qui est strictement nécessaire ; qu'en autorisant la mesure de levée du séquestre et la communication en totalité des milliers de documents saisis, sans effectuer de tri ou de filtrage, ni rechercher si n'était pas ainsi donné accès à la société ASPI à des documents susceptibles d'affecter les droits légitimes de la société ADN, relatifs notamment au secret des affaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 145 et 872 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. Il ne résulte ni des conclusions d'appel, dont le dispositif demandait des dommages-intérêts au titre de l'abus qu'aurait constitué la procédure de demande en mainlevée du séquestre, ni de l'arrêt que la société ADN, qui se bornait à demander le rejet de la production de pièces saisies devant la cour d'appel, ait demandé leur tri au regard de l'atteinte du secret des affaires.
9. Nouveau et mélangé de fait et de droit, le moyen est irrecevable.
Mais sur le moyen, relevé d'office
10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.
Vu l'article 496, alinéa 2, du code de procédure civile :
11. Il résulte de ce texte que l'instance en rétractation d'une ordonnance rendue sur requête a pour seul objet de soumettre à l'examen d'un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire. Il s'en déduit que la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet et que seul le juge des requêtes qui a rendu l'ordonnance peut être saisi d'une demande de rétractation de celle-ci.
12. Pour rejeter la demande de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017, l'arrêt retient que la nature des faits dont cette mesure devait concourir à rapporter la preuve excluait le caractère contradictoire de la procédure et justifiait le recours à l'ordonnance sur requête pour prévenir tout risque de disparition des preuves.
13. En statuant ainsi sur le bien-fondé de la demande de rétractation de l'ordonnance ayant autorisé la mesure d'instruction contestée, alors qu'elle était saisie à titre principal d'une demande de la société ASPI de mainlevée des éléments et pièces placés sous séquestre et que la demande de rétractation, qui avait été formée à titre reconventionnel par la société ADN devant elle et non devant le juge des requêtes ayant rendu cette ordonnance, était irrecevable, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
14. La cassation prononcée sur le moyen relevé d'office porte sur le seul rejet de la demande de la société ADN de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017.
15. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
16. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond sur le point atteint par la cassation, en prononçant l'irrecevabilité de la demande de rétractation de l'ordonnance, formée par la société ADN devant le juge des référés.
PAR CES MOTIFS, la Cour, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017, l'arrêt rendu le 6 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Infirme l'ordonnance rendue le 27 décembre 2017 par le juge des référés du tribunal de commerce de Coutances mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande en rétractation formée contre l'ordonnance du 11 juillet 2017 ;
Déclare irrecevable la demande de rétractation formée contre l'ordonnance du 11 juillet 2017 par la société ADN ;
Condamne la société ADN aux dépens, incluant ceux exposés devant les juges du fond ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société ADN et la condamne à payer à la société ASPI la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société ADN informatique industrielle.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, rendu en référé, d'avoir rejeté la demande de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017 et confirmé les mesures d'instruction ordonnées ;
AUX MOTIFS QUE, « en l'espèce compte tenu des dates respectives de ces événements la démission de monsieur J... de la SAS ASPI, la création par ce dernier d'une société concurrente et l'embauche dans les semaines suivant son immatriculation de plusieurs des salariés détenant le savoir-faire acquis auprès de la SAS ASPI et recherché par ses clients suivie du départ de plusieurs d'entre eux chez la SARL ADN dans les mois suivants accréditaient au 11 juillet 2017 l'existence d'un projet concerté dont la réalisation ne pouvait objectivement que désorganiser la SAS ASPI en la privant simultanément de plusieurs salariés compétents et l'exposer ,du fait de la perte du savoir-faire correspondant acquis à ses frais par ces derniers dans le développement du logiciel "Visionner", à la perte de clients à la recherche de ce savoir-faire et heureux de le retrouver chez la SARL ADN.
Les fichiers saisis le 19 juillet 2017 confirment l'appréhension par la SARL ADN d'une documentation technique, commerciale et administrative portant le logo ASPI dont le listing joint au procès-verbal de constat dressé à cette date établit que la plupart des documents ont été créés à une date antérieure à l'immatriculation de la SARL ADN le 7 novembre 2011, sans qu'il soit établi qu'il s'agirait de documents remis par les clients comme le soutient l'appelante.
Au vu du contenu des documents regroupés sous sa pièce n°23 par la SAS ASPI la SARL ADN disposait ainsi de documents administratifs ASPI tels qu'un modèle du PPSPS, des bons de livraison de matériels et de prestations ASPI, un document interne de méthodologie ASPI, d'une documentation commerciale tels que des comptes rendus détaillés aux clients portant le logo ASPI ainsi que d'une abondante documentation technique portant aussi le logo ASPI.
En ce qu'ils accréditent l'existence d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme consistant essentiellement pour la SARL ADN à profiter indûment, au travers du recrutement de salariés venant de la SAS ASPI, des investissements consentis par celle-ci dans le développement du logiciel "Visionner" et à obtenir ainsi un avantage concurrentiel sans en supporter le coût tout en désorganisant l'activité de l'entreprise concurrente ces éléments suffisent à caractériser le motif légitime exigé par l'article 145 du code de procédure civile pour autoriser la saisie de documents demandée par la SAS ASPI.
La nature des faits dont cette mesure devait concourir à rapporter la preuve excluait le caractère contradictoire de la procédure et justifiait le recours à l'ordonnance sur requête pour prévenir tout risque de disparition des preuves » ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « ces aspects du litige ne remettent pas en cause le fait que les allégations de la société A.S.P.I. sont suffisamment étayées et concordantes pour démontrer la réalité d'un transfert rapide de son activité au profit de la société ADN - INFORMATIQUE INDUSTRIELLE et laisser supposer que ce transfert de chiffre d'affaires puisse résulter d'une concurrence déloyale.
Dès lors, elle était bien fondée à solliciter que soit ordonnée une mesure de saisie, à l'effet de conserver et d'établir avant tout procès, la preuve des faits dont peut dépendre la solution du litige. Le recours à une procédure non contradictoire est justifiée par la nécessité d'éviter toute destruction de preuve, ou/et d'éviter l'altération de la sincérité de tout ou partie d'entre elles.
Il est évident que certaines des pièces saisies auraient pu être obtenues dans le cadre d'une mesure contradictoire, tel est le cas par exemple de la comptabilité, qui existe du seul fait de l'activité, et qui, par principe, ne peut être détruite ou altérée.
Cependant, si la documentation comptable peut être utile à l'appréciation de l'ampleur du transfert de chiffre d'affaires, elle n'est pas de nature à elle seule à démontrer le caractère déloyal de ce transfert.
En revanche, il est illusoire de considérer que la communication des pièces de nature à démontrer la réalité des actes déloyaux (courriers, mails, devis, études...) pourrait être utilement obtenue dans le cadre d'une procédure contradictoire. Il est en effet évident, qu'à tout le moins, le concurrent déloyal se gardera de communiquer des pièces dont l'autre partie ignore l'existence même.
Dans une telle hypothèse, seule la procédure de saisie non contradictoire est de nature à répondre efficacement à la manifestation de la vérité, étant précisé que les pièces saisies seront évidemment soumises au débat contradictoire en cas de poursuite de l'action, aux risques et périls du demandeur. En conséquence, la société ADN - INFORMATIQUE INDUSTRIELLE sera déboutée de sa demande relative à l'irrecevabilité de l'action de la société A.S.P.I. pour défaut de justification de la dérogation au principe du contradictoire » ;
1°) ALORS QU'il appartient au juge saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête de rechercher si la requête et l'ordonnance rendue sur son fondement exposent les circonstances exigeant que la mesure réclamée ne soit pas prise contradictoirement, sans pouvoir procéder à sa propre appréciation ; qu'en affirmant que la nature des faits reprochés – à savoir actes de parasitisme et concurrence déloyale-, dont la mesure devait concourir à rapporter la preuve, excluait le caractère contradictoire et justifiait le recours à l'ordonnance sur requête pour prévenir tout risque de déperdition des preuves, la cour d'appel a procédé à sa propre appréciation des faits, sans examiner la requête, ni l'ordonnance, et a violé les articles 145 et 493 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE, en toute hypothèse, il peut être ordonné sur requête toutes mesures d'instruction légalement admissibles lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement ; qu'à cet égard, les motifs propres à caractériser l'existence de circonstances susceptibles de justifier une dérogation au principe de la contradiction doivent figurer dans la requête ou dans l'ordonnance rendue à la suite de cette requête, sans que le juge de la rétractation puisse suppléer une carence de motivation de cette ordonnance ; qu'en l'espèce, l'ordonnance du 11 juillet 2017 ne contient pas de motifs justifiant de déroger au principe de la contradiction ; que la requête du 11 juillet 2017 se borne à affirmer, sans démonstration, ni explication, que compte tenu de la nature des faits allégués – à savoir des faits de parasitisme et de concurrence déloyale- le caractère non contradictoire de la mesure se justifie par la nécessité d'éviter toute destruction de pièces et/ou éviter l'altération de la sincérité de tout ou partie d'entre elles ; qu'il ne ressort pas de ces motifs généraux une justification concrète d'écarter, en l'espèce, le principe du contradictoire, que la cour d'appel aurait examinée et qui justifierait de rejeter la demande de rétractation de l'ordonnance ; qu'en rejetant dans ces circonstances la demande de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, rendu en référé, d'avoir rejeté la demande de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017 et confirmé les mesures d'instruction ordonnées ;
AUX MOTIFS QUE, en l'espèce compte tenu des dates respectives de ces événements la démission de monsieur J... de la SAS ASPI, la création par ce dernier d'une société concurrente et l'embauche dans les semaines suivant son immatriculation de plusieurs des salariés détenant le savoir-faire acquis auprès de la SAS ASPI et recherché par ses clients suivie du départ de plusieurs d'entre eux chez la SARL ADN dans les mois suivants accréditaient au 11 juillet 2017 l'existence d'un projet concerté dont la réalisation ne pouvait objectivement que désorganiser la SAS ASPI en la privant simultanément de plusieurs salariés compétents et l'exposer ,du fait de la perte du savoir-faire correspondant acquis à ses frais par ces derniers dans le développement du logiciel "Visionner", à la perte de clients à la recherche de ce savoir-faire et heureux de le retrouver chez la SARL ADN.
Les fichiers saisis le 19 juillet 2017 confirment l'appréhension par la SARL ADN d'une documentation technique, commerciale et administrative portant le logo ASPI dont le listing joint au procès-verbal de constat dressé à cette date établit que la plupart des documents ont été créés à une date antérieure à l'immatriculation de la SARL ADN le 7 novembre 2011, sans qu'il soit établi qu'il s'agirait de documents remis par les clients comme le soutient l'appelante.
Au vu du contenu des documents regroupés sous sa pièce n°23 par la SAS ASPI la SARL ADN disposait ainsi de documents administratifs ASPI tels qu'un modèle du PPSPS, des bons de livraison de matériels et de prestations ASPI, un document interne de méthodologie ASPI, d'une documentation commerciale tels que des comptes rendus détaillés aux clients portant le logo ASPI ainsi que d'une abondante documentation technique portant aussi le logo ASPI.
En ce qu'ils accréditent l'existence d'actes de concurrence déloyale et de parasitisme consistant essentiellement pour la SARL ADN à profiter indûment, au travers du recrutement de salariés venant de la SAS ASPI, des investissements consentis par celle-ci dans le développement du logiciel "Visionner" et à obtenir ainsi un avantage concurrentiel sans en supporter le coût tout en désorganisant l'activité de l'entreprise concurrente ces éléments suffisent à caractériser le motif légitime exigé par l'article 145 du code de procédure civile pour autoriser la saisie de documents demandée par la SAS ASPI.
La nature des faits dont cette mesure devait concourir à rapporter la preuve excluait le caractère contradictoire de la procédure et justifiait le recours à l'ordonnance sur requête pour prévenir tout risque de disparition des preuves ;
ALORS QUE les mesures d'instruction que le juge ordonne doivent être nécessaires et proportionnées, ce qui implique qu'elles soient limitées dans le temps, dans l'espace et par leur objet ; qu'en confirmant les mesures ordonnées le 11 juillet 2017, sans rechercher si ces mesures consistant à obtenir la communication de documents relatifs à l'activité de la société ADN et à ses relations avec ses salariés et ses clients, sans que puisse être opposé le secret des affaires, au siège de la société et chez toute autre personne ou établissement dont l'existence pourrait être révélée au cours des opérations, sans limitation dans le temps, ne s'analysait pas en une mesure d'investigation générale excédant les prévisions de l'article 145 du code de procédure civile, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, rendu en référé, d'avoir statué sur la demande de main-levée du séquestre et de la communication des documents saisis après avoir statué sur la demande en rétractation de l'ordonnance ;
AUX MOTIFS QUE le président du tribunal de commerce de Coutances était compétent non seulement pour ordonner la mesure d'instruction sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile mais aussi pour statuer en référé sur la demande principale de mainlevée du séquestre des pièces saisies en exécution de cette mesure et de communication des dites pièces d'une part, et sur la demande reconventionnelle de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017 présentée par la SARL ADN d'autre part. [...]
La SARL ADN conclut à la réformation de l'ordonnance du 27 décembre 2017 ayant ordonné la mainlevée du séquestre des documents saisis et leur communication à la SAS ASPI.
Il a déjà été répondu sur la compétence du juge des référés pour connaître des demandes qui lui étaient soumises, l'excès de pouvoir qui en serait résulté ainsi que sur la prescription alléguée de l'action de la SAS ASPI et la cour renvoie aux précédents développements sur ces points.
Pour soutenir que les conditions de l'article 872 du code de procédure civile sur lequel la SAS ASPI fondait sa demande de mainlevée et de communication n'étaient pas réunies la SARL ADN argue de l'absence d'urgence à prendre ces mesures du fait de la prescription alléguée et de la collaboration des deux sociétés de 2012 à 2015 qui offrait à la SAS ASPI toute possibilité de caractériser la concurrence déloyale Invoquée avant le mois de juillet 2017.
Mais ayant obtenu la possibilité de faire procéder à une mesure de constat et de saisie de documents dans les locaux de la SARL ADN la .SAS ASPI a tout intérêt à pouvoir exploiter au plus vite les documents collectés afin de vérifier s'ils peuvent légitimer l'exercice éventuel d'une action au fond, ce dont il s'ensuit que la condition tenant à l'urgence est remplie.
La SARL ADN argue ensuite de l'absence de différend entre les deux sociétés.
Les développements précédents suffisent à caractériser l'existence du différend opposant les deux sociétés quant aux actes de concurrence déloyale et de parasitisme reprochés par l'intimée à l'appelante et formellement contestés par cette dernière.
La SARL ADN argue enfin de l'existence d'une contestation sérieuse. Ce moyen - est toutefois inopérant dès lors que l'article 872 du code de procédure civile visant "toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend" n'impose pas le constat cumulatif de l'une et de l'autre mais offre une alternative entre l'absence de contestation sérieuse et l'existence d'un différend.
Les conditions posées par l'article 872 du code de procédure civile étant réunies l'ordonnance rendue le 27 décembre 2017 doit être confirmée en ce qu'elle a ordonné la mainlevée du séquestre des documents saisis dans les locaux de la SARL ADN et leur communication à la SAS ASPI ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE la société ADN - INFORMATIQUE INDUSTRIELLE étant déboutée des deux demandes précédentes, il y a lieu de la débouter de sa demande de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017.
En conséquence, il convient de faire droit à la demande de mainlevée, et à la communication à la société A.S.P.I., des éléments et pièces placés sous séquestre par Maître M... le 19 juillet 2017 ;
ALORS QUE l'instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à cet objet ; qu'est dès lors irrecevable la demande tendant à voir ordonner la mainlevée de la mesure de séquestre et la communication des documents saisis ; qu'en statuant sur ces demandes de la société Aspi et en y faisant droit après avoir statué sur la demande de rétractation dont elle était saisie, la cour d'appel a violé l'article 497 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaireIL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, rendu en référé, d'avoir ordonné la main-levée du séquestre et la communication des documents saisis ;
AUX MOTIFS QUE le président du tribunal de commerce de Coutances était compétent non seulement pour ordonner la mesure d'instruction sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile mais aussi pour statuer en référé sur la demande principale de mainlevée du séquestre des pièces saisies en exécution de cette mesure et de communication des dites pièces d'une part, et sur la demande reconventionnelle de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017 présentée par la SARL ADN d'autre part. [...]
La SARL ADN conclut à la réformation de l'ordonnance du 27 décembre 2017 ayant ordonné la mainlevée du séquestre des documents saisis et leur communication à la SAS ASPI.
Il a déjà été répondu sur la compétence du juge des référés pour connaître des demandes qui lui étaient soumises, l'excès de pouvoir qui en serait résulté ainsi que sur la prescription alléguée de l'action de la SAS ASPI et la cour renvoie aux précédents développements sur ces points.
Pour soutenir que les conditions de l'article 872 du code de procédure civile sur lequel la SAS ASPI fondait sa demande de mainlevée et de communication n'étaient pas réunies la SARL ADN argue de l'absence d'urgence à prendre ces mesures du fait de la prescription alléguée et de la collaboration des deux sociétés de 2012 à 2015 qui offrait à la SAS ASPI toute possibilité de caractériser la concurrence déloyale Invoquée avant le mois de juillet 2017.
Mais ayant obtenu la possibilité de faire procéder à une mesure de constat et de saisie de documents dans les locaux de la SARL ADN la .SAS ASPI a tout intérêt à pouvoir exploiter au plus vite les documents collectés afin de vérifier s'ils peuvent légitimer l'exercice éventuel d'une action au fond, ce dont il s'ensuit que la condition tenant à l'urgence est remplie.
La SARL ADN argue ensuite de l'absence de différend entre les deux sociétés.
Les développements précédents suffisent à caractériser l'existence du différend opposant les deux sociétés quant aux actes de concurrence déloyale et de parasitisme reprochés par l'intimée à l'appelante et formellement contestés par cette dernière.
La SARL ADN argue enfin de l'existence d'une contestation sérieuse. Ce moyen - est toutefois inopérant dès lors que l'article 872 du code de procédure civile visant "toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend" n'impose pas le constat cumulatif de l'une et de l'autre mais offre une alternative entre l'absence de contestation sérieuse et l'existence d'un différend.
Les conditions posées par l'article 872 du code de procédure civile étant réunies l'ordonnance rendue le 27 décembre 2017 doit être confirmée en ce qu'elle a ordonné la mainlevée du séquestre des documents saisis dans les locaux de la SARL ADN et leur communication à la SAS ASPI ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE la société ADN - INFORMATIQUE INDUSTRIELLE étant déboutée des deux demandes précédentes, il y a lieu de la débouter de sa demande de rétractation de l'ordonnance du 11 juillet 2017.
En conséquence, il convient de faire droit à la demande de mainlevée, et à la communication à la société A.S.P.I., des éléments et pièces placés sous séquestre par Maître M... le 19 juillet 2017 ;
ALORS QUE la demande de levée de séquestre ne tend à obtenir du juge qu'une mesure d'instruction complémentaire, destinée à assurer l'efficacité de la mesure ordonnée sur requête ; que, tout comme la mesure ordonnée sur requête, la mesure d'instruction complémentaire doit être nécessaire, proportionnée et ne pas affecter, notamment, le secret des affaires au-delà de ce qui est strictement nécessaire ; qu'en autorisant la mesure de levée du séquestre et la communication en totalité des milliers de documents saisis, sans effectuer de tri ou de filtrage, ni rechercher si n'était pas ainsi donné accès à la société Aspi à des documents susceptibles d'affecter les droits légitimes de la société ADN, relatifs notamment au secret des affaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 145 et 872 du code de procédure civile.