LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 26 novembre 2020
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 1329 FS-P+B+I
Pourvoi n° T 19-18.584
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020
M. X... K..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° T 19-18.584 contre l'arrêt rendu le 27 mars 2019 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe Seine-Maritime, dont le siège est 50 avenue de Bretagne, 76039 Rouen cedex 1,
2°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié 14 avenue Duquesne, 75350 Paris 07 SP,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. K..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe Seine-Maritime, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Taillandier-Thomas, Renault-Malignac, M. Rovinski, Mme Cassignard, conseillers, Mme Le Fischer, M. Gauthier, Mmes Vigneras, Dudit, M. Pradel, conseillers référendaires, M. de Monteynard, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 27 mars 2019), M. K... (la victime) a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe Seine-Maritime (la caisse), le 2 février 2016, une déclaration de maladie professionnelle, accompagnée d'un certificat médical initial du 26 janvier 2016 faisant état d'une "exposition à l'amiante de plus de 30 ans. Dyspnée d'effort avec au scanner thoracique un nodule sous-pleural" et visant le tableau n° 30 des maladies professionnelles.
2. La caisse ayant refusé de prendre en charge cette affection au titre de la législation professionnelle, au motif que les nodules et l'adénopathie n'étaient pas inscrits au tableau n° 30, M. K... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.
Examen des moyens
Sur les deux moyens réunis
Enoncé du moyen
3. La victime fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors :
« 1°/ que l'organisme social doit instruire la demande de prise en charge d'une maladie professionnelle sans être tenu par le tableau visé par la déclaration ; que, si l'enquête fait apparaître que la maladie médicalement constatée n'est pas désignée dans le tableau visé par la déclaration, la caisse ne peut décider de son origine professionnelle qu'après l'avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et l'évaluation de l'incapacité permanente de la victime ; que, le tribunal des affaires de sécurité sociale avait justement retenu « que le médecin conseil a indiqué, à juste titre, que la pathologie déclarée ne ressortait pas du tableau 30 mais qu'il n'en demeure pas moins qu'il existe une déclaration de maladie professionnelle que la caisse se devait d'instruire et qu'en l'absence d'inscription de cette pathologie à un tableau la caisse doit d'instruire le dossier au regard des alinéas quatre et cinq de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, qu'il appartenait donc à la caisse de saisir un comité de régional de reconnaissance des maladies professionnelles dans le délai de trois mois de la déclaration sauf à notifier la nécessité d'un délai complémentaire ce qu'elle n'a pas fait » ; que, pour infirmer ce jugement, la cour d'appel retient que la victime « n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale - il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP, la maladie déclarée par la victime ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge » ; qu'en estimant que la caisse devait instruire la demande de prise en charge de la maladie professionnelle uniquement au regard du tableau visé par la déclaration, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que dans ses conclusions, l'assuré social faisait valoir « qu'à tout le moins, la victime est bien fondée à solliciter de la juridiction qu'elle enjoigne à la CPAM la saisine d'un CRRMP afin qu'il se prononce sur le lien essentiel et direct entre la maladie et le travail » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen des écritures, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
4. Dès lors que la demande de la victime se réfère à un tableau de maladies professionnelles, l'organisme social n'est pas tenu, en cas de refus de prise en charge, d'instruire cette demande selon les règles applicables à la reconnaissance du caractère professionnel des maladies non désignées dans un tableau.
5. L'arrêt relève que la maladie déclarée par la victime ne figurait pas au tableau n° 30, dont elle invoquait exclusivement le bénéfice.
6. De ces constatations, la cour d'appel, qui n'avait pas à répondre à un moyen que celles-ci rendaient inopérant, a exactement déduit que la caisse n'était pas tenue de saisir un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.
7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. K... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. K...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur K... de ses demandes, notamment celle visant à faire reconnaître que la maladie devait être prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels ;
AUX MOTIFS QUE : « « En application de l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, la reconnaissance implicite du caractère professionnel d'une maladie sanctionne le seul non-respect par la caisse des délais qui lui sont impartis pour statuer, soit trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial. Ainsi, l'absence de saisine par la caisse d'un CRRMP ne saurait avoir pour effet une reconnaissance implicite du caractère professionnel de la maladie déclarée. En l'espèce, la caisse a reçu ces pièces le 3 février 2016 et a notifié son refus de prise en charge le 31 mars 2016. Ayant respecté le délai de trois mois pour rendre sa décision, c'est à tort que le tribunal des affaires de sécurité sociale a retenu l'existence d'une décision implicite de prise en charge. En vertu de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 25 %, déterminé conformément aux dispositions de l'article L. 434-2. Dans ces deux derniers cas la caisse reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. En l'espèce, M. K... n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP. La maladie déclarée par M. K... ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge ». »
ALORS QUE l'organisme social doit instruire la demande de prise en charge d'une maladie professionnelle sans être tenu par le tableau visé par la déclaration ; que, si l'enquête fait apparaître que la maladie médicalement constatée n'est pas désignée dans le tableau visé par la déclaration, la caisse ne peut décider de son origine professionnelle qu'après l'avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et l'évaluation de l'incapacité permanente de la victime ; que, le tribunal des affaires de sécurité sociale avait justement retenu « que le médecin conseil a indiqué, à juste titre, que la pathologie déclarée ne ressortait pas du tableau 30 mais qu'il n'en demeure pas moins qu'il existe une déclaration de maladie professionnelle que la caisse se devait d'instruire et qu'en l'absence d'inscription de cette pathologie à un tableau la caisse doit d'instruire le dossier au regard des alinéas quatre et cinq de l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale, qu'il appartenait donc à la caisse de saisir un comité de régional de reconnaissance des maladies professionnelles dans le délai de trois mois de la déclaration sauf à notifier la nécessité d'un délai complémentaire ce qu'elle n'a pas fait » ; que, pour infirmer ce jugement, la cour d'appel retient que « M. K... n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale - il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP, la maladie déclarée par M. K... ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge » ; qu'en estimant que la caisse devait instruire la demande de prise en charge de la maladie professionnelle uniquement au regard du tableau visé par la déclaration, la cour d'appel a violé l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Monsieur K... de ses demandes, notamment celle visant à enjoindre à la CPAM de désigner un CRRMP conformément aux dispositions de l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale ;
AUX MOTIFS QUE : « « En application de l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, la reconnaissance implicite du caractère professionnel d'une maladie sanctionne le seul non-respect par la caisse des délais qui lui sont impartis pour statuer, soit trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial. Ainsi, l'absence de saisine par la caisse d'un CRRMP ne saurait avoir pour effet une reconnaissance implicite du caractère professionnel de la maladie déclarée. En l'espèce, la caisse a reçu ces pièces le 3 février 2016 et a notifié son refus de prise en charge le 31 mars 2016. Ayant respecté le délai de trois mois pour rendre sa décision, c'est à tort que le tribunal des affaires de sécurité sociale a retenu l'existence d'une décision implicite de prise en charge. En vertu de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 25 %, déterminé conformément aux dispositions de l'article L. 434-2. Dans ces deux derniers cas la caisse reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. En l'espèce, M. K... n'ayant pas soumis de demande à la caisse au titre d'une maladie hors tableau, aucun différend ne l'opposait à cet organisme sur la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale. Il en résulte que la caisse n'était pas tenue de faire estimer l'incapacité permanente de l'assuré par son service médical et de saisir, le cas échéant, un CRRMP. La maladie déclarée par M. K... ne figurant pas dans le tableau n° 30, c'est à juste titre que la caisse a refusé sa prise en charge ». »
ALORS QUE, dans ses conclusions, l'assuré social faisait valoir « qu'à tout le moins, Monsieur K... est bien fondé à solliciter de la juridiction qu'elle enjoigne à la CPAM la saisine d'un CRRMP afin qu'il se prononce sur le lien essentiel et direct entre la maladie et le travail » ; qu'en s'abstenant de répondre ce moyen des écritures, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.