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25/11/2020 | FRANCE | N°19-14466

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 novembre 2020, 19-14466


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 novembre 2020

Rejet non spécialement motivé

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 11038 F-D

Pourvoi n° S 19-14.466

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020

La soc

iété Honeywell matériaux de friction, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , devenue la société Garrett motion France B, a for...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 novembre 2020

Rejet non spécialement motivé

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 11038 F-D

Pourvoi n° S 19-14.466

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020

La société Honeywell matériaux de friction, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , devenue la société Garrett motion France B, a formé le pourvoi n° S 19-14.466 contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2019 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. G... O..., domicilié [...] ,

2°/ à la société Valéo, société anonyme, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Ricour, conseiller, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Garrett motion France B, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Valéo, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. O..., après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Ricour, conseiller rapporteur, Mme Gilibert, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Garrett motion France B, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés Garrett motion France B et Valéo et condamne la société Garrett motion France B à payer à M. O... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Garrett motion France B

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné in solidum la société Valeo et la société HMF à payer à M. O... la somme de 8 000 € de dommages-intérêts pour préjudice d'anxiété ;

AUX MOTIFS QUE « Le salarié qui a travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel, pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante, se trouve du fait de l'insuffisance des moyens mis en oeuvre par ses employeurs successifs pour assurer l'obligation de sécurité, dans un état d'inquiétude permanent face au risque de développer à tout moment une maladie liée à l'amiante. Cela génère un préjudice moral qualifié de préjudice d'anxiété, dans lequel est inclus le bouleversement des conditions d'existence qui en résulte et dont le salarié peut obtenir réparation dès lors qu'il remplit les conditions prévues par l'article susvisé, et ce, qu'il se soumette ou non à des examens médicaux, quelle que soit la nature de son exposition au minerai, fonctionnelle ou environnementale et qu'il ait ou non sollicité le bénéfice de l'ACAATA. L'établissement de Condé sur Noireau relevant initialement de la société Valéo puis de la société HMF, au sein duquel il n'est pas contesté que M. O... travaillait depuis 1966, a été classé sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'ACAATA, pour une période courant de 1960 à 1996, par deux arrêtés successifs du 31 mars 1999 et du 16 juillet 2000, aucune distinction n'étant faite dans ces textes sur les emplois concernés. Il importe peu que le salarié ait ou non d'ores et déjà bénéficié de cette allocation, l'effectivité de son emploi au sein de l'établissement à compter de 1966 et donc pendant une période où y étaient traités l'amiante ou des matériaux en contenant n'étant pas contestée, peu important au regard de ce qui précède du type d'emploi occupé par M. O.... Au-delà du préjudice que l'ACAATA a pour but de compenser et de ceux nés d'une éventuelle maladie professionnelle pris en charge dans le cadre de la législation spécifique sur les maladies professionnelles, le fait d'avoir ainsi travaillé dans un établissement reconnu comme ayant utilisé de l'amiante a causé un préjudice d'anxiété tel que ci-dessus défini et ce, indépendamment de la durée d'exposition, M. O... n'ayant pas à justifier d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité telle qu'elle résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail, manquement dont l'existence est présumée du fait du classement de l'établissement sur la liste de ceux ouvrant droit à l'ACAATA, ni d'un préjudice propre en lien avec ce manquement. Bien que qualifiée d'obligation de résultat, il est cependant aujourd'hui admis que l'employeur puisse démontrer qu'il n'a commis aucune faute dans l'exécution de son obligation de sécurité et qu'il a mis tout en oeuvre pour éviter les risques et protéger ses salariés. Or il ne résulte pas des éléments versés aux débats que les sociétés Valéo puis HMF aient mis en oeuvre tous les moyens de prévention des risques professionnels de nature à assurer une protection effective à ses salariés, tant sur le plan collectif qu'individuel, alors que la dangerosité du minerai utilisé ne pouvait être ignorée, ce que démontre la succession de textes à destination des employeurs, en particulier les décrets du 31 août 1950 et du 5 janvier 1976 inscrivant l'asbestose et le mésothéliome au tableau des maladies professionnelles liées à l'inhalation des poussières d'amiante. En effet, s'agissant de Valéo, l'évocation dans un rapport de 1963 de la limitation considérable des quantités de poussières d'amiante est insuffisante à caractériser l'effectivité de la protection résultant des mesures prises, quand bien même dénoterait-elle un souci permanent d'amélioration du dépoussièrage, alors au demeurant que l'affectation des augmentations de dépenses en matière d'hygiène et de sécurité au problème spécifique des poussières d'amiante n'est aucunement démontrée. De même la seule réduction de l'empoussièrage ne peut conduire à considérer que les salariés, et en particulier M. O..., étaient protégés des effets de l'inhalation de l'amiante, la fourniture d'équipements individuels, de type masque à la supposer établie à compter de 1967, ne caractérisant pas l'effectivité de la protection offerte. Il importe peu que Valéo ait respecté les dispositions légales sur ce point dès lors que ce respect n'apporte pas plus la preuve de l'effectivité des mesures sur la protection de la santé du salarié, dont seul l'employeur est responsable au regard de l'article L. 4121-1 ci-dessus visé, et ce, indépendamment de l'action du législateur. Il en est de même pour la société HMF qui démontre certes avoir mis en oeuvre des mesures destinées à arrêter progressivement l'utilisation de l'amiante dans son processus de fabrication, et ce avant même l'entrée en vigueur de l'interdiction, qui démontre aussi avoir entrepris un désamiantage, mais qui n'apporte pour autant pas la preuve de ce que l'ensemble des moyens qu'elle évoque, tant de protection individuelle que collective était de nature à rendre effective la protection de M. O.... La société HMF ne conteste d'ailleurs pas qu'en sa qualité de salarié, ce dernier est resté exposé aux poussières d'amiante après 1990, dès lors qu'elle évoque elle-même une exposition faible à ce minerai, y compris au regard des prélèvements effectués après le décret N° 96-97 du 7 février 1996 relatif à la protection de la population contre les risques sanitaires liés à une exposition à l'amiante. Dans de telles conditions, le salarié s'est trouvé, tant par le fait de la société Valéo que par celui de la société HMF, dans une situation d'inquiétude permanente face au risque de déclaration à tout moment d'une maladie liée à l'amiante, situation caractérisant l'existence d'un préjudice d'anxiété dont il est en conséquence fondé à solliciter la réparation. A ce titre, l'indemnisation due par l'employeur doit être fixée à la somme de 8.000 euros, aucun élément ne permettant de retenir un préjudice de plus grande ampleur et le jugement entrepris sera confirmé sur ce point. Les sociétés ayant de par leur fait concouru de manière indivisible à la réalisation du dommage, elles seront condamnées in solidum et non solidairement à réparation »;

1. ALORS QUE la réparation du préjudice spécifique d'anxiété des salariés ayant travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 et figurant sur une liste établie par arrêté ministériel pendant une période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante repose sur les règles de la responsabilité civile et, plus précisément, sur un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ; qu'il en résulte que le régime probatoire attaché à l'existence de ce préjudice ne peut être fondé que sur des présomptions simples que l'employeur peut renverser en établissant soit que, nonobstant le classement de l'établissement, le salarié n'a pas, compte tenu des fonctions qu'il exerçait, été exposé au risque d'inhalation de poussières d'amiante au cours de son activité au sein de l'établissement, soit que l'employeur avait, au regard de son activité, de sa taille, des dispositions réglementaires en vigueur et des travaux effectués par le salarié, pris toutes les mesures nécessaires pour préserver la santé et la sécurité du salarié, de sorte qu'il n'a commis à l'égard du salarié aucun manquement à son obligation de sécurité ; qu'au cas présent, la société HMF faisait valoir, non seulement qu'elle avait, dès la reprise de l'établissement en octobre 1990, pris des mesures pour arrêter progressivement l'utilisation d'amiante et pour protéger les salariés contre le risque d'inhalation de poussières d'amiante, mais encore qu'elle avait fait procéder à des contrôles nombreux et réguliers qui avaient révélé des taux d'empoussièrements faibles, très inférieurs au seuil réglementaire ; qu'elle faisait donc valoir qu'elle n'avait commis aucun manquement à son obligation de sécurité ; qu'en se bornant à juger que la société HMF « n'apporte pas la preuve de ce que l'ensemble des moyens de protection qu'elle évoque, tant de protection individuelle que collective était de nature à rendre effective la protection de M. O... » et que la société HMF aurait reconnu une « exposition faible », sans rechercher si, au regard des éléments produits et notamment des prélèvements de poussières effectués, la société HMF ne démontrait pas qu'elle avait bien respecté l'ensemble des dispositions résultant de la réglementation en vigueur et n'avait commis aucun manquement à son obligation de sécurité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, le premier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017, applicable au litige, ensemble l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2. ALORS QUE le salarié qui recherche la responsabilité de son employeur doit justifier des préjudices qu'il invoque en faisant état d'éléments personnels et circonstanciés pertinents ; que la circonstance qu'il ait travaillé dans un établissement susceptible d'ouvrir droit à l'ACAATA ne dispense pas l'intéressé, qui sollicite l'indemnisation d'un préjudice d'anxiété, de justifier de tels éléments personnels et circonstanciés ; qu'au cas présent, la société exposante faisait valoir que le défendeur au pourvoi n'établissait pas la réalité du préjudice d'anxiété dont il demandait la réparation ; que pour allouer à M. O... une somme de 8 000 € de dommages-intérêts, la cour d'appel a jugé que le salarié n'avait pas à justifier d'un préjudice propre ; qu'en dispensant ainsi le défendeur au pourvoi de justifier de la réalité d'un préjudice d'anxiété personnellement subi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, le premier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017, applicable au litige, ensemble l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-14466
Date de la décision : 25/11/2020
Sens de l'arrêt : Rejet non spécialement motivé
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 31 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 nov. 2020, pourvoi n°19-14466


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.14466
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