La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/11/2020 | FRANCE | N°19-87145

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 24 novembre 2020, 19-87145


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 19-87.145 F-D

N° 2263

EB2
24 NOVEMBRE 2020

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 24 NOVEMBRE 2020

M. S... X... et M. K... Q... ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 16 septembre 2019, qui

, a condamné le premier, pour mise en danger de la vie d'autrui, harcèlement moral et infraction au code de l'environnement...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 19-87.145 F-D

N° 2263

EB2
24 NOVEMBRE 2020

CASSATION PARTIELLE

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 24 NOVEMBRE 2020

M. S... X... et M. K... Q... ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 16 septembre 2019, qui, a condamné le premier, pour mise en danger de la vie d'autrui, harcèlement moral et infraction au code de l'environnement et au code du travail, à deux ans d'emprisonnement dont six mois avec sursis et mise à l'épreuve, 7 000 euros d'amende et à une interdiction définitive de gérer une entreprise commerciale, et le second, pour faux et usage, à dix-huit mois d'emprisonnement et 10 000 euros d'amende.

Des mémoires, en demande et en défense, ont été produits.

Le pourvois sont joints en fonction de la connexité

Sur le rapport de Mme Goanvic, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. S... X..., les obsevations de la SARL cabinet Briard, avocat de M. K... Q..., les observations de Me Balat, avocat de M. T... M... et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Goanvic, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et Mme Guichard, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. En octobre 2010, un incendie a ravagé les locaux de la société Citron SA spécialisée dans la récupération, le traitement et le recyclage de déchets et d'ordures contenant des métaux lourds.

3. L'enquête a révélé que l'augmentation du volume de déchets traités ayant provoqué le dépassement des normes environnementales en matière de rejets toxiques, les dirigeants de la société ont ordonné la mise hors service du dispositif destiné à analyser ces derniers et la falsification des données communiquées à direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement.

4. Le 21 novembre 2016, le tribunal a condamné M. X... a 2 ans d'emprisonnement, 30 000 euros d'amende et a prononcé une interdiction définitive d'exercer une fonction d'encadrement et a dispensé de peine K... Q....

5. M. X... a formé appel, de même que le ministère public sur les dispositions relatives à la dispense de peine de M. Q....

Examen de la recevabilité du pourvoi formé par M. X...

6. La déclaration de pourvoi, faite par lettre, ne répond pas aux conditions exigées par les articles 576 et 577 du code de procédure pénale.

7.Dès lors, le pourvoi n'est pas recevable.

Examen des moyens

Sur le premier moyen,

8. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. Q... à une peine de dix huit mois d'emprisonnement et 10 000 euros d'amende, alors :

« 1°/ que l'article 132-19, alinéa 2 du code pénal impose qu'une condamnation à une peine d'emprisonnement sans sursis soit motivée par la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur ; que cette motivation doit témoigner de ce que cette peine est nécessaire et de ce que toute autre sanction serait manifestement inadéquate ; que la simple affirmation selon laquelle ces conditions sont remplies ne peut y suppléer ; qu'en se bornant à relever de manière abstraite que « la très importante gravité objective des faits, les circonstances de leur commission, ainsi que les éléments recueillis sur la personnalité de leur auteur, son évolution depuis les faits, sa situation matérielle, familiale et sociale, rendent nécessaire une peine d'emprisonnement de dix-huit mois, toute autre sanction étant manifestement inadéquate", sans concrètement motiver sa décision par référence à la gravité de l'infraction et la personnalité de M. Q..., la cour d'appel a méconnu le texte visé au moyen ;

2°/ que l'article 132-19, alinéa 3 du code pénal impose qu'une condamnation à une peine d'emprisonnement ferme – inférieure à deux ans ou un an en cas de récidive – qui n'a pas fait l'objet d'un aménagement ab initio par la juridiction soit spécialement motivée par référence à la situation matérielle, familiale et sociale du condamné ainsi que par référence à l'absence d'impossibilité matérielle d'ordonner une telle mesure ; qu'en omettant de motiver spécialement son refus d'ordonner l'aménagement de peine par référence à la situation matérielle, familiale et sociale de M. Q... et en ne justifiant d'aucune impossibilité matérielle d'y parvenir tandis même que ladite peine était inférieure à deux ans et que le prévenu, non récidiviste, était présent aux débats afin de répondre à toutes les questions nécessaires à la mise en place d'un tel aménagement, la cour d'appel a méconnu le texte visé au moyen ;

3°/ que conformément à l'article 132-20, alinéa 2 du code pénal, en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; que dès lors, en condamnant M. Q... à la peine d'amende de 10 000 euros en se bornant à mentionner la nature des faits ainsi que le prévenu « exerce aujourd'hui en qualité d'expert en contrat thermique et perçoit un salaire de 2 900 euros net », mais sans prendre le soin de mieux s'expliquer sur les charges de celui-ci, la cour d'appel a méconnu le texte visé au moyen. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 132-19 du code pénal dans sa rédaction alors en vigueur.

10. Il résulte de ce texte, dans sa version applicable au moment des faits, que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère inadéquat de toute autre sanction. Si la peine prononcée n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge qui décide de ne pas l'aménager doit, en outre, soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce et de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu.

11. Pour condamner le prévenu à la peine de dix huit mois d'emprisonnement, l'arrêt attaqué relève l'exceptionnelle gravité des infractions reprochées à M. Q... qui a contribué, par des falsifications, à une pollution de grande ampleur aux effets particulièrement dangereux et toujours actuels pour l'environnement, la faune, la flore et pour les salariés de la société.

12. Les juges ajoutent, qu'étant le seul professionnel compétent en matière de traitement des déchets dont il connaissait la législation et les risques, il a accepté les fonctions de directeur général de l'entreprise en ayant connaissance de ses pratiques déviantes ; qu'il a menti aux enquêteurs alors qu'il savait que les résultats des mesures réalisées étaient faux et qu'il n'a pas dénoncé les pratiques illégales de l'entreprise.

13. Ils en concluent que, si le reclassement de M. Q... n'est pas contesté, la gravité des faits, les circonstances de leur commission et les éléments recueillis sur la personnalité du prévenu, son évolution depuis les faits, sa situation matérielle, familiale et sociale, rendent nécessaire une peine d'emprisonnement de dix-huit mois, toute autre sanction étant manifestement inadéquate.

14. En se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur l'aménagement de la peine d'emprisonnement par une motivation spéciale au regard de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu et sans constater une impossibilité matérielle d'un tel aménagement, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé.

15. La cassation est en conséquence encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

16. La cassation sera limitée à la peine, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure.

17. Il appartiendra à la juridiction saisie, au cas où une peine d'emprisonnement sans sursis inférieure à deux ans, supérieure à un an, serait prononcée, d'appliquer, en matière d'aménagement, les dispositions en vigueur à la date expressément maintenues.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

I - DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi formé par M. S... X... ;

FIXE à 2 500 euros la somme que M. S... X... devra payer à M. M... T... en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale.

II - Sur le pourvoi formé par M. K... Q... :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rouen, en date du 16 septembre 2019, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rouen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre novembre deux mille vingt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-87145
Date de la décision : 24/11/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 16 septembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 24 nov. 2020, pourvoi n°19-87145


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : Me Balat, SARL Cabinet Briard, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.87145
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award