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19/11/2020 | FRANCE | N°19-18185

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 novembre 2020, 19-18185


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 novembre 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1249 F-D

Pourvoi n° J 19-18.185

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020

1°/ M. U... P..., domicilié [...] ,

2°/ la société GEI-T

erre, société civile immobilière,

3°/ la société U... P..., société à responsabilité limitée,

ayant toutes deux leur siège [...] ,

ont formé le pourvo...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 novembre 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1249 F-D

Pourvoi n° J 19-18.185

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020

1°/ M. U... P..., domicilié [...] ,

2°/ la société GEI-Terre, société civile immobilière,

3°/ la société U... P..., société à responsabilité limitée,

ayant toutes deux leur siège [...] ,

ont formé le pourvoi n° J 19-18.185 contre l'arrêt rendu le 19 avril 2019 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre A), dans le litige les opposant à M. K... I..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lemoine, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. P..., de la SCI GEI-Terre et de la société U... P..., de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de M. I..., et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Lemoine, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 19 avril 2019), M. P... et la SCI GEI-Terre, après avoir conclu une promesse de vente avec M. I... portant sur des parcelles de terrain et un ensemble de bâtiments industriels, ont engagé une action en nullité de cette promesse. Un arrêt irrévocable du 13 juin 2013 les a déboutés de l'intégralité de leurs demandes. M. P..., la SCI GEI-Terre et la société U... P..., titulaire d'un bail commercial sur les locaux objets de la promesse de vente litigieuse, ayant de nouveau assigné M. I... en annulation de cette promesse de vente, ce dernier a soulevé la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose déjà jugée au titre de l'arrêt du 13 juin 2013. En cours d'instance, et suite à une procédure de saisie-immobilière initiée par une banque à l'encontre de la société GEI-Terre, un juge de l'exécution a adjugé une des parcelles faisant l'objet de la promesse de vente.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. M. P... et la SCI GEI-Terre font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande tendant à l'annulation de la promesse de vente du 6 mai 2011, alors « que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ; que cette règle n'est écartée que lorsque l'événement invoqué résulte de l'accomplissement par le requérant d'une diligence qu'il avait négligé d'accomplir en temps utile et dont le défaut avait justifié le rejet de sa demande dans l'instance initiale ; qu'en retenant que la vente sur saisie immobilière de la parcelle cadastrée [...] objet de la promesse de vente du 6 mai 2011, ordonnée par jugement du juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Narbonne du 18 janvier 2016, ne pouvait constituer un élément nouveau permettant de faire obstacle à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 13 juin 2013 ayant débouté M. P... et la SCI GEI-Terre de leur demande en annulation de ladite promesse de vente, dès lors qu'elle résultait d'un défaut de paiement imputable à l'un des deux vendeurs indivisibles, cependant qu'en invoquant cette vente sur adjudication, M. P... et la société GEI-Terre ne se prévalaient nullement de l'accomplissement d'une diligence qu'ils avaient négligé d'accomplir en temps utile et dont le défaut avait justifié le rejet de leur demande dans l'instance initiale, la cour d'appel a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351, devenu 1355, du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

3. Le défendeur au pourvoi soutient que le moyen est irrecevable comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit.

4. Cependant, le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond, est recevable comme
étant de pur droit.

Bien-fondé du moyen

5. Il résulte des articles 480 du code de procédure civile et 1355 du code civil
que s'il incombe aux parties de présenter, dès l'instance relative à la première demande, l'ensemble des moyens qu'elles estiment de nature à fonder celle-ci, elles peuvent toutefois présenter de nouvelles demandes, au cours d'une instance ultérieure, dès lors que celles-ci sont fondées sur l'existence d'un droit né après la décision rendue à l'issue de l'instance initiale.

6. La cour d'appel a d'abord relevé, par motifs propres et adoptés, que par un arrêt du 13 juin 2013, la demande de M. P... et de la SCI GEI-Terre, tendant à l'annulation de la promesse de vente signée en 2011 en raison d'un dol qui aurait été commis par M. I..., a été rejetée.

7. Elle a ensuite constaté qu'à l'appui de leur nouvelle action en annulation de cette promesse de vente, les demandeurs invoquaient un nouveau moyen tiré de la violation de l'article L. 290-1 du code de la construction et de l'habitation.

8. Il en résulte que la nouvelle demande en annulation de la promesse de vente n'était pas fondée sur l'événement né après l'arrêt du 13 juin 2013 modifiant la situation juridique de M. P... et de la SCI GEI-Terre et consistant en la vente par adjudication d'une des parcelles objet de la promesse de la vente.

9. Par ce motif de pur droit substitué d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués par le moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. M. P... et la SCI GEI-Terre font grief à l'arrêt de rejeter le surplus de leurs demandes comme non fondées, alors « que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen de M. P... et de la SCI GEI-Terre tiré de ce que la promesse de vente du 6 mai 2011, indivisible entre eux, était devenue caduque en son entier par l'effet du jugement du juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Narbonne du 18 juillet 2016 portant adjudication de la parcelle cadastrée [...] à la société Smapi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

11. L' arrêt, en dépit de la formule générale du dispositif qui, par confirmation du premier jugement, « rejette le surplus des demandes comme non fondées », n'a pas statué sur la demande tendant à voir constater la caducité de la promesse de vente, dès lors qu'il ne résulte pas des motifs de la décision que la cour d'appel l'ait examinée.

12. L'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. P..., la SCI GEI-Terre et la société U... P... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. P..., la SCI GEI-Terre et la société U... P... et les condamne in solidum à payer à M. I... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. P..., la SCI GEI-Terre et la société U... P...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de M. P... et de la SCI Gei-Terre tendant à l'annulation de la promesse de vente du 6 mai 2011 comme irrecevable ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

« Sur la fin de non-recevoir tiré de l'autorité de la chose jugée :

La demande en nullité de la promesse de vente formée par U... P... et la Sci Gei-Terre se heurte à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt irrévocable de la cour d'appel de Montpellier en date du 13 juin 2013 s'agissant d'une demande formée par les mêmes parties (U... P... et la Sci Gei-Terre) contre le même défendeur (K... I...) tous pris en leur même qualité et qui a le même objet (annulation de la promesse de vente du 6 mai 2011) ainsi que la même cause (le principe de concentration des moyen interdisant de faire obstacle à l'autorité de la chose jugée en invoquant un moyen nouveau) ;

Les appelants concluent à la recevabilité de leur demande en annulation du compromis de vente en faisant valoir que le jugement d'adjudication au profit d'un tiers, intervenu le 18 janvier 2016 et portant sur la parcelle [...] , objet de la promesse litigieuse, est un élément nouveau modifiant la situation antérieurement reconnue en justice et permettant d'écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée retenue par le premier juge ;

Mais le caractère nouveau de l'événement permettant d'écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ne peut résulter de ce que la partie qui l'invoque a négligé d'accomplir une diligence en temps utile ;

Les appelants soutiennent que la vente est indivisible entre eux ;

Les négligences imputables à la Sci Gei-Terre, à l'origine de la saisie immobilière de la parcelle [...] , objet de la promesse litigieuse, et de sa vente sur adjudication en date du 18 janvier 2016, sont donc opposables à U... P... ;

Cette vente sur saisie immobilière ne peut constituer l'élément nouveau permettant de faire obstacle à l'autorité de la chose jugée dès lors qu'elle résulte d'un défaut de paiement imputable à l'un des deux vendeurs indivisibles qui l'invoquent ;

La demande de nullité formée par U... P... et la Sci Gei-Terre doit être déclarée irrecevable et le jugement sera confirmé sur ce point » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE

« Sur la demande d'irrecevabilité :

L'article 1351 du Code civil énonce que ''L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.'' ;

Par arrêt du 13 juin 2013, la Cour d'Appel a rejeté la demande de Monsieur P... et de la SCI GEI TERRE tendant à l'annulation de la promesse de vente signée en 2011 ; Les demandeurs évoquent un nouveau moyen tiré de la violation de l'article L. 290-1 du Code de la construction et de l'Habitation ; Faute pour les demandeurs d'avoir invoqué ce moyen lors du précédent contentieux ayant le même objet et noué entre les mêmes parties, il y a lieu de constater qu'il existe une similarité de cause et la demande de Monsieur P... et de la SCI GEI TERRE doit être déclarée irrecevable » ;

ALORS QUE l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ; que cette règle n'est écartée que lorsque l'événement invoqué résulte de l'accomplissement par le requérant d'une diligence qu'il avait négligé d'accomplir en temps utile et dont le défaut avait justifié le rejet de sa demande dans l'instance initiale ; qu'en retenant que la vente sur saisie immobilière de la parcelle cadastrée [...] objet de la promesse de vente du 6 mai 2011, ordonnée par jugement du juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Narbonne du 18 janvier 2016, ne pouvait constituer un élément nouveau permettant de faire obstacle à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 13 juin 2013 ayant débouté M. P... et la SCI Gei-Terre de leur demande en annulation de ladite promesse de vente, dès lors qu'elle résultait d'un défaut de paiement imputable à l'un des deux vendeurs indivisibles, cependant qu'en invoquant cette vente sur adjudication, M. P... et la société Gei-Terre ne se prévalaient nullement de l'accomplissement d'une diligence qu'ils avaient négligé d'accomplir en temps utile et dont le défaut avait justifié le rejet de leur demande dans l'instance initiale, la cour d'appel a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351, devenu 1351, du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir rejeté le surplus des demandes de M. P... et de la SCI Gei-Terre comme non fondées ;

AUX MOTIFS QUE

« Sur la fin de non-recevoir tiré de l'autorité de la chose jugée :

La demande en nullité de la promesse de vente formée par U... P... et la Sci Gei-Terre se heurte à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt irrévocable de la cour d'appel de Montpellier en date du 13 juin 2013 s'agissant d'une demande formée par les mêmes parties (U... P... et la Sci Gei-Terre) contre le même défendeur (K... I...) tous pris en leur même qualité et qui a le même objet (annulation de la promesse de vente du 6 mai 2011) ainsi que la même cause (le principe de concentration des moyen interdisant de faire obstacle à l'autorité de la chose jugée en invoquant un moyen nouveau) ;

Les appelants concluent à la recevabilité de leur demande en annulation du compromis de vente en faisant valoir que le jugement d'adjudication au profit d'un tiers, intervenu le 18 janvier 2016 et portant sur la parcelle [...] , objet de la promesse litigieuse, est un élément nouveau modifiant la situation antérieurement reconnue en justice et permettant d'écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée retenue par le premier juge ;

Mais le caractère nouveau de l'événement permettant d'écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ne peut résulter de ce que la partie qui l'invoque a négligé d'accomplir une diligence en temps utile ;

Les appelants soutiennent que la vente est indivisible entre eux ;

Les négligences imputables à la Sci Gei-Terre, à l'origine de la saisie immobilière de la parcelle [...] , objet de la promesse litigieuse, et de sa vente sur adjudication en date du 18 janvier 2016, sont donc opposables à U... P... ;

Cette vente sur saisie immobilière ne peut constituer l'élément nouveau permettant de faire obstacle à l'autorité de la chose jugée dès lors qu'elle résulte d'un défaut de paiement imputable à l'un des deux vendeurs indivisibles qui l'invoquent ;

La demande de nullité formée par U... P... et la Sci Gei-Terre doit être déclarée irrecevable et le jugement sera confirmé sur ce point » ;

ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en s'abstenant de répondre au moyen de M. P... et de la SCI Gei-Terre tiré de ce que la promesse de vente du 6 mai 2011, indivisible entre eux, était devenue caduque en son entier par l'effet du jugement du juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Narbonne du 18 juillet 2016 portant adjudication de la parcelle cadastrée [...] à la société Smapi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-18185
Date de la décision : 19/11/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 19 avril 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 nov. 2020, pourvoi n°19-18185


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.18185
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