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18/11/2020 | FRANCE | N°19-14775

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 novembre 2020, 19-14775


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 novembre 2020

Rejet

M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 664 F-D

Pourvoi n° C 19-14.775

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 NOVEMBRE 2020

La Société

de gestion financière et de participation, (SOGEFIP) société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° C 19-14.775 co...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 novembre 2020

Rejet

M. GUÉRIN, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 664 F-D

Pourvoi n° C 19-14.775

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 NOVEMBRE 2020

La Société de gestion financière et de participation, (SOGEFIP) société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° C 19-14.775 contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige l'opposant à la société Siparex proximité innovation, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la Société de gestion financière et de participation, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Siparex proximité innovation, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents M. Guérin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 novembre 2018), la Société de gestion financière et de participation (la société Sogefip), ayant pour activité le conseil aux entreprises, dont M. O... est président-directeur général, a conclu, le 6 novembre 2009, un contrat de prestation de services avec la société Sigefi Venture gestion, en considération de la personne de M. O....

2. Le 12 septembre 2012, le contrat a été transféré à la société Siparex proximité innovation (la société Siparex) par suite de l'absorption par cette dernière de la société Sigefi Venture gestion. M. O... a été nommé membre du directoire et directeur général de la société Siparex.

3. La société Sogefip, reprochant à la société Siparex d'avoir, à la suite de la révocation des mandats sociaux de M. O..., brutalement rompu, le 13 mai 2014, leur relation commerciale établie, a assigné cette dernière en paiement de dommages-intérêts en application de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, troisième, quatrième et septième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le moyen, pris en ses deuxième, cinquième et sixième branches

Enoncé du moyen

5. La société Sogefip fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts au titre de la rupture brutale de la relation commerciale établie, alors :

« 2° / que le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, ni le procès-verbal de révocation du 13 mai 2014, ni la lettre de révocation de M. O... datée du même jour ne reprochaient à ce dernier un défaut d'exécution loyale de ses obligations à l'égard de la société Siparex ; qu'en effet, le procès-verbal indiquait expressément que l'exécution par M. O... de ses obligations et de sa mission n'était pas en cause, dès lors que "les difficultés rencontrées avec N... O... sont uniquement comportementales et ne relèvent pas de la gestion de l'activité en elle-même ou de ses modalités" ; que de la même façon, la lettre de révocation se bornait à reprocher à M. O... certaines attitudes, et ne portait en aucune manière un grief de défaut de loyauté dans l'accomplissement de ses missions ; qu'en retenant cependant que "M. O... a été révoqué de ses mandats de membre du directoire et de directeur général de la société Siparex, pour des motifs tenant au défaut d'exécution loyale de ses obligations à l'égard de cette société, rendant impossible l'exécution de la mission confiée à la société Sogefip de direction et de développement du pôle Venture Capital du groupe Siparex (articles 1 et 2.2 du contrat)" , la cour d'appel a dénaturé les documents litigieux et violé le principe susvisé ;

5°/ qu'aux termes du contrat du 6 novembre 2009, il entrait dans la mission de la société Sogefip d'apporter son expertise et son conseil notamment au développement de la société Siparex ; que l'article 2 du préambule des règles de bonnes conduite de la société Siparex précisait également que "les collaborateurs de Siparex doivent exercer leurs fonctions dans le souci permanent de l'intérêt de la clientèle (c'est-à-dire, pour les besoins des présentes, les actionnaires et souscripteurs des sociétés et des fonds)" ; qu'en manifestant en l'espèce son opposition à un projet de réorganisation de la société, d'abord oralement, puis en remettant un document écrit retraçant le contenu de l'intervention orale effectuée, M. O... n'a fait que se conformer à ses obligations de conseil et de prise en compte de l'intérêt de la clientèle, conformément au contrat du 6 novembre 2009 et aux règles de bonne conduite de la société Siparex ; qu'en décidant au contraire qu'en manifestant "son opposition fondamentale au projet de réorganisation de la société Siparex" et en remettant, lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014, "un document écrit destiné à faire acter son opposition au projet d'évolution de la gouvernance de la société Siparex", M. O... a manqué aux règles de bonne conduite de cette dernière et commis une faute d'une gravité suffisante pour justifier la rupture immédiate des relations commerciales établies avec la société Sogefip, la cour d'appel a violé les articles 1103 du code civil et L. 442-6, I, 5°, du code de commerce ;

6°/ qu'aux termes du contrat du 6 novembre 2009, il entrait dans la mission de la société Sogefip d'apporter son expertise et son conseil notamment au développement de la société Siparex ; que l'article 2 du préambule des règles de bonnes conduite de la société Siparex précisait également que "les collaborateurs de Siparex doivent exercer leurs fonctions dans le souci permanent de l'intérêt de la clientèle (c'est-à-dire, pour les besoins des présentes, les actionnaires et souscripteurs des sociétés et des fonds)" ; qu'il entrait en conséquence dans la mission d'expertise et de conseil de la société Sogefip d'évaluer un projet de réorganisation de la société Siparex et d'informer celle-ci, notamment en conseil de surveillance, des réserves tenant aux risques de la nouvelle organisation envisagée, peu important que ces réserves soient en porte-à-faux avec la position du président de la société ; qu'en décidant néanmoins qu'en manifestant "son opposition fondamentale au projet de réorganisation de la société Siparex, émanant de son président M. B...", M. O... a adopté une attitude et un comportement "affectant l'intérêt social de la société Siparex", la cour d'appel a derechef violé les articles 1103 du code civil et L. 442-6, I, 5°, du code de commerce. »

Réponse de la Cour

6. Après avoir énoncé que le contrat conclu le 6 novembre 2009 stipulait une clause intuitu personae liée à la qualité de M. O..., qui s'engageait à réaliser personnellement les missions confiées à la société Sogefip, l'arrêt retient que ce dernier a été révoqué de ses mandats de membre du directoire et de directeur général de la société Siparex pour avoir tenu des propos déplacés envers deux collaborateurs du groupe Siparex. Il ajoute, que lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014, il a porté atteinte à l'intérêt social de la société Siparex en mettant en cause le projet de réorganisation de la société, que soutenait son président, M. B..., en présence du président du directoire de la société La Française, partenaire commercial privilégié du groupe Siparex et en remettant un document écrit destiné à faire acter son opposition au projet, sans en avoir préalablement informé M. B....

7. Ayant ainsi relevé les manquements répétés de M. O... aux règles de bonne conduite du groupe Siparex, qu'il s'était engagé à respecter, et souverainement considéré que ces règles constituaient une obligation essentielle du contrat de prestation de services, faisant ressortir, sans dénaturer les documents de la cause, qu'elles s'imposaient à M. O... dans l'exercice de sa mission d'expertise et de conseil, la cour d'appel a pu retenir que M. O..., qui s'identifiait à la société Sogefip, avait commis une faute d'une gravité suffisante, de nature à compromettre l'exécution de ce contrat et que cette défaillance justifiait la rupture sans préavis des relations commerciales établies entre les parties.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Société de gestion financière et de participation aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société de gestion financière et de participation et la condamne à payer à la société Siparex proximité innovation la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour la Société de gestion financière et de participation

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris ayant débouté la société Sogefip de sa demande de dommages-intérêts au titre de la résiliation du contrat du 6 novembre 2009 ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « aux termes de l'article L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers (
) de rompre unilatéralement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ». La rupture des relations commerciales établies peut intervenir à effet immédiat à la condition qu'elle soit justifiée par des fautes suffisamment graves imputées au partenaire commercial. L'article 9 du Code de procédure civile dispose qu' « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ». En l'espèce, le caractère établi de la relation, son ancienneté ainsi que l'auteur de la rupture ne font l'objet d'aucune contestation. En revanche est contestée la gravité des manquements imputés à la Sogefip, justifiant la rupture sans préavis par la société Spi. Sollicitant la confirmation du jugement entrepris sur ce point, la société Spi fait valoir que la gravité des manquements commis par M. O... aux « règles de bonne conduite du groupe Siparex », rappelées dans la lettre de résiliation du 13 mai 2014, justifiait la résiliation sans préavis du contrat de prestation de services. A ce titre, la société Spi reproche notamment à M. O... : des propos violents et déplacés tenus auprès de M. Y... à propos d'un autre collaborateur du groupe Siparex ; le ton méprisant utilisé dans les échanges avec M. B..., président de la société Spi et du groupe Siparex et l'attitude inadmissible adoptée lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014. Sollicitant l'infirmation du jugement entrepris, la Sogefip réplique que la société Spi a rompu sans motif valable la relation commerciale puisque M. O... n'a nullement contrevenu aux règles de bonne conduite. Elle soutient en effet qu'aucun des manquements allégués par la société Spi n'est caractérisé en l'espèce et conteste à ce titre toute valeur probante à la pièce n°31 adverse (« procès-verbal de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014 »), arguant du fait que la pièce litigieuse a été établie non contradictoirement et a été de surcroît versée par la société Spi le 24 septembre 2018, soit à la veille de la clôture prévue initialement le 25 septembre. Dans ces conditions, la Sogefip conclut que la rupture de la relation par la société Spi à effet immédiat n'est nullement justifiée par un quelconque comportement fautif de la société Sogefip, prise en la personne de M. O.... La société Siparex Proximité Innovation démontre l'existence de fautes de comportement de M. O..., qui rendaient impossible la poursuite d'une relation de collaboration impliquant des relations quotidiennes de confiance avec lui, étant rappelé que le contrat de prestation de services litigieux prévoyait expressément en son article 3 « intuitu personae » que : « le présent contrat est conclu intuitu personae ; il est strictement lié à la qualité de Monsieur N... O..., président-directeur général de Sogefip, ce dernier s'engageant à réaliser personnellement les missions décrites aux présentes (
) ». En effet, il résulte des pièces versées aux débats que : - M. O... a été révoqué de ses mandats de membre du directoire et de directeur général de la société Siparex, pour des motifs tenant au défaut d'exécution loyale de ses obligations à l'égard de cette société, rendant impossible l'exécution de la mission confiée à la société Sogefip de direction et de développement du pôle Venture Capital du groupe Siparex (articles 1 et 2.2 du contrat), - il a tenu des propos déplacés auprès de M. F..., coprésident du directoire de la société Siparex, ainsi qu'auprès de M. Y... à propos d'un autre collaborateur du groupe Siparex, - il a manifesté son opposition fondamentale au projet de réorganisation de la société Siparex, émanant de son président M. B..., en adoptant une attitude et un comportement affectant l'intérêt social de la société Siparex. En effet, lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014, il a mis en cause le projet de M. B..., en présence du président du directoire de la société La Française, partenaire commercial de premier plan du groupe Siparex, remettant à cette occasion, sans en avoir préalablement informé M. B..., un document écrit destiné à faire acter son opposition au projet d'évolution de la gouvernance de la société Siparex. Ces manquements répétés aux règles de bonne conduite du groupe Siparex par M. O..., qui s'identifiait à la société Sogefip, constituent une défaillance dans une obligation essentielle du contrat de prestation de services de nature à compromettre son exécution, et une faute d'une gravité suffisante pour justifier la rupture des relations commerciales établies, sans préavis. Il y a donc lieu de rejeter les demandes formées par la société Sogefip pour rupture brutale des relations commerciales établies » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' « au visa de l'article 3 du contrat du 6 novembre 2009 liant la société Sogefip à la société Siparex Proximité Innovation le contrat est conclu intuitu personae, il est strictement lié à la qualité de M. O..., PDG de Sogefip ; que les manquements qui seraient commis par M. O... le sont au nom de la société Sogefip dont il est le seul gérant ; que l'article 2 du contrat du 6 novembre 2009 stipule : « M. O... s'engage expressément à respecter les « règles de bonne conduite », de déontologie, ainsi que de toutes procédures en vigueur au sein des sociétés du groupe Siparex
» dont il déclare avoir reçu un exemplaire ; que l'article 5 de ces « règles de bonne conduite » précise la nature des relations interpersonnelles qui doivent présider aux relations entre les collaborateurs du groupe Siparex (pièce n° 21 du défendeur) ; qu'il est établi en pièces n° 7 et 8 du défendeur un comportement fautif de M. O... à l'égard de M. F..., co-président du directoire, des propos formellement violents tenus auprès de M. Y... (pièce n° 10 du défendeur), une attitude formellement contraire aux règles de bonne conduite lors du conseil de surveillance du 16 avril 2014 en présence de M. L..., président du directoire de La Française, partenaire commercial important de Siparex et qui a été sanctionné par la révocation de M. O... de ses fonctions de membre du directoire et de DG de Siparex Proximité Innovation lors du conseil du 13 mai 2014 (pièce n° 16 du défendeur) ; que le comportement fautif de M. O..., agissant au nom de la société Sogefip conformément à l'article 3 du contrat du 6 novembre 2009, est la cause de la rupture des relations commerciales entre la société Siparex Proximité Innovation et la société Sogefip ; que le tribunal, au visa de l'article L. 442-6, 5° du code de commerce qui dispose que « les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations », dira la demande de la société Sogefip mal fondée et la déboutera de sa demande de dommages et intérêts au titre de la résiliation du contrat du 6 novembre 2009 » ;

1°/ ALORS QUE si les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du Code de commerce « ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure », seul un manquement grave imputable à la partie qui subit la rupture est de nature à justifier la rupture sans préavis des relations commerciales établies ; qu'en l'espèce, les règles de bonne conduite édictées par la société Siparex Proximité Innovation, annexées au contrat du 6 novembre 2009, avaient principalement pour objet de définir des règles de prévention et de gestion des conflits d'intérêts, des règles de transparence ainsi que des obligations régissant la communication d'informations en matière financière ; que le titre III de ces règles de bonne conduite, après avoir envisagé les obligations essentielles de neutralité (article 1), d'exclusivité (article 2), de transparence (article 3) et les règles en cas de conflits d'intérêts (article 4), stipulait en son article 5, intitulé « Respect de l'éthique de Siparex », que « par ailleurs, les collaborateurs s'engagent à adopter entre eux et vis-à-vis des tiers en relation avec Siparex les attitudes de rigueur et de convivialité qui caractérisent la culture d'entreprise de Siparex. En ce qui concerne les relations interpersonnelles au sein de Siparex, et notamment afin d'éviter toute forme de harcèlement moral, les collaborateurs s'engagent tant dans leurs propos oraux que dans leurs écrits (courriers, notes, e-mails, etc.) à ne pas émettre de jugements mettant en cause les personnes ou d'opinions blessantes pouvant blesser ou déstabiliser leurs interlocuteurs » ; que cette obligation d'entretenir au sein de la société Siparex Proximité Innovation des relations interpersonnelles courtoises et conviviales, dénuées d'échanges blessants mettant en cause les personnes, apparaissait manifestement comme une règle de bonne conduite accessoire aux autres, qui avaient toutes trait aux activités de la société Siparex Proximité Innovation sur les marchés financiers ; qu'en retenant cependant que le comportement de M. O... caractérisait des manquements à l'article 5 du titre III des règles de bonne conduite de la société Siparex Proximité Innovation qui constituaient une « défaillance dans une obligation essentielle du contrat de prestation de services », pour en déduire ensuite que ces manquements présentaient un caractère suffisamment grave pour justifier la rupture sans préavis des relations commerciales établies avec la société Sogefip, la Cour d'appel a violé les articles 1103 du Code civil et L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce ;

2°/ ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, ni le procès-verbal de révocation du 13 mai 2014, ni la lettre de révocation de M. O... datée du même jour ne reprochaient à ce dernier un défaut d'exécution loyale de ses obligations à l'égard de la société Siparex Proximité Innovation ; qu'en effet, le procès-verbal indiquait expressément que l'exécution par M. O... de ses obligations et de sa mission n'était pas en cause, dès lors que « les difficultés rencontrées avec N... O... sont uniquement comportementales et ne relèvent pas de la gestion de l'activité en elle-même ou de ses modalités » ; que de la même façon, la lettre de révocation se bornait à reprocher à M. O... certaines attitudes, et ne portait en aucune manière un grief de défaut de loyauté dans l'accomplissement de ses missions ; qu'en retenant cependant que « M. O... a été révoqué de ses mandats de membre du directoire et de directeur général de la société Siparex, pour des motifs tenant au défaut d'exécution loyale de ses obligations à l'égard de cette société, rendant impossible l'exécution de la mission confiée à la société Sogefip de direction et de développement du pôle Venture Capital du groupe Siparex (articles 1 et 2.2 du contrat) », la Cour d'appel a dénaturé les documents litigieux et violé le principe susvisé ;

3°/ ALORS QUE l'article 5 du titre III des règles de bonnes conduite de la société Siparex Proximité Innovation prévoyait en son alinéa 3 qu'en cas de manquement à l'obligation « ne pas émettre de jugements mettant en cause les personnes ou d'opinions blessantes pouvant blesser ou déstabiliser leurs interlocuteurs », « le président du Comité stratégique et d'Ethique de Siparex Associés pourra être saisi directement et confidentiellement par tout collaborateur qui s'estimerait l'objet d'une telle pratique. Il prendra alors les initiatives qui lui paraitront les plus opportunes et pourra le cas échéant en saisir le président directeur général de Sigefi » ; que la société Sogefip faisait expressément valoir dans ses conclusions d'appel que les deux incidents retenus à l'encontre de M. O..., ayant impliqué MM. F... et Y... , qui s'étaient déroulés en décembre 2013 et mars 2014, n'avaient connu aucune suite, le président du comité stratégique et d'éthique de la société Siparex Proximité Innovation n'ayant pas été saisi, et que M. B..., président de cette société, avait même qualifié les échanges ayant eu lieu à ce propos d' « inconsistants » et de « consommateurs de temps et d'énergie », en demandant aux personnes concernées de les cesser (conclusions, p. 18 et 20) ; qu'en retenant cependant que les propos tenus par M. O... lors de ces deux incidents constituaient une faute d'une gravité suffisante pour justifier la rupture immédiate des relations commerciales établies avec la société Sogefip, sans répondre aux conclusions d'appel de la société exposante qui soulignaient que les deux incidents en question n'avaient pas donné lieu à la procédure interne prévue par les règles de bonne conduite de la société Siparex Proximité Innovation et avaient même été définitivement clos par le président de la société, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;

4°/ ALORS QUE l'article 5 du titre III des règles de bonne conduite de la société Siparex Proximité Innovation imposait de « ne pas émettre de jugement mettant en cause les personnes ou d'opinions blessantes pouvant blesser ou déstabiliser (les) interlocuteurs » ; qu'en se bornant en l'espèce à affirmer que le comportement de M. O... lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014 constituait un manquement à ces règles de conduite, sans constater à aucun moment que ce dernier aurait émis un jugement mettant en cause les personnes ou une opinion blessante lors de cette réunion, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103 du Code civil et L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce ;

5°/ ALORS QU'aux termes du contrat du 6 novembre 2009, il entrait dans la mission de la société Sogefip d'apporter son expertise et son conseil notamment au développement de la société Siparex Proximité Innovation ; que l'article 2 du préambule des règles de bonnes conduite de la société Siparex Proximité Innovation précisait également que « les collaborateurs de Siparex doivent exercer leurs fonctions dans le souci permanent de l'intérêt de la clientèle (c'est-à-dire, pour les besoins des présentes, les actionnaires et souscripteurs des sociétés et des fonds) » ; qu'en manifestant en l'espèce son opposition à un projet de réorganisation de la société, d'abord oralement, puis en remettant un document écrit retraçant le contenu de l'intervention orale effectuée, M. O... n'a fait que se conformer à ses obligations de conseil et de prise en compte de l'intérêt de la clientèle, conformément au contrat du 6 novembre 2009 et aux règles de bonne conduite de la société Siparex Proximité Innovation ; qu'en décidant au contraire qu'en manifestant « son opposition fondamentale au projet de réorganisation de la société Siparex » et en remettant, lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014, « un document écrit destiné à faire acter son opposition au projet d'évolution de la gouvernance de la société Siparex », M. O... a manqué aux règles de bonne conduite de cette dernière et commis une faute d'une gravité suffisante pour justifier la rupture immédiate des relations commerciales établies avec la société Sogefip, la Cour d'appel a violé les articles 1103 du Code civil et L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce ;

6°/ ALORS QU'aux termes du contrat du 6 novembre 2009, il entrait dans la mission de la société Sogefip d'apporter son expertise et son conseil notamment au développement de la société Siparex Proximité Innovation ; que l'article 2 du préambule des règles de bonnes conduite de la société Siparex Proximité Innovation précisait également que « les collaborateurs de Siparex doivent exercer leurs fonctions dans le souci permanent de l'intérêt de la clientèle (c'est-à-dire, pour les besoins des présentes, les actionnaires et souscripteurs des sociétés et des fonds) » ; qu'il entrait en conséquence dans la mission d'expertise et de conseil de la société Sogefip d'évaluer un projet de réorganisation de la société Siparex Proximité Innovation et d'informer celle-ci, notamment en conseil de surveillance, des réserves tenant aux risques de la nouvelle organisation envisagée, peu important que ces réserves soient en porte-à-faux avec la position du président de la société ; qu'en décidant néanmoins qu'en manifestant « son opposition fondamentale au projet de réorganisation de la société Siparex, émanant de son président M. B... », M. O... a adopté une attitude et un comportement « affectant l'intérêt social de la société Siparex », la Cour d'appel a derechef violé les articles 1103 du Code civil et L. 442-6, I, 5°, du Code de commerce ;

7°/ ALORS QUE la société Sogefip faisait valoir dans ses conclusions d'appel que l'opposition manifestée par M. O... lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014, n'avait pu surprendre M. B... qui était parfaitement informé préalablement à celle-ci de la position de M. O... sur le projet en cause (conclusions, p. 13) et que la société La Française, associé minoritaire de la société Siparex Proximité Innovation, n'était nullement un client très important du groupe devant lequel il aurait été nécessaire de dissimuler une divergence de vue entre les dirigeants de la société Siparex Proximité Innovation, mais seulement un prestataire du groupe (conclusions, p. 14) ; qu'en affirmant que M. O... avait, lors de la réunion du conseil de surveillance du 16 avril 2014, mis en cause le projet du président du directoire sans en avoir préalablement informé celui-ci et en s'exprimant devant la société La Française, partenaire commercial de premier plan du groupe Siparex, sans répondre aux moyens déterminants soulevés par les conclusions d'appel de la société exposante sur ces points, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-14775
Date de la décision : 18/11/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 nov. 2020, pourvoi n°19-14775


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.14775
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