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12/11/2020 | FRANCE | N°18-25967

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 12 novembre 2020, 18-25967


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 novembre 2020

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 833 F-D

Pourvoi n° X 18-25.967

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020

1°/ M. G... S...,

2°/ Mme E... K..., épouse

S...,

tous deux domiciliés [...] ,

ont formé le pourvoi n° X 18-25.967 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (11...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 novembre 2020

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 833 F-D

Pourvoi n° X 18-25.967

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020

1°/ M. G... S...,

2°/ Mme E... K..., épouse S...,

tous deux domiciliés [...] ,

ont formé le pourvoi n° X 18-25.967 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (11e chambre B), dans le litige les opposant à la société Sama, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Collomp, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gaschignard, avocat de M. et Mme S..., de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Sama, après débats en l'audience publique du 22 septembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Collomp, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 mai 2018, rectifié le 20 décembre 2018), M. et Mme S..., bailleurs, ont signifié à la société Sama, preneuse à bail de locaux à usage commercial, un congé avec offre de renouvellement, que celle-ci a accepté dans son principe, et l'ont assignée en fixation du prix du bail renouvelé.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

2. M. et Mme S... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en fixation du loyer du bail renouvelé en fonction de la valeur locative par exception à la règle du plafonnement, de dire que le loyer, révisé par application de l'indice trimestriel de la construction, s'élève à 29 923 euros et que la taxe foncière viendrait en déduction de ce montant, alors « qu'il appartient au juge chargé de fixer le montant du loyer du bail renouvelé de rechercher, au besoin d'office, ce qu'est la valeur locative des locaux donnés à bail ; qu'en décidant de fixer le montant du loyer du bail renouvelé par application au loyer d'origine de l'indice du coût de la construction, puis en déduisant de ce montant la charge que représente l'obligation faite au preneur de payer lui-même les travaux de mise en conformité et de gros entretien ainsi que la taxe foncière, tout en constatant que ces sujétions particulières résultaient déjà au bail d'origine, la cour d'appel a violé les articles L. 145-33 et R. 145-8, dernier alinéa, du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

3. La société Sama conteste la recevabilité du moyen au motif que celui-ci critique une disposition de l'arrêt qui serait favorable à M. et Mme S..., dès lors que la recherche de la valeur locative n'a d'intérêt que si elle est inférieure au montant du loyer plafonné.

4. Cependant, en appliquant des abattements sur le loyer plafonné, le loyer fixé par la cour d'appel peut être inférieur à la valeur locative, en sorte que les bailleurs ne sont pas dépourvus d'intérêt à se prévaloir de la violation des textes invoqués au moyen.

5. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 145-33 et R. 145-8 du code de commerce :

6. Selon ce premier texte, le prix du bail commercial renouvelé doit correspondre à la valeur locative. Selon le second, les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci s'est déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de minoration de la valeur locative

7. Pour fixer le prix du bail renouvelé, l'arrêt, après avoir rejeté la demande de la preneuse en fixation du loyer à la valeur locative, faute de démontrer l'incidence négative sur son activité des facteurs locaux de commercialité, applique au loyer plafonné des abattements pour tenir compte des charges exorbitantes du droit commun pesant contractuellement sur le preneur.

8. En statuant ainsi, alors qu'il lui incombait de rechercher, nonobstant l'absence de modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33 du code de commerce, si le loyer du bail renouvelé, calculé par application de l'indice prévu à l'article L. 145-34 du même code, excédait la valeur locative, laquelle s'évalue selon les critères définis à l'article L. 145-33 et non sur la base du loyer plafonné auquel, comme loyer contractuel indexé, il n'y a pas lieu d'appliquer des facteurs de minoration, la cour d'appel a violé le premier texte susvisé, par défaut d'application, et le second, par fausse application.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il écarte la demande de déplafonnement du loyer et en ce qu'il condamne M. et Mme S... à payer à la société Sama les intérêts au taux légal sur la somme de 1 981,84 euros, à compter du 1er mars 1999, et avec anatocisme par année entière (au titre du dépôt de garantie supérieur à 2 mois de loyer), l'arrêt rendu le 24 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet sur les autres points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Sama aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Sama et la condamne à payer à M. et Mme S... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour M. et Mme S...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les bailleurs de leur demande tendant à voir fixer le loyer du bail renouvelé en fonction de la valeur locative effective par exception à la règle du plafonnement, dit que le loyer sera révisé par application de l'indice trimestriel de la construction, dit que le bail renouvelé par application de l'indice trimestriel du coût de la construction s'élève à 23 923 euros [lire 29 923 euros] et dit que la taxe foncière doit venir en déduction de ce montant,

AUX MOTIFS QUE (p. 2) par acte sous seing privé du 1er mars 1999, M. G... S... et son épouse donnaient à bail à la SARL Sama pour une durée de neuf ans à compter du 1er avril 1999 des locaux situés [...] moyennant un loyer indexé de 23 782,05 euros ; que (pp. 7-8), la monovalence des locaux n'est pas établie, non plus qu'une évolution notable des facteurs de commercialité ; que ( p. 9 ) le bail échu étant de 9 ans, il convient de faire application des dispositions de l'article 145-34 du code de commerce et de dire que le prix du loyer renouvelé doit être plafonné en fonction de la variation de l'indice du coût de la construction depuis la fixation initiale du loyer du bail ; que le loyer avant éventuels abattements et pondérations s'élève à 32 466,81 euros selon le calcul suivant : 23 782 x 1443 (ICC 3ème trimestre 2007) / 1057 (ICC 3ème trimestre 1998) ; que sur le preneur est tenu par le bail des travaux et mise en conformité et de ceux visés à l'article 606 du code civil ce qui justifie un abattement de 10 % ; que la taxe foncière est en totalité à la charge du preneur, elle s'élevait à la somme de 4.630 euros en 2008 ; que l'article R. 145-8 du code de commerce prévoit que du point de vue des obligations respectives des parties, les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative ; que l'impôt foncier pèse en principe sur le bailleur en conséquence de quoi il sera déduit du prix du loyer ; (
) que le loyer hors charges du bail renouvelé s'établit donc pour une surface pondérée de 541,92 m2 à 32.470 € - 10 % = 29.223 € duquel la taxe foncière doit venir en déduction ;

1° - ALORS QU'il appartient au juge chargé de fixer le montant du loyer du bail renouvelé de rechercher, au besoin d'office, ce qu'est la valeur locative des locaux donnés à bail ; qu'en décidant de fixer le montant du loyer du bail renouvelé par application au loyer d'origine de l'indice du coût de la construction, puis en déduisant de ce montant la charge que représente l'obligation faite au preneur de payer lui-même les travaux de mise en conformité et de gros entretien ainsi que la taxe foncière, tout en constatant que ces sujétions particulières résultaient déjà au bail d'origine, la cour d'appel a violé les articles L. 145-33 et R. 145-8, dernier alinéa, du code de commerce ;

2° - ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en décidant, à l'occasion de la fixation du loyer du bail renouvelé, qu'il y aura lieu de faire venir en déduction de ce loyer la taxe foncière acquittée par le locataire, après avoir pourtant constaté que, selon les énonciations du bail, « la taxe foncière est en totalité à la charge du preneur », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil devenu l'article 1103 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-25967
Date de la décision : 12/11/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 12 nov. 2020, pourvoi n°18-25967


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.25967
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