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05/11/2020 | FRANCE | N°19-22023

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 05 novembre 2020, 19-22023


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Cassation partielle sans renvoi

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 790 F-D

Pourvoi n° F 19-22.023

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

Mme B... J..., domiciliée [...] , a formé

le pourvoi n° F 19-22.023 contre le jugement rendu le 29 mai 2019 par le tribunal d'instance de Fort-de-France, dans le litige l'opposant à l'A...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Cassation partielle sans renvoi

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 790 F-D

Pourvoi n° F 19-22.023

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

Mme B... J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° F 19-22.023 contre le jugement rendu le 29 mai 2019 par le tribunal d'instance de Fort-de-France, dans le litige l'opposant à l'ASL Lotissement Habitation [...], dont le siège est [...] représentée par Mme G... O..., défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme J..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'ASL Lotissement Habitation [...], après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Fort-de-France, 29 mai 2019), rendu en dernier ressort, Mme J..., propriétaire d'un lot dans le lotissement Habitation [...], a formé opposition à une ordonnance d'injonction de payer une certaine somme à l'association syndicale libre du lotissement (l'ASL) au titre de charges impayées.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Mme J... fait grief au jugement de la condamner à payer à l'ASL la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts, alors « que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui lui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'il résulte du jugement que l'ASL sollicitait à l'audience, comme dans le dispositif de ses conclusions écrites soutenues oralement, la condamnation de Mme J... au paiement des charges dues s'élevant à la somme de 894,60 euros, au paiement d'une somme de 208 euros correspondant aux intérêts à titre des frais accessoires, au paiement d'une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement d'une somme de 583,22 euros au titre des intérêts au taux contractuel du cahier des charges du lotissement ; qu'en condamnant Mme J... au versement d'une somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts, le tribunal, qui ne s'est pas prononcé seulement sur ce qui lui était demandé, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 4, premier alinéa, et 5 du code de procédure civile :

4. Aux termes du premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

5. Aux termes du second, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.

6. Pour condamner Mme J... à payer à l'ASL la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts, le jugement retient que l'abstention prolongée d'un copropriétaire à s'acquitter des sommes mises à sa charge lèse inévitablement l'ensemble des autres colotis et retarde ou ne permet pas le paiement des charges incombant à l'ASL.

7. En statuant ainsi, alors qu'il avait constaté que, au cours de l'audience, l'ASL, représentée par sa présidente, avait maintenu ses demandes formulées dans ses conclusions du 2 avril 2019 et tendant à la condamnation de Mme J... au paiement des charges dues, de la somme de 208 euros correspondant aux intérêts à titre des frais accessoires, de la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de celle de 593,22 euros au titre des intérêts contractuels, le tribunal, qui s'est prononcé sur une chose non demandée, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du second moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme J... à payer à l'ASL la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts, le jugement rendu le 29 mai 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Fort-de-France ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit n'y avoir lieu de modifier la condamnation aux dépens prononcée par le juge du fond ;

Condamne l'ASL aux dépens de la procédure devant la Cour de cassation ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme J....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné Mme B... J... à payer à l'ASL Lotissement Habitation [...] la somme de 894,60 euros au titre des charges de copropriété dues au 3 avril avec intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 018 et d'AVOIR condamné Mme B... J... à payer à l'ASL Lotissement Habitation [...] la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande en paiement de provisions échues : selon l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; le cahier des charges régissant le lotissement concerné prévoit en son article 23 que le directeur doit faire approuver que l'assemblée en réunion ordinaire le projet de budget de l'année en cours ; l'assemblée générale des copropriétaires fixe le montant de la dotation qu'il est nécessaire de constituer pour couvrir les dépenses budgétaires ; la requérante indique qu'au jour de l'audience et en dépit de ses affirmations Mme J... reste redevable de la somme de 894.60 Euros et qu'une sommation de payer lui a été signifiée afin qu'elle régularise sa situation ; elle produit pour justifier de sa créance un extrait du grand livre du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018 et du 1er janvier 2019 au 3 mars 2019 ; elle précise que l'ensemble des versements allégués par la défenderesse ont déjà été pris en considération et imputés sur son compte ; les différents projets de budget ont été approuvés par l'assemblée générale et Mme J... ne démontre pas avoir contesté, dans les délais prévus, les décisions d'assemblée générale correspondantes ; elle n'est donc pas fondée à refuser de payer les sommes qui lui sont réclamées ; à ce titre, il doit être relevé que Mme J... ne conteste pas en être redevable, mais soutient être à jour de ses charges de copropriété ; or, les différents relevés de compte produits aux débats ne permettent pas de le confirmer ; si les versements allégués ont bien été effectués, ils n'ont pas suffi à apurer la dette ; il résulte ainsi des éléments produits aux débats que la défenderesse reste redevable de la somme de 894.60 euros, au titre des charges de copropriété dues au 3 avril 2019. Elle sera condamnée au paiement du montant correspondant ; les intérêts au taux contractuels du cahier des charges -article 24 du cahier des charges, doivent être considérés comme constituant une clause pénale en ce qu'ils sanctionnent un manquement du débiteur par le versement d'une somme d'argent ; le taux retenu 2% par mois correspond à un taux de 24% l'an qui est bien supérieur au taux d'usure ; en application de l'article 1231-5 du Code civil, il y aura lieu de réduire d'office le taux réclamé en le ramenant au taux légal à compter de saisine initiale de la juridiction à savoir le 17 janvier 2018 ; sur la demande de dommages et intérêts : il y sera fait droit à hauteur de 300 Euros, puisque l'abstention prolongée d'un copropriétaire à s'acquitter des sommes mises à sa charge lèse inévitablement l'ensemble des autres co-lotis et retarde ou ne permet pas le paiement des charges incombant à l'ASL ;

1) ALORS QUE les juges du fond ne doivent pas dénaturer le sens clair et précis des conclusions des parties ; que Mme J... faisait valoir dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience qu'elle avait effectué divers versements ayant apuré sa dette dont un versement par un chèque d'un montant de 117,11 euros (conclusions de Mme J... p.2) ; que l'ASL reconnaissait dans ses conclusions que « la somme de 117,11 euros (était) non imputée sur le compte de Mme J... » (conclusions de l'ASL, p.3, §4) ; qu'en affirmant, pour condamner Mme J... au versement de la somme de 894,60 euros, que l'ASL « précise que l'ensemble des versements allégués par la défenderesse ont déjà été pris en considération et imputés sur son compte », le tribunal a dénaturé les conclusions de l'ASL en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2) ALORS QU'est libéré de sa dette, celui qui justifie de son paiement ; que Mme J... faisait valoir dans ses conclusions soutenues oralement à l'audience qu'elle avait effectué divers versements ayant apuré sa dette dont un versement par un chèque d'un montant de 117,11 euros (conclusions de Mme J... p.2) ; qu'en condamnant Mme J... au versement de la somme de 894,60 euros ne prenant pas en considération le chèque litigieux, après avoir pourtant retenu que les versements allégués par Mme J... avaient bien été effectués, le tribunal a violé les articles 1342 et 1353 du code civil ;

3) ALORS, en toute hypothèse, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que Mme J... se prévalait dans ses conclusions du règlement d'une somme de 117,11 euros par chèque et du justificatif de son encaissement (conclusions de Mme J..., pièce 13 du bordereau de pièces joint aux conclusions) ; qu'en se bornant à affirmer que les versements allégués par Mme J... n'avait pas suffi à apurer la dette qui s'élève selon les éléments produits à la somme de 894,60 euros sans s'expliquer sur le justificatif de la remise du chèque d'un montant de 117,11 euros versé aux débats par Mme J... et dont l'ASL reconnaissait que la somme n'avait pas été imputée sur son décompte, le tribunal a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné Mme B... J... à payer à l'ASL Lotissement Habitation [...] la somme de 300 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande de dommages et intérêts : il y sera fait droit à hauteur de 300 euros, puisque l'abstention prolongée d'un copropriétaire à s'acquitter des sommes mises à sa charge lèse inévitablement l'ensemble des autres co-lotis et retarde ou ne permet pas le paiement des charges incombant à l'ASL ;

1) ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui lui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'il résulte du jugement que l'ASL sollicitait à l'audience, comme dans les dispositif de ses conclusions écrites soutenues oralement, la condamnation de Mme J... au paiement des charges dues s'élevant à la somme de 894,60 euros, au paiement d'une somme de 208 euros correspondant aux intérêts à titre des frais accessoire, au paiement d'une somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement d'une somme de 583,22 euros au titre des intérêts au taux contractuel du cahier des charges du lotissement ; qu'en condamnant Mme J... au versement d'une somme de 300 euros à titre de dommagesintérêts, le tribunal, qui ne s'est pas prononcé seulement sur ce qui lui était demandé, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2) ALORSQUE les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure ; que le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire ; qu'en se bornant à constater, pour condamner Mme J..., outre au paiement d'un solde de charges de copropriété avec intérêts au taux légal, au versement de dommagesintérêts, que l'abstention prolongée à s'acquitter de ces charges lésait les autres colotis et retardait le paiement des charges incombant à l'ASL, le tribunal, qui a statué par des motifs impropres à caractériser un préjudice indépendant du retard apporté au paiement et causé par la mauvaise foi de Mme J..., a violé l'article 1231-6 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-22023
Date de la décision : 05/11/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Fort-de-France, 29 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 05 nov. 2020, pourvoi n°19-22023


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.22023
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