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04/11/2020 | FRANCE | N°18-23103;18-23104;18-23105

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 novembre 2020, 18-23103 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2020

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 972 FS-D

Pourvois n°
J 18-23.103
à M 18-23.105 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2020

La société Péri, société par actions simplifiée, dont

le siège est [...] , a formé les pourvois n° J 18-23.103, K 18-23.104, M 18-23.105 contre trois arrêts rendus le 24 avril 2018 par la cour d'appel d'Age...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2020

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 972 FS-D

Pourvois n°
J 18-23.103
à M 18-23.105 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2020

La société Péri, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé les pourvois n° J 18-23.103, K 18-23.104, M 18-23.105 contre trois arrêts rendus le 24 avril 2018 par la cour d'appel d'Agen (chambre sociale), dans les litiges l'opposant respectivement :

1°/ à Mme B... R..., domiciliée [...] ,

2°/ à M. M... P..., domicilié [...] ,

3°/ à M. K... T..., domicilié [...] ,

4°/ à Pôle emploi Aquitaine, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de chacun de ses pourvois, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller doyen, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Péri, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme R... et de MM. T... et P..., et l'avis écrit de M. Weissmann, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Leprieur, conseiller doyen rapporteur, M. Pietton, Mmes Richard, Le Lay, Mariette, conseillers, Mme Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Vu la connexité, joint les pourvois n° J 18-23.103, K 18-23.104 et M 18-23.105 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Agen, 24 avril 2018), que MM. P... et T..., ainsi que Mme R... étaient salariés de la société Péri ; que cette société, ayant décidé la fermeture de deux de ses agences, a proposé aux salariés qui y travaillaient, soit au moins dix personnes, la modification de leur contrat de travail ; que neuf salariés, dont ceux précédemment nommés, ont été licenciés pour motif économique en décembre 2013 ;

Sur le moyen unique :

Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts de prononcer la nullité du licenciement des salariés et, en conséquence, de le condamner à leur payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts de ce chef, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3 ; qu'en retenant, pour dire que l'employeur était tenu de mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi, que le projet initial de fermeture des sites de Boé et Nivolas concernait au moins dix salariés, dont M. U..., qui s'étaient vus proposer une modification de leur contrat de contrat de travail qu'ils avaient refusée et que l'employeur ne justifiait pas, ni que M. U..., avait initialement accepté la modification de son contrat de travail, ni que son licenciement n'avait pas été initialement envisagé par l'employeur, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a violé les textes susvisés ;

2°/ au surplus, que l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3 ; qu'en jugeant le licenciement nul et de nul effet après avoir relevé que si le procès-verbal de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013 faisait état de dix refus de modifications du contrat de travail, le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 13 novembre 2013 mentionnait que seuls neuf salariés avaient répondu par la négative et qu'un projet de licenciement collectif de moins de dix salariés était envisagé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que le projet définitif de licenciement tel que présenté lors de la dernière consultation des représentants du personnel ne concernait que neuf salariés et n'était dès lors pas soumis à l'obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, a violé les textes susvisés ;

3°/ à tout le moins que, en se bornant, pour infirmer le jugement entrepris, lequel avait justement considéré que le licenciement n'était pas nul dès lors que la fermeture de l'agence de Boé ne s'était traduite que par le licenciement de neuf salariés, à affirmer que le projet initial de licenciement concernait dix salariés qui avaient refusé la modification de leur contrat de travail et que M. U..., ne justifiait pas avoir accepté la modification de son contrat de travail, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, quel avait été le nombre de licenciement définitivement envisagé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-25 du code du travail, ensemble l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur ;

Mais attendu que l'article L. 1233-25 du code du travail fait obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi lorsque dix salariés au moins ont refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3 du même code et que leur licenciement est envisagé ;

Et attendu que la cour d'appel a constaté que les dix salariés concernés par le projet de réorganisation, dont elle a fait ressortir qu'il avait été mené à son terme sans modification, avaient tous refusé la modification de leur contrat de travail selon le procès-verbal de réunion de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013 et que si le procès-verbal de réunion extraordinaire de la même délégation du 13 novembre 2013 mentionnait que seuls neuf salariés avaient refusé la proposition de mutation qui leur avait été faite, l'employeur ne justifiait ni des conditions, ni de la date de modification du contrat de travail du dixième salarié, à savoir antérieurement ou postérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement économique ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu en déduire que l'employeur était tenu de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Péri aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Péri et la condamne à payer à Mme R... et à MM. P... et T... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Péri, demanderesse au pourvoi n° J 18-23.103

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du licenciement de Mme R... et conséquence, d'AVOIR condamné la Société PERI à lui payer une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef ainsi que la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

AUX MOTIFS QUE : « Conformément aux dispositions de l'article L. 1233-61 du code du travail, « Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre (...) ».Il résulte par ailleurs des dispositions de l'article L. 1233-25 du code du travail que « Lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail, proposée par leur employeur pour l'un des motifs économiques énoncés par l'article L. 1233-3 et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique ». En l'espèce, il ressort des conclusions des parties et des pièces de la procédure que : -l'employeur ne disconvient pas que la fermeture des agences de Boé et de Nivolas concernait bien au moins 10 salariés auxquels des propositions de mutation au siège social de Meaux ont été adressées ; -cette démarche est confirmée par le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 24 septembre 2013, les réponses suivantes ayant été apportées par la direction : *sur les questions du projet de fermeture des agences et de la modification du lieu de travail des salariés attachés à ces agences, la direction a précisé qu'elle souhaitait «recentrer les ressources sur le siège et centraliser nos forces sur Meaux », *sur la question relative au télétravail, la direction a précisé qu'elle « ne souhaite pas pratiquer le télétravail, ce mode de travail ne cadre pas avec la nouvelle stratégie de centralisation »;- selon le procès-verbal de réunion de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013, s'agissant du bilan des réponses aux propositions de reclassement, d'ensemble des réponses a été reçu. Celles-ci sont malheureusement négatives ». -de manière surprenante, le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 13 novembre 2013, soit 15 jours plus tard - sur interrogation relative à la mise en oeuvre d'un PSE - mentionne cette fois que, selon la direction, « neuf salariés ont répondu par la négative à la proposition de reclassement proposée (...) M. U... en tant qu'ingénieur recherche et développement restera un salarie de Péri France » ; -pour autant, au regard des énonciations contradictoires et donc non probantes contenues dans les procès-verbaux des 29 octobre et 13 novembre 2013 quant au nombre de salariés ayant refusé la proposition de mutation, la société Péri qui invoque l'acceptation par le salarié de la mutation proposée - ne verse aux débats ni la proposition adressée à. ce dernier, ni le nécessaire avenant de son contrat de travail, ni même une attestation de l'intéressé, toutes pièces qui permettraient à la cour de vérifier que M. U... occupe bien le nouvel emploi proposé suite à la fermeture du site de Nivolas et qu'il n'a donc pas refusé cette proposition initiale ; - la seule circonstance que , selon les bulletins de salaire produits, M. U..., entre avril 2015 et mars 2016, a été employé par la société PERI ne permet pas plus de considérer que son licenciement n'a pas été envisagé par l'employeur qui ne fournit pas plus d'éléments relatifs aux conditions de modification de son contrat de travail, et donc a fortiori à la date à laquelle elle serait intervenue, à savoir antérieurement ou postérieurement à l'engagement des procédures de licenciement économique en cause. II résulte de l'ensemble de ces éléments qu'au moins 10 salariés ont été concernés par la fermeture des sites de Boé et de Nivolas, que ces salariés se sont vus proposer une modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail - à savoir une mutation au siège social de Meaux -, que l'employeur ne conteste pas le refus de neuf de ses salariés et ne produit strictement aucun élément permettant de vérifier que le dixième salarié aurait, comme elle le prétend, accepté la proposition faite, étant observé que Mme R... fournit quant elle des éléments permettant de supposer que la proposition initiale a bien été refusée par M. U... dès lors que l'employeur n'envisageait aucune possibilité de télétravail – ce qui semble pourtant avoir été finalement convenu avec M. U..., qui, selon les bulletins de salaire fournis, réside à plus de 600 kms du siège social de l'entreprise – et que seule la Société PERI est en mesure de justifier de la date et des conditions dans lesquelles la modification du contrat de travail de M. U... est intervenue. Dans ces conditions, la société Péri se devait en application des textes susvisés d'établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, ce qu'elle n'a pas fait. II en résulte que le licenciement de Mme R... est nul et de nul effet. Mme R..., âgé de 35 ans au moment de la rupture de son contrat de travail, totalisait près de 5 ans d'ancienneté. Dans ces conditions, son préjudice sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 15 000 euros. Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de Mme R... les frais irrépétibles qu'elle a dû exposer dans cette instance évalués à la somme de 1 500 euros. La société Péri sera en conséquence condamnée à M payer ladite somme sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La société Péri qui succombe ne peut, quant à elle, qu'être déboutée de sa demande formulée de ce chef ».

1) ALORS QUE l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3; qu'en retenant, pour dire que l'employeur était tenu de mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi, que le projet initial de fermeture des sites de Boé et Nivolas concernait au moins 10 salariés, dont M. U..., qui s'étaient vus proposer une modification de leur contrat de contrat de travail qu'ils avaient refusée et que l'employeur ne justifiait pas, ni que M. U... avait initialement accepté la modification de son contrat de travail, ni que son licenciement n'avait pas été initialement envisagé par l'employeur, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a violé les textes susvisés ;

2) ALORS AU SURPLUS QUE l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3; qu'en jugeant le licenciement nul et de nul effet après avoir relevé que si le procès-verbal de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013 faisait état de dix refus de modifications du contrat de travail, le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 13 novembre 2013 mentionnait que seuls neuf salariés avaient répondu par la négative et qu'un projet de licenciement collectif de moins de 10 salariés était envisagé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que le projet définitif de licenciement tel que présenté lors de la dernière consultation des représentants du personnel ne concernait que 9 salariés et n'était dès lors pas soumis à l'obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, a violé les textes susvisés ;

3) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en se bornant, pour infirmer le jugement entrepris, lequel avait justement considéré que le licenciement n'était pas nul dès lors que la fermeture de l'agence de Boé ne s'était traduite que par le licenciement de 9 salariés, à affirmer que le projet initial de licenciement concernait 10 salariés qui avaient refusé la modification de leur contrat de travail et que M. U... ne justifiait pas avoir accepté la modification de son contrat de travail, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, quel avait été le nombre de licenciement définitivement envisagé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. L. 1233-25 du code du travail, ensemble l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur.
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Péri, demanderesse au pourvoi n° K 18-23.104

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, prononcé la nullité du licenciement de M. P... et conséquence, d'AVOIR condamné la Société PERI à lui payer une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef ainsi que la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE : « Conformément aux dispositions de l'article L. 1233-61 du code du travail, « Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre (...) ».Il résulte par ailleurs des dispositions de l'article L. 1233-25 du code du travail que « Lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail, proposée par leur employeur pour l'un des motifs économiques énoncés par l'article L. 1233-3 et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique ». En l'espèce, il ressort des conclusions des parties et des pièces de la procédure que : -l'employeur ne disconvient pas que la fermeture des agences de Boé et de Nivolas concernait bien au moins 10 salariés auxquels des propositions de mutation au siège social de Meaux ont été adressées ; -cette démarche est confirmée par le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 24 septembre 2013, les réponses suivantes ayant été apportées par la direction : *sur les questions du projet de fermeture des agences et de la modification du lieu de travail des salariés attachés à ces agences, la direction a précisé qu'elle souhaitait « recentrer les ressources sur le siège et centraliser nos forces sur Meaux », *sur la question relative au télétravail, la direction a précisé qu'elle « ne souhaite pas pratiquer le télétravail, ce mode de travail ne cadre pas avec la nouvelle stratégie de centralisation»;- selon le procès-verbal de réunion de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013, s'agissant du bilan des réponses aux propositions de reclassement, l'ensemble des réponses a été reçu. Celles-ci sont malheureusement négatives ». -de manière surprenante, le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 13 novembre 2013, soit 15 jours plus tard - sur interrogation relative à la mise en oeuvre d'un PSE - mentionne cette fois que, selon la direction, « neuf salariés ont répondu par la négative à la proposition de reclassement proposée (...) M. U... en tant qu'ingénieur recherche et développement restera un salarie de Péri France » ; -pour autant, au regard des énonciations contradictoires et donc non probantes contenues dans les procès-verbaux des 29 octobre et 13 novembre 2013 quant au nombre de salariés ayant refusé la proposition de mutation, la société Péri qui invoque l'acceptation par le salarié de la mutation proposée - ne verse aux débats ni la proposition adressée à. ce dernier, ni le nécessaire avenant de son contrat de travail, ni même une attestation de l'intéressé, toutes pièces qui permettraient à la cour de vérifier que M. U... occupe bien le nouvel emploi proposé suite à la fermeture du site de Nivolas et qu'il n'a donc pas refusé cette proposition initiale ; - la seule circonstance que , selon les bulletins de salaire produits, M. U..., entre avril 2015 et mars 2016, a été employé par la société PERI ne permet pas plus de considérer que son licenciement n'a pas été envisagé par l'employeur qui ne fournit pas plus d'éléments relatifs aux conditions de modification de son contrat de travail, et donc a fortiori à la date à laquelle elle serait intervenue, à savoir antérieurement ou postérieurement à l'engagement des procédures de licenciement économique en cause. II résulte de l'ensemble de ces éléments qu'au moins 10 salariés ont été concernés par la fermeture des sites de Boé et de Nivolas, que ces salariés se sont vus proposer une modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail - à savoir une mutation au siège social de Meaux -, que l'employeur ne conteste pas le refus de neuf de ses salariés et ne produit strictement aucun élément permettant de vérifier que le dixième salarié aurait, comme elle le prétend, accepté la proposition faite, étant observé que M. P... fournit quant à lui des éléments permettant de supposer que la proposition initiale a bien été refusée par M. U... dès lors que l'employeur n'envisageait aucune possibilité de télétravail – ce qui semble pourtant avoir été finalement convenu avec M. U..., qui, selon les bulletins de salaire fournis, réside à plus de 600 kms du siège social de l'entreprise – et que seule la Société PERI est en mesure de justifier de la date et des conditions dans lesquelles la modification du contrat de travail de M. U... est intervenue. Dans ces conditions, la société Péri se devait en application des textes susvisés d'établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, ce qu'elle n'a pas fait. Il en résulte que le licenciement de M. P... est nul et de nul effet. M. P..., âgé de 37 ans au moment de la rupture de son contrat de travail, totalisait près de 5 ans d'ancienneté. Il a assez rapidement retrouvé un emploi à des conditions financières sensiblement équivalentes. Dans ces conditions, son préjudice sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 20 000 euros. Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de M. P... les frais irrépétibles qu'il a du exposer dans cette instance évalués à la somme de 1500 euros. La Société Péri sera en conséquence condamnée à lui payer ladite somme sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. La société Péri qui succombe, ne peut quant à elle, qu'être déboutée de sa demande formulée de ce chef » ;

1) ALORS QUE l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3; qu'en retenant, pour dire que l'employeur était tenu de mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi, que le projet initial de fermeture des sites de Boé et Nivolas concernait au moins 10 salariés, dont M. U..., qui s'étaient vus proposer une modification de leur contrat de contrat de travail qu'ils avaient refusée et que l'employeur ne justifiait pas, ni que M. U... avait initialement accepté la modification de son contrat de travail, ni que son licenciement n'avait pas été initialement envisagé par l'employeur, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a violé les textes susvisés ;

2) ALORS AU SURPLUS QUE l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3; qu'en jugeant le licenciement nul et de nul effet après avoir relevé que si le procès-verbal de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013 faisait état de dix refus de modifications du contrat de travail, le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 13 novembre 2013 mentionnait que seuls neuf salariés avaient répondu par la négative et qu'un projet de licenciement collectif de moins de 10 salariés était envisagé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que le projet définitif de licenciement tel que présenté lors de la dernière consultation des représentants du personnel ne concernait que 9 salariés et n'était dès lors pas soumis à l'obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, a violé les textes susvisés ;

3) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en se bornant, pour infirmer le jugement entrepris, lequel avait justement considéré que le licenciement n'était pas nul dès lors que la fermeture de l'agence de Boé ne s'était traduite que par le licenciement de 9 salariés, à affirmer que le projet initial de licenciement concernait 10 salariés qui avaient refusé la modification de leur contrat de travail et que M. U... ne justifiait pas avoir accepté la modification de son contrat de travail, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, quel avait été le nombre de licenciement définitivement envisagé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. L. 1233-25 du code du travail, ensemble l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur.

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Péri, demanderesse au pourvoi n° M 18-23.105

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du licenciement de M. T... et conséquence, d'AVOIR condamné la Société PERI à lui payer une somme de 65 000 euros à titre de dommages et intérêts de ce chef ainsi que la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

AUX MOTIFS QUE : « Conformément aux dispositions de l'article L. 1233-61 du code du travail, « Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre (...) ».Il résulte par ailleurs des dispositions de l'article L. 1233-25 du code du travail que «Lorsqu'au moins dix salariés ont refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail, proposée par leur employeur pour l'un des motifs économiques énoncés par l'article L. 1233-3 et que leur licenciement est envisagé, celui-ci est soumis aux dispositions applicables en cas de licenciement collectif pour motif économique ». En l'espèce, il ressort des conclusions des parties et des pièces de la procédure que : -l'employeur ne disconvient pas que la fermeture des agences de Boé et de Nivolas concernait bien au moins 10 salariés auxquels des propositions de mutation au siège social de Meaux ont été adressées ; -cette démarche est confirmée par le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 24 septembre 2013, les réponses suivantes ayant été apportées par la direction : *sur les questions du projet de fermeture des agences et de la modification du lieu de travail des salariés attachés à ces agences, la direction a précisé qu'elle souhaitait « recentrer les ressources sur le siège et centraliser nos forces sur Meaux», *sur la question relative au télétravail, la direction a précisé qu'elle « ne souhaite pas pratiquer le télétravail, ce mode de travail ne cadre pas avec la nouvelle stratégie de centralisation»;- selon le procès-verbal de réunion de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013, s'agissant du bilan des réponses aux propositions de reclassement, l'ensemble des réponses a été reçu. Celles-ci sont malheureusement négatives ». -de manière surprenante, le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 13 novembre 2013, soit 15 jours plus tard - sur interrogation relative à la mise en oeuvre d'un PSE - mentionne cette fois que, selon la direction, « neuf salariés ont répondu par la négative à la proposition de reclassement proposée (...) M. U... en tant qu'ingénieur recherche et développement restera un salarie de Péri France » ; -pour autant, au regard des énonciations contradictoires et donc non probantes contenues dans les procès-verbaux des 29 octobre et 13 novembre 2013 quant au nombre de salariés ayant refusé la proposition de mutation, la société Péri qui invoque l'acceptation par le salarié de la mutation proposée - ne verse aux débats ni la proposition adressée à. ce dernier, ni le nécessaire avenant de son contrat de travail, ni même une attestation de l'intéressé, toutes pièces qui permettraient à la cour de vérifier que M. U... occupe bien le nouvel emploi proposé suite à la fermeture du site de Nivolas et qu'il n'a donc pas refusé cette proposition initiale ; - la seule circonstance que , selon les bulletins de salaire produits, M. U..., entre avril 2015 et mars 2016, a été employé par la société PERI ne permet pas plus de considérer que son licenciement n'a pas été envisagé par l'employeur qui ne fournit pas plus d'éléments relatifs aux conditions de modification de son contrat de travail, et donc a fortiori à la date à laquelle elle serait intervenue, à savoir antérieurement ou postérieurement à l'engagement des procédures de licenciement économique en cause. II résulte de l'ensemble de ces éléments qu'au moins 10 salariés ont été concernés par la fermeture des sites de Boé et de Nivolas, que ces salariés se sont vus proposer une modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail - à savoir une mutation au siège social de Meaux -, que l'employeur ne conteste pas le refus de neuf de ses salariés et ne produit strictement aucun élément permettant de vérifier que le dixième salarié aurait, comme elle le prétend, accepté la proposition faite, étant observé que M. T... fournit quant à lui des éléments permettant de supposer que la proposition initiale a bien été refusée par M. U... dès lors que l'employeur n'envisageait aucune possibilité de télétravail – ce qui semble pourtant avoir été finalement convenu avec M. U..., qui, selon les bulletins de salaire fournis, réside à plus de 600 kms du siège social de l'entreprise – et que seule la Société PERI est en mesure de justifier de la date et des conditions dans lesquelles la modification du contrat de travail de M. U... est intervenue. Dans ces conditions, la société Péri se devait en application des textes susvisés d'établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, ce qu'elle n'a pas fait. Il en résulte que le licenciement de M. T... est nul et nul effet. M. T..., âgé de 56 ans au moment de la rupture de son contrat de travail, totalisait près de 22 ans d'ancienneté. Il justifie par ailleurs ne pas avoir retrouvé d'emploi stable depuis son licenciement et supporter une baisse significative de ses revenus. Dans ces conditions, son préjudice sera justement indemnisé par l'allocation d'une somme de 65 000 euros. Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de M. T... les frais irrépétibles qu'il a dû exposer dans cette instance évalués à la somme de 1500 euros. La Société Péri sera en conséquence condamnée à lui payer ladite somme sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ».

1) ALORS QUE l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3; qu'en retenant, pour dire que l'employeur était tenu de mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi, que le projet initial de fermeture des sites de Boé et Nivolas concernait au moins 10 salariés, dont M. U..., qui s'étaient vus proposer une modification de leur contrat de contrat de travail qu'ils avaient refusée et que l'employeur ne justifiait pas, ni que M. U... avait initialement accepté la modification de son contrat de travail, ni que son licenciement n'avait pas été initialement envisagé par l'employeur, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a violé les textes susvisés ;

2) ALORS AU SURPLUS QUE l'article L. 1233-25 du code du travail et l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur, ne font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi que lorsque le projet définitif de licenciement présenté aux représentants du personnel concerne au moins dix salariés, peu important qu'initialement, dix salariés au moins aient refusé la modification d'un élément essentiel de leur contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3; qu'en jugeant le licenciement nul et de nul effet après avoir relevé que si le procès-verbal de la délégation unique du personnel du 29 octobre 2013 faisait état de dix refus de modifications du contrat de travail, le procès-verbal de réunion extraordinaire de la délégation unique du personnel du 13 novembre 2013 mentionnait que seuls neuf salariés avaient répondu par la négative et qu'un projet de licenciement collectif de moins de 10 salariés était envisagé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que le projet définitif de licenciement tel que présenté lors de la dernière consultation des représentants du personnel ne concernait que 9 salariés et n'était dès lors pas soumis à l'obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, a violé les textes susvisés ;

3) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en se bornant, pour infirmer le jugement entrepris, lequel avait justement considéré que le licenciement n'était pas nul dès lors que la fermeture de l'agence de Boé ne s'était traduite que par le licenciement de 9 salariés, à affirmer que le projet initial de licenciement concernait 10 salariés qui avaient refusé la modification de leur contrat de travail et que M. U... ne justifiait pas avoir accepté la modification de son contrat de travail, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, quel avait été le nombre de licenciement définitivement envisagé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. L. 1233-25 du code du travail, ensemble l'article L. 1233-61 dudit code, dans sa rédaction alors en vigueur.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-23103;18-23104;18-23105
Date de la décision : 04/11/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 24 avril 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 nov. 2020, pourvoi n°18-23103;18-23104;18-23105


Composition du Tribunal
Président : M. Cathala (président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.23103
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