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22/10/2020 | FRANCE | N°18-21381

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 22 octobre 2020, 18-21381


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 octobre 2020

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 761 F-D

Pourvoi n° N 18-21.381

Aide juridictionnelle partielle en défense
au profit de Mme Q....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 5 avril 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 OCTOBRE 2020

Le syndicat des copropriétaires de la résiden...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 octobre 2020

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 761 F-D

Pourvoi n° N 18-21.381

Aide juridictionnelle partielle en défense
au profit de Mme Q....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 5 avril 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 22 OCTOBRE 2020

Le syndicat des copropriétaires de la résidence [...] , représenté par son syndic bénévole M. D... C..., a formé le pourvoi n° N 18-21.381 contre le jugement rendu le 14 juin 2018 par le tribunal d'instance de Saintes, dans le litige l'opposant à Mme A... Q..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Collomp, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence [...] , de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme Q..., après débats en l'audience publique du 8 septembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Collomp, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Saintes, 14 juin 2018), rendu en dernier ressort, Mme Q..., propriétaire d'un lot dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, a été assignée par le syndicat des copropriétaires en paiement d'un arriéré de charges et du coût de la remise en état de la façade.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen
2. Le syndicat des copropriétaires fait grief au jugement de rejeter l'ensemble de ses demandes, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, pour dire nulles et de nul effet les décisions prises lors des assemblées générales des copropriétaires de 2016 et 2017, dire qu'elles ne pouvaient fonder les appels de fonds dus par chaque copropriétaire et, en conséquence, débouter le syndicat de l'ensemble de ses demandes de paiement formées à l'encontre de Mme Q..., le tribunal d'instance qui a énoncé que ces assemblées générales étaient présidées par M. C..., syndic bénévole, a dénaturé le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 14 novembre 2016 comme le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 16 mai 2017 qui mentionnent, tous deux, que l'assemblée était présidée par M. G..., et, ce faisant, a méconnu le principe susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

3. Pour rejeter les demandes du syndicat des copropriétaires, le jugement retient que les assemblées générales de 2016 et 2017 sont entachées de nullité au regard de la loi du 10 juillet 1965 dès lors qu'elles ont été présidées par le syndic bénévole, M. C..., qu'il en résulte que toutes les décisions prises lors des assemblées générales présidées par M. C... sont donc nulles et nulles d'effet et ne peuvent fonder les appels de fonds dus par chacun des copropriétaires, et qu'en considération de l'illégalité de ces assemblées générales, le montant du devis pour la remise en état de ladite façade ne peut être réclamé à Mme Q....

4. En statuant ainsi, alors que les procès-verbaux des assemblées générales des 14 novembre 2016 et 16 mai 2017 mentionnent qu'a été élu président de séance non pas M. C..., mais M. G..., le tribunal, qui a dénaturé les termes clairs et précis de ces documents, a violé le principe susvisé.

Et sur le moyen unique, pris en ses deuxième à quatrième branches :

Enoncé du moyen

5. Le syndicat des copropriétaires fait grief au jugement de rejeter ses demandes, alors :

« 1°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant, pour débouter le syndicat des copropriétaires exposant de sa demande en paiement des frais de réfection de la façade de l'immeuble formée à l'encontre de Mme Q..., que la jurisprudence était constante quant à des travaux susceptibles de modifier une façade extérieure, qu'il ne s'agissait pas, en effet, d'un simple ravalement ou d'une peinture, comme tel était le cas, mais de la couleur lorsque celle-ci est radicalement différente ou d'aménagements structurants tels que la pose de vérandas, de films protecteurs sur les vitres, de barreaux aux fenêtres ou de volets métalliques et que tel n'était pas le cas en l'espèce, sans donner aucun motif de nature à expliciter et étayer une telle assertion, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant, pour débouter le syndicat des copropriétaires exposant de sa demande en paiement des frais de réfection de la façade de l'immeuble formée à l'encontre de Mme Q..., que la copropriété était responsable des infiltrations d'eau dans les parties communes comme tel était le cas, qu'elle devait intervenir et qu'elle ne l'avait pas fait, sans fournir le moindre motif permettant de justifier de telles assertions, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en affirmant péremptoirement que les dégradations incriminées ne sont pas prouvées, sans analyser, même sommairement, les éléments de preuve invoqués par l'exposant dans ses conclusions et versés aux débats établissant que Mme Q... avait dégradé la façade de l'immeuble en déposant l'enduit de la façade du rez-de-chaussée, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

6. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

7. Pour rejeter la demande du syndicat des copropriétaires en paiement des frais de remise en état de la façade, le jugement retient que la jurisprudence est constante quant aux travaux susceptibles de modifier une façade extérieure, qu'il ne s'agit pas d'un simple ravalement ou d'une simple peinture mais de la couleur lorsqu'elle est radicalement différente ou d'aménagements structurants, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, que, par ailleurs, s'il s'agit d'un dommage, les travaux de réfection nécessaires doivent être effectués, que, de surcroît, la copropriété est responsable des parties communes et plus particulièrement des infiltrations d'eau, comme tel est le cas, et doit, à ce titre, intervenir, ce qu'elle n'a pas fait, et qu'enfin, les dégradations incriminées ne sont pas prouvées.

8. En statuant ainsi, par voie de simples affirmations, sans préciser ni analyser, même sommairement, les pièces sur lesquelles il fondait sa décision, le tribunal, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 juin 2018, entre les parties, par le tribunal d'instance de Saintes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Bordeaux ;

Condamne Mme Q... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme Q... et la condamne à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence [...] la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de la résidence [...] .

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence [...] de l'ensemble ses demandes

AUX MOTIFS QUE I - sur la remise en cause des assemblées générales de 2016 et 2017 s'agissant de la présidence de l'assemblée générale par le syndic bénévole M. C..., l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 est très clair : « un syndic bénévole ne peut pas être président de l'assemblée générale» .. « En revanche, il est de droit secrétaire général de séance » ; que même si la Cour de Cassation dans un arrêt du 13 novembre 2013 (CIV n°12-12.084) a considéré qu'aucune assemblée de copropriétaires n'était informelle et que les décisions prises ne sont pas inexistantes et donc de fait annulables, il s'agit de l'organisation de cellesci car elles sont systématiquement entachées de nullité au regard de la loi du 10 juillet 1965 susvisée, dès lors qu'elles sont présentées par le syndic bénévole ; que toutes les décisions prises lors des assemblées générales présidées par M. C... sont donc nulles et nulles d'effet et elles ne peuvent, dans ces conditions, fonder les appels de fonds dus par chacun des copropriétaires ; que le syndicat des copropriétaires de la résidence Rubis représenté par son syndic bénévole M. C... sera donc débouté de ses demandes de règlement des sommes dues par Mme A... Q... ; que dans ces conditions, il n'y a pas lieu de statuer sur la légalité des convocations des assemblées générales, ni sur l'absence de justificatifs quant aux sommes réclamées ; II - sur la dégradation de la façade, la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété impose aux copropriétaires d'entretenir la façade de leur immeuble ; qu'elle leur interdit aussi toute modification de l'aspect extérieur du bâtiment sans autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires ; que si le juge peut imposer une remise en état, c'est en raison de la modification de la façade, mais il peut, au contraire, autoriser les travaux pour défaut d'entretien ; que manifestement, en l'espèce, cette modification a été faite préalablement à l'autorisation de l'assemblée des copropriétaires, mais dans la mesure où les assemblées générales du 16/05/2017 et du 11/11/2017 sont entachées d'illégalité ayant été présidées par le syndic bénévole M. C..., le montant du devis de la société Batideal pour la remise en état de ladite façade ne peut être réclamé à Mme A... Q..., d'autant plus que la jurisprudence est constante quant à des travaux susceptibles de modifier une façade extérieure (CA PARIS 11/12/08 ; CA LYON 18/11/08 ; CA PARIS 06/11/08 ; CASS 04/12/07 ...) ; qu'il ne s'agit pas, en effet, d'un simple ravalement ou d'une peinture, comme tel est le cas, mais de la couleur lorsque celle-ci est radicalement différente ou d'aménagements structurants tels que la pose de vérandas ; de films protecteurs sur les vitres, de barreaux aux fenêtres ou de volets métalliques ; qu'en l'espèce, tel n'est pas le cas ; que par ailleurs, s'il s'agit d'un dommage, comme le note la défenderesse, et de fait les travaux nécessaires de réfection doivent être effectués (CA Aix-en-Provence 31/10/07 ; CA Paris 31/01/08) ; que de surcroît, la copropriété est responsable des parties communes et plus particulièrement des infiltrations d'eau comme tel est le cas et doit, à ce titre, intervenir (cour d'appel Versailles 11/06/99 ; CA Aix-en-Provence 28/02/08) et force est de constater qu'elle ne l'a pas fait ; qu'au regard des circonstances et de la jurisprudence et alors que les dégradations incriminées ne sont pas prouvées, le syndicat des copropriétaires de la résidence Rubis représenté par son syndic bénévole M. C... sera donc débouté de sa demande de condamnation de Mme Q... au paiement de la somme de 1751,76 euros correspondant au devis de remise en état de la façade ;

ALORS DE PREMIERE PART QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, pour dire nulles et de nul effet les décisions prises lors des assemblées générales des copropriétaires de 2016 et 2017, dire qu'elles ne pouvaient fonder les appels de fonds dus par chaque copropriétaire et, en conséquence, débouter le syndicat de l'ensemble de ses demandes de paiement formées à l'encontre de Mme Q..., le tribunal d'instance qui a énoncé que ces assemblées générales étaient présidées par M. C..., syndic bénévole, a dénaturé le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 14 novembre 2016 comme le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 16 mai 2017 qui mentionnent, tous deux, que l'assemblée était présidée par M. G..., et, ce faisant, a méconnu le principe susvisé ;

ALORS DE DEUXIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant, pour débouter le syndicat des copropriétaires exposant de sa demande en paiement des frais de réfection de la façade de l'immeuble formée à l'encontre de Mme Q..., que la jurisprudence était constante quant à des travaux susceptibles de modifier une façade extérieure, qu'il ne s'agissait pas, en effet, d'un simple ravalement ou d'une peinture, comme tel était le cas, mais de la couleur lorsque celle-ci est radicalement différente ou d'aménagements structurants tels que la pose de vérandas, de films protecteurs sur les vitres, de barreaux aux fenêtres ou de volets métalliques et que tel n'était pas le cas en l'espèce, sans donner aucun motif de nature à expliciter et étayer une telle assertion, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant, pour débouter le syndicat des copropriétaires exposant de sa demande en paiement des frais de réfection de la façade de l'immeuble formée à l'encontre de Mme Q..., que la copropriété était responsable des infiltrations d'eau dans les parties communes comme tel était le cas, qu'elle devait intervenir et qu'elle ne l'avait pas fait, sans fournir le moindre motif permettant de justifier de telles assertions, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS DE QUATRIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en affirmant péremptoirement que les dégradations incriminées ne sont pas prouvées, sans analyser, même sommairement, les éléments de preuve invoqués par l'exposant dans ses conclusions et versés aux débats établissant que Mme Q... avait dégradé la façade de l'immeuble en déposant l'enduit de la façade du rez-de-chaussée, le tribunal d'instance a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-21381
Date de la décision : 22/10/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Saintes, 14 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 22 oct. 2020, pourvoi n°18-21381


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.21381
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