LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 20-84.320 F-D
N° 2289
CK
21 OCTOBRE 2020
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 OCTOBRE 2020
M. F... J... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, en date du 30 juin 2020, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative d'assassinat, vols aggravés, violences aggravées et participation armée à un attroupement, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Zerbib, conseiller, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. F... J..., et les conclusions de M. Valleix, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. J... a été mis en examen notamment des chefs de tentative d'assassinat, vols et violences aggravés et placé en détention provisoire le 19 juin 2019.
3. Par ordonnance du 15 juin 2020, le juge des libertés et de la détention a prolongé sa détention provisoire pour une durée de six mois à compter du 19 juin 2020.
4. M. J... a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le second moyen
5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de prolongation de détention provisoire du 15 juin 2020 en rejetant le moyen tiré de la violation du droit à un procès équitable pour défaut d'impartialité du juge des libertés et de la détention, alors :
« 1°/ que pour apprécier l'impartialité du juge, il convient de s'assurer notamment que celui-ci ne manifeste aucun parti pris ni préjugé personnel et qu'il fait preuve du détachement nécessaire ; que tel n'est pas le cas lorsque le juge manifeste, par les termes mêmes employés dans sa décision, une hostilité caractérisée à l'égard du conseil d'une partie ; qu'il appartient alors à la chambre de l'instruction appelée à statuer sur appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention qui constate, dans cette ordonnance, une telle animosité, d'infirmer la décision pour violation du droit à un tribunal impartial ; que n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et préliminaire, 137 à 144, 591 et 593 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction qui, constatait des « tensions entre le juge et la défense », tout en confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention aux motifs, radicalement inopérants, que l'impartialité ne peut concerner que les rapports entre le juge et le mis en examen quand ces tensions, constatées a minima, étaient exclusives du détachement et de la neutralité devant nécessairement guider l'office de ce juge ;
2°/ qu'en tout état de cause, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et préliminaire, 137 à 144, 591 et 593 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction qui confirmait l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, lequel avait pourtant manifesté une grave hostilité à l'encontre de l'avocat du mis en examen dont il n'avait pas hésité, sur un ton sarcastique et, en tout cas inapproprié, à remettre en cause les qualités et investissement professionnels, en se contentant de relever que cette ordonnance était motivée en fait et en droit, cette seule motivation, évidemment indispensable, n'étant pas de nature à exclure toute crainte légitime du mis en examen quant à l'impartialité de ce magistrat. »
Réponse de la Cour
7. Pour écarter le grief tiré de la partialité du juge des libertés et de la détention, l'arrêt énonce notamment que si transparaissent, dans le paragraphe liminaire de l'ordonnance appelée, quelques tensions entre ce magistrat et l'avocat de la défense consécutives aux propos exprimés lors du débat contradictoire par le client de ce dernier, qui a déploré ne pas avoir vu son conseil pendant des mois, elles ne sauraient conduire à infirmer cette décision à raison de la partialité alléguée de son auteur, cette exigence ne s'imposant que dans les rapports entre le juge et le mis en examen.
8. Les juges ajoutent que l'ordonnance n'est motivée en droit et en fait que par référence aux seuls critères légaux de prolongation de la détention.
9. En statuant ainsi, et dès lors que, d'une part, il résulte de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme que seule la personne accusée au sens de ce texte a droit à ce que sa cause soit entendue par un juge impartial, l'avocat qui l'assiste n'étant pas lui-même accusé, d'autre part, les considérations litigieuses ne comportent aucune appréciation dirigée à l'encontre du mis en examen et ne concernent pas le fond du dossier, la chambre de l'instruction, qui n'a pas méconnu les exigences du procès équitable, a justifié sa décision.
10. Ainsi, le moyen doit être écarté.
11. Par ailleurs l'arrêt est régulier, tant la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un octobre deux mille vingt.