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21/10/2020 | FRANCE | N°18-20930

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 octobre 2020, 18-20930


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 951 F-D

Pourvoi n° X 18-20.930

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 OCTOBRE 2020

M. E... F..., domicilié [...] , a f

ormé le pourvoi n° X 18-20.930 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2018 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 951 F-D

Pourvoi n° X 18-20.930

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 OCTOBRE 2020

M. E... F..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° X 18-20.930 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2018 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à la société Adrexo, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. F..., de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Adrexo, après débats en l'audience publique du 9 septembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 8 juin 2018), M. F... a été engagé à compter du 2 mai 2001 par contrat de travail à temps partiel modulé, en qualité de distributeur de journaux, par la société Adrexo (la société).

2. Ayant démissionné le 1er novembre 2014, il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement d'un rappel de salaire, d'une indemnité de fin de carrière, d'indemnités de déplacement ainsi que de dommages-intérêts pour non-respect de la convention collective.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de rappel de salaires, alors « que la quantification préalable de l'ensemble des missions confiées et accomplies par le distributeur, dans le cadre de l'exécution de son métier, en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévue par l'article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe ne saurait, à elle seule, satisfaire aux exigences de l'article L. 3171-4 du code du travail et qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, le salarié produisait la feuille de route mentionnant l'existence d'un lotissement sur une seule commune classée R3 selon la convention collective nationale de la distribution ainsi qu'un décompte des heures travaillées et non payées selon la tranche de poids de la poignée, la cadence, le temps payé et le temps dû ; qu'il appartenait en conséquence à l'employeur de rapporter la preuve de la classification régulière en R1, R2 et R3 des communes sur le territoire desquelles le salarié devait accomplir ses missions selon des cadences faisant varier sa rémunération et qu'il avait rémunéré les heures de travail effectuées par le salarié ; qu'en retenant néanmoins que le salarié ne fournissait aucun élément de nature à étayer ses prétentions ni à laisser supposer qu'il avait bien accompli les heures qu'il alléguait, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »

Réponse de la Cour

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué et des écritures oralement soutenues devant la cour d'appel par le salarié, que ce dernier réclamait un rappel de salaire calculé, non pas sur la base d'un nombre d'heures de travail effectuées mais en se fondant exclusivement sur le dispositif conventionnel de quantification préalable du temps de travail, dont il faisait valoir qu'il avait été appliqué de façon non conforme par l'employeur.

5. Abstraction faite des motifs surabondants relatifs à l'absence d'étaiement de la demande, la cour d'appel qui, sans méconnaître les règles de preuve, a constaté par une appréciation souveraine des éléments qui lui étaient soumis, que n'était pas établie la méconnaissance par l'employeur des dispositions conventionnelles relatives au classement des secteurs de distribution en fonction de la densité des habitations a, pas ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande au titre du travail dissimulé, alors « que la cassation à intervenir sur la base du premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du présent chef de dispositif. »

Réponse de la Cour

7. Le rejet du premier moyen prive de portée ce moyen.

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité de déplacement, alors que « les premiers juges avaient constaté que l'indemnité versée au salarié pour les déplacements entre le dépôt et le secteurs de distribution était ''notoirement insuffisante'' au regard des frais exposés par le salarié ; qu'en se bornant à retenir que le salarié ne justifiait pas qu'il avait droit à la rémunération des frais afférents et à des déplacements non pris en compte dans le forfait, sans vérifier si la somme versée n'était pas manifestement disproportionnée au montant des frais engagés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'annexe III de la convention collective de la distribution directe du 9 février 2004. »

Réponse de la Cour

Vu la règle selon laquelle les frais professionnels engagés par le salarié doivent être supportés par l'employeur et les articles 455 et 954 du code de procédure civile :

9. Selon la règle susvisée, les frais qu'un salarié justifie avoir exposés pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition, d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés et, d'autre part, que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au SMIC.

10. Pour débouter le salarié de sa demande, l'arrêt retient que, pour l'établissement des kilomètres parcourus, le salarié tient compte de ses déplacements entre son domicile et le dépôt d'une part, et entre son domicile et les secteurs d'autre part, que le salarié ne justifie par aucun élément de ce que la société serait tenue de l'indemniser pour ses déplacements au départ et à l'arrivée à son domicile, qu'il ne justifie pas qu'il a droit au remboursement de frais afférents à des déplacements non pris en compte dans le forfait.

11. En statuant comme elle l'a fait, sans s'expliquer sur le moyen tiré du caractère manifestement disproportionné du remboursement forfaitaire des frais de déplacement au regard du montant réellement engagé, alors qu'il résultait du jugement qui lui était déféré que le conseil des prud'hommes avait jugé la demande fondée en son principe au motif que l'indemnisation était notoirement insuffisante par rapport aux trajets effectués par le salarié dans l'exercice de ses fonctions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

12. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité de fin de carrière, alors « que l'article 18 de la convention collective de la distribution subordonne le versement de l'indemnité de fin de carrière à la double condition que le salarié parte volontairement à la retraite et qu'il ait obtenu la liquidation de sa retraite ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. F... avait démissionné le 1er novembre 2014 après avoir travaillé pendant treize ans pour la société Adrexo et qu'il avait obtenu la liquidation de ses droits à la retraite ; qu'en retenant néanmoins, pour le débouter de sa demande d'indemnité de fin de carrière, qu'il avait travaillé dans le cadre d'un ''cumul emploi-retraite'' pour en déduire qu'il ne pouvait prétendre à l'indemnité de fin de carrière, la cour d'appel, qui a ajouté au texte susvisé une condition qu'il ne prévoit pas, l'a méconnu. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 18 de la convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004, étendue par arrêté du 16 juillet 2004 :

13. Selon ce texte, si à compter de l'âge d'ouverture des droits à la pension de vieillesse du régime général, le salarié prend l'initiative de mettre fin à sa carrière, il perçoit une « indemnité de fin de carrière » s'établissant, après dix ans d'ancienneté, à un mois de salaire.

14. Pour débouter le salarié de sa demande, l'arrêt retient que l'indemnité de fin de carrière est due à la double condition que le salarié parte volontairement à la retraite et qu'il ait obtenu la liquidation de sa retraite, qu'il ressort des pièces du dossier que le salarié, né le [...] , avait déjà liquidé ses droits à la retraite lorsqu'il est entré au service de la société le 2 mai 2001, qu'il a travaillé dans le cadre d'un cumul emploi-retraite, qu'il n'était donc pas concerné par ces dispositions.

15. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté au texte conventionnel une condition tirée de la non-liquidation des droits à la retraite qu'il ne prévoyait pas, a violé le texte susvisé.

Et sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

16. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts, alors « que la cassation à intervenir sur la base du premier, deuxième ou troisième moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du présent chef de dispositif. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

17. La cassation à intervenir sur les deuxième et troisième moyens entraîne par voie de conséquence, la cassation du chef de l'arrêt critiqué par le cinquième moyen, déboutant le salarié de sa demande de dommages-intérêts.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen pris en sa première branche, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. F... de sa demande de rappel de salaires ainsi que de sa demande au titre du travail dissimulé, l'arrêt rendu le 8 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

Remet sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ;

Condamne la société Adrexo aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Adrexo et la condamne à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille vingt, et signé par lui et Mme Monge, conseiller, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. F...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. F... de sa demande de rappels de salaires ;

Aux motifs qu'en application de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, la preuve des horaires de travail effectués n'incombe spécialement à aucune des parties, et que si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que l'annexe 3 de la convention collective nationale de la distribution directe prévoit une classification des secteurs de distribution en trois catégories, Urbain, Suburbain et Rural ; que la catégorie Rural est ensuite subdivisée en trois catégories en fonction de l'habitat collectif et individuel comme suit : Rural 1 (R1) : 10 à 15 % d'habitat collectif et 75 à 90 % d'habitat individuel, Rural 2 (R2) : 3 à 10 % d'habitat collectif et 90 à 97 % d'habitat individuel, Rural 3 (R3) : 0 à 3 % d'habitat collectif et 97 à 100 % d'habitat individuel ; que cette même annexe fixe un cadencement horaire par rapport au nombre de boîtes-aux-lettres à distribuer par heure et une poignée de documents en fonction du poids de cette poignée et de la densité des secteurs selon la classification énoncée ci-dessus ; qu'en l'espèce, il est constant que durant sa collaboration de travail, M. E... F... était chargé d'assurer la distribution dans les secteurs 321, 36 et 436 ; que les communes suivantes étaient réparties sur ces trois secteurs : Balan classée R3 (secteur 321), Pérouges classée R2 (secteur 36), Bourg-Saint-Christophe classée R1 (secteur 436), Faramans classée R3 (secteur 436) Saint-Eloi classée R3 (secteur 436) ; que E... F... fait valoir que l'employeur a cherché à minimiser son salaire ; que son temps de travail réel a été supérieur aux heures pour lesquelles il a été rémunéré en ce que ses secteurs de distribution comprenaient les communes de Pérouges et de Bourg-Saint-Christophe qui auraient dû faire l'objet d'un classement en R3 en vertu de l'annexe 3 de la convention collective compte tenu de l'absence d'habitat collectif sur ces secteurs ; que les cadences prévues pour ces communes, soit 321 boîtes pour Pérouges et 400 boîtes pour Bourg-Saint-Christophe, étaient impossibles à respecter ; que E... F... se prévaut du fait que la société Adrexo a établi pour ce salarié une seule feuille de route pour les secteurs 321, 36 et 436 regroupant plusieurs communes ; que sur les feuilles de route concernant les communes de Pérouges et de Bourg-Saint-Christophe, les abréviations H et R qui désignent l'habitat collectif ne sont pas cochées ; qu'il s'ensuit que ces communes ne présentent aucun habitat collectif dans les secteurs de distribution de E... F... ; qu'il n'existe que de l'habitat individuel justifiant le classement de ces communes en R3 sur les secteurs 36 et 436 ; que force est de constater que E... F... ne justifie par aucune pièce que la société Adrexo a défini l'habitat collectif uniquement par les rubriques H et R ; qu'il ressort du logiciel de gestion produit par la société Adrexo aux débats que le nombre de boîtes-aux-lettres à distribuer est réparti entre les rubriques H (HLM), R (Résidences), V (Villas, A (Autres) et C (Commerces) et que toutes les boîtes-aux-lettres d'une même rubrique peuvent être réparties entre les habitats collectifs et les habitats individuels, le cas se produisant ainsi pour les boîtes-aux-lettres des villas qui sont classées soit en habitat individuel, soit en habitat collectif dès lors que les villas sont situées dans un lotissement ; qu'il s'ensuit que E... F... ne produit aucune pièce de nature à établir que la société Adrexo n'a pas respecté la classification conventionnelle à l'occasion de son classement des habitats collectifs ; que dans ces conditions, E... F... ne fournit aucun élément de nature à étayer ses prétentions ni à laisser supposer qu'il a bien accompli les heures qu'il allègue ; que la demande relative au rappel de salaire doit par conséquent être rejetée ;

Alors que la quantification préalable de l'ensemble des missions confiées et accomplies par le distributeur, dans le cadre de l'exécution de son métier, en fonction des critères associés à un référencement horaire du temps de travail prévue par l'article 2.2.1.2 du chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe ne saurait, à elle seule, satisfaire aux exigences de l'article L. 3171-4 du code du travail et qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, le salarié produisait la feuille de route mentionnant l'existence d'un lotissement sur une seule commune classée R3 selon la convention collective nationale de la distribution ainsi qu'un décompte des heures travaillées et non payées selon la tranche de poids de la poignée, la cadence, le temps payé et le temps dû ; qu'il appartenait en conséquence à l'employeur de rapporter la preuve de la classification régulière en R1, R2 et R3 des communes sur le territoire desquelles M. F... devait accomplir ses missions selon des cadences faisant varier sa rémunération et qu'il avait rémunéré les heures de travail effectuées par le salarié ; qu'en retenant néanmoins que M. F... ne fournissait aucun élément de nature à étayer ses prétentions ni à laisser supposer qu'il avait bien accompli les heures qu'il alléguait, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. F... de sa demande d'indemnité de déplacement ;

Aux motifs que l'annexe III de la convention collective applicable et l'avenant n° 8 du 1er juin 2006 relatif aux frais de déplacement entré en vigueur le 1er janvier 2007 prévoient que le distributeur perçoit une indemnité de frais kilométriques fixée de manière forfaitaire, ce dont il résulte que le salarié n'a pas droit au remboursement de frais afférents à des déplacements non pris en compte dans le forfait ; qu'en l'espèce, il est constant que M. E... F... fait valoir au soutien de sa demande de rappels d'indemnités de déplacement qu'il a parcouru à l'intérieur de chaque secteur des distances égales voire supérieures au nombre de kilomètres inscrit sur ses feuilles de route pour les trois secteurs ; qu'il se prévaut d'un tableau établi par ses soins ; qu'il apparaît que le tableau de M. E... F... présente par journée d'activité le nombre de kilomètres payés, le nombre de kilomètres dus correspondant à la différence entre les kilomètres parcouru et les kilomètres payés, outre le total dû en euros sur la base d'une indemnité kilométrique de 0,385 euros en 2011, de 0,395 euros en 2012 et à compter du 1er janvier 2013, et de 0,40 euros à compter du 16 septembre 2013 ; que pour l'établissement des kilomètres parcourus, le salarié tient compte de ses déplacements entre son domicile et le dépôt, d'une part, et entre son domicile et les secteurs, d'autre part ; que la cour relève que E... F... ne justifie par aucun élément de ce que la société Adrexo serait tenue d'indemniser ce salarié pour ses déplacements au départ et à l'arrivée à son domicile ; qu'en outre, les données du tableau relatives aux kilomètres parcourus par E... F... dans ses trois secteurs de distribution ne sont corroborées par aucune des pièces du dossier ; qu'il s'ensuit que E... F... ne justifie pas qu'il a droit à la rémunération de frais afférents à des déplacements non pris en compte dans le forfait ;

Alors 1°) que les frais qu'un salarié justifie avoir exposés, pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent être remboursés sans qu'ils puissent être imputés sur la rémunération qui lui est due, à moins qu'il n'ait été contractuellement prévu qu'il en conserverait la charge moyennant le versement d'une somme fixée à l'avance de manière forfaitaire et à la condition, d'une part, que cette somme forfaitaire ne soit pas manifestement disproportionnée au regard du montant réel des frais engagés, et, d'autre part, que la rémunération proprement dite du travail reste chaque mois au moins égale au SMIC ; que l'annexe III de la convention collective de la distribution directe du 9 février 2004, prévoit que le salarié a droit au paiement des kilomètres aller dépôt/secteur et des kilomètres inter-commune sur les secteurs ruraux, au tarif kilométrique de 0,33 euros outre un forfait secteur de 1,52 euros ; que l'avenant n° 12 du 11 juin 2008 relatif aux indemnités kilométriques des distributeurs a augmenté chaque année le montant de l'indemnité kilométrique forfaitaire, s'élevant 0,385 euros en 2011, 0,395 euros en 2012 et 2013 jusqu'au 16 septembre 2013, où elle a été portée à 0,40 euros ; qu'en l'espèce, il n'était pas contesté que M. F... ne pouvait accomplir au dépôt les tâches de préparation de la distribution, et devait donc procéder à cette tâche à son domicile ; qu'en retenant néanmoins que M. F... ne justifiait pas qu'il avait droit à la rémunération de frais afférents à des déplacements non pris en compte dans le forfait, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

Alors 2°) que les premiers juges avaient constaté que l'indemnité versée au salarié pour les déplacements entre le dépôt et le secteurs de distribution était « notoirement insuffisante » au regard des frais exposés par le salarié ; qu'en se bornant à retenir que M. F... ne justifiait pas qu'il avait droit à la rémunération des frais afférents et à des déplacements non pris en compte dans le forfait, sans vérifier si la somme versée n'était pas manifestement disproportionnée au montant des frais engagés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'annexe III de la convention collective de la distribution directe du 9 février 2004.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. F... de sa demande d'indemnité de fin de carrière ;

Aux motifs que l'article 18 de la convention collective nationale de la distribution directe dispose que « la "fin de carrière" ou la cessation d'activité d'un salarié peut intervenir, à la demande de l'employeur ou du salarié, sous les conditions suivantes : que l'intéressé soit au moins parvenu à l'âge de l'ouverture des droits à la pension de vieillesse du régime général et qu'il ait été observé, de part et d'autre, un délai de préavis qui peut, à la demande de l'une ou l'autre des parties, aller jusqu'à trois mois, sans pour autant être inférieur à un mois ; que la mise à retraite d'un salarié n'est possible que dans la mesure où celui-ci peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein et qu'il ait atteint un âge ne pouvant être inférieur à celui fixé par le code de la sécurité sociale ; que si les conditions de mise à la retraite ne sont pas réunies, la rupture du contrat de travail par l'employeur constitue un licenciement ; que si le salarié prend l'initiative de mettre fin à sa carrière, il perçoit une indemnité dite "de fin de carrière" après 5 ans d'ancienneté s'établissant comme suit : - 1/2 mois de salaire à partir de 5 ans d'ancienneté ; - 1 mois de salaire après 10 ans d'ancienneté ; - 2 mois de salaire après 15 ans d'ancienneté ; - 3 mois de salaire après 20 ans d'ancienneté ; - 4 mois de salaire après 30 ans d'ancienneté » ; qu'il s'ensuit que l'indemnité de fin de carrière est due à la double condition que le salarié parte volontairement à la retraite et qu'il ait obtenu la liquidation de sa retraite ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que E... F..., né le [...] , avait déjà liquidé ses droits à la retraite lorsqu'il est entré au service de la société Adrexo le 2 mai 2001 ; qu'il a travaillé dans le cadre d'un cumul emploi-retraite ; que M. E... F... n'était donc pas concerné par les dispositions précitées ; qu'il s'ensuit que la demande de M. E... F... au titre de l'indemnité de fin de carrière n'est pas fondée ;

Alors que l'article 18 de la convention collective de la distribution subordonne le versement de l'indemnité de fin de carrière à la double condition que le salarié parte volontairement à la retraite et qu'il ait obtenu la liquidation de sa retraite ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. F... avait démissionné le 1er novembre 2014 après avoir travaillé pendant treize ans pour la société Adrexo et qu'il avait obtenu la liquidation de ses droits à la retraite ; qu'en retenant néanmoins, pour le débouter de sa demande d'indemnité de fin de carrière, qu'il avait travaillé dans le cadre d'un cumul emploi-retraite » pour en déduire qu'il ne pouvait prétendre à l'indemnité de fin de carrière, la cour d'appel, qui a ajouté au texte susvisé une condition qu'il ne prévoit pas, l'a méconnu.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. F... de sa demande au titre du travail dissimulé ;

Aux motifs qu'il résulte de l'article L. 8221-1 du code du travail qu'est prohibé le travail totalement ou partiellement dissimulé par dissimulation d'emploi salarié ; qu'aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2015, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à la déclaration préalable à l'embauche, de mentionner sur le bulletin de paye un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, de se soustraire intentionnellement à l'obligation de délivrer un bulletin de paye et de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales ; qu'il résulte de l'article L. 8223-1 du code du travail qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a recours en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 du code du travail a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire ; qu'en l'espèce, pour la première fois en cause d'appel, M. E... F... sollicite le paiement d'une indemnité au titre du travail dissimulé au motif que la société Adrexo n'a pas délivré au salarié les bulletins de paye qui correspondent aux heures de travail réellement accomplies ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas établi que M. E... F... a réellement accompli les heures de travail qu'il allègue ; que la demande au titre du travail dissimulé n'est donc pas fondée ; qu'ajoutant au jugement déféré, la cour déboute M. E... F... de ce chef ;

Alors que la cassation à intervenir sur la base du premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du présent chef de dispositif.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. F... de sa demande de dommages et intérêts ;

Aux motifs que la réparation d'un préjudice résultant d'un manquement de l'employeur suppose que le salarié qui s'en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d'une part la réalité du manquement et d'autre part l'existence et l'étendue du préjudice en résultant ; qu'en l'espèce, M. E... F... sollicite d'abord le paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'application de la convention collective depuis février 2004 ; que la cour rappelle qu'il résulte de ce qui précède que M. E... F... n'a pas établi que la société Adrexo aurait méconnu les dispositions de la convention collective reposant sur le classement des habitats collectif dans les secteurs de distribution de M. E... F..., sur les frais de déplacement et sur l'indemnité de fin de carrière ; qu'à défaut de manquement imputable à l'employeur du chef de l'application de la convention collective, la demande de dommages et intérêts n'est pas fondée ; qu'infirmant le jugement déféré, la cour débouté M. E... F... de ce chef ; que pour la première fois en cause d'appel, M. E... F... sollicite le paiement de la somme de 744,14 euros à titre de dommages et intérêts pour mise à disposition de son garage personnel pour l'exécution de ses fonctions ; que la cour constate que M. E... F... ne produit strictement aucune pièce de nature à établir la réalité du manquement allégué ; qu'à défaut de manquement imputable à l'employeur, la demande à titre de dommages et intérêts n'est pas fondée ; qu'ajoutant au jugement déféré, la cour débouté M. E... F... de ce chef ; que pour la première fois en cause d'appel, M. E... F... sollicite le paiement de la somme de 2 058 euros à titre de dommages et intérêts pour classement irrégulier des secteurs de distribution ; que la cour rappelle qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'est pas établi que la société Adrexo ait méconnu les dispositions de la convention collective reposant sur le classement des habitats collectifs dans les secteurs de distribution de M. E... F... ; qu'à défaut de manquement imputable à l'employeur, la demande à titre de dommages et intérêts n'est pas fondée ; qu'ajoutant au jugement déféré, la cour débouté M. E... F... de ce chef ;

Alors que la cassation à intervenir sur la base du premier, deuxième ou troisième moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence et en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du présent chef de dispositif.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-20930
Date de la décision : 21/10/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 08 juin 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 oct. 2020, pourvoi n°18-20930


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.20930
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