LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° P 20-84.433 F-D
N° 2386
EB2
14 OCTOBRE 2020
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 OCTOBRE 2020
M. A... Y..., Mme W... S..., épouse Y..., et Mme H... G... ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bastia, en date du 24 juin 2020, qui, dans la procédure suivie contre le premier des chefs d'abus de faiblesse et usage de chèques falsifiés, la deuxième des chefs d'abus de faiblesse, falsification et usage de chèques falsifiés, la troisième du chef de recel, a ordonné leur renvoi devant le tribunal correctionnel.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire, commun aux demandeurs, et en défense ont été produits.
Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. A... Y..., de Mme W... S..., épouse Y..., et de Mme H... G..., les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. E... T..., et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. R... X..., né en 1950, est décédé le [...].
3. Le 29 août 2014, une information a été ouverte pour abus de faiblesse commis au préjudice de R... X... courant 2010 à 2014. Par réquisitoire supplétif du 12 janvier 2016, le procureur de la République a élargi la saisine du juge d'instruction aux infractions d'abus de faiblesse pour une période étendue à 2008 et 2009, et à des faits de falsification de chèques et de recel, notamment.
4. Les demandeurs ont été mis en examen de ces chefs.
5. Le juge d'instruction a, par ordonnance du 28 février 2020, ordonné le renvoi des demandeurs devant le tribunal correctionnel, tout en prononçant un non-lieu pour les faits commis du 1er janvier 2008 au 30 août 2011, compte-tenu de leur prescription.
6. M. E... T..., partie civile, a seul fait appel de cette ordonnance.
Examen des moyens
Sur les premier et troisième moyens
7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné le renvoi devant le tribunal correctionnel d'Ajaccio de M. Y... et Mme S... épouse Y... pour avoir, du 14 mars 2008 au [...], frauduleusement abusé de l'état d'ignorance ou de la situation de faiblesse de R... X..., et d'avoir ordonné le renvoi de Mme G... pour avoir, du 14 mars 2008 au [...], sciemment recelé des biens qu'elle savait provenir d'un délit, en l'espèce un abus de faiblesse commis au préjudice de R... X..., alors « que le délai de la prescription de l'action publique, si le délit a été commis à l'encontre d'une personne vulnérable, court à compter du jour où l'infraction apparaît à la victime dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; que pour juger que l'action publique n'était pas prescrite pour les faits d'abus de faiblesse commis plus de trois années avant le réquisitoire introductif, la chambre de l'instruction a statué par des motifs dont il résulte seulement que R... X... présentait, au 1er janvier 2008, des signes évidents de vulnérabilité, et que M. Y..., Mme S..., épouse Y... et Mme G... avaient nécessairement connaissance de la faiblesse et de la vulnérabilité de R... X... ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la victime des faits, R... X..., avait eu connaissance de ceux-ci, dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique, plus de trois ans avant le premier acte interruptif de la prescription, la chambre de l'instruction a violé l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'article préliminaire et les articles 8, 176, 177, 179, 183, 183, 186, 191 et suivants du code de procédure pénale, 223-15-2 du code pénal. »
Réponse de la Cour
9. Selon l'article 574 du code de procédure pénale, l'arrêt de la chambre de l'instruction portant renvoi du prévenu devant le tribunal correctionnel ne peut être attaqué devant la Cour de cassation que lorsqu'il statue sur la compétence ou qu'il présente des dispositions définitives que le tribunal, saisi de la prévention, n'a pas le pouvoir de modifier.
10. En l'espèce, les énonciations du moyen ne présentent aucune disposition que le tribunal, saisi de la poursuite, n'aurait pas le pouvoir de modifier. En conséquence, il revient à critiquer les énonciations de l'arrêt relatives aux charges que la chambre de l'instruction a retenues contre le prévenu, de sorte qu'il est irrecevable en application de l'article 574 susvisé.
11. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 500 euros la somme globale que M. A... Y..., Mme W... S..., épouse Y..., et Mme H... G... devront payer à M. E... T... en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze octobre deux mille vingt.