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14/10/2020 | FRANCE | N°20-84078

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 octobre 2020, 20-84078


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° C 20-84.078 FS-D

N° 2396

CK
14 OCTOBRE 2020

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 OCTOBRE 2020

M. L... A... a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 534 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 25 juin 2020, qui, dans l'informati

on suivie contre lui des chefs de trafic de stupéfiants, importation de stupéfiant, blanchiment, infraction à la législation...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° C 20-84.078 FS-D

N° 2396

CK
14 OCTOBRE 2020

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 14 OCTOBRE 2020

M. L... A... a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 534 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 25 juin 2020, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de trafic de stupéfiants, importation de stupéfiant, blanchiment, infraction à la législation sur les armes, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Guéry, conseiller, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. L... A..., et les conclusions de M. Valleix, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 octobre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Guéry, conseiller rapporteur, M. Moreau, Mme Drai, M. de Larosière de Champfeu, Mmes Slove, Sudre, Issenjou, M. Turbeaux, conseillers de la chambre, Mmes Carbonaro, Barbé, M. Mallard, conseillers référendaires, M. Valleix, avocat général, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Dans le cadre d'une information ouverte auprès de la juridiction interrégionale spécialisée de Marseille, M. L... A... a été mis en examen, le 18 décembre 2017, des chefs d'importation de stupéfiants en bande organisée, d'infractions à la législation sur les stupéfiants, de blanchiment, d'association de malfaiteurs et de non justification de ressources, faits commis de courant 2014 au 12 décembre 2017, et d'acquisition et détention d'armes de la catégorie A ou B, faits commis courant 2017 jusqu'au 12 décembre 2017.

3. Le même jour, il a été placé en détention provisoire.

4. Le 15 juin 2020, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Marseille a rendu une ordonnance portant prolongation de la détention provisoire de M. A... pour une durée de six mois à compter du 17 juin 2020.

5. M. A... a interjeté appel de cette ordonnance.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du 15 juin 2020 prolongeant la détention provisoire du mis en examen alors :

« 1°/ que, les dispositions des articles 22 et 35 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit en ce qu'elles méconnaissent, d'une part, la compétence confiée au législateur par l'article 34 de la Constitution et, d'autre part, le droit de mener une vie familiale normale garanti par le préambule de la Constitution de 1946 ; que consécutivement à la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale ;

2°/ que, les dispositions combinées des articles 2 et 22 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire et 728 du Code de procédure pénale, qui n'encadrent pas le statut des détenus particulièrement signalés, portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit en ce qu'elles méconnaissent, d'une part, la compétence confiée au législateur par l'article 34 de la Constitution et, d'autre part, le droit à la sûreté et à la présomption d'innocence garantis par les articles 2 et 9 de la Déclaration de 1789 ; que consécutivement à la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, l'arrêt attaqué se trouvera privé de base légale. »

Réponse de la Cour

7. Par arrêt de ce jour, la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la seconde question prioritaire de constitutionnalité. Elle a ordonné la transmission de la première question prioritaire de constitutionnalité.

8. L'article 23-5, alinéa 4, de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel dispose que lorsque le Conseil constitutionnel a été saisi, le Conseil d'Etat ou la Cour de cassation sursoit à statuer jusqu'à ce qu'il se soit prononcé. Il en va autrement quand l'intéressé est privé de liberté à raison de l'instance et que la loi prévoit que la Cour de cassation statue dans un délai déterminé.

9. Il est rappelé que, dans sa décision n° 2009-595 DC du 3 décembre 2009, le Conseil constitutionnel a jugé que si l'alinéa 4 de l'article précité peut conduire à ce qu'une décision définitive soit rendue dans une instance à l'occasion de laquelle le Conseil constitutionnel a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité et sans attendre qu'il ait statué, dans une telle hypothèse, ni cette disposition ni l'autorité de la chose jugée ne sauraient priver le justiciable de la faculté d'introduire une nouvelle instance pour qu'il puisse être tenu compte de la décision du Conseil constitutionnel.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du 15 juin 2020 prolongeant sa détention provisoire en rejetant le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme alors :

« 1°/ que l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme garantit à toute personne le droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'en conséquence, il appartient au juge judiciaire, gardien des libertés individuelles, de s'assurer que l'atteinte au droit d'une personne placée en détention provisoire à une vie familiale est prévue par la loi et proportionnée à la poursuite d'un but légitime ; que dès lors, la chambre de l'instruction qui, pour dire que la détention de l'exposant ne porte pas une atteinte disproportionnée à des intérêts familiaux légitimes, se borne à rappeler la gravité des faits et à retenir que le détenu est « l'une des nombreuses personnes placées sous mandat de dépôt dans ce dossier qui, par mesure de précaution, ont été affectées dans divers établissements sur le territoire national », sans expliquer en quoi cette atteinte à son droit au respect de sa vie familiale était proportionnée au but poursuivi, lorsqu'elle relevait elle-même que l'exposant est père d'une enfant en bas âge et qu'il est détenu loin de son domicile, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations et n'a pas justifié sa décision au regard des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 148-4, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ que la Cour européenne des droits de l'homme juge que l'absence de garanties suffisantes, en droit interne, contre d'éventuels abus dans la répartition géographique des détenus constitue une violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ; que ne justifie pas sa décision, la chambre de l'instruction qui, saisie d'un moyen en ce sens, considère qu'il n'apparaît pas « appartenir à l'office de la chambre de l'instruction, notamment dans le cadre de son office résultant des termes et du champ de sa saisine, de déterminer dans quel établissement ni non plus sous quel régime particulier éventuel l'intéressé doit être incarcéré » ; que de ce fait encore, les articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 148-4, 591 et 593 du code de procédure pénale ont été méconnus. »

Réponse de la Cour

11. Pour répondre à l'argumentation du demandeur, qui prétendait que le lieu de son incarcération constituait une ingérence disproportionnée à sa vie privée et familiale, au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'arrêt relève qu'en l'état des éléments soumis à la cour il n'apparaît pas qu'à ce jour, compte tenu de la gravité des faits sur lesquels porte l'instruction et des nécessités de la conduite de celle-ci, l'incarcération de M. A..., père d'une jeune enfant, porte une atteinte disproportionnée à des intérêts familiaux légitimes ni non plus qu'elle mette en danger la santé, la sécurité et la moralité de cette enfant ou que son éducation en soit gravement compromise.

12. Les juges ajoutent qu'il n'appartient pas à la chambre de l'instruction, dans le cadre de son office résultant des termes et du champ de sa saisine, de déterminer dans quel établissement ni non plus sous quel régime particulier éventuel l'intéressé doit être incarcéré.

13. S'il n'appartient pas à la chambre de l'instruction de déterminer dans quel établissement une détention provisoire doit être accomplie, c'est à tort que la juridiction n'a évoqué, dans sa réponse, que les éléments pouvant justifier cette détention et non celles susceptibles de répondre à la contestation d'un éloignement pouvant porter une atteinte excessive à la vie familiale du demandeur.

14. La cassation n'est toutefois pas encourue dès lors qu'il n'est pas établi ni même allégué que M. A... ait sollicité du magistrat instructeur son changement d'affectation.

15. Ainsi, le moyen doit être écarté.

16. Par ailleurs l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze octobre deux mille vingt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 20-84078
Date de la décision : 14/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-En-Provence, 25 juin 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 oct. 2020, pourvoi n°20-84078


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:20.84078
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