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14/10/2020 | FRANCE | N°19-18574

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 octobre 2020, 19-18574


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 octobre 2020

Cassation

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 875 F-D

Pourvoi n° H 19-18.574

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 OCTOBRE 2020

La société Neoma Business School, établiss

ement d'enseignement supérieur consulaire, dont le siège est [...] , venant aux droits de l'association Neoma Business School, a formé le pourvoi ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 octobre 2020

Cassation

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 875 F-D

Pourvoi n° H 19-18.574

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 OCTOBRE 2020

La société Neoma Business School, établissement d'enseignement supérieur consulaire, dont le siège est [...] , venant aux droits de l'association Neoma Business School, a formé le pourvoi n° H 19-18.574 contre l'arrêt rendu le 3 avril 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme S... U..., domiciliée [...] ,

2°/ à Pôle emploi Champagne-Ardenne, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Richard, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Neoma Business School, établissement d'enseignement supérieur consulaire, de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme U..., après débats en l'audience publique du 1er septembre 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Richard, conseiller rapporteur, M. Maron, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 3 avril 2019), Mme U..., engagée en qualité de responsable centre des évaluations et inscriptions, par l'association Reims Management School, devenue Neoma Business School, aux droits de laquelle se trouve la société Neoma Business School, établissement d'enseignement supérieur consulaire, a été licenciée pour faute grave le 13 avril 2015, par le directeur général de l'association, agissant sur délégation de son président.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. L'employeur fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de la salariée pour faute grave était abusif et en ce qu'il l'a condamné à lui payer diverses sommes, alors « qu'entre dans les attributions du président de l'association, sauf dispositions statutaires réservant ce pouvoir à un autre organe, de mettre en oeuvre la procédure de licenciement d'un salarié ; qu'en l'espèce, l'article 13 des statuts de l'association prévoyait, de manière générale, que « le conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour gérer, diriger et administrer l'association sous réserve de ceux statutairement réservés aux assemblées générales », et l'article 16 des dits statuts énonçait que « le président de l'association préside le bureau, le conseil d'administration et l'assemblée générale. Il fait exécuter les décisions arrêtées par le bureau et le conseil d'administration. Il veille au bon fonctionnement de l'association qu'il représente (
) dans tous les actes de la vie civile. Il est investi de tous pouvoirs à cet effet, sous réserve des attributions délivrées par les présents statuts aux assemblées générales et au conseil d'administration. (
) Il peut déléguer certaines de ses prérogatives dans le cadre d'une délégation de pouvoir ou de signature » ; qu'il résultait donc des statuts de l'association que le président disposait du pouvoir de licencier et de déléguer ce pouvoir au directeur général ; qu'en affirmant que le pouvoir de licencier relevait de ceux dévolus au conseil d'administration et que le président de l'association n'avait pas été investi du pouvoir de licencier par le conseil d'administration, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1103 et 1104 du code civil et l'article L. 1232-6 du code du travail, alors applicable, ensemble les articles L. 1232-1 et L. 1235-1, alors applicable, du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1232-6 du code du travail et la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association :

3. Il entre dans les attributions du président d'une association, sauf disposition statutaire attribuant cette compétence à un autre organe, de mettre en oeuvre la procédure de licenciement d'un salarié.

4. Pour dire le licenciement de la salariée sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient qu'il résulte des dispositions combinées des articles 13 et 16 des statuts alors applicables que le pouvoir de licencier relève de ceux largement dévolus au conseil d'administration, le président devant agir dans le respect de ceux ressortissant à cet organe, puisque le conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour gérer, diriger et administrer l'association sous réserve de ceux statutairement réservés aux assemblées générales et que le président , qui représente l'association dans les actes de la vie civile, est investi de tous pouvoirs à cet effet sous réserve des attributions délivrées au conseil d'administration.

5. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les statuts de l'association ne contenaient aucune disposition spécifique relative au pouvoir de recruter ou de licencier un salarié, à l'exception de la nomination et de la révocation du directeur général de l'association par le conseil d'administration, de sorte qu'il entrait dans les attributions de son président de mettre en oeuvre la procédure de licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne Mme U... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Neoma Business School, établissement d'enseignement supérieur consulaire

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement de la salariée pour faute grave était abusif, en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à la salariée les sommes de 9 793,68 euros au titre du préavis, de 979,36 euros au titre des congés payés afférents, de 3 841,55 euros au titre de la mise à pied disciplinaire, de 384,15 euros au titre des congés payés y afférents, de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et de 58 000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement abusif, en ce qu'il a fixé la moyenne du salaire brut mensuel à 3 264,56 euros, en ce qu'il a ordonné à l'employeur de rectifier l'attestation Pôle Emploi ainsi que le certificat de travail sans astreinte, et en ce qu'il a condamné l'employeur aux entiers dépens y compris les éventuels frais d'exécution visés à l'article 10 du décret du 12 décembre 1996, d'AVOIR, infirmant le jugement et statuant à nouveau, condamné l'employeur à payer à la salariée la somme de 21 841,24 euros au titre de l'indemnité de licenciement, d'AVOIR y ajoutant, précisé que les condamnations indemnitaires et salariales étaient prononcées sous déduction des cotisations applicables, d'AVOIR condamné l'employeur, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, à rembourser à l'organisme intéressé, dans la limite de six mois, les indemnités de chômage versées à la salariée licenciée du jour de son licenciement à celui de l'arrêt, d'AVOIR condamné l'employeur à payer à la salariée la somme de 2 200 euros au titre des frais irrépétibles, d'AVOIR mis les dépens d'appel à la charge de l'employeur ;

AUX MOTIFS QUE « 1°/ Sur le licenciement :
S'il entre, en vertu du principe de la force obligatoire des contrats et de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association, dans les attributions du président d'une association de mettre en oeuvre la procédure de licenciement d'un salarié, c'est à la condition qu'aucune disposition statutaire n'attribue cette compétence à un autre organe.
Le manquement à cette règle n'est pas susceptible d'une régularisation postérieure, une association ne pouvant s'affranchir du respect de ses propres statuts.
Il rend, sur le fondement de l'article L. 1232-6 du code du travail, le licenciement non pas nul, en l'absence de disposition légale en ce sens, mais sans cause réelle et sérieuse, la rupture effective du contrat de travail procédant de la violation d'une garantie de fond tenant à l'absence de pouvoir du signataire de la lettre de licenciement au regard des statuts de l'association.
En l'espèce, aux termes de l'article 13 des statuts alors applicables, 'le Conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour gérer, diriger et administrer l'association sous réserve de ceux statutairement réservés aux assemblées générales (...). Il peut faire toute délégation de pouvoirs pour une mission déterminée'.
Aux termes de l'article 16 de ces statuts, 'Le Président (...) fait exécuter les décisions arrêtées par le Bureau et le Conseil d'administration. Il veille au bon fonctionnement de l'association qu'il représente dans ses rapports avec les milieux économiques, avec les collectivités territoriales, les administrations et les actes de la vie civile. Il est investi de tous pouvoirs à cet effet, sous réserve des attributions délivrées par les présents statuts aux assemblées générales et au Conseil d'administration (...). il peut déléguer certaines de ses prérogatives dans le cadre d'une délégation de pouvoirs ou de signature'.
C'est à juste titre que la salariée déduit de ces statuts que le pouvoir de la licencier relevait de ceux largement dévolus au conseil d'administration, le président devant agir dans le respect de ceux ressortissant à cet organe.
Or, en l'espèce, la lettre de licenciement a été signée par le directeur général.
Il importe peu que celui-ci ait reçu délégation du président pour y procéder dès lors que ce dernier n'avait pas été investi par le conseil d'administration du pouvoir de licencier Mme U... de sorte qu'il lui était impossible de déléguer un pouvoir dont il ne disposait pas.
Et il est indifférent que Mme U... ait été engagée le 2 octobre 2012 par le directeur général alors en fonctions, les parties s'accordant sur la conclusion effective à l'époque du contrat de travail.
En conséquence, le licenciement, prononcé par une personne dépourvue du pouvoir, est sans cause réelle et sérieuse, ce qui conduira à la confirmation du jugement par substitution de motifs, le jugement écartant la faute grave sur la base des attestations » ;

ALORS QU'il entre dans les attributions du président de l'association, sauf dispositions statutaires réservant ce pouvoir à un autre organe, de mettre en oeuvre la procédure de licenciement d'un salarié ; qu'en l'espèce, l'article 13 des statuts de l'association prévoyait, de manière générale, que « le conseil d'administration est investi des pouvoirs les plus étendus pour gérer, diriger et administrer l'association sous réserve de ceux statutairement réservés aux assemblées générales », et l'article 16 desdits statuts énonçait que « le Président de l'association préside le bureau, le conseil d'administration et l'assemblée générale. Il fait exécuter les décisions arrêtées par le Bureau et le Conseil d'administration. Il veille au bon fonctionnement de l'association qu'il représente (
) dans tous les actes de la vie civile. Il est investi de tous pouvoirs à cet effet, sous réserve des attributions délivrées par les présents statuts aux assemblées générales et au conseil d'administration. (
) Il peut déléguer certaines de ses prérogatives dans le cadre d'une délégation de pouvoir ou de signature » ; qu'il résultait donc des statuts de l'association que le Président disposait du pouvoir de licencier et de déléguer ce pouvoir au Directeur général ; qu'en affirmant que le pouvoir de licencier relevait de ceux dévolus au Conseil d'administration et que le Président de l'association n'avait pas été investi du pouvoir de licencier par le Conseil d'administration, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1103 et 1104 du code civil et l'article 1232-6 du code du travail, alors applicable, ensemble les articles L. 1232-1 et L. 1235-1, alors applicable, du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-18574
Date de la décision : 14/10/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 03 avril 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 oct. 2020, pourvoi n°19-18574


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.18574
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