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30/09/2020 | FRANCE | N°19-18293

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2020, 19-18293


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle sans renvoi

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 852 F-D

Pourvoi n° B 19-18.293

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

Le comité social et é

conomique de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, dont le siège est [...] , venant aux droits du CHSCT Garges-lès-Gonesse de la soc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle sans renvoi

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 852 F-D

Pourvoi n° B 19-18.293

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

Le comité social et économique de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, dont le siège est [...] , venant aux droits du CHSCT Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, a formé le pourvoi n° B 19-18.293 contre l'ordonnance rendue en la forme des référés le 7 juin 2019 par le président du tribunal de grande instance de Pontoise, dans le litige l'opposant à la société Conforama France, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat du comité social et économique de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Conforama France, après débats en l'audience publique du 15 juillet 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Reprise d'instance

1. Il est donné acte au comité social et économique de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France (le comité social et économique), venant aux droits du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement de Garges-lès-Gonesse de cette société, de sa reprise d'instance.

Faits et procédure

2. Selon l'ordonnance attaquée (président du tribunal de grande instance de Pontoise, 7 juin 2019), rendue en la forme des référés, la société Conforama France (la société) a, dans son établissement de Garges-lès-Gonesse, mis à la disposition des responsables de rayon un document d'animation commerciale permettant de faire un suivi d'activité journalier des vendeurs. Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de cet établissement (le CHSCT) a, par délibération du 15 février 2019, décidé de recourir à une mesure d'expertise sur la mise en place de la fiche de suivi d'activité journalier et désigné le cabinet Degest pour y procéder.

3. Le 1er mars 2019, la société a fait assigner le CHSCT devant le président du tribunal de grande instance aux fins d'annulation de cette délibération.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Le comité social et économique fait grief à l'ordonnance de prononcer la nullité de la délibération du CHSCT du 15 février 2019 aux termes de laquelle il a décidé de recourir à une mesure d'expertise sur la mise en place de la fiche de suivi d'activité journalier et désigné le cabinet Degest pour y procéder, alors :

« 1°/ que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail prévu à l'article L. 4612-8-1 du code du travail ; que pour écarter l'existence d'un projet important justifiant le recours à un expert, le président du tribunal, se référant aux seules précisions apportées par la société Conforama, s'est borné à affirmer que la mise en place du suivi journalier « ne compromet en aucune manière l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail des salariés n'apportant aucun changement dirimant dans lesdites conditions de travail » ; qu'en statuant ainsi sans préciser les éléments lui permettant d'asseoir de telles affirmations, le président du tribunal a statué par voie de simple affirmation en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en écartant l'existence d'un projet important justifiant le recours à un expert le CHSCT sans examiner ni même viser les nombreuses pièces que le CHSCT produisait pour sa part aux débats et dont il résultait que la mise en place du suivi journalier, qui concernait l'intégralité des vendeurs mais également les responsables de rayon et les hôtesses de caisses de tous les magasins de l'enseigne et avait au demeurant donné lieu à information consultation du comité central d'entreprise en raison de son importance, emportait mise en place d'objectifs individuels et journaliers, et que ce nouvel outil à la disposition de l'employeur constituait une source de stress et de risques psychosociaux, le président du tribunal a de nouveau violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Le président du tribunal de grande instance, qui a statué par une décision motivée et n'était pas tenu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui a constaté que la fiche de suivi journalier n'était ni un outil d'évaluation des salariés, ni une fiche de fixation d'objectifs, que seuls les vendeurs et indirectement les responsables de rayon étaient concernés par cette fiche, n'encourt pas les griefs du moyen.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. Le comité social et économique fait grief à l'ordonnance de condamner le CHSCT aux dépens, alors « que sauf abus, l'employeur doit supporter les frais de contestation de la procédure d'expertise ; qu'en condamnant le CHSCT de l'établissement de Garges-Lès-Gonesse aux dépens, le président du tribunal de grande instance a violé l'article L. 4614-13 alors en vigueur du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 4614-13 du code du travail alors applicable :

7. Il résulte de ce texte que, sauf abus, l'employeur doit supporter les frais de contestation de la procédure d'expertise

8. Pour condamner le CHSCT aux dépens, l'ordonnance retient qu'il est partie perdante.

9. En statuant ainsi, sans caractériser un abus de la part du CHSCT, le président du tribunal de grande instance a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle condamne le CHSCT de l'établissement de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France aux dépens, l'ordonnance rendue le 7 juin 2019, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Pontoise ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne la société Conforama France aux dépens, en ce compris ceux exposés devant le président du tribunal de grande instance ;

En application de l'article L. 4614-13 du code du travail, condamne la société Conforama France à payer à la SCP Piwnica et Molinié la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour le comité social et économique de Garges-lès-Gonesse de la société Conforama France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir prononcé la nullité de la délibération du CHSCT de l'établissement Conforama de Garges-Lès-Gonesse en date du 15 février 2019 aux termes de laquelle il a décidé de recourir à une mesure d'expertise sur la mise en place de la fiche de suivi d'activité journalier et désigné le cabinet Degest pour y procéder ;

AUX MOTIFS QU'il résulte des pièces versées aux débats que la société Conforama a mis à la disposition des responsables de rayon un document d'animation commerciale permettant de faire un suivi d'activité journalier des vendeurs ; qu'il est fait grief par le CHSCT à ce projet de viser tous les salariés de l'entreprise sans exception d'une catégorie professionnelle qui a pour conséquence de fixer des objectifs individuels et journaliers alors même que les contrats individuels du personnel ne contiennent pas de cause s'y rapportant ; qu'il s'agit donc d'une modification substantielle de la relation de travail de tous les salariés qui est une source de stress et de risques psychosociaux par l'instauration d'objectifs quotidiens et individuels et un suivi hiérarchique ; qu'il s'agit donc d'un projet très contraignant dont l'impact constitue une source d'inquiétude pour les salariés et qui constitue un projet important qui justifie de recourir à une expertise ; qu'il résulte de l'article L. 4612-8 du code du travail que le CHSCT est consulté avant toute décision d'aménagement importante modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ; que pour donner lieu à une consultation du CHSCT et le cas échéant, à une expertise, encore faut-il que le projet concerne un nombre significatif de salariés et conduise à un changement déterminant des conditions de travail des salariés concernés ; que le caractère important du projet est donc la condition nécessaire à la consultation et à l'expertise ; qu'en l'espèce, il est bien précisé par la société Conforama que la fiche de suivi d'activité journalier n'est pas un outil d'évaluation (laquelle s'effectue sur une année) ni une fiche de fixation d'objectifs qui doit être prévue au contrat de travail et n'est pas davantage un système de classement des salariés en fonction de leur performance ; que dès lors, il est constant que seuls les vendeurs sont concernés par cette fiche de suivi et indirectement les responsables de rayon, et qu'il s'agit d'un document sans conséquence sur l'évolution professionnelle des salariés concernés puisqu'il n'a d'incidence ni sur leur évaluation, ni sur leur rémunération ; qu'il apparaît ainsi qu'il s'agit comme le précise la société Conforama elle-même d'un simple document d'animation commerciale destiné aux équipes de vente qui ne peut être qualifié de projet important puisqu'il ne modifie pas la répartition des postes et ne compromet en aucune manière l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail des salariés n'apportant aucun changement dirimant dans lesdites conditions de travail ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu de faire une étude d'impact comme le sollicite le CHSCT puisque la mise en place de la fiche de suivi d'activité journalier ne constitue pas un projet important modifiant les conditions de travail.

1° ALORS QUE le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail prévu à l'article L. 4612-8-1 du code du travail ; que pour écarter l'existence d'un projet important justifiant le recours à un expert, le président du tribunal, se référant aux seules précisions apportées par la société Conforama, s'est borné à affirmer que la mise en place du suivi journalier « ne compromet en aucune manière l'hygiène, la sécurité et les conditions de travail des salariés n'apportant aucun changement dirimant dans lesdites conditions de travail » ; qu'en statuant ainsi sans préciser les éléments lui permettant d'asseoir de telles affirmations, le président du tribunal a statué par voie de simple affirmation en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2° ET ALORS QU'en écartant l'existence d'un projet important justifiant le recours à un expert le CHSCT sans examiner ni même viser les nombreuses pièces que le CHSCT produisait pour sa part aux débats et dont il résultait que la mise en place du suivi journalier, qui concernait l'intégralité des vendeurs mais également les responsables de rayon et les hôtesses de caisses de tous les magasins de l'enseigne et avait au demeurant donné lieu à information consultation du comité central d'entreprise en raison de son importance, emportait mise en place d'objectifs individuels et journaliers, et que ce nouvel outil à la disposition de l'employeur constituait une source de stress et de risques psychosociaux, le président du tribunal a de nouveau violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir condamné le CHSCT de l'établissement de Garges-Lès-Gonesse aux dépens ;

ALORS QUE sauf abus, l'employeur doit supporter les frais de contestation de la procédure d'expertise ; qu'en condamnant le CHSCT de l'établissement de Garges-Lès-Gonesse aux dépens, le président du tribunal de grande instance a violé l'article L. 4614-13 alors en vigueur du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-18293
Date de la décision : 30/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Pontoise, 07 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2020, pourvoi n°19-18293


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.18293
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