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30/09/2020 | FRANCE | N°19-13456

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2020, 19-13456


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 801 F-D

Pourvoi n° U 19-13.456

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

Le comité d'hygiène, de sécurité et des condi

tions de travail (CHSCT) de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Franche-Comté, aux ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 801 F-D

Pourvoi n° U 19-13.456

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Franche-Comté, aux droits duquel vient le comité social et économique (CSE) de l'URSSAF de Franche-Comté, dont le siège est [...] , représenté par sa secrétaire, Mme F... Y..., domiciliée, [...] , a formé le pourvoi n° U 19-13.456 contre l'ordonnance rendue en la forme des référés le 26 février 2019 par le président du tribunal de grande instance de Besançon, dans le litige l'opposant à l'URSSAF de Franche-Comté, représentée par sa directrice, Mme O... P..., dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du CSE de l'URSSAF de Franche-Comté, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Franche-Comté, après débats en l'audience publique du 1er juillet 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Reprise d'instance

1. Il est donné acte au comité social et économique (CSE) de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Franche-Comté, venant aux droits du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'URSSAF de Franche-Comté, de sa reprise d'instance.

Faits et procédure

2. Selon l'ordonnance attaquée (président du tribunal de grande instance de Besançon, 26 février 2019), rendue en la forme des référés, le CHSCT de l'URSSAF de Franche-Comté a voté le recours à une expertise sur le fondement d'un risque grave.

3. Le 4 janvier 2019, l'employeur a fait assigner le CHSCT aux fins d'annuler cette délibération.

Examen du moyen

Sur le moyen, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Frais de procédure devant la Cour

5. Aux termes de l'article L. 4614-13, alinéa 3, du code du travail, dans sa rédaction issue de l'article 31 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, les frais d'expertise sont à la charge de l'employeur. Toutefois, en cas d'annulation définitive par le juge de la décision du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou de l'instance de coordination, les sommes perçues par l'expert sont remboursées par ce dernier à l'employeur. Le comité d'entreprise peut, à tout moment, décider de les prendre en charge dans les conditions prévues à l'article L. 2325-41-1.

6. Il résulte de ce texte que l'ensemble des frais nés de la contestation de la décision du CHSCT de recourir à l'expertise, y compris les honoraires d'avocat, incombe à l'employeur, sauf abus.

7. Ces dispositions s'appliquent à l'ensemble des frais exposés par le CHSCT lors d'une instance engagée postérieurement à l'entrée en vigueur de l'article 31 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et antérieurement à la mise en place du comité social et économique, par application de l'article 9, V, de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'URSSAF de Franche-Comté aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'URSSAF de Franche-Comté ;

En application de l'article L. 4614-13 du code du travail, alors applicable, condamne l'URSSAF de Franche-Comté à payer à la SCP Lyon-Caen et Thiriez la somme de 3 600 euros TTC ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour le comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail de l'URSSAF de Franche-Comté.

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir annulé la délibération du CHSCT en date du 21 janvier 2018 portant sur la désignation d'un expert agréé ;

AUX MOTIFS QUE « En droit : En application de l'article L 4614-12 du code du travail le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agrée lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident de travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement. Le risque peut être réalisé ou probable et il doit être identifié et actuel. Il appartient au demandeur de prouver l'existence de ce risque. En fait : II ressort de la lecture de la résolution du 21 décembre 2018 que la décision a été prise au motif qu'il existe au sein de l'ensemble de l'entreprise, des inquiétudes en raison de faits énoncés en seize mentions. Il est donc demandé à l'expert d'analyser les conditions de travail et d'identifier les risques et de formuler des préconisations. Il se déduit de ces mentions qu'il est confié à l'expert une mission d'audit sur les conditions de travail de l'ensemble des sites, des services et des effectifs et un constat de l'existence de risques. Il appartient donc au CHSCT de démontrer l'existence d'un risque identifié, actuel, avéré ou très probable qui mettrait en danger la sécurité et la santé tous les agents de l'entreprise. Le CHSCT ne peut déléguer à un expert cette identification du risque ni la mission générale d'examen des conditions de travail. Par ailleurs, il doit être constaté que parmi les faits énoncés et pièces produites au soutien de la résolution : - Certaines alertes datent de 2015 et ne peuvent caractériser un risque actuel (lettres syndicales des 8 juin et 10 novembre 2015 et réunions de délégués syndicaux de septembre et octobre 2015), - Les attestations produites, au faible nombre de quatre pour un effectifs de 245 agents, sont établies en majorité par les membres du CHSCT (Mme R..., M. T..., Mme Y...) et concernent deux personnes non dénommées et une ayant fait l'objet de poursuites disciplinaires, - Les faits relatifs aux « multiplicités des MOP et feux rouges », aux difficultés avec le management à distance, au turn over inquiétant ne sont pas établis. - Le rapport de l'enquête menée en mars 2018 par une délégation du CHSCT, sur l'un des services d'un site, est contesté par la direction qui souligne certaines irrégularités de conduite de l'enquête et d'établissement du rapport. - Les observations du médecin du travail et de l'inspecteur du travail ne sont pas corroborées par les éléments produits par l'Urssaf, notamment les rapports annuels d'activité au CHSCT des différents sites, les taux d'absentéisme et le classement relatif à la charge de travail par agent. - Le questionnaire n'a pas de force probante dès lors que les conditions de sa réalisation ne sont pas connues. Il n'est pas démontré l'existence d'un risque grave justifiant le recours à une expertise. En conséquence, l'ensemble de ces motifs conduisent à faire droit à la demande de l'Urssaf. » ;

ALORS en premier lieu QUE le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail peut faire appel à un expert agréé lorsqu'un risque grave, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement ; le risque grave propre à justifier le recours à une mesure d'expertise sur le fondement de ces dispositions s'entend d'un risque identifié et actuel ; qu'en l'espèce, pour annuler la résolution du CHSCT du 21 décembre 2018, décidant de la réalisation d'une expertise pour risque grave, la Cour d'appel a relevé que le CHSCT ne pouvait déléguer à un expert l'identification du risque ni la mission générale d'examen des conditions de travail, qu'en statuant par de tels motifs alors qu'elle avait par ailleurs constaté qu'il ressortait de la lecture de la résolution du 21 décembre 2018 que les élus avaient constaté qu'il existait des inquiétudes en raison de faits énoncés en seize mentions, ce dont il se déduisait que le CHSCT faisait état, dans sa résolution, d'éléments objectifs susceptibles de caractériser un risque avéré, la Cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations a violé les dispositions de l'article L. 4614-12 du Code du travail ;

ALORS en deuxième lieu QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, pour considérer qu'il n'était pas démontré l'existence d'un risque grave, la Cour d'appel a constaté que, parmi les pièces produites au soutien de la résolution, certaines alertes dataient de 2015 et ne pouvaient caractériser un risque actuel (lettres syndicales des 8 juin et 10 novembre 2015 et réunions de délégués syndicaux de septembre et octobre 2015), que les attestations produites, au faible nombre de quatre pour un effectifs de 245 agents, étaient établies en majorité par les membres du CHSCT et concernaient deux personnes non dénommées et une ayant fait l'objet de poursuites disciplinaires, que le rapport de l'enquête menée en mars 2018 par une délégation du CHSCT, sur l'un des services d'un site, était contesté par la direction qui soulignait certaines irrégularités de conduite de l'enquête et d'établissement du rapport, que les observations du médecin du travail et de l'inspecteur du travail n'étaient pas corroborées par les éléments produits par l'Urssaf et que le questionnaire n'avait pas de force probante dès lors que les conditions de sa réalisation n'étaient pas connues ;
qu'en statuant ainsi sans examiner les autres pièces versées aux débats par le CHSCT afin d'établir l'existence d'un risque grave et notamment les différentes alertes des représentants du personnel adressées à la direction mais également aux autorités de tutelle et aux élus locaux en 2017 et 2018, les comptes-rendus de réunions de services de 2017 et 2018 dans le cadre desquelles les agents mettaient en avant la dégradation de leurs conditions de travail et leur souffrance ainsi que différents courriers adressés à la direction par des salariés de l'URSSAF de Franche-Comté faisant état de la détérioration de leurs conditions de travail et d'une dégradation consécutive de leur état de santé, la Cour d'appel a méconnu les exigences découlant de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS en troisième lieu QUE, saisi par le CHSCT d'un faisceau d'éléments de fait tendant à établir l'existence d'un risque grave pour la santé des salariés, le juge doit apprécier si, pris dans leur ensemble, ces faits permettent de caractériser un tel risque ; qu'en l'espèce, pour conclure qu'il n'était pas démontré l'existence d'un risque grave justifiant le recours à une expertise, la Cour d'appel s'est contentée d'examiner séparément une partie des éléments de fait dont faisait état le CHSCT ; qu'en s'abstenant de rechercher si, pris dans leur ensemble, ces éléments de fait ne caractérisaient pas un risque grave, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 4614-12 du Code du travail dans leur version applicable au litige ;

ALORS en quatrième lieu QUE le principe selon lequel nul ne peut se constituer un titre à lui-même n'est pas applicable à la preuve des faits juridiques ; qu'en l'espèce, pour considérer qu'il n'était pas démontré l'existence d'un risque grave justifiant le recours à un expertise, la Cour d'appel a notamment relevé que les attestations produites par le CHSCT au soutien de sa résolution étaient établies en majorité par les membres du CHSCT ; qu'en écartant, pour ce motif inopérant, les attestations en cause, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1315 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

ALORS en cinquième lieu QUE pour considérer qu'il n'était pas démontré l'existence d'un risque grave justifiant le recours à un expertise, la Cour d'appel a encore relevé que les « observations » du médecin du travail produites par le CHSCT au soutien de sa résolution n'étaient pas corroborées par les éléments produits par l'URSSAF ; qu'en refusant pour de tels motifs de prendre en considération le rapport annuel d'activité médicale pour 2017 et le courrier d'alerte du médecin du travail adressé à l'URSSAF de Franche-Comité le 25 janvier 2018 quand ces documents faisaient état d'éléments recueillis lors des consultations menées par le médecin du travail et relatifs notamment à l'état de santé des salariés reçus dans ce cadre ainsi que du lien existant entre cet état de santé et la dégradation de leurs conditions de travail, éléments qui ne pouvaient, par définition, être corroborés ceux produits par l'URSSAF, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 4614-12 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-13456
Date de la décision : 30/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Besançon, 26 février 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2020, pourvoi n°19-13456


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.13456
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