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30/09/2020 | FRANCE | N°19-10547

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 septembre 2020, 19-10547


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 772 F-D

Pourvoi n° H 19-10.547

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

La société Sietar et VTI, soc

iété par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° H 19-10.547 contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2018 par la cour d'a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 septembre 2020

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 772 F-D

Pourvoi n° H 19-10.547

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

La société Sietar et VTI, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° H 19-10.547 contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2018 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à M. M... T..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Sietar et VTI, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. T..., après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 14 novembre 2018), M. T... a été engagé par la société Sietar etVTI en qualité de chargé d'affaires.

2. Il a été convoqué le 3 avril 2013 à un entretien préalable en vue de son licenciement et a été mis à pied à titre conservatoire.

3. Le 10 avril 2013, il lui a été notifié une lettre mentionnant en objet : « Notification de mise à pied» et indiquant : « Nous vous avons convoqué (...) pour un entretien préalable afin de recueillir vos explications. Les discussions ne nous ayant pas permis de remettre en cause notre appréciation, nous sommes dans l'obligation de prolonger votre mise à pied. Si notre décision après cet entretien nous amenait à vous licencier pour faute grave, cette mise à pied disciplinaire se prolongerait jusqu'à l'issue de la procédure pour faute grave. »

4. Par lettre du 12 avril 2013 portant pour objet « mise à pied », l'employeur a écrit au salarié de ne pas tenir compte du courrier du 10 avril 2013. Le même jour, une mise à pied qualifiée de conservatoire lui a été notifiée.

5. Le 17 avril 2013, le salarié a été licencié pour faute grave à raison des mêmes faits que ceux visés dans les lettres de mise à pied des 10 et 12 avril 2013.

6. Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. L'employeur fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes au titre du licenciement, de juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse et le condamner au paiement de diverses indemnités, alors « que la mise à pied prononcée par l'employeur dans l'attente de sa décision dans la procédure de licenciement parallèlement engagée a un caractère conservatoire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que la mise à pied adressée au salarié le 10 avril 2013, qualifiée de disciplinaire par l'employeur à la suite d'une simple erreur matérielle de son comptable, indiquait qu'elle se prolongeait jusqu'à l'attente de la décision de la société Sietar et Vti sur la procédure de licenciement : ‘' les discussions ne nous ayant pas permis de remettre en cause notre appréciation, nous sommes dans l'obligation de prolonger votre mise à pied. Si notre décision après cet entretien nous amenait à vous licencier pour faute grave, cette mise à pied disciplinaire se prolongerait jusqu'à l'issue de la procédure pour faute grave ‘' ; qu'en retenant pourtant, pour dire irrégulier le licenciement, que la mise à pied aurait eu un caractère disciplinaire et aurait épuisé le pouvoir disciplinaire de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 1332-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1332-3 du code du travail :

8. La mise à pied prononcée par l'employeur dans l'attente de sa décision dans la procédure de licenciement engagée dans le même temps a un caractère conservatoire.

9. Pour juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que l'employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire dès lors que le courrier du 10 avril 2013 invoquait une mise à pied qui comprenait précisément le terme « disciplinaire » et au surplus qu'elle entraînait retenue du salaire, de sorte qu'il ne pouvait unilatéralement annuler la mesure de mise à pied disciplinaire ainsi notifiée et prononcer le licenciement pour faute grave à raison des mêmes faits.

10. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la mise à pied du salarié avait été prononcée le 3 avril 2013 à titre conservatoire, qu'une procédure de licenciement avait été engagée au même moment et que la lettre du 10 avril 2013 ne manifestait pas la volonté de l'employeur d'abandonner la procédure de licenciement pour faute grave mais avait au contraire pour objet de préciser que la mise à pied se prolongerait jusqu'au terme de celle-ci, ce dont il résultait qu'elle avait un caractère conservatoire, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. T... de ses demandes d'annulation du blâme du 24 octobre 2012 et de la mise à pied conservatoire, de condamnation de la société au paiement de sommes à titre de rappel de salaire et congés payés afférents ainsi que de dommages-intérêts au titre du blâme et pour licenciement irrégulier, l'arrêt rendu le 14 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne M. T... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Sietar et VTI

Il est fait grief à la décision attaquée d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il avait débouté M. T... de ses demandes au titre du licenciement et statuant à nouveau, d'avoir condamné la société Sietar et Vti à payer audit salarié les sommes de 9 874,67 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 987,46 € au titre des congés payés afférents au préavis, 6 583,23 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, et 25 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

aux motifs que « sur le licenciement : M. T... conteste le licenciement pour faute grave se prévalant de la prohibition du cumul de sanctions pour les mêmes faits rendant le licenciement sans cause réelle et sérieuse, invoquant qu'il a été licencié pour des faits identiques à ceux indiqués dans le courrier de mise à pied du 12 avril 2013 qui constituait bien une mise à pied disciplinaire, la société ne pouvant invoquer utilement l'erreur de la comptable, dès lors que le courrier est signé de M. C... PDG, qu'il était déjà mis à pied à titre conservatoire depuis le 3 avril 2013, que rien ne justifiait qu'il soit de nouveau mis à pied le 12 avril 2013 postérieurement à l'entretien préalable, que le courrier vise clairement le terme de « mise à pied disciplinaire » et indique que les journées de mise à pied entraîneront retenue de salaire alors que dans le cas d'une mise à pied à titre conservatoire, le paiement ou non de la période de suspension dépend de la sanction infligée, laquelle a abouti au licenciement pour faute grave seulement le 17 avril 2013, que la société ne pouvait plus revenir sur sa décision et sur cette sanction ; que par ailleurs, M. T... invoque que les faits évoqués dans la lettre de licenciement ne justifient pas son licenciement pour faute grave ; que la société réplique que pendant la procédure de licenciement M. T... a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire, qu'à l'issue de l'entretien et en l'attente de la décision, la société a prolongé la mise à pied, que par erreur de rédaction il a été mentionné dans le courrier du 10 avril 2013 « mise à pied disciplinaire », que s'apercevant de cette erreur la comptable a adressé au salarié un courrier rectificatif dès le 12 avril et lui a demandé de ramener le premier courrier à la société ce dont le salarié avait convenu, qu'il ne s'agissait pas d'une mise à pied disciplinaire valant sanction, celle-ci ne précisant ni le nombre de jours de la mise à pied, ni les dates d'application, qu'il n'y a donc pas double sanction. Par ailleurs la société soutient que l'importance des fautes commises par le salarié justifient le licenciement ; que l'article L. 1331-1 du code du travail dispose que : « Constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération » ; que l'employeur épuise son pouvoir disciplinaire par la sanction et ne peut relativement aux faits sanctionnés, le restaurer en décidant unilatéralement d'annuler la mesure ainsi notifiée ; qu'en l'espèce, il convient de retenir que par lettre du 3 avril 2013, la société a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement prévu le 10 avril suivant et lui a notifié sa mise à pied conservatoire « dans l'attente d'une décision définitive » ( pièce n° 23 des productions du salarié) ; puis que la société a adressé au salarié la lettre du 10 avril 2013 signée par M. C..., PDG, portant pour objet : « Notification de mise à pied » (pièce n° 24 des productions du salarié) et ainsi libellée : « En date du 3 avril 2013, nous avons eu à regretter de votre part : En tant que fautes professionnelles : - 07/03/2013- Barillet vapeur CHARVIGNE : malgré qu'il vous ait été indiqué par le magasinier que le tube était déformé à ses extrémités, vous n'avez pas contrôlé la fabrication de cette allonge de barillet auprès de l'atelier, ni mis en garde les opérateurs sur ces défauts difficiles à percevoir visuellement. L'intervention se soldant par une non-conformité réglementaire qui met l'entreprise en situation de risque vis-à-vis de l'intégrité du barillet ; et au-delà de ce risque d'avarie, la perte du client Lactalis qui est notre premier client. Sans parler de la nécessité de refaire la pièce défectueuse et de remonter la nouvelle ce qui aura un coût d'au moins du double que ce qu'initialement prévu. - 04/03/2013 – Monsieur D... R... H... : vous avez commandé une chaudière vapeur de 30 000 € sans informé le fournisseur que vous avions besoin d'une boîte à fumées à droite. Il a donc livré une chaudière standard avec boîte à fumées à gauche, ce qui avait pour conséquence l'impossibilité de raccordement de la chaudière. J'ai dû intervenir pour décider de la solution technique à mettre en oeuvre, solution technique qui a coûtée, dans un contexte ou le remplacement de cette chaudière était sans marge puisque due à une erreur de dimensionnement de l'année dernière, commande de l'année dernière dont vous aviez la charge. - D'autres carences importantes pourraient être reprochées mais ces deux sujets graves sont suffisants. En tant que faute disciplinaire : Le fait de vous absenter trois semaines, soit du 11 mars au 2 avril, sans notre accord formel, pour travailler pour un tiers, de manière rémunérée (fonction publique). Eu égard de la gravité de ces agissements altérant le bon fonctionnement de l'entreprise, nous vous avons convoqué le 10 avril 2013 à 11 h, pour un entretien préalable afin de recueillir vos explications. Les discussions ne nous ayant pas permis de remettre en cause notre appréciation, nous sommes dans l'obligation de prolonger votre mise à pied. Si notre décision après cet entretien nous amenait à vous licencier pour faute grave, cette mise à pied disciplinaire se prolongerait jusqu'à l'issue de la procédure de licenciement pour faute grave. Pendant cette période, votre contrat de travail est suspendu. Ces journées de mise à pied entraîneront retenue de salaire sur votre paye du mois de avril 2013 » ; qu'il résulte des termes mêmes de la mise à pied notifiée par lettre du 10 avril 2013 que contrairement à ce que l'employeur invoque, la mise à pied a un caractère disciplinaire et non provisoire au regard de ce qu'elle comprend précisément le terme « disciplinaire » et qu'au surplus de ce qu'elle entraîne immédiatement retenue de salaire ; que par la notification de cette sanction disciplinaire, l'employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire relativement aux faits visés et il ne pouvait concernant les faits sanctionnés le restaurer en décidant unilatéralement d'annuler la mesure ainsi notifiée par la notification d'une nouvelle mise à pied de nature conservatoire, par lettre du 12 avril 2013 visant toujours les mêmes faits ; que par lettre du 17 avril 2013 dont la teneur a été reprise en exergue de l'arrêt et qui fixe les limites du litige, la société a notifié à M. T... son licenciement pour faute grave visant exactement les mêmes faits que ceux ayant fait l'objet de la mise à pied disciplinaire du 10 avril 2013 et non des faits nouveaux intervenus postérieurement ; que l'employeur qui n'invoque pas dans la lettre de licenciement la poursuite ou la découverte après la mise à pied disciplinaire d'agissements fautifs imputables à M. P. et ayant épuisé son pouvoir disciplinaire par l'effet de cette mise à pied disciplinaire du 10 avril 2013, ne peut reprendre les faits objet de la sanction disciplinaire pour motiver le licenciement et par suite le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, le jugement devant être infirmé de ce chef ; sur les demandes liées au licenciement : * sur le salaire durant la mise à pied :que le licenciement pour faute grave étant injustifié, l'employeur est tenu au paiement du salaire pendant la mise à pied soit du 3 avril au 17 avril 2013 ; que pour autant il convient de retenir que durant cette période M. T... était placé en arrêt de maladie ainsi qu'il résulte de la pièce n° 3 des productions de la société, de sorte que l'employeur a procédé à une retenue sur salaire au titre de l'absence maladie et non au titre de la mise à pied ; que par suite, M. T... sera débouté de sa demande de paiement ; * sur l'indemnité de préavis : que M. T... est fondé en sa demande de préavis de trois mois, préavis qui n'est pas discuté quant à la durée, représentant la somme de 3 X 3.291,62 € = 9874,67 € outre 987,46 € au titre des congés payés afférents ; * sur l'indemnité de licenciement : qu'au regard de son ancienneté, M. P. est fondé en sa demande d'indemnité conventionnelle de licenciement, pour la somme de 6.583,23 € ; * dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : qu'au moment du licenciement, M. T... bénéficiait d'une ancienneté de plus de 8 ans dans l'entreprise employant habituellement plus de 11 salariés, percevait un salaire brut mensuel de 3.291,62 € et était âgé de 34 ans ; qu'au regard de ces éléments, il convient d'allouer à M. T... la somme de 25.000 € à titre de dommages-intérêts pour la perte injustifiée de son emploi, par application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige ; que la condamnation sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail appelle l'application des dispositions de l'article L. 1235-4 du même code ; qu'il convient d'ordonner le remboursement par la société aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour du licenciement au jour de l'arrêt, dans la limite de deux mois d'indemnités de chômage » ;

alors 1°/ que la mise à pied prononcée par l'employeur dans l'attente de sa décision dans la procédure de licenciement parallèlement engagée a un caractère conservatoire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que la mise à pied adressée à M. T... le 10 avril 2013, qualifiée de disciplinaire par l'employeur à la suite d'une simple erreur matérielle de son comptable, indiquait qu'elle se prolongeait jusqu'à l'attente de la décision de la société Sietar et Vti sur la procédure de licenciement : « les discussions ne nous ayant pas permis de remettre en cause notre appréciation, nous sommes dans l'obligation de prolonger votre mise à pied. Si notre décision après cet entretien nous amenait à vous licencier pour faute grave, cette mise à pied disciplinaire se prolongerait jusqu'à l'issue de la procédure pour faute grave » (conclusions, p. 6, alinéa 2) ; qu'en retenant pourtant, pour dire irrégulier le licenciement, que la mise à pied aurait eu un caractère disciplinaire et aurait épuisé le pouvoir disciplinaire de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 1332-3 du code du travail ;

alors 2°/ que la mise à pied prononcée par l'employeur, pour une durée déterminée, dans l'attente de sa décision dans la procédure de licenciement parallèlement engagée a un caractère conservatoire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a elle-même constaté que la mise à pied adressée à M. T... le 10 avril 2013, qualifiée de disciplinaire par l'employeur à la suite d'une simple erreur matérielle de son comptable, était à durée indéterminée puisqu'elle se prolongeait jusqu'à l'attente de la décision de la société Sietar et Vti sur la procédure de licenciement : « les discussions ne nous ayant pas permis de remettre en cause notre appréciation, nous sommes dans l'obligation de prolonger votre mise à pied. Si notre décision après cet entretien nous amenait à vous licencier pour faute grave, cette mise à pied disciplinaire se prolongerait jusqu'à l'issue de la procédure pour faute grave » (conclusions, p. 6, alinéa 2) ; qu'en retenant pourtant, pour dire irrégulier le licenciement, que la mise à pied aurait eu un caractère disciplinaire et aurait épuisé le pouvoir disciplinaire de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 1332-3 du code du travail ;

alors 3°/ que la mise à pied prononcée par l'employeur, pour une durée déterminée, dans l'attente de sa décision dans la procédure de licenciement parallèlement engagée a un caractère conservatoire, et ce quelle que soit la qualification que lui a donnée l'employeur ; qu'en l'espèce, pour dire que la mise à pied adressée par l'employeur aurait un caractère disciplinaire, la cour d'appel s'est bornée à relever que « la mise à pied a un caractère disciplinaire et non provisoire au regard de ce qu'elle comprend précisément le terme « disciplinaire » » (arrêt, p. 6, antépénultième alinéa) ; qu'en se fondant ainsi sur une circonstance parfaitement inopérante de la terminologie employée par erreur par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-3 du code du travail ;

alors 4°/ que la commission d'une faute grave par le salarié justifie le non-paiement du salaire pendant la période mise à pied conservatoire ; qu'en l'espèce, pour dire que la mise à pied adressée par l'employeur aurait un caractère disciplinaire, la cour d'appel s'est bornée à relever « qu'elle entraîne immédiatement retenue de salaire » (arrêt, p. 6, antépénultième alinéa) ; qu'en se fondant ainsi sur une circonstance parfaitement inopérante, dès lors qu'une mise à pied conservatoire peut également entraîner une retenue sur salaire lorsqu'elle est justifiée, comme en l'espèce, par la faute grave du salarié, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-10547
Date de la décision : 30/09/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 14 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 sep. 2020, pourvoi n°19-10547


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10547
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