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24/09/2020 | FRANCE | N°19-16568

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 24 septembre 2020, 19-16568


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 septembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 681 F-D

Pourvoi n° B 19-16.568

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 SEPTEMBRE 2020

M. E... V..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° B 19-1

6.568 contre le jugement rendu le 20 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne (chambre civile, 1re section), dans le ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 septembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 681 F-D

Pourvoi n° B 19-16.568

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 SEPTEMBRE 2020

M. E... V..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° B 19-16.568 contre le jugement rendu le 20 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant à la commune de Bassuet, représentée par son maire en exercice, domicilié [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Béghin, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de M. V..., de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la commune de Bassuet, après débats en l'audience publique du 30 juin 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Béghin, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne, 20 mars 2019), rendu en dernier ressort, M. V..., considérant être propriétaire du chemin d'accès à son fonds, a contesté la délibération du conseil municipal de la commune de Bassuet l'ayant inscrit au tableau des chemins ruraux et des voies communales.

2. Par arrêt 30 mars 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a sursis à statuer jusqu'à ce que le juge judiciaire se soit prononcé sur le droit de propriété de M. V..., en vertu d'un acte du 5 octobre 1954, subsidiairement, de la prescription acquisitive.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

4. M. V... fait grief au jugement de dire qu'il n'est pas propriétaire du chemin en vertu d'une prescription acquisitive, alors :

« 1°/ que l'accomplissement d'actes matériels de possession non équivoques fait présumer de l'intention de les exercer à titre de propriétaire ; que pour estimer que M. V... ne rapportait pas la preuve d'une possession continue, paisible, publique, non-équivoque et à titre de propriétaire du chemin litigieux pendant trente ans, le tribunal a énoncé que la propriété de ce passage n'avait pas été revendiquée par les consorts S... lors de l'enquête réalisée pour le renouvellement du cadastre en 1958, que la possession dont M. V... se prévalait faisait l'objet de contestations depuis 2009, notamment avec ses voisins R... et T... lorsque M. V... avait tenté de fermer l'accès du chemin, et qu'une clôture avait été implantée le long du chemin, clôture pour laquelle Mme S... avait sollicité, en septembre 1999, l'autorisation au chef de la subdivision de Vitry-leFrançois de la direction départementale de l'équipement de la Marne qui lui avait indiqué qu'elle devait vérifier le bornage de sa propriété en bordure dudit chemin, ce qui montrait que Mme S... entendait laisser ce chemin en dehors de ses murs de clôture et librement accessible ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher s'il ne résultait pas à la fois du titre de propriété de 1954 de M. V... lui donnant « tous droits sur le chemin commun », et du fait que ce chemin n'avait jamais été emprunté par le public et que M. V... en avait toujours assuré l'entretien, que Mme S... et/ou M. V..., s'étaient toujours comportés en propriétaires du chemin litigieux, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 2258, 2261, 2265 et 2272 du code civil ;

2°/ que pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, et non-équivoque pendant trente ans ; que pour estimer que M. V... ne rapportait pas la preuve d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire du chemin litigieux pendant trente ans, le tribunal a énoncé que la propriété de ce passage n'avait pas été revendiquée par les consorts S... lors de l'enquête réalisée pour le renouvellement du cadastre en 1958, que la possession dont M. V... se prévalait faisait l'objet de contestations depuis 2009, notamment avec ses voisins R... et T... lorsque M. V... avait tenté de fermer l'accès du chemin, et qu'une clôture avait été implantée le long du chemin, clôture pour laquelle Mme S... avait sollicité, en septembre 1999, l'autorisation au chef de la subdivision de Vitry-le-François de la direction départementale de l'équipement de la Marne qui lui avait indiqué qu'elle devait vérifier le bornage de sa propriété en bordure dudit chemin, ce qui montrait que Mme S... entendait laisser ce chemin en dehors de ses murs de clôture et librement accessible ; qu'en statuant ainsi, au regard de circonstances inopérantes compte tenu des dates des événements retenus par le tribunal, qui n'empêchaient pas, au moins entre 1958 et 1999, l'exercice, pendant trente ans, d'une possession continue et non interrompue, paisible, publique, et non équivoque, le tribunal a statué par un motif inopérant et violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Ayant retenu souverainement qu'il résultait des attestations produites que le chemin litigieux constituait un passage commun dont l'entretien était effectué par l'ensemble des riverains, ce dont il se déduisait que l'usage et l'entretien du chemin invoqués par M. V... ne caractérisait pas une possession utile de nature à établir sa propriété exclusive, le tribunal, qui n'avait pas à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

6. M. V... fait grief au jugement de dire qu'il n'est pas propriétaire du chemin de la cour des miracles en vertu de l'acte notarié du 5 octobre 1954 et qu'il n'en est pas propriétaire en vertu d'une prescription acquisitive, « alors que les chemins et sentiers d'exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation et sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, l'usage en étant commun à tous les intéressés et pouvant être interdit au public ; qu'en se bornant à déclarer que M. V... ne rapportait pas la preuve de la propriété du chemin litigieux par titre ou par prescription acquisitive, sans s'expliquer sur la nature de chemin d'exploitation du chemin litigieux subsidiairement revendiquée par M. V... au regard de ses caractéristiques topographiques, de son usage exclusif par les riverains du chemin, et de ses modalités d'entretien, le tribunal a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. La question préjudicielle dont était saisie le tribunal de grande instance n'ayant pas porté sur l'éventuelle qualification de chemin d'exploitation du chemin litigieux, le moyen est inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. V... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. V... et le condamne à payer à la commune de Bassuet la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. V....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué,

D'AVOIR dit que M. V... n'est pas propriétaire du chemin de la cour des miracles en vertu de l'acte notarié du 5 octobre 1954 et D'AVOIR dit que M. V... n'est pas propriétaire du chemin en vertu d'une prescription acquisitive ;

AUX MOTIFS QU'il sera rappelé qu'aux termes de l'article 1353 (ancien 1315) du code civil, lequel a une portée générale et s'applique dans tous les cas où une loi particulière n'en a pas décidé autrement, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime, les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ; que selon l'article L. 161-2 de ce code, l'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ; que la destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée ; que l'article L. 161-3 du même code dispose que tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ; qu'il résulte de ces dispositions qu'est instaurée une présomption d'appartenance à la commune de tout chemin affecté à l'usage du public, de sorte que le propriétaire qui revendique la propriété d'un tel chemin doit renverser cette présomption en établissant la preuve de la propriété du chemin, par titre ou par prescription acquisitive ; qu'ainsi, la charge de la preuve incombe à Monsieur E... V... lequel revendique la propriété du chemin litigieux et ce, par tous moyens ; que sur la première partie de la question préjudicielle : Monsieur E... V... est-il propriétaire du chemin de la cour des miracles en vertu de l'acte notarié du 5 octobre 1954 dont il se prévaut, il résulte de l'acte notarié de vente par les consorts U... à Monsieur N... S..., reçu le 5 octobre 1954 par Maître G... L..., notaire à BASSUET (51), que Monsieur S... est propriétaire "d'une maison sis à [...] , dans une cour commune, comprenant : corps de logis, composé d'un corridor et pièces d'habitation, à droite du corps de logis, écurie, grange faisant saillie sur la cour, cellier dans la grange, jardin derrière la grande, portion de cour, le tout, d'une contenance de 5a 20ca, [...] , [...] et [...], avec tous droits au passage commun et à la cour commune" ; qu'ainsi, si le titre de propriété dont se prévaut Monsieur E... V... ainsi que l'extrait du plan cadastral, qui ne répertorie pas ledit chemin comme étant sa propriété et pour lequel Monsieur E... V... ne paie pas de taxe foncière, fait apparaître que l'accès à sa propriété s'effectue par le chemin litigieux, il ne saurait en être déduit que ce chemin était commun à plusieurs propriétaires ou lui appartient à titre exclusif ; que compte-tenu de ces éléments, il y a lieu de considérer que le chemin litigieux ne figure pas dans le titre de propriété dont se prévaut Monsieur E... V... comme faisant partie de sa propriété mais davantage comme un droit de passage ; qu'en conséquence, Monsieur E... V... n'est pas propriétaire du chemin de la cour des miracles en vertu de l'acte notarié du 5 octobre 1954 ;
que sur la seconde partie de la question préjudicielle : le cas échéant et subsidiairement, l'est-il en vertu d'une action en prescription acquisitive si le bien en question est une propriété communale et que le juge administratif venait à considérer que ce chemin n'appartient pas au domaine public, il résulte des dispositions des articles 2258, 2261 et 2272 du code civil que celui qui justifie d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire d'un bien pendant une durée de 30 ans en devient propriétaire, sans qu'il soit obligé de rapporter un titre et sans que l'on puisse lui opposer d'exception déduite de la mauvaise foi ; qu'en outre, pour prescrire, il faut une possession caractérisée par l'accomplissement d'actes matériels de possession ; qu'en l'espèce, Monsieur E... V... fait valoir, à titre subsidiaire, qu'il a acquis par prescription ledit chemin dans la mesure où U en est l'utilisateur exclusif et qu'il en assure l'entretien ; qu'il produit à cet égard deux attestations en date des 17 et 18 août 2012, dont une est illisible, émanant de personnes ayant habité dans les propriétés voisines qui indiquent que le passage commun était privé et que son entretien était effectué par l'ensemble des propriétaires et non par les services de la commune ; que pour autant, il convient de relever que la propriété de ce passage n'a pas été revendiquée par les consorts S... lors de l'enquête réalisée pour le renouvellement du cadastre en 1958 ; qu'en outre, la possession dont Monsieur E... V... se prévaut a fait l'objet de contestations depuis 2009, notamment avec les voisins de celui-ci, Messieurs R... et T... lesquels se sont joints à la commune de BASSUET pour faire établir un procès-verbal de constat d'huissier le 25 mars 2014 lorsque Monsieur E... V... a tenté de fermer l'accès du chemin ; que par ailleurs, il résulte des photographies versées au dossier qu'une clôture a été implantée le long du chemin, clôture pour laquelle Madame B... S... avait sollicité, en septembre 1999, l'autorisation au chef de la subdivision de Vitry-le-François de la direction Départementale de l'Equipement de la Marne qui lui avait indiqué, par courrier du 27 septembre 1999, qu'elle était tenue de vérifier le bornage de sa propriété en bordure dudit chemin, ce qui permet d'en déduire que Madame B... S... avait l'intention de laisser ledit chemin en dehors de ses murs de clôture et librement accessible ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que Monsieur E... V... ne rapporte pas la preuve d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire du chemin de la cour des miracles pendant une durée de 30 ans et qu'en conséquence, de dire que les conditions de la prescription acquisitive ne sont pas réunies en l'espèce ;

ALORS QUE l'affectation à l'usage du public faisant présumer de l'appartenance du chemin à la commune suppose qu'il soit constaté l'utilisation du chemin rural comme voie de passage et/ou des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ; qu'en postulant qu'il appartenait à M. V... de renverser la présomption d'appartenance du chemin litigieux à la commune de Bassuet en établissant la preuve de la propriété du chemin par titre ou prescription acquisitive, sans constater que ce chemin était effectivement affecté à l'usage du public et/ou l'objet d'actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du code civil, ensemble les articles L. 161-1, L. 161-2 et L. 161-3 du code rural et de la pêche maritime.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué,

D'AVOIR dit que M. V... n'est pas propriétaire du chemin en vertu d'une prescription acquisitive ;

AUX MOTIFS QU'il sera rappelé qu'aux termes de l'article 1353 (ancien 1315) du code civil, lequel a une portée générale et s'applique dans tous les cas où une loi particulière n'en a pas décidé autrement, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime, les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ; que selon l'article L. 161-2 de ce code, l'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ; que la destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée ; que l'article L. 161-3 du même code dispose que tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ; qu'il résulte de ces dispositions qu'est instaurée une présomption d'appartenance à la commune de tout chemin affecté à l'usage du public, de sorte que le propriétaire qui revendique la propriété d'un tel chemin doit renverser cette présomption en établissant la preuve de la propriété du chemin, par titre ou par prescription acquisitive ; qu'ainsi, la charge de la preuve incombe à Monsieur E... V... lequel revendique la propriété du chemin litigieux et ce, par tous moyens ;
[...]
Que sur la seconde partie de la question préjudicielle : le cas échéant et subsidiairement, l'est-il en vertu d'une action en prescription acquisitive si le bien en question est une propriété communale et que le juge administratif venait à considérer que ce chemin n'appartient pas au domaine public, il résulte des dispositions des articles 2258, 2261 et 2272 du code civil que celui qui justifie d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire d'un bien pendant une durée de 30 ans en devient propriétaire, sans qu'il soit obligé de rapporter un titre et sans que l'on puisse lui opposer d'exception déduite de la mauvaise foi ; qu'en outre, pour prescrire, il faut une possession caractérisée par l'accomplissement d'actes matériels de possession ; qu'en l'espèce, Monsieur E... V... fait valoir, à titre subsidiaire, qu'il a acquis par prescription ledit chemin dans la mesure où U en est l'utilisateur exclusif et qu'il en assure l'entretien ; qu'il produit à cet égard deux attestations en date des 17 et 18 août 2012, dont une est illisible, émanant de personnes ayant habité dans les propriétés voisines qui indiquent que le passage commun était privé et que son entretien était effectué par l'ensemble des propriétaires et non par les services de la commune ; que pour autant, il convient de relever que la propriété de ce passage n'a pas été revendiquée par les consorts S... lors de l'enquête réalisée pour le renouvellement du cadastre en 1958 ; qu'en outre, la possession dont Monsieur E... V... se prévaut a fait l'objet de contestations depuis 2009, notamment avec les voisins de celui-ci, Messieurs R... et T... lesquels se sont joints à la commune de BASSUET pour faire établir un procès-verbal de constat d'huissier le 25 mars 2014 lorsque Monsieur E... V... a tenté de fermer l'accès du chemin ; que par ailleurs, il résulte des photographies versées au dossier qu'une clôture a été implantée le long du chemin, clôture pour laquelle Madame B... S... avait sollicité, en septembre 1999, l'autorisation au chef de la subdivision de Vitry-le-François de la direction Départementale de l'Equipement de la Marne qui lui avait indiqué, par courrier du 27 septembre 1999, qu'elle était tenue de vérifier le bornage de sa propriété en bordure dudit chemin, ce qui permet d'en déduire que Madame B... S... avait l'intention de laisser ledit chemin en dehors de ses murs de clôture et librement accessible ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que Monsieur E... V... ne rapporte pas la preuve d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire du chemin de la cour des miracles pendant une durée de 30 ans et qu'en conséquence, de dire que les conditions de la prescription acquisitive ne sont pas réunies en l'espèce ;

1°) ALORS QUE l'accomplissement d'actes matériels de possession non équivoques fait présumer de l'intention de les exercer à titre de propriétaire ; que pour estimer M. V... ne rapportait pas la preuve d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire du chemin litigieux pendant trente ans, le tribunal a énoncé que la propriété de ce passage n'avait pas été revendiquée par les consorts S... lors de l'enquête réalisée pour le renouvellement du cadastre en 1958, que la possession dont M. V... se prévalait faisait l'objet de contestations depuis 2009, notamment avec ses voisins R... et T... lorsque M. V... avait tenté de fermer l'accès du chemin, et qu'une clôture avait été implantée le long du chemin, clôture pour laquelle Mme S... avait sollicité, en septembre 1999, l'autorisation au chef de la subdivision de Vitry-le-François de la direction départementale de l'équipement de la Marne qui lui avait indiqué qu'elle devait vérifier le bornage de sa propriété en bordure dudit chemin, ce qui montrait que Mme S... entendait laisser ce chemin en dehors de ses murs de clôture et librement accessible ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher s'il ne résultait pas à la fois du titre de propriété de 1954 de M. V... lui donnant « tous droits sur le chemin commun », et du fait que ce chemin n'avait jamais été emprunté par le public et que M. V... en avait toujours assuré l'entretien, que Mme S... et/ou M. V..., s'étaient toujours comportés en propriétaires du chemin litigieux, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 2258, 2261, 2265 et 2272 du code civil ;

2°) ALORS QUE pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, et non équivoque pendant trente ans ; que pour estimer M. V... ne rapportait pas la preuve d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire du chemin litigieux pendant trente ans, le tribunal a énoncé que la propriété de ce passage n'avait pas été revendiquée par les consorts S... lors de l'enquête réalisée pour le renouvellement du cadastre en 1958, que la possession dont M. V... se prévalait faisait l'objet de contestations depuis 2009, notamment avec ses voisins R... et T... lorsque M. V... avait tenté de fermer l'accès du chemin, et qu'une clôture avait été implantée le long du chemin, clôture pour laquelle Mme S... avait sollicité, en septembre 1999, l'autorisation au chef de la subdivision de Vitry-le-François de la direction départementale de l'équipement de la Marne qui lui avait indiqué qu'elle devait vérifier le bornage de sa propriété en bordure dudit chemin, ce qui montrait que Mme S... entendait laisser ce chemin en dehors de ses murs de clôture et librement accessible ; qu'en statuant ainsi, au regard de circonstances inopérantes compte tenu des dates des événements retenus par le tribunal, qui n'empêchaient pas, au moins entre 1958 et 1999, l'exercice, pendant trente ans, d'une possession continue et non interrompue, paisible, publique, et non équivoque, le tribunal a statué par un motif inopérant et violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué,

D'AVOIR dit que M. V... n'est pas propriétaire du chemin de la cour des miracles en vertu de l'acte notarié du 5 octobre 1954 et D'AVOIR dit que M. V... n'est pas propriétaire du chemin en vertu d'une prescription acquisitive ;

AUX MOTIFS QU'il sera rappelé qu'aux termes de l'article 1353 (ancien 1315) du code civil, lequel a une portée générale et s'applique dans tous les cas où une loi particulière n'en a pas décidé autrement, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime, les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ; que selon l'article L. 161-2 de ce code, l'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ; que la destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée ; que l'article L. 161-3 du même code dispose que tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ; qu'il résulte de ces dispositions qu'est instaurée une présomption d'appartenance à la commune de tout chemin affecté à l'usage du public, de sorte que le propriétaire qui revendique la propriété d'un tel chemin doit renverser cette présomption en établissant la preuve de la propriété du chemin, par titre ou par prescription acquisitive ; qu'ainsi, la charge de la preuve incombe à Monsieur E... V... lequel revendique la propriété du chemin litigieux et ce, par tous moyens ; que sur la première partie de la question préjudicielle : Monsieur E... V... est-il propriétaire du chemin de la cour des miracles en vertu de l'acte notarié du 5 octobre 1954 dont il se prévaut, il résulte de l'acte notarié de vente par les consorts U... à Monsieur N... S..., reçu le 5 octobre 1954 par Maître G... L..., notaire à BASSUET (51), que Monsieur S... est propriétaire "d'une maison sis à [...] , dans une cour commune, comprenant : corps de logis, composé d'un corridor et pièces d'habitation, à droite du corps de logis, écurie, grange faisant saillie sur la cour, cellier dans la grange, jardin derrière la grande, portion de cour, le tout, d'une contenance de 5a 20ca, [...] , [...] et [...], avec tous droits au passage commun et à la cour commune" ; qu'ainsi, si le titre de propriété dont se prévaut Monsieur E... V... ainsi que l'extrait du plan cadastral, qui ne répertorie pas ledit chemin comme étant sa propriété et pour lequel Monsieur E... V... ne paie pas de taxe foncière, fait apparaître que l'accès à sa propriété s'effectue par le chemin litigieux, il ne saurait en être déduit que ce chemin était commun à plusieurs propriétaires ou lui appartient à titre exclusif ; que compte-tenu de ces éléments, il y a lieu de considérer que le chemin litigieux ne figure pas dans le titre de propriété dont se prévaut Monsieur E... V... comme faisant partie de sa propriété mais davantage comme un droit de passage ; qu'en conséquence, Monsieur E... V... n'est pas propriétaire du chemin de la cour des miracles en vertu de l'acte notarié du 5 octobre 1954 ; que sur la seconde partie de la question préjudicielle : le cas échéant et subsidiairement, l'est-il en vertu d'une action en prescription acquisitive si le bien en question est une propriété communale et que le juge administratif venait à considérer que ce chemin n'appartient pas au domaine public, il résulte des dispositions des articles 2258, 2261 et 2272 du code civil que celui qui justifie d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire d'un bien pendant une durée de 30 ans en devient propriétaire, sans qu'il soit obligé de rapporter un titre et sans que l'on puisse lui opposer d'exception déduite de la mauvaise foi ; qu'en outre, pour prescrire, il faut une possession caractérisée par l'accomplissement d'actes matériels de possession ; qu'en l'espèce, Monsieur E... V... fait valoir, à titre subsidiaire, qu'il a acquis par prescription ledit chemin dans la mesure où U en est l'utilisateur exclusif et qu'il en assure l'entretien ; qu'il produit à cet égard deux attestations en date des 17 et 18 août 2012, dont une est illisible, émanant de personnes ayant habité dans les propriétés voisines qui indiquent que le passage commun était privé et que son entretien était effectué par l'ensemble des propriétaires et non par les services de la commune ; que pour autant, il convient de relever que la propriété de ce passage n'a pas été revendiquée par les consorts S... lors de l'enquête réalisée pour le renouvellement du cadastre en 1958 ; qu'en outre, la possession dont Monsieur E... V... se prévaut a fait l'objet de contestations depuis 2009, notamment avec les voisins de celui-ci, Messieurs R... et T... lesquels se sont joints à la commune de BASSUET pour faire établir un procès-verbal de constat d'huissier le 25 mars 2014 lorsque Monsieur E... V... a tenté de fermer l'accès du chemin ; que par ailleurs, il résulte des photographies versées au dossier qu'une clôture a été implantée le long du chemin, clôture pour laquelle Madame B... S... avait sollicité, en septembre 1999, l'autorisation au chef de la subdivision de Vitry-le-François de la direction départementale de l'équipement de la Marne qui lui avait indiqué, par courrier du 27 septembre 1999, qu'elle était tenue de vérifier le bornage de sa propriété en bordure dudit chemin, ce qui permet d'en déduire que Madame B... S... avait l'intention de laisser ledit chemin en dehors de ses murs de clôture et librement accessible ; qu'ainsi, eu égard à l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que Monsieur E... V... ne rapporte pas la preuve d'une possession continue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire du chemin de la cour des miracles pendant une durée de 30 ans et qu'en conséquence, de dire que les conditions de la prescription acquisitive ne sont pas réunies en l'espèce ;

ALORS QUE les chemins et sentiers d'exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation et sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, l'usage en étant commun à tous les intéressés et pouvant être interdit au public ; qu'en se bornant à déclarer que M. V... ne rapportait pas la preuve de la propriété du chemin litigieux par titre ou par prescription acquisitive, sans s'expliquer sur la nature de chemin d'exploitation du chemin litigieux subsidiairement revendiquée par M. V... au regard de ses caractéristiques topographiques, de son usage exclusif par les riverains du chemin, et de ses modalités d'entretien, le tribunal a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-16568
Date de la décision : 24/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Châlons-en-Champagne, 20 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 24 sep. 2020, pourvoi n°19-16568


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.16568
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