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23/09/2020 | FRANCE | N°18-25699

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 septembre 2020, 18-25699


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 septembre 2020

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 450 F-D

Pourvoi n° F 18-25.699

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020

M. J... T.

.., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° F 18-25.699 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commercial...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 septembre 2020

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 450 F-D

Pourvoi n° F 18-25.699

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 SEPTEMBRE 2020

M. J... T..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° F 18-25.699 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. L... T..., domicilié [...] , ancien gérant de la société [...] ,

2°/ à la société [...], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la société [...] ,

3°/ à M. Q... G..., domicilié [...] , pris en qualité d'administrateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société [...] ,

4°/ à M. K... N..., domicilié [...] ,

5°/ à M. X... E...,

6°/ à M. H... W...,

domiciliés tous deux [...],

tous trois cocessionnaires du fonds de commerce de la société [...] ,

7°/ à la société KCC, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. J... T..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. L... T..., de la SCP Colin-Stoclet, avocat de la société KCC, de la SCP Lesourd, avocat de la société [...], ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 juin 2020 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 6 septembre 2018 ), la société [...] a été mise en redressement judiciaire le 2 mai 2016. Un jugement du 11 juillet 2016 a arrêté un plan de cession en faveur de MM. N..., W... et E... auxquels a été substituée la société KCC, puis a prononcé la conversion du redressement en liquidation judiciaire, la société Gastaud étant désignée liquidateur. M. J... T..., propriétaire indivis des locaux d'exploitation de la société, a formé tierce opposition au jugement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner à la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

3. M. J... T... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa tierce opposition au jugement en ce qu'il prononce la conversion du redressement de la société [...] en liquidation judiciaire et en ce qu'il arrête le plan de cession "du fonds de commerce" de cette société alors :

« 1°/ que sont susceptibles de tierce opposition, les jugements de conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; qu'en déclarant irrecevable la tierce opposition de M. J... T... contre le jugement du 11 juillet 2016 ayant prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire de la SARL [...] en liquidation judiciaire, la Cour d'appel a violé les articles L. 661-2 et L. 661-1 I 5° dans leur version applicable au territoire de la Nouvelle-Calédonie ;

2°/ que, s'il ne peut être exercé de tierce opposition contre un jugement qui arrête le plan de cession d'une entreprise en redressement judiciaire, il est dérogé à cette règle en cas d'excès de pouvoir ; qu'en l'espèce, M. J... T... invoquait la nullité du jugement ayant arrêté le plan de cession de la société [...] pour excès de pouvoir en ce qu'il a entériné la cession d'un fonds de commerce avec un droit au bail inexistant sur un immeuble qui est sa propriété indivise ; qu'en déclarant M. J... T... irrecevable en sa tierce opposition en ce que le jugement a arrêté le plan de cession de la société [...] sans s'expliquer sur l'excès de pouvoir invoqué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 661-7 dans sa version applicable au territoire de la Nouvelle-Calédonie et des principes régissant l'excès de pouvoir. »

Réponse de la Cour

4. L'article 583 du code de procédure civile applicable en Nouvelle-Calédonie réserve l'exercice de la tierce opposition aux personnes qui y ont intérêt, mais à la condition qu'elles n'aient été ni parties ni représentées au jugement qu'elles attaquent, c'est-à-dire qu'elles soient des tiers. Or, aux termes même de ses conclusions d'appel, M. J... T... expose qu'il « n'est pas tiers mais représentant du débiteur ». Il en résulte que, s'étant ainsi lui-même privé de la qualité nécessaire pour former tierce opposition au jugement du 11 juillet 2016, aussi bien en ce que ce jugement a arrêté le plan de cession de la société [...] qu'en ce qu'il a ensuite converti le redressement judiciaire de celle-ci en liquidation judiciaire, M. J... T... ne peut se faire un grief de l'irrecevabilité de la tierce opposition prononcée par la cour d'appel, l'aurait-elle été pour des motifs erronés.

Le moyen est donc inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. J... T... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois septembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. J... T...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré M. J... T... irrecevable en sa tierce opposition formée à l'encontre de la décision en date du 11 juillet 2016 ayant arrêté le plan de cession du fonds de commerce de la SARL [...] au profit de MM. W..., E... et N... et de l'avoir déclaré également irrecevable en sa tierce opposition formée à l'encontre de cette même décision du 11 juillet 2016 ayant prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire de la SARL [...] ;

AUX MOTIFS QUE M. J... T... a déposé au greffe du tribunal mixte de commerce de Nouméa le 12 septembre 2016, une déclaration tendant à le recevoir en sa tierce opposition à l'encontre du jugement du 11 juillet 2016 ordonnant la cession des actifs et la liquidation de la SARL [...] ; que l'article 582 du code de procédure civile dispose que :

« la tierce opposition tend à faire rétracter ou réformer un jugement au profit du tiers qui l'attaque. Elle remet en question relativement à son auteur les points jugés qu'elle critique, pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit » ;

qu'en l'espèce il y a lieu d'examiner la tierce opposition à la lumière des articles applicables en matière de procédure collective ; que l'article L. 661-6 du code de commerce dans sa version applicable au territoire de la Nouvelle Calédonie dispose :

« III – Ne sont susceptibles que d'un appel de la part soit du débiteur, soit du ministère public, soit du cessionnaire ou du cocontractant mentionné à l'article L. 642-7 les jugements qui arrêtent ou rejettent le plan de cession de l'entreprise » ;

que l'article L. 661-7 alinéa 1er du même code précise que :

« Il ne peut être exercé de tierce opposition ou de recours en cassation ni contre les jugements mentionnés à l'article L. 661-6, ni contre les arrêts rendus en application des I et II du même article » ;

qu'il résulte clairement de ces deux articles que les jugements arrêtant un plan de cession sont insusceptibles de tierce opposition de la part de toute personne n'étant ni débiteur, ni cessionnaire ou cocontractant ; qu'en l'espèce, M. J... T... n'est ni débiteur, ni cessionnaire ou co-contractant ; qu'il agit selon les termes de sa tierce opposition en qualité de membre de l'indivision successorale des consorts T... ; qu'en conséquence, à ce titre J... T... doit être déclaré irrecevable en sa tierce opposition à l'encontre du jugement en date du 11 juillet 2016 arrêtant le plan de cession de la SARL [...] ; que le premier juge dans son jugement du 28 octobre 2016, a pourtant considéré que la tierce opposition de M. J... T... était recevable en ce que le jugement à l'encontre duquel il avait exercé cette voie de recours ne se bornait pas à autoriser un plan de cession, mais avait subséquemment prononcé la liquidation judiciaire de la société [...] ;

qu'il doit toutefois être rappelé que selon les dispositions de l'article L. 661-2 du code de commerce, sont susceptibles de tierce opposition, « les décisions mentionnées au 1° à 5° du I de l'article L. 661-1, à l'exception du 4° » ;

qu'il doit être constaté que le 5° de l'article L. 661-1 du code de commerce n'évoque que « les décisions statuant sur le prononcé de la liquidation judiciaire
» ; qu'aucune des décisions mentionnées au 1° à 5° du I de l'article L. 661-1 ne prévoit l'hypothèse d'une décision de conversion de redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; qu'en outre il y a lieu de rappeler les termes de l'article 583 du code de procédure civile qui prévoient :

« Est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a un intérêt à la condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque » ;

qu'il n'est pas inintéressant de relever que J... T... souligne dans ses propres écritures qu'il « n'est pas un tiers mais un coindivisaire à qui le droit d'agir dans le cadre de la présente procédure a été reconnu » ; que le jugement est donc infirmé ;

1°- ALORS QUE sont susceptibles de tierce opposition, les jugements de conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; qu'en déclarant irrecevable la tierce opposition de M. J... T... contre le jugement du 11 juillet 2016 ayant prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire de la SARL [...] en liquidation judiciaire, la Cour d'appel a violé les articles L. 661-2 et L. 661-1 I 5° dans leur version applicable au territoire de la Nouvelle Calédonie ;

2°- ALORS QUE s'il ne peut être exercé de tierce opposition contre un jugement qui arrête le plan de cession d'une entreprise en redressement judiciaire, il est dérogé à cette règle en cas d'excès de pouvoir ; qu'en l'espèce, M. J... T... invoquait la nullité du jugement ayant arrêté le plan de cession de la société [...] pour excès de pouvoir en ce qu'il a entériné la cession d'un fonds de commerce avec un droit au bail inexistant sur un immeuble qui est sa propriété indivise ; qu'en déclarant M. J... T... irrecevable en sa tierce opposition en ce que le jugement a arrêté le plan de cession de la société [...] sans s'expliquer sur l'excès de pouvoir invoqué, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 661-7 dans sa version applicable au territoire de la Nouvelle Calédonie et des principes régissant l' excès de pouvoir ;

3°- ALORS QUE le tiers qui est recevable à former tierce opposition est celui qui n'a été ni partie ni représenté au jugement qu'il attaque ; qu'en se fondant pour exclure la recevabilité de la tierce opposition de M. J... T... sur sa déclaration selon laquelle il n'est pas un tiers mais un coindivisaire à qui le droit d'agir dans le cadre de la présente procédure a été reconnu, quand il ne résulte pas de cette déclaration que M. J... T... coindivisaire du gérant du débiteur, était partie ou représenté au jugement du 11 juillet 2016, la Cour d'appel a violé l'article 583 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie ;

4°- ALORS de surcroit QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut soulever d'office un moyen sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, les défendeurs à la tierce opposition ne prétendaient pas que M. J... T... serait irrecevable en sa tierce opposition pour avoir été prétendument partie ou représenté au jugement attaqué ; qu'en soulevant ce moyen d'office sans inviter les parties à présenter leurs observations, la Cour d'appel a violé le principe de la contradiction et l'article 16 du code de procédure civile de la Nouvelle Calédonie.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-25699
Date de la décision : 23/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nouméa, 06 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 sep. 2020, pourvoi n°18-25699


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Colin-Stoclet, SCP Lesourd, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.25699
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