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09/09/2020 | FRANCE | N°19-12797

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 septembre 2020, 19-12797


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 634 F-D

Pourvoi n° C 19-12.797

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 SEPTEMBRE 2020

La société Relais FNAC, société par actions sim

plifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° C 19-12.797 contre l'arrêt rendu le 21 décembre 2018 par la cour d'appel de...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 634 F-D

Pourvoi n° C 19-12.797

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 SEPTEMBRE 2020

La société Relais FNAC, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° C 19-12.797 contre l'arrêt rendu le 21 décembre 2018 par la cour d'appel de Douai (14e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. S... W..., domicilié [...] ,

2°/ à Mme Y... L..., domiciliée [...] ,

3°/ à Mme H... V..., domiciliée [...] ,

4°/ à Mme D... M..., domiciliée [...] ,

5°/ à Mme G... R..., domiciliée [...] ,

6°/ à Mme Q... F..., domiciliée [...] ,

7°/ à M. B... T..., domicilié [...] ,

8°/ à M. A... O..., domicilié [...] ,

9°/ à Mme B... X..., domiciliée [...] ,

10°/ à M. C... E..., domicilié [...] ,

11°/ à Mme K... I..., domiciliée [...] ,

12°/ à Mme J... P..., domiciliée [...] ,

13°/ à Mme N... U..., domiciliée [...] ,

14°/ à Mme CJ... SO... TF..., domiciliée [...] ,

15°/ à Mme XQ... NO..., domiciliée [...] ,

16°/ à Mme X... EY..., domiciliée [...] ,

17°/ à M. RZ... UG..., domicilié [...] ,

18°/ à M. NF... NN..., domicilié [...] ,

19°/ à Mme AW... VI..., domiciliée [...] ,

20°/ à Mme UB... QQ..., domiciliée [...] ,

21°/ à Mme SO... WM..., domiciliée [...] ,

22°/ à Mme AW... RC..., domiciliée [...] ,

23°/ à M. B... LR..., domicilié [...] ,

24°/ à M. HH... GC..., domicilié [...] ,

25°/ à Mme PB... LG..., domiciliée [...] ,

26°/ à Mme KC... TP..., domiciliée [...] ,

27°/ à M. YY... BD..., domicilié [...] ,

28°/ à M. GT... FD..., domicilié [...] ,

29°/ à Mme MR... WF..., domiciliée [...] ,

30°/ à Mme XF... MP..., domiciliée [...] ,

31°/ à Mme VK... UI..., domiciliée [...] ,

32°/ à Mme MT... PF..., domiciliée [...] ,

33°/ à M. NF... UP..., domicilié [...] ,

34°/ à M. KM... KD..., domicilié [...] ,

35°/ à M. C... HX..., domicilié [...] ,

36°/ à M. H... II..., domicilié [...] ,

37°/ à M. OT... AL..., domicilié [...] ,

38°/ à M. RW... VC..., domicilié [...] ,

39°/ à Mme JA... XZ..., domiciliée [...] ,

40°/ à M. KM... QW..., domicilié [...] ,

41°/ à Mme KN... HR..., domiciliée [...] ,

42°/ à Mme SR... HM..., domiciliée [...] ,

43°/ à M. FY... FV..., domicilié [...] ,

44°/ à M. KM... RM..., domicilié [...] ,

45°/ à Mme YF... MH..., domiciliée [...] ,

46°/ à Mme X... EX..., domiciliée [...] ,

47°/ à Mme N... DS..., domiciliée [...] ,

48°/ à Mme Z... VX..., domiciliée [...] ,

49°/ à M. RH... DS..., domicilié [...] ,

50°/ à M. EP... RM..., domicilié [...] ,

51°/ à M. Q... UH..., domicilié [...] ,

52°/ à Mme KN... RA..., domiciliée [...] ,

53°/ à M. RH... EC..., domicilié [...] ,

54°/ à Mme Q... VU..., domiciliée [...] ,

55°/ à M. KM... B... KD..., domicilié [...] ,

56°/ à M. VY... MF..., domicilié [...] ,

57°/ à M. BE... WO..., domicilié [...] ,

58°/ à Mme TN... OP..., domiciliée [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la société Relais FNAC, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. W..., T..., O..., E..., UG..., NN..., LR..., GC..., BD..., FD..., UP..., KD..., HX..., II..., AL..., VC..., QW..., FV..., RM..., DS..., RM..., UH..., EC..., KD..., MF..., WO..., de Mmes L..., V..., M..., R..., F..., X..., I..., P..., U..., TF..., NO..., EY..., VI..., QQ..., WM..., RC..., LG..., TP..., WF..., MP..., UI..., PF..., XZ..., HR..., HM..., MH..., EX..., DS..., VX..., RA..., VU... et OP..., après débats en l'audience publique du 4 juin 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire rapporteur, M. Joly, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application des articles R. 431-7 et L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 21 décembre 2018), le 22 juin 1999, la société Relais FNAC a signé avec les organisations syndicales représentatives CFDT, CFTC, CGT et CFE-CGC, un accord d'intéressement applicable dans ses établissements dont celui de Lille, pour une durée de trois exercices sociaux, à savoir du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2001. M. W... et cinquante-sept autres salariés ou anciens salariés de cet établissement ont saisi, le 2 mai 2013, le tribunal de grande instance pour obtenir paiement d'un rappel de primes d'intéressement pour les années 2000 et 2001.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La société fait grief à l'arrêt de déclarer recevables les demandes des salariés et anciens salariés, alors :

« 1°/ que, d'une part, la clause stipulée à l'article 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 aux termes de laquelle « les différends qui pourraient survenir dans l'application de l'accord se régleront si possible à l'amiable, après avis de la commission d'intéressement et qu'à défaut, le différend serait exposé au directeur départemental du travail et de l'emploi et pourrait être porté en ultime recours devant la juridiction compétente » institue une procédure de conciliation obligatoire préalable à toute action en justice, dont la méconnaissance constitue une fin de non-recevoir ; qu'en l'espèce, en énonçant que cette clause n'a pas de caractère obligatoire, mais correspond à un processus dont la mise en oeuvre est considérée comme souhaitable, de sorte que l'absence de saisine préalable de la commission d'intéressement ne peut constituer une cause d'irrecevabilité de l'action en justice, la cour d'appel a violé l'article 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999, précité, ensemble l'article 122 du code de procédure civile ;

2°/ que, d'autre part, l'article 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 stipule que « les différends qui pourraient survenir dans l'application de l'accord se régleront si possible à l'amiable, après avis de la commission d'intéressement », elle-même instituée par son article 9, avec « pour rôle de suivre l'application des dispositions » dudit accord ; qu'en l'espèce, en énonçant que la société Relais FNAC ne pouvait se prévaloir de l'absence de saisine préalable, par les salariés, de cette commission, qui « n'a manifestement jamais été instituée et ne s'est jamais réunie », tandis qu'il est constant que non seulement les stipulations susmentionnées avaient prévu sa création mais que, de surcroît, elle avait été sollicitée pour un accord suivant, la cour d'appel a violé les articles 9 et 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999, précités ;

3°/ qu'enfin, l'intéressement institué par l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 étant calculé au niveau de chaque magasin, la saisine du DDTE, envisagée par son article 10, ne peut être satisfaisante que pour le différend relatif à l'établissement concerné ; qu'en l'espèce, en jugeant satisfaisante, pour les salariés de l'établissement de Lille, une saisine du DDTE de Nanterre par un délégué syndical central CGT, la cour d'appel a violé ce texte. »

Réponse de la Cour

3. Aux termes de l'article 10 de l'accord du 22 juin 1999, les différends qui pourraient survenir dans l'application de l'accord se régleront si possible à l'amiable, après avis de la commission de l'intéressement. A défaut, le différend serait exposé au directeur départemental du travail et de l'emploi et pourrait être porté en ultime recours devant la juridiction compétente. Pendant cette période, l'application de l'accord se poursuit conformément aux règles qu'il énonce.

4. Ayant retenu exactement que cette clause ne prévoit ni n'énonce expressément qu'en cas de différend portant sur l'application ou l'interprétation de l'accord collectif litigieux, la mise en oeuvre de la procédure de conciliation constitue un préalable obligatoire à toute action contentieuse, la cour d'appel a à bon droit écarté la fin de non recevoir tirée du non respect de la procédure préalable de conciliation.

5. Le moyen qui s'attaque à des motifs surabondants en ses deuxième et troisième branches n'est donc pas fondé pour le surplus.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La société fait grief à l'arrêt de dire que la charge des frais de logistique ne peut être prise en compte dans le calcul du résultat opérationnel sous la forme d'une déduction d'une redevance fixée en pourcentage par la société Relais FNAC sur le chiffre d'affaires du magasin de Lille et que l'activité logistique servie par la société FNAC logistique constitue une charge logistique d'exploitation de l'activité normale de la société Relais FNAC et doit être prise en compte sur la base des coûts logistiques réels pour le calcul du résultat opérationnel servant de base au calcul de la prime d'intéressement, alors :

« 1°/ que, d'une part, l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 est, par définition, postérieur à la mise en place, le 1er juin 1999, de la nouvelle organisation logistique et de la prise en compte de la charge logistique sous la forme d'une redevance ; qu'en l'espèce, en considérant, toutefois, que cette redevance était une charge nouvelle, par rapport au calcul de la charge logistique en coûts réels, de sorte que sa prise en compte au titre du calcul de l'intéressement ne pouvait être décidée que par voie d'avenant, la cour d'appel, qui a donc méconnu la chronologie des éléments mis en place et des accords conclus, a violé l'article 4 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999, précité ;

2°/ que, d'autre part, fixés en début d'année, le taux de redevance et le chiffre d'affaires net marchandises budgeté pour le magasin auquel s'appliquait le taux de redevance n'étaient plus modifiés, ce taux ayant été fixé de façon à faire supporter à l'ensemble des magasins les coûts logistiques afférents à leur activité, de sorte que la société Relais FNAC n'était donc pas en mesure de faire varier le montant de l'intéressement en fonction des résultats réels du magasin, que ce soit en cours ou en fin d'année ; que, dès lors, en l'espèce, en énonçant qu'en déduisant la « redevance Massy » du calcul du résultat opérationnel, la société Relais FNAC appliquait une redevance forfaitaire fixée par ses soins dont elle pouvait à son gré faire varier le montant, la cour d'appel, qui a ainsi ignoré le caractère intrinsèquement aléatoire de ce mode de calcul, a violé l'article 4 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999. »

Réponse de la Cour

7. En application de l'article 3 de l'accord du 22 juin 1999, l'intéressement ne dépend pas d'une décision des parties signataires, mais résulte uniquement des règles de calcul définies par l'accord. Selon l'article 4, l'intéressement est calculé à partir de deux indicateurs combinés :
- Le taux de résultat opérationnel de chaque établissement exprimé en pourcentage du chiffre d'affaires total. Le « RO » est égal au résultat d'exploitation hors loyers des immeubles, frais de siège, plan d'intéressement, coûts des éléments non récurrents et reprise des provisions pour risques d'immobilisations + plus ou moins-values sur immobilisations corporelles + destructions d'immobilisations.
- La variation du taux de résultat opérationnel de chaque établissement par rapport à l'exercice de douze mois précédents.
D'un exercice sur l'autre, les méthodes de comptabilisation doivent être identiques ou permettre une appréciation cohérente des indicateurs.

8. La cour d'appel a constaté que si, jusqu'au milieu de l'année 1999, les frais d'approvisionnement du magasin correspondaient au coût réel de l'action logistique tel qu'il était facturé par les prestataires de services extérieurs au groupe, postérieurement à cette période les frais logistiques déduits du résultat opérationnel et donc du montant de l'intéressement ont été fixés sans considération du coût réel des frais d'approvisionnement par l'effet d'une décision unilatérale de la société Relais Fnac, en pourcentage du chiffre d'affaires du magasin. Elle a exactement déduit de ces constatations qu'en modifiant pendant le cours de l'exécution de l'accord applicable dès le 1er janvier 1999, les modalités de calcul des frais logistiques, sans les faire accepter par l'ensemble des parties signataires sous la forme d'un avenant, et en déduisant du résultat opérationnel une redevance forfaitaire fixée par ses soins dont elle pouvait à son gré faire varier le montant d'un exercice à l'autre, la société Relais FNAC a méconnu les obligations qui lui étaient faites par l'accord du 22 juin 1999.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Relais FNAC aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Relais FNAC .

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Relais FNAC.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevables les demandes des salariés et anciens salariés de la société RELAIS FNAC ;

Aux motifs que : « Sur la fin de non-recevoir tirée du non-respect de la procédure de conciliation

La clause d'une convention instituant une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.

En l'espèce, la société Relais Fnac soutient que les salariés ne se sont pas soumis aux dispositions de l'article 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 qui institue une procédure amiable pour le règlement des différends pouvant survenir dans l'application de cet accord, préalable à la saisine des juridictions.

L'article 10 de l'accord d'intéressement sur lequel porte le litige dispose que « les différends qui pourraient survenir dans l'application de l'accord se règleront si possible à l'amiable, après avis de la commission d'intéressement. À défaut, le différend serait exposé au directeur départemental du travail et de l'emploi et pourrait être porté en ultime recours devant la juridiction compétente. Pendant cette période, l'application de l'accord se poursuit conformément aux règles qu'il énonce ».

Il résulte que cette clause écrite pour l'essentiel au conditionnel ne prévoit ni n'énonce expressément qu'en cas de différend portant sur l'application ou l'interprétation de l'accord collectif litigieux, la mise en oeuvre de la procédure de conciliation constitue un préalable obligatoire pour les parties signataires de l'accord, à toute action contentieuse.

Sauf à retirer aux mots le sens qu'ils comportent, l'utilisation de l'expression « si possible » a pour conséquence que le préalable de règlement du différend à l'amiable après avis de la commission d'intéressement n'a pas de caractère obligatoire mais correspond à un processus dont la mise en oeuvre est considérée comme souhaitable.

En conséquence, l'absence de saisine préalable de la commission d'intéressement ne peut constituer une cause d'irrecevabilité de l'action en justice.

Au surplus, il convient de relever que la société Relais Fnac ne peut se prévaloir d'une absence de saisine de la commission d'intéressement, alors que cette commission dont la composition est prévue par l'article 9 de l'accord litigieux, n'a manifestement jamais été instituée et ne s'est jamais réunie.

L'adresse de la commission n'est pas connue des salariés ou des organisations syndicales, le lieu de saisine de la Commission n'est pas précisé, les membres composant la commission n'ont manifestement pas été désignés et sont inconnus aux termes de cet accord ou aux termes de son annexe.

En outre, il résulte des pièces produites que les salariés ont exposé le différend au directeur départemental du travail et de l'emploi. M. RL..., délégué syndical central CGT, s'est en effet adressé en juin 2001, au directeur départemental du travail et de l'emploi de Nanterre pour contester les modalités de calcul de l'intéressement de la société Fnac pour l'année 2000.

Dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont retenu l'exception d'irrecevabilité soulevée par la société Relais Fnac pour absence du préalable de règlement amiable. Le jugement sera infirmé de ce chef » ;

1. Alors que, d'une part, la clause stipulée à l'article 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 aux termes de laquelle « les différends qui pourraient survenir dans l'application de l'accord se règleront si possible à l'amiable, après avis de la commission d'intéressement [et qu']à défaut, le différend serait exposé au directeur départemental du travail et de l'emploi et pourrait être porté en ultime recours devant la juridiction compétente » institue une procédure de conciliation obligatoire préalable à toute action en justice, dont la méconnaissance constitue une fin de non-recevoir ; qu'en l'espèce, en énonçant que cette clause n'a pas de caractère obligatoire, mais correspond à un processus dont la mise en oeuvre est considérée comme souhaitable, de sorte que l'absence de saisine préalable de la commission d'intéressement ne peut constituer une cause d'irrecevabilité de l'action en justice, la cour d'appel a violé l'article 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999, précité, ensemble l'article 122 du Code de procédure civile ;

2. Alors que, d'autre part, l'article 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 stipule que « les différends qui pourraient survenir dans l'application de l'accord se règleront si possible à l'amiable, après avis de la commission d'intéressement », elle-même instituée par son article 9, avec « pour rôle de suivre l'application des dispositions » dudit accord ; qu'en l'espèce, en énonçant que la société RELAIS FNAC ne pouvait se prévaloir de l'absence de saisine préalable, par les salariés, de cette commission, qui « n'a manifestement jamais été instituée et ne s'est jamais réunie », tandis qu'il est constant que non seulement les stipulations susmentionnées avaient prévu sa création mais que, de surcroît, elle avait été sollicitée pour un accord suivant, la cour d'appel a violé les articles 9 et 10 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999, précités ;

3. Alors qu'enfin, l'intéressement institué par l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 étant calculé au niveau de chaque magasin, la saisine du DDTE, envisagée par son article 10, ne peut être satisfaisante que pour le différend relatif à l'établissement concerné ; qu'en l'espèce, en jugeant satisfaisante, pour les salariés de l'établissement de Lille, une saisine du DDTE de Nanterre par un délégué syndical central CGT, la cour d'appel a violé ce texte.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(à titre subsidiaire)

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la charge des frais de logistique ne peut être prise en compte dans le calcul du résultat opérationnel sous la forme d'une déduction d'une redevance fixée en pourcentage par la société RELAIS FNAC sur le chiffre d'affaires du magasin de Lille et d'avoir dit que l'activité logistique servie par la société FNAC LOGISTIQUE constitue une charge logistique d'exploitation de l'activité normale de la société RELAIS FNAC et doit être prise en compte sur la base des coûts logistiques réels pour le calcul du résultat opérationnel servant de base au calcul de la prime d'intéressement ;

Aux motifs que : « Le bien fondé des demandes :

L'accord d'intéressement conclu le 22 juin 1999 prévoit en son article 4 que le calcul de l'intéressement se fonde sur deux indicateurs combinés :

- le taux de résultat opérationnel de chaque établissement exprimé en pourcentage du chiffre d'affaires total. Le résultat opérationnel est égal au résultat d'exploitation hors loyers des immeubles, frais de siège, plan d'intéressement, coûts des éléments non récurrents et reprise des provisions pour risques d'immobilisations + plus et moins-values sur immobilisations corporelles + destructions d'immobilisation

- la variation du taux de résultat opérationnel de chaque établissement par rapport à l'exercice de douze mois précédents.

Le même article ajoute : « D'un exercice sur l'autre, les méthodes de comptabilisation doivent être identiques pour permettre une appréciation cohérente des indicateurs ».

Enfin, il est précisé à l'article 3 de l'accord que : « L'intéressement ne dépend pas d'une décision des parties signataires, il résulte uniquement des règles de calcul définies dans l'accord ».

Jusqu'au milieu de l'année 1999, les frais d'approvisionnement des établissements Fnac étaient supportés par chacun d'eux au coût réel au vu des facturations adressées par des prestataires extérieurs au groupe.

A compter du second semestre de l'année 1999, une organisation logistique centralisée a été mise en place au travers d'une entité spécialisée, la société Fnac Logistique. La facturation des frais d'approvisionnement a alors été établie par cette dernière non pas au coût réel, mais sous la forme d'une redevance calculée en pourcentage du chiffre d'affaires de chaque magasin.

Selon les indications fournies par les parties, cette facturation s'est élevée à 0,7 % du chiffre d'affaires marchandises magasins en 1999. Elle a alors été neutralisée pour l'année en question pour le calcul du résultat opérationnel et de l'intéressement. Pour l'année 2000, la redevance a été fixée à 1,1 % du chiffre d'affaires puis pour l'année 2001 à 1,2 %. Pour ces deux années, la redevance a été déduite du montant du résultat opérationnel.

Il apparaît ainsi que, alors que jusqu'au milieu de l'année 1999, les frais d'approvisionnement du magasin correspondaient au coût réel de l'action logistique tel qu'il était facturé par les prestataires de services, postérieurement à cette période les frais logistiques déduits du résultat opérationnel et donc du montant de l'intéressement ont été fixés sans considération du coût réel des frais d'approvisionnement par l'effet d'une décision unilatérale de la société Relais Fnac, en pourcentage du chiffre d'affaires du magasin.

En modifiant ainsi pendant le cours de l'exécution de l'accord litigieux les modalités de calcul des frais logistiques, sans les faire accepter par l'ensemble des parties signataires sous la forme d'un avenant, et en déduisant du résultat opérationnel une redevance forfaitaire fixée par ses soins dont elle pouvait à son gré faire varier le montant, la société Relais Fnac a méconnu les obligations qui lui étaient faites par l'accord du 22 juin 1999, qui interdisaient de faire dépendre l'intéressement d'une décision des parties signataires.

Dans ces conditions, l'action engagée par les salariés est fondée en son principe. Le jugement sera donc infirmé.

Sur les modalités de calculs des rappels de prime d'intéressement :

Les salariés considèrent que la redevance au titre des frais logistiques n'entrant pas dans les prévisions de l'accord d'intéressement, il y a lieu de neutraliser cette redevance déduite de façon irrégulière et produisent un tableau de leurs demandes financières, selon la méthode retenue pour l'année 1999.

La société Relais Fnac critique cette neutralisation aux motifs qu'il convient, selon elle, de revenir aux dispositions initiales de l'accord et de déduire le coût réel des frais logistiques. Elle détaille ce coût réel au regard des frais de personnel, des frais généraux et des frais financiers et de sa filiale Fnac Logistique et fait valoir que la facturation des frais réels de logistique aurait été supérieure à la redevance forfaitaire critiquée par les salariés, en produisant un décompte et un tableau reprenant pour chacun des salariés les sommes dues au titre de l'intéressement.

Contrairement à ce que soutiennent les salariés, l'activité logistique servie par la société Fnac Logistique constitue une charge logistique d'exploitation de l'activité normale de la société Relais Fnac et doit donc être prise en compte pour le calcul du résultat opérationnel servant de base au calcul de la prime d'intéressement » ;

1. Alors que, d'une part, l'accord d'intéressement du 22 juin 1999 est, par définition, postérieur à la mise en place, le 1er juin 1999, de la nouvelle organisation logistique et de la prise en compte de la charge logistique sous la forme d'une redevance ; qu'en l'espèce, en considérant, toutefois, que cette redevance était une charge nouvelle, par rapport au calcul de la charge logistique en coûts réels, de sorte que sa prise en compte au titre du calcul de l'intéressement ne pouvait être décidée que par voie d'avenant, la cour d'appel, qui a donc méconnu la chronologie des éléments mis en place et des accords conclus, a violé l'article 4 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999, précité ;

2. Alors que, d'autre part, fixés en début d'année, le taux de redevance et le chiffre d'affaires net marchandises budgeté pour le magasin auquel s'appliquait le taux de redevance n'étaient plus modifiés, ce taux ayant été fixé de façon à faire supporter à l'ensemble des magasins les coûts logistiques afférents à leur activité, de sorte que la société RELAIS FNAC n'était donc pas en mesure de faire varier le montant de l'intéressement en fonction des résultats réels du magasin, que ce soit en cours ou en fin d'année ; que, dès lors, en l'espèce, en énonçant qu'en déduisant la « redevance Massy » du calcul du résultat opérationnel, la société RELAIS FNAC appliquait une redevance forfaitaire fixée par ses soins dont elle pouvait à son gré faire varier le montant, la cour d'appel, qui a ainsi ignoré le caractère intrinsèquement aléatoire de ce mode de calcul, a violé l'article 4 de l'accord d'intéressement du 22 juin 1999.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-12797
Date de la décision : 09/09/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 21 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 sep. 2020, pourvoi n°19-12797


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12797
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