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08/09/2020 | FRANCE | N°19-84983

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 septembre 2020, 19-84983


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 19-84.983 FS-P+B+I

N° 1490

CK
8 SEPTEMBRE 2020

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 SEPTEMBRE 2020

REJET du pourvoi formé par la société Assurances du Crédit mutuel, partie intervenante, contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en da

te du 22 février 2019, qui, dans la procédure suivie contre Mme C... T... des chefs d'homicide involontaire, a prononcé sur le...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° R 19-84.983 FS-P+B+I

N° 1490

CK
8 SEPTEMBRE 2020

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 8 SEPTEMBRE 2020

REJET du pourvoi formé par la société Assurances du Crédit mutuel, partie intervenante, contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 22 février 2019, qui, dans la procédure suivie contre Mme C... T... des chefs d'homicide involontaire, a prononcé sur les intérêts civils.

Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.

Sur le rapport de Mme Goanvic, conseiller, les observations de la SCP Gaschignard, avocat de la société Assurances du Crédit mutuel, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat du Fonds de garantie des assurances obligatoires, les observations de la SARL Cabinet Coutaud et Munier-Apaire, avocats de MM. J... U..., W... U..., Mmes N... E..., R... V..., L... O... et les conclusions de Mme Le Dimna, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 juin 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Goanvic, conseiller rapporteur, M. Pers, Mmes Schneider, Ingall-Montagnier, MM. Bellenger, Lavielle, Samuel, conseillers de la chambre, Mmes Chauchis, Méano, M. Leblanc, conseillers référendaires, Mme Le Dimna, avocat général, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 13 novembre 2014, est survenu un accident de la circulation entre un véhicule conduit par Mme T..., assurée par la société Assurance du Crédit mutuel, et un motocycliste, H... U..., qui est décédé des suites de ses blessures.

3. Par jugement du 9 septembre 2016, le tribunal correctionnel, statuant sur les intérêts civils, a déclaré irrecevable l'exception de nullité pour réticence ou fausse déclaration du contrat d'assurance présentée par la société Assurances du Crédit mutuel et a jugé que l'assureur devrait garantir Mme T..., déclarée responsable des préjudices subis par les parties civiles et condamnée à leur payer diverses sommes.

4. La société Assurance du Crédit mutuel a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable l'exception de nullité du contrat d'assurance présentée par la société Assurances du Crédit mutuel et ordonné la mise hors de cause du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages alors « que le principe selon lequel la nullité du contrat d'assurance pour fausse déclaration intentionnelle est opposable à tout bénéficiaire de la garantie de l'assureur n'est pas contraire aux articles 3 et 13 de la directive n° 2009/103/CE du 16 septembre 2009 concernant l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l'obligation d'assurer cette responsabilité ; qu'en jugeant néanmoins que la nullité pour fausse déclaration intentionnelle du contrat d'assurance souscrit par Mme T... était inopposable aux ayants droit de M. U..., la cour d'appel a violé les articles L. 113-8, R. 211-13 du code des assurances et 385-1 du code de procédure pénale tels qu'interprétés à la lumière de la directive susvisée. »

Réponse de la Cour

6. Pour déclarer irrecevable l'exception de nullité du contrat d'assurance et mettre hors de cause le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO), l'arrêt retient notamment que, ne figurant pas à la liste des exceptions et déchéances inopposables aux tiers, prévues par l'article R. 211-3 du code des assurances, l'exception de nullité fondée sur la fausse déclaration intentionnelle de l'assuré en application de l'article L. 113-8 du code des assurances est opposable aux victimes. Pour autant, une telle exception n'est recevable que si elle est de nature à exonérer totalement l'assureur de toute obligation.

7. Puis, il énonce, que par arrêt du 20 juillet 2017, C-287/16, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que « L'article 3, paragraphe 1, de la directive 72/166/CEE du Conseil, du 24 avril 1972, concernant le rapprochement des législations des états membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs, et au contrôle de l'obligation d'assurer cette responsabilité, et l'article 2, paragraphe 1, de la deuxième directive 84/5/CEE du Conseil, du 30 décembre 1983, concernant le rapprochement des législations des états membres relatives à l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation des véhicules automoteurs, doivent être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale qui aurait pour effet que soit opposable aux tiers victimes, dans des circonstances telles que celles de l'affaire au principal, la nullité d'un contrat d'assurance de responsabilité civile automobile résultant de fausses déclarations initiales du preneur d'assurance en ce qui concerne l'identité du propriétaire et du conducteur habituel du véhicule concerné ou de la circonstance que la personne pour laquelle ou au nom de laquelle ce contrat d'assurance est conclu n'avait pas d'intérêt économique a la conclusion dudit contrat ».

8. Les juges ajoutent que les directives visent à assurer une indemnisation rapide des victimes d'accidents corporels par l'assureur du responsable, sans que puissent leur être opposées les nullités fondées sur les rapports existant entre l'assureur et l'assuré susceptibles de retarder leur indemnisation et qu'au regard de l'arrêt du 20 juillet 2017 de la Cour de justice de l'Union européenne, le droit communautaire prime sur le droit national telles les dispositions de l'article R. 211-3 du code des assurances.

9. En statuant par ces seuls motifs, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions visées au moyen.

10. Elle a, à bon droit, interprété les articles L. 113-8 et R. 211-3 du code des assurances au regard des finalités et de la portée générale des dispositions du droit de l'Union européenne telles que précisées par l'arrêt du 20 juillet 2017, Fidelidade, (C 287-16) de la Cour de justice de l'Union européenne et codifiées par la directive du Parlement et du Conseil n° 2009/103/CE du 16 septembre 2009 concernant l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l'obligation d'assurer cette responsabilité.

11. Au demeurant, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a tiré les mêmes conséquences des dispositions du droit de l'Union européenne (2e Civ., 29 août 2019, pourvoi n° 18-14.768 et 2e Civ., 16 janvier 2020, pourvoi n° 18-23.381, en cours de publication).

12. Dès lors, le moyen n'est pas fondé.

13. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme globale que la société Assurances du Crédit mutuel devra payer aux parties civiles, en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

DIT n'y avoir lieu à application des autres demandes au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit septembre deux mille vingt.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ASSURANCE - Assureur appelé en garantie - Juridictions pénales - Compétence - Contrat - Exception de nullité ou de non-garantie - Accident de la circulation - Inopposabilité aux victimes - Effets

En application de la directive du n° 2009/103/CE du 16 septembre 2009, concernant l'assurance de la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l'obligation d'assurer cette responsabilité, codifiant des dispositions du droit de l'Union européenne précisées par l'arrêt du 20 juillet 2017, Fidelidade (C287-16) de la CJUE, la nullité du contrat d'assurance édictée par l'article L. 113-8 du code des assurances n'est pas opposable aux victimes et le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) ne peut, dans ce cas, être appelé à les indemniser de leurs dommages matériels. Justifie sa décision la cour d'appel qui déclare irrecevable l'exception de nullité du contrat d'assurance et met hors de cause le FGAO, en écartant les dispositions de droit national contraires au droit de l'Union européenne


Références :

Articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de l'action sociale et des familles.

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 22 février 2019

A rapprocher : 2e Civ., 16 janvier 2020, pourvoi n° 18-23381, Bull., (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation: Cass. Crim., 08 sep. 2020, pourvoi n°19-84983, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle
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Composition du Tribunal
Président : M. Soulard
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Delvolvé et Trichet, SARL Cabinet Munier-Apaire

Origine de la décision
Formation : Chambre criminelle
Date de la décision : 08/09/2020
Date de l'import : 21/12/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19-84983
Numéro NOR : JURITEXT000042348637 ?
Numéro d'affaire : 19-84983
Numéro de décision : C2001490
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2020-09-08;19.84983 ?
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