LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° D 19-81.936 F-D
N° 1425
EB2
2 SEPTEMBRE 2020
DECHEANCE
CASSATION PARTIELLE
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 SEPTEMBRE 2020
MM. T... S..., C... Q... , P... K..., B... I... et A... X... ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry, chambre correctionnelle, en date du 13 février 2019, qui, pour menace pour déterminer une victime à se rétracter, complicité du même délit et association de malfaiteurs, les a condamnés, le premier à trois ans d'emprisonnement, le deuxième à trente mois d'emprisonnement, les troisième et quatrième à deux ans d'emprisonnement, le cinquième à deux ans d'emprisonnement dont dix huit mois avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits, en demande pour MM. S... et Q... , et en défense pour M. E... D... V... et Mme O... H... son épouse.
Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. T... S..., les observations de Me Occhipinti, avocat de Mme O... H... D... R... et M. E... D... V... , parties civiles, et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 juin 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 10 octobre 2016 M. D... V... , arrivé sur les lieux d'un cambriolage, a été mis en joue avec une arme à feu. Il a précisé qu'alors qu'il venait chercher son véhicule professionnel garé à proximité d'un magasin cambriolé, il avait été agressé par un individu qui lui avait ordonné de se mettre à terre et de lui remettre ses téléphones portables.
3. L'information immédiatement ouverte a conduit à l'interpellation de M. S..., puis de M. Q... , lesquels ont été placés en détention provisoire. La surveillance d'une ligne téléphonique a permis l'interception d'une conversation du 20 novembre 2016 aux termes de laquelle il est apparu que MM. S..., Q... et K... étaient convenus de se rendre au domicile de M. D... V... afin de l'inciter à revenir sur les déclarations que ce dernier avait faites aux enquêteurs.
4. Un dispositif de surveillance a été mis en place, les parties civiles étant tenues informées. Le 21 novembre 2016, MM. Q... , K... et X... ont été vus dans un véhicule qui s'est garé à proximité de la résidence de M. D... V... .
5. M. K... a été interpellé dans l'entrée de l'immeuble où habite M. D... V... . MM. Q... et X..., restés dans la voiture, ont également été appréhendés.
6. MM. S..., Q... , K..., X... et I... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel, selon les préventions susvisées, lequel a prononcé leur relaxe.
7. Le ministère public et les parties civiles ont relevé appel de cette décision.
Déchéance des pourvois formés par MM. K..., I... et X...
8. Ils n'ont pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par leur avocat, un mémoire exposant leurs moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de les déclarer déchus de leurs pourvois par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen présenté par M. S...
9. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur les premiers moyens présentés par MM. S... et Q...
Enoncés des moyens
10. Le moyen présenté pour M. S... critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déclaré coupable du délit de complicité de menace ou d'acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter, alors :
« 1°/ que, selon M. S..., la complicité n'est caractérisée qu'autant qu'il y a un fait principal punissable dont l'existence est établie dans tous ses éléments constitutifs ; que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article 434-5 du code pénal incrimine toute menace ou tout autre acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter ; que la tentative de ce délit n'est pas punissable ; que l'acte d'intimidation est un acte inspirant la crainte d'un mal à la victime ; que le fait de se tenir physiquement devant ou à proximité du domicile d'une personne suppose, pour inspirer la crainte d'un mal à celle-ci, soit un contact direct entre l'auteur et la victime soit la délivrance volontaire par l'auteur, par le biais d'un tiers, d'une information à la victime sur cette présence laquelle doit de surcroît, lorsque la victime ne connaît pas l'auteur, présenter un caractère intimidant ; qu'en retenant, pour déclarer M. S... coupable de complicité par fourniture d'instructions du délit de l'article 434-5 du code pénal, que le fait pour MM. Q... , X... et K... de se trouver devant ou à proximité du domicile de la victime constituait un acte d'intimidation lorsque la présence physique de MM. Q... , X... et K... devant ou à proximité du domicile de M. D... V... , quelle qu'ait été leur corpulence, n'était pas de nature à intimider celui-ci qui ne les connaissait pas, n'a été en contact à aucun moment avec eux et n'aurait eu aucune raison d'avoir connaissance de leur présence sans l'information préalable des policiers sur un projet d'infraction planifié contre lui, la cour d'appel a violé le principe d'interprétation stricte de la loi pénale et les articles 111-4, 121-6, 121-7, 434-5 du code pénal, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et 591 du code de procédure pénale ;
2°/ que l'insuffisance de motifs équivaut à l'absence de motifs ; que l'article 434-5 du code pénal incrimine toute menace ou tout autre acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter ; qu'en retenant que le fait pour MM. Q... et X... de se trouver à proximité du domicile de la victime était un acte d'intimidation de celle-ci lorsqu'elle a par ailleurs constaté dans ses motifs que M. Q... avait garé son véhicule, dans lequel il avait été interpellé avec M. X..., au fond de la rue des écoles « en se plaçant loin du domicile de la victime », ce qui excluait qu'ils aient pu intimider celle-ci par cet acte, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 121-6, 121-7, 434-5 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article 434-5 du code pénal incrimine toute menace ou tout autre acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter ; qu'en retenant que le fait pour MM. Q... , K... et X... de se trouver devant ou à proximité du domicile de la victime était un acte d'intimidation de celle-ci lorsqu'il n'existe dans ce simple acte de présence physique aucun élément suffisamment explicite permettant de le rattacher à une pression pour obtenir d'une victime le non-dépôt d'une plainte ou une rétractation, la cour d'appel a violé les articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-4, 121-6, 121-7, 434-5 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
4°/ que le délit de l'article 434-5 du code pénal est un délit intentionnel ; qu'en retenant que MM. Q... , K... et X... de se trouver devant ou à proximité du domicile de la victime était un acte d'intimidation de celle-ci lorsque les trois prévenus n'ont pas pu avoir la volonté, par ce seul acte, d'intimider la victime, qui ne les connaissait pas et n'avait jamais été contact avec eux, en vue de la déterminer à ne pas porter plainte ou à se rétracter, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 121-3, 121-6, 121-7, 434-5 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. »
11. Le moyen présenté pour M. Q... critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déclaré coupable du délit de menace ou acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter, alors :
« 1°/ que, selon M. Q... la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article 434-5 du code pénal incrimine toute menace ou tout autre acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter ; que la tentative de ce délit n'est pas punissable ; que l'acte d'intimidation est un acte inspirant la crainte d'un mal à la victime ; que le fait de se tenir physiquement à proximité du domicile d'une personne suppose, pour inspirer la crainte d'un mal à celle-ci, soit un contact direct entre l'auteur et la victime soit la délivrance volontaire par l'auteur, par le biais d'un tiers, d'une information à la victime sur cette présence laquelle doit de surcroît, lorsque la victime ne connaît pas l'auteur, présenter un caractère intimidant ; qu'en retenant, pour déclarer M. Q... coupable du délit de l'article 434-5 du code pénal, que le fait pour le prévenu de se trouver à proximité du domicile de la victime constituait un acte d'intimidation lorsque la présence physique dans un véhicule de M. Q... à proximité du domicile de M. D... V... , quelle qu'ait été sa corpulence, n'était pas de nature à intimider celui-ci qui ne le connaissait pas, n'a été en contact à aucun moment avec lui et n'aurait eu aucune raison d'avoir connaissance de cette présence sans l'information préalable des policiers sur un projet d'infraction planifié contre lui, la cour d'appel a violé le principe d'interprétation stricte de la loi pénale et les articles 111-4, 434-5 du code pénal, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme et 591 du code de procédure pénale ;
2°/ que l'insuffisance de motifs équivaut à l'absence de motifs ; que l'article 434-5 du code pénal incrimine toute menace ou tout autre acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter ; qu'en retenant que le fait pour M. Q... de se trouver à proximité du domicile de la victime était un acte d'intimidation de celle-ci lorsqu'elle a par ailleurs constaté dans ses motifs que M. Q... avait garé son véhicule, dans lequel il avait été interpellé, au fond de la rue des écoles « en se plaçant loin du domicile de la victime », ce qui excluait qu'il ait pu intimider celle-ci par cet acte, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard du texte précité et de l'article 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article 434-5 du code pénal incrimine toute menace ou tout autre acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter ; qu'en retenant que le fait pour M. Q... de se trouver à proximité du domicile de la victime était un acte d'intimidation de celle-ci lorsqu'il n'existe dans ce simple acte de présence physique aucun élément suffisamment explicite permettant de le rattacher à une pression pour obtenir d'une victime le non-dépôt d'une plainte ou une rétractation, la cour d'appel a violé les articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-4, 434-5 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
4°/ que le délit de l'article 434-5 du code pénal est un délit intentionnel ; qu'en retenant que le fait pour M. Q... de se trouver à proximité du domicile de la victime était un acte d'intimidation de celle-ci lorsque M. Q... n'a pas pu avoir la volonté, par ce seul acte, d'intimider la victime, qui ne le connaissait pas et n'avait jamais été contact avec lui, en vue de la déterminer à ne pas porter plainte ou à se rétracter, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 121-3, 434-5 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
12. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 434-5 du code pénal et 593 du code de procédure pénale :
13. Il résulte du premier de ces textes que pour être établie, la menace ou l'acte d'intimidation commis en vue de déterminer la victime d'un crime ou d'un délit à ne pas porter plainte ou à se rétracter doit être adressée à cette dernière, ou dans des conditions telles que son auteur sait ou ne peut ignorer qu'elle parviendra à sa connaissance.
14. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
15. Pour déclarer les prévenus coupables de menaces et complicité de menaces, l'arrêt attaqué énonce que le fait pour trois des prévenus, de s'être présentés au domicile de la partie civile ou de se trouver à proximité constitue un acte d'intimidation.
16. Les juges ajoutent que, s'agissant des faits de complicité reprochés à M. S..., ce dernier a fourni les instructions pour organiser l'expédition des trois autres.
17. En se déterminant ainsi, sans autrement caractériser, en l'absence de tout contact entre la victime et les prévenus, des actes de nature à la faire revenir sur sa déposition, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et n'a pas justifié sa décision.
18. La cassation est par conséquent encourue.
Sur les deuxièmes moyens présentés par MM. S... et Q...
Enoncé des moyens
19. Le moyen présenté pour M. S... critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déclaré coupable du délit d'association de malfaiteurs en vue de la préparation du délit de violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours avec ces circonstances qu'elles ont été commises en réunion, sur une victime pour l'influencer et avec préméditation, alors :
« 1°/ que, selon M. S..., le résultat dommageable de violences volontaires, qui conditionne la qualification pénale des faits, étant impossible à déterminer par anticipation, l'association de malfaiteurs en vue de la préparation du délit de violences volontaires n'est pas punissable, au même titre que la tentative du délit de violences volontaires ; qu'en déclarant M. S... coupable du délit d'associations de malfaiteurs en vue de la préparation du délit de violences volontaires aggravées, la cour d'appel a violé les articles 222-13, 450-1 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
2°/ que le délit d'association de malfaiteurs suppose un groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un crime ou d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement ; que les juges du fond doivent caractériser, à partir des faits matériels de préparation, les éléments constitutifs du délit projeté ; qu'en déduisant des deux conversations téléphoniques intervenues le 20 novembre 2016 à 16h47 et à 17h58 la fourniture par M. S... à M. Q... d'instructions sur les propos à tenir à la victime pour faire pression sur elle de nature à constituer des faits de violences et des menaces lorsqu'il ressortait de ses propres constatations que lors des deux conversations, M. S... avait demandé à ses interlocuteurs que les choses se passent « bien calmement », « en mode gentil » afin d'éviter que M. D... « ait peur » et qu'il « soit en confiance » et avait insisté sur le fait qu'il ne voulait pas « qu'il ait de problème » et qu'il fallait lui parler en mode « pacifiste » « du début à la fin » de façon « détendue » de sorte que ces conversations faisaient référence à une discussion « calme » et « pacifiste » afin de déterminer M. D... V... à revenir sur ses déclarations et n'envisageaient jamais l'usage de la force afin de blesser ou d'impressionner vivement la victime, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 222-13, 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que le délit d'associations de malfaiteurs suppose un groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un crime ou d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement ; que les juges du fond doivent caractériser, à partir des faits matériels de préparation, les éléments constitutifs du délit projeté ; qu'en se bornant à faire état de la présence, dans les deux conversations téléphoniques intervenues le 20 novembre 2016 à 16h47 et à 17h58, de projets de proposition d'argent à la victime, de « pressions » ou de « menaces » sans jamais caractériser la moindre violence, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 222-13, 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que les agissements réprimés au titre de l'association de malfaiteurs sont nécessairement distincts des faits de commission de l'infraction préparée elle-même ; qu'en affirmant que « l'ensemble des faits définis plus haut » matérialisant une entente en vue de la préparation de violences étaient « constitutifs de voies de fait » et avaient atteint leur but au vu des conséquences sur les victimes médicalement constatées et que le fait de se présenter devant le domicile de la partie civile, qu'elle avait relevé par ailleurs au titre des actes préparatoires, constituait des faits de violence comme le démontrait le certificat médical produit par les parties civiles constatant une ITT de huit jours, la cour d'appel, qui a ainsi retenu que les actes matériels caractérisant la préparation des violences étaient eux-mêmes constitutifs des violences, a violé les articles 450-1 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
5°/ que le résultat produit par l'éventuelle commission de l'infraction préparée ne peut servir à caractériser le délit préparé au titre de l'association de malfaiteurs, lequel doit être établi au vu des seuls actes préparatoires ; qu'en se fondant sur le constat d'une ITT de huit jours chez les parties civiles pour en déduire la préparation de violences, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
6°/ que les faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ; qu'en relevant d'une part que constitue un acte d'intimidation le fait pour les trois prévenus, présents physiquement, de s'être présentés au domicile de la partie civile ou de se trouver à proximité de celui-ci et d'autre part que constitue un acte préparatoire « l'arrêt du véhicule au fond de la rue des écoles » ayant MM. Q... et X... comme occupants et « la descente de M. K... depuis le fond de la rue des Ecoles pour se rendre dans l'[...] devant la porte du logement de la victime », de sorte que le même fait a donné lieu contre le prévenu à deux déclarations de culpabilité du chef de complicité du délit de l'article 434-5 du code pénal et du chef du délit d'association de malfaiteurs de l'article 450-1 du même code, la cour d'appel a violé le principe non bis in idem et l'article 591 du code de procédure pénale ;
7°/ que les faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ; qu'en application de ce principe, la qualification pénale des faits dont la préparation est l'objet de l'entente, constitutive de l'association de malfaiteurs, ne peut être différente de celle retenue au titre des poursuites du chef de l'infraction finalement commise lorsque les faits sont strictement identiques ; qu'en qualifiant le fait de se présenter à plusieurs à proximité du domicile d'une victime d'acte d'intimidation pour déclarer M. S... coupable de complicité du délit de l'article 434-5 du code pénal puis en retenant, pour le déclarer coupable d'associations de malfaiteurs, que ce même fait constitue des violences ayant causé une ITT inférieure ou égale à huit jours sur une victime, en réunion et avec préméditation, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 222-13, 121-6, 121-7, 434-5, 450-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale et du principe non bis in idem ;
8°/ que la contradiction de motifs équivaut à l'absence de motifs ; qu'en qualifiant le fait de se présenter à plusieurs à proximité du domicile d'une victime d'acte d'intimidation pour déclarer le prévenu coupable de complicité du délit de l'article 434-5 du code pénal puis en retenant, pour déclarer le prévenu coupable d'association de malfaiteurs, que ce même fait constitue des violences ayant causé une ITT inférieure ou égale à huit jours sur une victime, en réunion et avec préméditation, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs,
9°/ que pour être constitutif de violence psychologique, un acte doit avoir impressionné vivement la victime ; qu'en retenant pour déclarer M. S... coupable d'association de malfaiteurs en vue de la préparation de violences aggravées que le fait de se présenter à plusieurs à proximité du domicile de M. D... V... était constitutif de violences lorsqu'elle a elle-même constaté que M. Q... , qui était resté avec M. X... dans le véhicule où ils ont été d'ailleurs interpellés, s'était arrêté au fond de la rue des écoles et pour éviter de se faire repérer en se plaçant loin du domicile de la victime de sorte que cet agissement n'a pu créer aucun choc émotif aux parties civiles, la cour d'appel a violé les articles 222-13, 450-1 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
10°/ que le délit de violences suppose l'existence d'un lien de causalité entre l'acte de violence et le dommage subi par la victime ; que l'interposition d'un tiers pour commettre des violences psychologiques suppose que l'auteur ait sciemment recouru à ce tiers ; qu'en retenant que le fait de se présenter devant ou à proximité du domicile de la partie civile constituait des faits de violences ayant entraîné une ITT de huit jours lorsqu'il n'existait aucun lien de causalité entre la présence de MM. Q... , X... et K... devant ou à proximité du domicile de la victime et le choc émotif des parties civiles, lequel avait pour seule cause l'information donnée de leur propre initiative par les services de police à M. D... V... quant à un projet de visite d'un groupe d'individus à son domicile afin qu'il modifie sa déposition concernant les faits du 10 octobre 2016, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 222-13, 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. »
20. Le moyen présenté pour M. Q... critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déclaré coupable du délit d'association de malfaiteurs en vue de la préparation du délit de violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours avec ces circonstances qu'elles ont été commises en réunion, sur une victime pour l'influencer et avec préméditation, alors :
« 1°/ que, selon M. Q... , le résultat dommageable de violences volontaires, qui conditionne la qualification pénale des faits, étant impossible à déterminer par anticipation, l'association de malfaiteurs en vue de la préparation du délit de violences volontaires n'est pas punissable, au même titre que la tentative du délit de violences volontaires ; qu'en déclarant M. Q... coupable du délit d'associations de malfaiteurs en vue de la préparation du délit de violences volontaires aggravées, la cour d'appel a violé les articles 222-13, 450-1 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
2°/ que le délit d'association de malfaiteurs suppose un groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un crime ou d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement ; que les juges du fond doivent caractériser, à partir des faits matériels de préparation, les éléments constitutifs du délit projeté ; qu'en déduisant des deux conversations téléphoniques intervenues le 20 novembre 2016 à 16h47 et à 17h58 la fourniture par M. S... à M. Q... d'instructions sur les propos à tenir à la victime pour faire pression sur elle de nature à constituer des faits de violences et des menaces lorsqu'il ressortait de ses propres constatations que lors des deux conversations, M. S... avait demandé, notamment à M. Q... , que les choses se passent « bien calmement », « en mode gentil » afin d'éviter que M. D... « ait peur » et qu'il « soit en confiance » et avait insisté sur le fait qu'il ne voulait pas « qu'il ait de problème » et qu'il fallait lui parler en mode « pacifiste » « du début à la fin » de façon « détendue » de sorte que ces conversations faisaient référence à une discussion « calme » et « pacifiste » afin de déterminer M. D... V... à revenir sur ses déclarations et n'envisageaient jamais l'usage de la force afin de blesser ou d'impressionner vivement la victime, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 222-13, 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que le délit d'associations de malfaiteurs suppose un groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un crime ou d'un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement ; que les juges du fond doivent caractériser, à partir des faits matériels de préparation, les éléments constitutifs du délit projeté ; qu'en se bornant à faire état de la présence, dans les deux conversations téléphoniques intervenues le 20 novembre 2016 à 16h47 et à 17h58, de projets de proposition d'argent à la victime, de « pressions » ou de « menaces » sans jamais caractériser la moindre violence, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 222-13, 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que les agissements réprimés au titre de l'association de malfaiteurs sont nécessairement distincts des faits de commission de l'infraction préparée elle-même ; qu'en affirmant que « l'ensemble des faits définis plus haut » matérialisant une entente en vue de la préparation de violences étaient « constitutifs de voies de fait » et avaient atteint leur but au vu des conséquences sur les victimes médicalement constatées et que le fait de se présenter devant le domicile de la partie civile, qu'elle avait relevé par ailleurs au titre des actes préparatoires, constituait des faits de violence comme le démontrait le certificat médical produit par les parties civiles constatant une ITT de huit jours, la cour d'appel, qui a ainsi retenu que les actes matériels caractérisant la préparation des violences étaient eux-mêmes constitutifs des violences, a violé les articles 450-1 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
5°/ que le résultat produit par l'éventuelle commission de l'infraction préparée ne peut servir à caractériser le délit préparé au titre de l'association de malfaiteurs, lequel doit être établi au vu des seuls actes préparatoires ; qu'en se fondant sur le constat d'une ITT de huit jours chez les parties civiles pour en déduire la préparation de violences, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;
6°/ que les faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ; qu'en relevant d'une part que constitue un acte d'intimidation le fait pour les trois prévenus, présents physiquement, de s'être présentés au domicile de la partie civile ou de se trouver à proximité de celui-ci et d'autre part que constitue un acte préparatoire « l'arrêt du véhicule au fond de la rue des écoles » ayant MM. Q... et X... comme occupants et « la descente de M. K... depuis le fond de la rue des Ecoles pour se rendre dans l'[...] devant la porte du logement de la victime », de sorte que le même fait a donné lieu contre le prévenu à deux déclarations de culpabilité du chef du délit de l'article 434-5 du code pénal et du chef du délit d'association de malfaiteurs de l'article 450-1 du même code, la cour d'appel a violé le principe non bis in idem et l'article 591 du code de procédure pénale ;
7°/ que les faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ; qu'en application de ce principe, la qualification pénale des faits dont la préparation est l'objet de l'entente, constitutive de l'association de malfaiteurs, ne peut être différente de celle retenue au titre des poursuites du chef de l'infraction finalement commise lorsque les faits sont strictement identiques ; qu'en qualifiant le fait de se présenter à plusieurs à proximité du domicile d'une victime d'acte d'intimidation pour déclarer le prévenu coupable du délit de l'article 434-5 du code pénal puis en retenant, pour le déclarer coupable d'associations de malfaiteurs, que ce même fait constitue des violences ayant causé une ITT inférieure ou égale à huit jours sur une victime, en réunion et avec préméditation, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 222-13, 434-5, 450-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale et du principe non bis in idem ;
8°/ que la contradiction de motifs équivaut à l'absence de motifs ; qu'en qualifiant le fait de se présenter à plusieurs à proximité du domicile d'une victime d'acte d'intimidation pour déclarer le prévenu coupable du délit de l'article 434-5 du code pénal puis en retenant, pour déclarer le prévenu coupable d'association de malfaiteurs, que ce même fait constitue des violences ayant causé une ITT inférieure ou égale à huit jours sur une victime, en réunion et avec préméditation, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;
9°/ que pour être constitutif de violence psychologique, un acte doit avoir impressionné vivement la victime ; qu'en retenant pour déclarer M. Q... coupable d'association de malfaiteurs en vue de la préparation de violences aggravées que le fait de se présenter à plusieurs à proximité du domicile de M. D... V... était constitutif de violences lorsqu'elle a elle-même constaté que M. Q... , qui était resté dans le véhicule où il a été d'ailleurs interpellé, s'était arrêté au fond de la rue des écoles et pour éviter de se faire repérer en se plaçant loin du domicile de la victime de sorte que cet agissement n'a pu créer aucun choc émotif aux parties civiles, la cour d'appel a violé les articles 222-13, 450-1 du code pénal et 591 du code de procédure pénale ;
10°/ que le délit de violences suppose l'existence d'un lien de causalité entre l'acte de violence et le dommage subi par la victime ; que l'interposition d'un tiers pour commettre des violences psychologiques suppose que l'auteur ait sciemment recouru à ce tiers ; qu'en retenant que le fait de se présenter devant le domicile de la partie civile constituait des faits de violences ayant entraîné une ITT de huit jours lorsqu'il n'existait aucun lien de causalité entre le stationnement du véhicule de M. Q... à proximité du domicile de la victime et le choc émotif des parties civiles, lequel avait pour seule cause l'information donnée de leur propre initiative par les services de police à M. D... V... quant à un projet de visite d'un groupe d'individus à son domicile afin qu'il modifie sa déposition concernant les faits du 10 octobre 2016, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 222-13, 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
21. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 222-13, 450-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale :
22. Selon le premier de ces textes, la préparation de la commission d'un délit n'est susceptible d'être réprimée qu'autant que celui-ci est puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement.
23. Il résulte du deuxième que, pour être punies de cinq ans d'emprisonnement, les violences doivent, non seulement avoir été commises dans deux des circonstances visées, mais encore avoir entraîné une incapacité totale de travail.
24. Selon le troisième, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
25. Pour déclarer les prévenus coupables d'association de malfaiteurs, l'arrêt attaqué se réfère tout d'abord à l'article 222-13 du code pénal selon lequel, lorsque des violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours sont commises dans deux des circonstances particulières qu'il vise : sur un témoin, une victime ou une partie civile, en raison de sa dénonciation ou de sa plainte ; par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ; avec préméditation ou avec guet-apens, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement.
26. Les juges ajoutent que M. S... a bâti une entente avec les quatre autres prévenus, afin de découvrir l'adresse de la victime, notamment en collectant et diffusant plusieurs numéros de téléphone en lien avec elle, en faisant appel à M. I..., salarié d'un commerce d'équipements électroménagers et audio-visuels, et au travers d'une discussion sur la manière de faire revenir la victime sur ses déclarations.
27. Ils font état du contenu des interceptions téléphoniques, qu'ils analysent comme laissant apparaître, sans doute possible, l'expression de menaces constitutives de violences.
28. Ils retiennent également la fourniture du véhicule par M. Q... , la récupération de MM. K... et X..., l'arrivée sur place dans le but de procéder au repérage préalable du domicile de la victime, l'arrêt du véhicule loin du domicile de la victime, la présence de M. K... devant la porte du logement de la victime.
29. Ils énoncent enfin que l'ensemble des faits matériels qu'ils décrivent ont parfaitement atteint leur but, au vu des conséquences importantes sur les victimes, constatées par certificats médicaux versés au dossier, qui font état d'une incapacité temporaire totale de travail de huit jours chez les parties civiles.
30. En se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.
31. En effet, en premier lieu, il ne pouvait être présumé qu'à la supposer commise, l'infraction projetée allait entraîner une incapacité totale de travail.
32. En second lieu, la cour d'appel ne pouvait retenir, pour fonder sa décision, une incapacité de travail résultant, non d'agissements imputables aux prévenus, mais de l'information donnée par les services de police à M. V... et Mme H..., selon laquelle les mis en cause avaient le projet de les contacter.
33. La cassation est à nouveau encourue.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le troisième moyen présenté par M. Q... , la Cour :
Sur les pourvois formés par MM. K..., I... et X... :
CONSTATE la déchéance des pourvois ;
Sur les pourvois formés par MM. S... et Q... :
CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à MM. S... et Q... , l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry susvisé, en date du 13 février 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Chambéry et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux septembre deux mille vingt.