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08/07/2020 | FRANCE | N°19-10534

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juillet 2020, 19-10534


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2020

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 647 FS-P+B

Pourvoi n° T 19-10.534

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. L....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation en date du 14 juin 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
______________________

___

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JUILLET 2020

La société Bongard, société par actions simplifiée, dont le siège est [....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2020

Rejet

M. CATHALA, président

Arrêt n° 647 FS-P+B

Pourvoi n° T 19-10.534

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. L....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation en date du 14 juin 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JUILLET 2020

La société Bongard, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], a formé le pourvoi n° T 19-10.534 contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2018 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. G... L..., domicilié [...],

2°/ à Pôle emploi - Direction régionale Grand-Est, dont le siège est [...],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Bongard, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. L..., et l'avis de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 juin 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 14 décembre 2018), M. L..., salarié de la société Bongard depuis mars 2000, et titulaire de divers mandats représentatifs depuis 2002, a été licencié pour faute grave le 9 août 2012, après obtention d'une autorisation préalable de licenciement datée du 7 août 2012. L'autorisation administrative a été annulée par la cour administrative d'appel le 23 juin 2015, et le pourvoi formé sur cette décision a été déclaré irrecevable par le Conseil d'Etat. Le salarié a été réintégré dans ses fonctions le 21 juillet 2015.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de l'indemnité prévue à l'article L. 2422-4 du code du travail en cas d'annulation d'une autorisation administrative de licenciement. Par ailleurs, l'employeur a repris la procédure de licenciement et obtenu, le 15 février 2016, une autorisation de licenciement du ministre du travail.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une certaine somme au titre de l'indemnité de l'article L. 2422-4 du code du travail alors :

« 1°/ que l'indemnisation correspondant à la réparation du préjudice subi au cours de la période écoulée entre le licenciement d'un salarié protégé et sa réintégration n'est due que lorsque l'annulation de la décision autorisant le licenciement est devenue définitive ; que tel n'est pas le cas lorsque l'employeur poursuit, à la suite de la réintégration d'un salarié protégé, la procédure de licenciement initialement engagée en considération des mêmes faits ; qu'en l'espèce, la société soutenait que les dispositions de l'article L. 2422-4 du code du travail, prévoyant l'indemnisation du préjudice subi au cours de la période écoulée entre le licenciement du salarié protégé et sa réintégration, n'étaient pas applicables dès lors que, l'employeur ayant repris la même procédure de licenciement à la suite de la réintégration du salarié et cette procédure ayant abouti au licenciement du salarié, il s'agissait d'une seule et même procédure et donc qu'aucune annulation définitive de la dernière décision d'autorisation de licenciement n'était intervenue ; que pour accueillir les demandes indemnitaires formées par le salarié à l'encontre de la société exposante, la cour d'appel a considéré par motifs propres et adoptés que la circonstance que l'employeur ait repris un processus de licenciement du salarié en obtenant une nouvelle autorisation administrative de licenciement à son encontre fondée sur les mêmes faits était sans emport puisqu'elle reposait sur une autre autorisation administrative de licenciement et que la première décision d'autorisation de licenciement du 7 août 2012 était définitive ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 2422-4 du code du travail.

2°/ que l'indemnisation correspondant à la réparation du préjudice subi au cours de la période écoulée entre le licenciement d'un salarié protégé et sa réintégration n'est due que lorsque l'annulation de la décision autorisant le licenciement est devenue définitive ; que tel n'est pas le cas lorsque l'employeur poursuit, à la suite de la réintégration d'un salarié protégé, la procédure de licenciement initialement engagée en considération des mêmes faits ; qu'en l'espèce, pour accueillir les demandes indemnitaires formées par le salarié à l'encontre de la société exposante, la cour d'appel a considéré par motifs propres que l'indemnisation du salarié protégé pour le préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration suite à l'annulation de la décision d'autorisation du licenciement, reposait sur le caractère définitif de cette annulation et non sur le fait que son licenciement serait infondé, ce qui pourrait être à nouveau discuté dans le cadre de la nouvelle procédure de licenciement ; que cependant, l'appréciation du caractère définitif de l'annulation de la décision autorisant le licenciement ne pouvait être réalisée indépendamment de la poursuite de la procédure initiale par l'employeur fondée sur les mêmes motifs et de la justification des motifs ayant présidé au licenciement du salarié protégé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a derechef violé l'article L. 2422-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. En application de l'article L. 2422-4 du code du travail le salarié protégé, licencié après l'obtention d'une autorisation administrative de licenciement ultérieurement annulée, peut demander indemnisation de son préjudice lorsque la décision d'annulation est devenue définitive.

6. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation (Soc., 10 décembre 1997, pourvoi n° 94-45.337, Bull. 1997, V, 435) que l'annulation par le juge administratif d'un refus d'autorisation de licencier ne vaut pas autorisation de licencier et une autorisation administrative de licencier délivrée postérieurement à l'annulation par le juge administratif d'une précédente autorisation ne peut avoir pour effet de régulariser a posteriori le licenciement prononcé sur la base de l'autorisation annulée et tenir en échec le droit à réintégration que le salarié tient de l'annulation par le juge administratif de la précédente autorisation. Par ailleurs, la Cour a déjà jugé (Soc., 2 février 2006, pourvoi n° 05-41.811, Bull. 2006, V, n° 61) que le caractère définitif de la décision administrative privant le licenciement d'un salarié protégé de validité n'a d'effet que sur l'exigibilité du paiement de l'indemnité prévue à l'article L. 412-19 du code du travail destinée à réparer le préjudice subi par le salarié évincé de l'entreprise, qui perdure tant que la réintégration qu'il a demandée ne lui est pas accordée.

7. Une décision d'annulation d'une autorisation administrative devient définitive lorsqu'il n'a pas été formé de recours dans les délais, ou lorsqu'aucune voie de recours ordinaire ne peut plus être exercée à son encontre. Le fait qu'après l'annulation par une décision définitive de l'autorisation administrative de licenciement, l'employeur puisse reprendre la procédure de licenciement pour les mêmes faits et demander une nouvelle autorisation de licenciement est sans emport sur le caractère définitif de la décision d'annulation de la première décision d'autorisation et sur l'application des dispositions de l'article L. 2422-4 du code du travail.

8.C'est dès lors à bon droit que la cour d'appel, constatant que le salarié avait été licencié le 9 août 2012 en vertu d'une autorisation administrative ultérieurement annulée par une décision définitive, a fait droit à la demande d'indemnité formée par le salarié en application de l'article L. 2422-4 du code du travail.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Bongard aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Bongard et la condamne à payer à la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy la somme de 3 000 euros, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat.

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Bongard

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société à payer au salarié les sommes de 61 423 euros au titre de l'indemnité de l'article L. 2422-4 du code du travail et de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « l'article L. 2422-4 alinéa 1 du code du travail dispose que : "Lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L.2422-l a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision" ; il est constant que par décision du 7 août 2012, le licenciement de Monsieur L... a été autorisé par l'inspecteur du travail et qu'il a été licencié sur la base de cette décision le 9 août 2012 ; il est également constant que par un arrêt de la cour administrative d'appel du 23 juin 2015, la décision d'autorisation de son licenciement a été annulée et est devenue définitive le 27 janvier 2016, date à laquelle le Conseil d'Etat a déclaré irrecevable le pourvoi formé par 1'employeur à son encontre ; auparavant,1'employeur avait procédé à la réintégration du salarié dans1'entreprise le 21 juillet 2015 ; dans ces conditions que la cour ne peut que constater, comme les premiers juges, que les conditions de mise en oeuvre des dispositions susvisées sont remplies ; la décision autorisant le licenciement du salarié en date du 7 août 2012 a été définitivement annulée le 27 janvier 2016 ; le salarié était investi d'un des mandats mentionnés à l'article L.2422-1 du code du travail ; il a formulé une demande en réparation du préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration dans 1'entreprise dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision ; l'employeur affirme que, dès la réintégration du salarié, il aurait repris la procédure de licenciement à son encontre fondée sur les mêmes faits et obtenu l'autorisation administrative de le licencier, laquelle ne serait toutefois pas définitive au jour où la cour statue ; l'indemnisation du salarié protégé pour le préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration suite à l'annulation de la décision d'autorisation du licenciement, repose sur le caractère définitif de cette annulation et non sur le fait que son licenciement serait infondé, ce qui pourrait être à nouveau discuté dans le cadre de la nouvelle procédure de licenciement ; la circonstance que l'employeur ait repris un processus de licenciement du salarié en obtenant une nouvelle autorisation administrative de licenciement à son encontre fondée sur les mêmes faits, est sans emport puisqu'elle repose sur une autre autorisation administrative de licenciement ; force est de constater que la première décision d'autorisation de licenciement du 7 août 2012 est définitive, ce qui ouvrait droit à l'indemnisation du salarié sur le fondement de l'article L.2422-4 du code du travail dont il remplissait par ailleurs les autres conditions ; les premiers juges ont intégralement réparé le préjudice subi par le salarié en lui allouant les sommes de 61 423 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel et 1500 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ; c'est à juste titre qu'ils l'ont débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour perte de chance d'obtenir des avantages salariaux tels que primes de congés annuels ou majorations pour heures supplémentaires ; en effet il ne justifie pas que, dans la période de trois ans qui a séparé son licenciement de sa réintégration dans l'entreprise, il ait été privé de l'éventualité de percevoir ces avantages ; le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a condamné l'employeur, partie perdante, à payer au salarié la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance ; à hauteur d'appel, l'équité commande que l'employeur soit condamné à payer au salarié la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance ; à hauteur d'appel, l'équité commande que l'employeur soit condamné à payer au salarié la somme de 1500 € de l'article 700 du code de procédure civile ; il supportera les dépens d'appel » ;

ET AUX MOTIFS QUE, aux termes du jugement attaqué, « La présente décision est contradictoire en application des dispositions de l'article 467 du code de procédure civile. Aux termes de l'article L. 1235-1 du Code du travaille juge a pour mission d'apprécier la régularité de la procédure de licenciement. Il est acquis que M. L... G... avait un statut de salarié protégé en raison de son mandat de délégué syndical, de sa qualité de membre titulaire du comité d'entreprise, de candidat au CHSCT lors de la désignation du 3 juillet 2012 et de conseiller prud'homal. Son licenciement pour être régulier nécessitait de requérir l'avis du comité d'entreprise et l'accord de l'inspecteur du travail. Le comité d'entreprise, réuni le 5 juillet 2012, a donné un avis favorable. L'inspecteur du travail a donné l'autorisation de licencier M. L... le 7 août 2012, mais cette décision a fait l'objet d'une annulation par arrêt du 23 juin 2015 de la Cour Administrative d'Appel de NANCY. L'article L. 2422-4 du code du travail dispose que "Lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision. L'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois s'il n'a pas demandé sa réintégration. Ce paiement s'accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire". Le droit à indemnisation ne peut être exercé que lorsque l'annulation de la décision d'autorisation est devenue définitive. Il en résulte que ce droit est subordonné au fait qu'aucun recours (hiérarchique ou contentieux) ne peut plus être exercé à l'encontre de la décision d'annulation. La décision d'annulation de la décision d'autorisation du 7 août 2012 est l'arrêt du 23 juin 2015 rendu par la Cour Administrative d'Appel de NANCY. Cet arrêt était susceptible d'un pourvoi devant le Conseil d'État. La SAS BONGARD a formé pourvoi de cet arrêt du 23 juin 2015 et le Conseil d'État, statuant le 27 janvier 2016 a décidé que le pourvoi de la Société BONGARD n'était pas admis. Plus aucun recours n'étant possible, l'arrêt du 23 juin 2015 est devenu définitif. La SAS BONGARD soutient qu'elle n'a pas, suite à la réintégration de M. L..., entamé une nouvelle procédure de licenciement mais qu'elle n'a fait que poursuivre celle commencée antérieurement. Elle en conclut que la décision d'annulation, soit l'arrêt du 23 juin 2015 n'est pas devenu définitif puisque lui a succédé une décision du Ministre du 15 février 2016, venant autoriser le licenciement. Ce distinguo quant à une nouvelle procédure ou la poursuite d'une procédure ancienne est sans aucune incidence sur la question de l'indemnisation de M. L.... En effet, la décision du Ministre du 15 février 2016 ne constitue pas une décision venant annuler celle de l'inspecteur du travail du 7 août 2012 ou l'arrêt du 23 juin 2015 mais celle du 4 septembre 2015. Or le licenciement du 9 août 2012 est bien fondé sur la décision du 7 août 2012 et non sur celle du 4 septembre 2015 et1'arrêt du 23 juin 2015, ayant annulé la décision du 4 septembre 2012 est bien devenu définitif. L'article L 2422-4 du code du travail trouve par conséquent à s'appliquer ».

ALORS, en premier lieu, QUE l'indemnisation correspondant à la réparation du préjudice subi au cours de la période écoulée entre le licenciement d'un salarié protégé et sa réintégration n'est due que lorsque l'annulation de la décision autorisant le licenciement est devenue définitive ; que tel n'est pas le cas lorsque l'employeur poursuit, à la suite de la réintégration d'un salarié protégé, la procédure de licenciement initialement engagée en considération des mêmes faits ; qu'en l'espèce, la société soutenait que les dispositions de l'article L. 2422-4 du code du travail, prévoyant l'indemnisation du préjudice subi au cours de la période écoulée entre le licenciement du salarié protégé et sa réintégration, n'étaient pas applicable dès lors que, l'employeur ayant repris la même procédure de licenciement à la suite de la réintégration du salarié et cette procédure ayant abouti au licenciement du salarié, il s'agissait d'une seule et même procédure et donc qu'aucune annulation définitive de la dernière décision d'autorisation de licenciement n'était intervenue ; que pour accueillir les demandes indemnitaires formées par le salarié à l'encontre de la société exposante, la cour d'appel a considéré par motifs propres et adoptés que la circonstance que l'employeur ait repris un processus de licenciement du salarié en obtenant une nouvelle autorisation administrative de licenciement à son encontre fondée sur les mêmes faits était sans emport puisqu'elle reposait sur une autre autorisation administrative de licenciement et que la première décision d'autorisation de licenciement du 7 août 2012 était définitive ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 2422-4 du code du travail ALORS, en second lieu, QUE l'indemnisation correspondant à la réparation du préjudice subi au cours de la période écoulée entre le licenciement d'un salarié protégé et sa réintégration n'est due que lorsque l'annulation de la décision autorisant le licenciement est devenue définitive ; que tel n'est pas le cas lorsque l'employeur poursuit, à la suite de la réintégration d'un salarié protégé, la procédure de licenciement initialement engagée en considération des mêmes faits ; qu'en l'espèce, pour accueillir les demandes indemnitaires formées par le salarié à l'encontre de la société exposante, la cour d'appel a considéré par motifs propres que l'indemnisation du salarié protégé pour le préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration suite à l'annulation de la décision d'autorisation du licenciement, reposait sur le caractère définitif de cette annulation et non sur le fait que son licenciement serait infondé, ce qui pourrait être à nouveau discuté dans le cadre de la nouvelle procédure de licenciement ; que cependant, l'appréciation du caractère définitif de l'annulation de la décision autorisant le licenciement ne pouvait être réalisée indépendament de la poursuite de la procédure initiale par l'employeur fondée sur les mêmes motifs et de la justification des motifs ayant présidé au licenciement du salarié protégé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a derechef violé l'article L. 2422-4 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société à payer au salarié la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral et de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, précités au premier moyen

ET AUX MOTIFS QUE, aux termes du jugement attaqué, « Sur les conséquences financières : Le préjudice de M. L... est un préjudice financier, en termes de pertes de salaires et un préjudice moral. S'agissant des salaires, il y a lieu de prendre en compte les salaires bruts (article L1234-9 du code du travail, Cass Soc 7 juin 2005 n° 03-44.969). Il est acquis que le salaire brut de M. L... était en 2012 de 1.756,82 euros brut, qu'il bénéficiait aussi d'une prime d'ancienneté mensuelle de 114,00 euros bruts ainsi que d'une indemnité de transport d'un montant de 103,36 euros brut. M . L... a droit à une indemnisation du 27 juin 2012, date de sa mise à pieds conservatoire jusqu'au 20 juillet 2015, date de sa réintégration. Compte tenu des montants servant de base aux calculs et de la durée, la SAS BONGARD aurait dû lui verser la somme de 87.742,20 euros. Le juge doit déduire du montant de l'indemnité légale, les revenus perçus par le salarié entre son licenciement et sa réintégration (Cass. soc., 29-9-14, n°13-15733; Cass. soc., 13-11-08, n"07-41331), soit en l'espèce les allocations chômage. M. L... ayant perçu du POLE EMPLOI la somme de 26.319,20 euros, cette somme devra être déduite et la SAS BONGARD sera condamnée à verser à M. L... la somme de 61.423 euros au titre de sa perte de revenus. M. V... ne rapporte aucun élément quant à l'existence d'une perte de chance d'obtenir des avantages salariaux tels que primes de congés annuels ou majorations pour heures supplémentaires. II sera débouté de ce chef de demande. S'agissant du préjudice moral, un licenciement cause inévitablement un préjudice moral, qui au regard des éléments produits, sera évalué forfaitairement à la somme de 1.500 euros. L'exécution provisoire, compatible avec la nature de l'affaire est nécessaire en raison de son ancienneté, et surtout de la nature salariale des créances sera ordonnée. Il serait inéquitable que M. G... L... supporte l'intégralité de ses frais irrépétîbles. En conséquence, la S.A.S. BONGARD sera condamnée à lui verser la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. La S.A.S. BONGARD succombant sera condamnée aux dépens.

ALORS, en premier lieu, QUE pour allouer au salarié la somme de 1 500 euros au titre de la réparation du préjudice moral subi du fait de l'annulation de la première procédure de licenciement, la cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que, s'agissant du préjudice moral, un licenciement causait inévitablement un préjudice moral qui, au regard de éléments produits, sera évalué forfaitairement à la somme de 1 500 euros ; que le premier moyen a permis de démontrer que le demande d'indemnisation fondée sur l'article L. 2422-4 du code du travail au titre de la réparation préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration n'était pas fondée ; que la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen entrainera, par voie de conséquence et par application de l'article 624 du Code de procédure civile, la censure des chefs de l'arrêt ayant fait droit à la demande d'indemnisation du préjudice moral du salarié ;

ALORS, en second lieu, et en tout état de cause, QUE, l'employeur qui licencie un salarié sur le fondement d'une autorisation par la suite annulée ne commet aucune faute ; que les juges ne peuvent tirer de la seule demande d'indemnisation formulée par le salarié l'existence d'un préjudice moral nécessaire ; qu'en l'espèce, pour allouer au salarié la somme de 1 500 euros au titre de la réparation du préjudice moral subi du fait de l'annulation de la première procédure de licenciement, la cour d'appel a considéré, par motifs adoptés, que, s'agissant du préjudice moral, un licenciement causait inévitablement un préjudice moral qui, au regard de éléments produits, serait évalué forfaitairement à la somme de 1 500 euros ; qu'en retenant l'existence d'un préjudice nécessaire, la cour d'appel a violé l'article L. 2422-4 du code du travail, ensemble de l'article 1382, devenu 1240, du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-10534
Date de la décision : 08/07/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Licenciement - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Annulation par l'autorité administrative - Caractère définitif - Conditions - Détermination - Portée

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Licenciement - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Annulation par l'autorité administrative - Préjudice - Réparation - Condition CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Salarié protégé - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Annulation par l'autorité administrative - Caractère définitif - Conditions - Détermination - Portée

Une décision d'annulation d'une autorisation administrative devient définitive lorsqu'il n'a pas été formé de recours dans les délais, ou lorsqu'aucune voie de recours ordinaire ne peut plus être exercée à son encontre. Le fait qu'après l'annulation par une décision définitive de l'autorisation administrative de licenciement, l'employeur puisse reprendre la procédure de licenciement pour les mêmes faits et demander une nouvelle autorisation de licenciement est sans emport sur le caractère définitif de la décision d'annulation de la première décision d'autorisation et sur l'application des dispositions de l'article L. 2422-4 du code du travail


Références :

article L. 2422-4 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 14 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2020, pourvoi n°19-10534, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Cathala
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 11/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10534
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