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02/07/2020 | FRANCE | N°19-12753

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 02 juillet 2020, 19-12753


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 juillet 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 664 F-P+B+I

Pourvoi n° E 19-12.753

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 JUILLET 2020

La société du Quai, société civile immobilière, dont le siè

ge est [...] , a formé le pourvoi n° E 19-12.753 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Colmar (chambre 12), dans le litige...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 juillet 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 664 F-P+B+I

Pourvoi n° E 19-12.753

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 JUILLET 2020

La société du Quai, société civile immobilière, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° E 19-12.753 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Colmar (chambre 12), dans le litige l'opposant à la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société du Quai, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 27 mai 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 20 décembre 2018) et les productions, par ordonnance du 6 octobre 2017, un tribunal d'instance, statuant comme tribunal de l'exécution, a ordonné, à la requête de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne (la banque), la vente forcée de biens immobiliers appartenant à la SCI du Quai (la SCI).

2. Sur le pourvoi immédiat formé par cette dernière le 20 octobre 2017, le tribunal a, par ordonnance du 17 novembre 2017, dit n'y avoir lieu à rétracter sa décision et transmis le dossier à une cour d'appel.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La SCI fait grief à l'arrêt de déclarer son pourvoi immédiat mal fondé et de confirmer l'ordonnance du tribunal de l'exécution forcée immobilière de Strasbourg en date du 6 octobre 2017 et d'ordonner la vente forcée des immeubles sis à Strasbourg et cadastrés comme suit : livre foncier de Strasbourg, section [...] , lots 7 et 10, à hauteur de la somme de 227 806,03 euros selon commandement de payer aux fins de vente forcée immobilière du 19 septembre 2017, de commettre M. E... W..., notaire à Strasbourg, en vue de procéder aux opérations de vente forcée immobilière, de dire que la mise à prix serait fixée conformément à l'article 147 de la loi civile du 1er juin 1924 et de dire que le notaire commis devrait respecter le rang des créanciers hypothécaires inscrits en cas de distribution ultérieure, en se prononçant au vu des conclusions récapitulatives de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne en date du 16 novembre 2018 alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en se fondant, pour déclarer le pourvoi immédiat de la SCI du Quai mal fondé sur les conclusions récapitulatives de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne en date du 16 novembre 2018 qui n'avaient pourtant pas été notifiées à SCI du Quai, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour :

Vu les articles 672 et 673 du code de procédure civile et l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales :

4. Selon le premier de ces textes, la signification des actes entre avocats est constatée par l'apposition du cachet et de la signature de l'huissier de justice sur l'acte et sa copie avec l'indication de la date et du nom de l'avocat destinataire. Selon le deuxième, la notification directe des actes entre avocats s'opère par la remise de l'acte en double exemplaire à l'avocat destinataire, lequel restitue aussitôt à son confrère l'un des exemplaires après l'avoir daté et visé.

5. L'arrêt attaqué se prononce sans débat au visa de conclusions de la banque du 16 novembre 2018, postérieures au pourvoi immédiat, et sur lesquelles avait été apposé un tampon de l'ordre des avocats de Strasbourg faisant état de leur notification et revêtu de la signature de l'avocat de la banque.

6. En statuant ainsi, sans vérifier que ces conclusions avaient été notifiées à l'avocat de la SCI, et que cette dernière en avait eu connaissance et avait été mise en mesure d'y répondre, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne et la condamne à payer à la SCI du Quai la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du deux juillet deux mille vingt, et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour la société du Quai.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La SCI du Quai fait grief à l'arrêt attaqué rectifié d'avoir déclaré son pourvoi immédiat mal fondé et d'avoir confirmé l'ordonnance du tribunal de l'exécution forcée immobilière de Strasbourg en date du 6 octobre 2017, et d'avoir ainsi ordonné la vente forcée des immeubles sis à Strasbourg et cadastrés comme suit : livre foncier de Strasbourg, section [...] , lots 7 et 10, à hauteur de la somme de 227.806,03 euros selon commandement de payer aux fins de vente forcée immobilière du 19 septembre 2017, d'avoir commis Me E... W..., notaire à Strasbourg, en vue de procéder aux opérations de vente forcée immobilière, d'avoir dit que la mise à prix serait fixée conformément à l'article 147 de la loi civile du 1er juin 1924 et d'avoir dit que le notaire commis devrait respecter le rang des créanciers hypothécaires inscrits en cas de distribution ultérieure, en se prononçant au vu des conclusions récapitulatives de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne en date du 16 novembre 2018 ;

ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en se fondant, pour déclarer le pourvoi immédiat de la SCI du Quai mal fondé sur les conclusions récapitulatives de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne en date du 16 novembre 2018 qui n'avaient pourtant pas été notifiées à SCI du Quai, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
subsidiaire

La SCI du Quai fait grief à l'arrêt attaqué rectifié d'avoir déclaré son pourvoi immédiat mal fondé et d'avoir confirmé l'ordonnance du tribunal de l'exécution forcée immobilière de Strasbourg en date du 6 octobre 2017, et d'avoir ainsi ordonné la vente forcée des immeubles sis à Strasbourg et cadastrés comme suit : livre foncier de Strasbourg, section [...] , lots 7 et 10, à hauteur de la somme de 227.806,03 euros selon commandement de payer aux fins de vente forcée immobilière du 19 septembre 2017, d'avoir commis Me E... W..., notaire à Strasbourg, en vue de procéder aux opérations de vente forcée immobilière, d'avoir dit que la mise à prix serait fixée conformément à l'article 147 de la loi civile du 1er juin 1924 et d'avoir dit que le notaire commis devrait respecter le rang des créanciers hypothécaires inscrits en cas de distribution ultérieure ;

AUX MOTIFS QU'il est constant que le prêt de 2006 a déjà fait l'objet d'une déchéance du terme qui a été sanctionnée tant par le juge du fond que par le juge de l'exécution forcée immobilière ; que la banque populaire a prononcé une nouvelle fois la déchéance du terme le 26 mai 2017 et qu'un commandement aux fins de vente forcée immobilière a été signifié le 19 septembre 2017 ; que s'agissant de la nullité du commandement, il résulte de l'article 673 du code de procédure civile ancien que le commandement comprend la mention du titre exécutoire, la procuration du fondé de pouvoir et l'indication de la nature et de la consistance des immeubles et du tribunal où la saisie est pratiquée ; que les autres mentions ne sont pas applicables en droit local alors qu'il n'y a pas de publication du commandement ; que d'une part, la nullité du commandement ne saurait résulter d'un défaut de mention des intérêts échus, ni de l'absence des dispositions contractuelles prévoyant l'indemnité forfaitaire telle que mise en compte, ni de la contestation du décompte, alors qu'aucun règlement d'échéances n'est invoqué ni démontré et que seule une « avance » résultant du recalcul des intérêts au taux légal a permis le règlement des échéances jusqu'au mois de janvier 2017 ; que d'autre part, la nullité du commandement ne peut être encourue quant aux mentions exigées par l'article 673 dont l'absence n'est pas précisée et qui ne justifie d'aucun grief ; que le seul grief invoqué est celui tiré de l'imprécision de la dette alors que contractuellement, il est prévu que tout terme impayé à son échéance sera converti en euros ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le commandement de payer aux fins de vente forcée délivré le 19 septembre 2017 comporte les mentions essentielles exigées par le droit local applicable, à savoir le titre exécutoire, les montants réclamés en principal, frais et intérêts ainsi que la désignation des biens immobiliers, objets de la vente forcée, avec leur désignation cadastrale ; que qui plus est et en application de l'article 159, alinéa 2 de la loi du 1er juin 1924, les éventuels vices de procédure ne sont sanctionnés par la nullité qu'en cas de grief, lequel n'est en l'espèce ni prouvé ni allégué ;
(
) que la créance de la banque est bel et bien certaine, liquide et exigible ;
que la créance est contractuellement convertie en euros, en raison de la déchéance du terme et que les sommes réclamées tiennent compte des modalités de calcul des intérêts au taux légal, tels que définis par le tribunal de grande instance ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent se contenter d'une motivation purement formelle et statuer par voie d'affirmation ; qu'en se contentant d'affirmer, pour juger que la créance de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne était fondée, que les sommes réclamées tenaient compte des modalités de calcul des intérêts au taux légal, et que le trop-perçu des intérêts conventionnels n'avaient permis le règlement des échéances que jusqu'au mois de janvier 2017, sans autre précision, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner, fût-ce sommairement, les éléments de preuve produits par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se contentant d'affirmer, pour juger que la créance de la Banque populaire Alsace Lorraine Champagne était fondée, que les sommes réclamées tenaient compte des modalités de calcul des intérêts au taux légal, et que le trop-perçu des intérêts conventionnels n'avaient permis le règlement des échéances que jusqu'au mois de janvier 2017, sans même examiner, fût-ce pour l'écarter, le décompte de l'expert-comptable de la SCI du Quai qui était de nature à démontrer le contraire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-12753
Date de la décision : 02/07/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Notification - Notification entre avocats - Modalités - Détermination - Portée

PROCEDURE CIVILE - Droit de la défense - Conclusions - Notification - Notification entre avocats - Régularité - Vérification - Office du juge PROCEDURE CIVILE - Notification - Notification entre avocats - Signification - Mentions OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS - Huissier de justice - Acte - Signification - Signification entre avocats - Apposition du cachet et de la signature de l'huissier - Nécessité

Selon l'article 672 du code de procédure civile, la signification des actes entre avocats est constatée par l'apposition du cachet et de la signature de l'huissier de justice sur l'acte et sa copie avec l'indication de la date et du nom de l'avocat destinataire. Selon l'article 673 du même code, la notification directe des actes entre avocats s'opère par la remise de l'acte en double exemplaire à l'avocat destinataire, lequel restitue aussitôt à son confrère l'un des exemplaires après l'avoir daté et visé. Viole ces dispositions la cour d'appel qui statue sans débat au visa de conclusions comportant la mention imprimée selon laquelle elles avaient été notifiées à l'avocat constitué par la partie adverse (arrêt n° 1, pourvoi n° 19-12.752) ou sur lesquelles avait été apposé un tampon de l'ordre des avocats d'un barreau faisant état de leur notification et revêtu de la signature de l'avocat auteur des conclusions (arrêt n° 2, pourvoi n° 19-12.753), sans vérifier que ces conclusions avaient été notifiées dans les formes requises et que la partie adverse avait été mise en mesure d'y répondre


Références :

articles 672 et 673 du code de procédure civile

article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 20 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 02 jui. 2020, pourvoi n°19-12753, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre
Avocat(s) : SCP Buk Lament-Robillot, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12753
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