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01/07/2020 | FRANCE | N°19-10830

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 juillet 2020, 19-10830


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er juillet 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 553 F-D

Pourvoi n° Q 19-10.830

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 1ER JUILLET 2020

Mme I... W..., domiciliée [...] , a formé le pour

voi n° Q 19-10.830 contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2018 par la cour d'appel de Basse-Terre (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er juillet 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 553 F-D

Pourvoi n° Q 19-10.830

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 1ER JUILLET 2020

Mme I... W..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° Q 19-10.830 contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2018 par la cour d'appel de Basse-Terre (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société [...], société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rinuy, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme W..., de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [...], après débats en l'audience publique du 20 mai 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rinuy, conseiller rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 3 décembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 22 mars 2017, pourvoi n° 15-23.103), Mme W... a été engagée le 7 mai 2007 en qualité de comptable par la société [...]. Le 7 avril 2011, la salariée a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur. Le 27 avril 2011, l'employeur a annoncé la tenue d'élections de délégués du personnel. Le 7 juin 2011, l'employeur a fait signifier à la salariée une convocation à un entretien préalable à son éventuel licenciement et, le même jour, le syndicat Union des travailleurs de la santé - UGTG a communiqué la liste de ses candidats dont la salariée. Celle-ci a été licenciée pour faute grave le 22 juin 2011. Par jugement du 3 novembre 2011, le tribunal d'instance de Basse-Terre a déclaré recevable la candidature de l'intéressée aux élections professionnelles et annulé ces élections. Le 14 décembre 2011, la salariée a sollicité sa réintégration au poste de comptable, à laquelle l'employeur s'est opposé.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en nullité du licenciement pour non respect du statut protecteur et de ses demandes indemnitaires et en dommages-intérêts afférentes, alors :

« 1°/ que le salarié bénéficie de la protection instituée en faveur des candidats aux élections professionnelles lorsqu'à la date d'envoi de sa convocation à l'entretien préalable au licenciement, l'employeur avait connaissance de sa candidature ou de l'imminence de celle-ci ; que les mentions qui figurent sur l'acte de signification délivré par l'huissier instrumentaire en ce qui concerne notamment la date et l'heure de délivrance, font foi jusqu'à inscription de faux ; qu'en jugeant que la société [...] avait eu connaissance de la candidature de Mme W... aux prochaines élections professionnelles le 7 juin 2011 à 12h32, postérieurement à la remise de la convocation à son entretien préalable ce qui la privait du statut protecteur, au seul motif que l'huissier instrumentaire avait attesté, six ans après les faits, lui avoir signifié sa convocation à son domicile personnel, ce jour-là, avant midi, quand sur l'acte de signification l'huissier de justice avait mentionné la date du 7 juin 2011 à 14h45, postérieure à la connaissance par l'employeur de sa candidature aux prochaines élections, la cour d'appel qui ne pouvait prendre en considération les dires de l'huissier instrumentaire dès lors qu'ils étaient contraires aux mentions qu'il avait lui-même fait figurer dans l'acte de signification et qui faisaient foi jusqu'à inscription de faux, a violé les articles 658 du code de procédure civile et L. 2411-7 du code du travail ;

2°/ qu'en écartant ''exemplaire de la copie de notification produit par la salariée'' au motif que la mention manuscrite d'un ''horaire de remise'' à 14h45 serait d'une authenticité douteuse, quand l'acte produit par la salariée était l'acte de signification par l'huissier de justice, de sa convocation à un entretien préalable à son licenciement, dont l'horaire de remise en main propre à son domicile faisait foi jusqu'à inscription de faux, la cour d'appel qui en a jugé autrement, a violé les articles 658 du code de procédure civile et L. 2411-7 du code du travail ;

3°/ que l'acte de signification d'un d'huissier de justice tient lieu d'original pour la partie à laquelle elle a été remise ou adressée ; qu'en écartant les mentions figurant sur la ''copie de la notification'' de sa convocation à entretien préalable qui avait été remise en main propre à Mme W... par voie d'huissier, en raison de ''l'absence de mention d'horaire sur le second original versé aux débats par la société'', quand seule la mention inscrite sur l'acte de signification, faisait foi de l'heure à laquelle sa convocation lui avait été remise, le 7 juin 2011 à 14h45, par l'huissier instrumentaire, la cour d'appel a violé les articles 658 du code de procédure civile et L. 2411-7 du code du travail. »

Réponse de la Cour

3. Pour l'application des dispositions de l'article L. 2411-7 du code du travail, c'est au moment de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable au licenciement que l'employeur doit avoir connaissance de la candidature du salarié ou de son imminence.

4. La cour d'appel ayant constaté que la société avait adressé par courriel du 7 juin 2011 à 9 heures 11, à son conseil, le courrier de convocation à l'entretien préalable litigieux, que cette convocation avait été signifiée le même jour et que la liste des candidatures sur laquelle figurait la salariée avait été adressée à l'employeur par télécopie le 7 juin 2011, à 12 heures 37, le moyen est inopérant.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de juger que son licenciement était justifié par une faute grave, alors :

« 1°/ que n'est pas fautif le refus du salarié d'exécuter des tâches qui n'entrent pas dans ses prérogatives contractuelles quand bien même il a accepté, pendant un temps, de les accomplir ; qu'en jugeant fautif le refus de Mme W..., par courrier du 3 mars 2011, d'effectuer la comptabilité des huit sociétés gérées par M. L... en plus de celle de la société [...] pour laquelle elle avait été engagée, au seul motif que par le passé, « elle exerçait des tâches de cette nature pour l'ensemble du groupe » ce qui ne permettait pas de retenir que ces tâches qui n'étaient pas stipulées à son contrat de travail, auraient relevé de ses fonctions contractuelles, la cour d'appel a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil et les articles L. 1221-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°/ que ne saurait caractériser une faute grave justifiant son licenciement, le refus du salarié d'accomplir certaines tâches en raison de la surcharge de travail qui en résulte ; qu'en jugeant que le refus de Mme W..., au-delà de ses tâches comptables pour le compte de la société [...], de réaliser la préparation de la comptabilité de huit autres sociétés, était constitutif d'une faute grave, sans avoir recherché si, comme elle le soutenait dans ses conclusions d'appel, son refus n'était pas justifié par la surcharge de travail que ces missions générait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que la salariée s'était refusée à intervenir sur les dossiers du groupe alors qu'elle avait pour rôle d'en assurer le traitement comptable, ce qui avait contraint le cabinet d'expertise comptable à retarder la sortie programmée des comptes et de la liasse fiscale, entraînant des majorations ou pénalités, et rendu nécessaire la formation du personnel comptable dans l'urgence pour pallier les refus d'exécution des tâches par la salariée. Elle a pu en déduire que les manquements professionnels de la salariée, qui ont entraîné une perturbation notable de l'organisation du travail et ont eu des répercussions sur les procédures comptables, compte tenu de l'existence d'une précédente sanction, justifiaient son licenciement pour faute grave.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme W... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme W....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme W... de sa demande en nullité du licenciement pour non respect du statut protecteur et de ses demandes indemnitaires et en dommages-intérêts afférentes ;

AUX MOTIFS QUE l'article L. 2411-7 du code du travail dispose que l'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de délégué du personnel, à partir de la publication des candidatures ; que la durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur ; que cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ; qu'il est établi par les pièces versées aux débats que la société [...] a adressé par courriel du 7 juin 2011 à 9h11, à son conseil, le courrier de convocation à un entretien préalable litigieux, aux fins de vérifications par ledit conseil ; qu'il résulte de l'attestation de l'huissier instrumentaire en date du 23 juin 2017 que la notification de la convocation précitée à l'entretien préalable, délivrée le 7 juin 2011 à Mme W... I..., a été remise à l'intéressée dans la matinée avant 12 heures ; que la circonstance que l'exemplaire de la copie de la notification produit par la salariée comporte la mention manuscrite d'un horaire de remise, dont l'authenticité s'avère discutable compte tenu de la différence d'écriture avec celle de la date portée sur le même acte et de l'absence de mention d'horaire sur le second original versé aux débats par la société, ne saurait valablement remettre en cause le moment de la remise avant 12 heures attestée par l'huissier instrumentaire ; que de même, la salariée ne peut davantage remettre en cause l'horaire de signification de la convocation à l'entretien préalable, au motif d'une impossibilité temporelle et géographique de déplacement de l'huissier jusqu'à son lieu de travail en vue de la signification de l'acte, comme sollicité par l'employeur, alors qu'il est établi que celui-ci lui a été signifié à personne à son domicile ; qu'il ressort des mentions figurant sur la lettre du 7 juin 2011 par laquelle le syndicat U. T. S.- U. G. T. G. a adressé à l'employeur la liste de ses candidats en vue des élections du délégué du personnel, sur laquelle figure Mme W..., que ce courrier a été envoyé à l'employeur par télécopie le 7 juin 2011 à 12h37 ; que par suite, la cour constate qu'il résulte des éléments ci-dessus, que, d'une part, la remise de la lettre de convocation à l'entretien préalable a été nécessairement faite par l'huissier avant 12 heures, le 7 juin 2011 et, d'autre part, que l'engagement de la procédure de licenciement résultant de cette remise, est intervenue avant la connaissance par l'employeur de la candidature de la salariée aux élections professionnelles, qui était effective à 12h37 ; que par suite, la salariée, qui ne peut nullement se prévaloir d'un statut protecteur au moment de l'engagement de la procédure de licenciement, sera déboutée de ses demandes de nullité de licenciement, de dommages et intérêts pour violation du statut protecteur et de versement de sa rémunération qu'elle aurait perçue depuis son licenciement ; que la cour observe que la salariée, qui ne demande plus en cause d'appel sa réintégration, est réputée avoir abandonné ce chef de demande » ;

1°) ALORS QUE le salarié bénéficie de la protection instituée en faveur des candidats aux élections professionnelles lorsqu'à la date d'envoi de sa convocation à l'entretien préalable au licenciement, l'employeur avait connaissance de sa candidature ou de l'imminence de celle-ci ; que les mentions qui figurent sur l'acte de signification délivré par l'huissier instrumentaire en ce qui concerne notamment la date et l'heure de délivrance, font foi jusqu'à inscription de faux ; qu'en jugeant que la société [...] avait eu connaissance de la candidature de Mme W... aux prochaines élections professionnelles le 7 juin 2011 à 12h32, postérieurement à la remise de la convocation à son entretien préalable ce qui la privait du statut protecteur, au seul motif que l'huissier instrumentaire avait attesté, six ans après les faits, lui avoir signifié sa convocation à son domicile personnel, ce jour-là, avant midi, quand sur l'acte de signification l'huissier de justice avait mentionné la date du 7 juin 2011 à 14h45, postérieure à la connaissance par l'employeur de sa candidature aux prochaines élections, la cour d'appel qui ne pouvait prendre en considération les dires de l'huissier instrumentaire dès lors qu'ils étaient contraires aux mentions qu'il avait lui-même fait figurer dans l'acte de signification et qui faisaient foi jusqu'à inscription de faux, a violé les articles 658 du code de procédure civile et L. 2411-7 du code du travail ;

2°) ALORS QU'en écartant « l'exemplaire de la copie de notification produit par la salariée » au motif que la mention manuscrite d'un « horaire de remise » à 14h45 serait d'une authenticité douteuse, quand l'acte produit par la salariée était l'acte de signification par l'huissier de justice, de sa convocation à un entretien préalable à son licenciement, dont l'horaire de remise en main propre à son domicile faisait foi jusqu'à inscription de faux, la cour d'appel qui en a jugé autrement, a violé les articles 658 du code de procédure civile et L. 2411-7 du code du travail ;

3°) ALORS QUE l'acte de signification d'un d'huissier de justice tient lieu d'original pour la partie à laquelle elle a été remise ou adressée ; qu'en écartant les mentions figurant sur la « copie de la notification » de sa convocation à entretien préalable qui avait été remise en main propre à Mme W... par voie d'huissier, en raison de « l'absence de mention d'horaire sur le second original versé aux débats par la société », quand seule la mention inscrite sur l'acte de signification, faisait foi de l'heure à laquelle sa convocation lui avait été remise, le 7 juin 2011 à 14h45, par l'huissier instrumentaire, la cour d'appel a violé les articles 658 du code de procédure civile et L. 2411-7 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, d'avoir jugé que le licenciement de Mme W... était justifié par une faute grave ;

AUX MOTIFS QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et il appartient à l'employeur d'en démontrer l'existence ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 22 juin 2011, signifiée par acte d'huissier le 23 juin 2011, qui fixe les limites du litige, reproche à la salariée :
- une attitude de blocage systématique dans l'entreprise,
- la restriction de ses fonctions dans l'entreprise en redéfinissant de manière unilatérale l'étendue de ses tâches,
- son refus de travailler en collaboration avec l'expert comptable de l'entreprise,
- les conséquences de son attitude ayant entraîné un retard préjudiciable pour l'entreprise, notamment d'ordre financier,
- son comportement ayant mis en danger la viabilité de l'établissement,
- son comportement ayant désorganisé le travail de l'équipe comptable,
- le défaut de comptabilisation d'une facture dans le bilan comptable, faussant ainsi les résultats annuels,
- la non prise en compte de la facture du commissaire aux comptes,
- la persistance de son comportement, malgré un avertissement du 13 avril 2011,
- les propos diffamatoires et insultants tenus à l'égard du Président du conseil d'Administration le lundi 6 juin 2011 ;
Qu'il ressort des pièces du dossier que Mme W... a été embauchée par la SA [...] en qualité de comptable, observation étant faite que son contrat de travail prévoyait qu'en fonction des nécessités d'organisation du travail, la salariée pouvait être affectée aux divers postes correspondant à la nature de son emploi ; que par lettre du 3 mars 2011, Mme W... a informé son employeur que, suite à l'absence d'accord sur la revalorisation de son salaire, ses tâches seront limitées à la seule comptabilité de la SA [...] ; que par courrier du 13 avril 2011, l'employeur lui a notifié un avertissement lié à son refus systématique de s'impliquer dans la comptabilité et résultant de sa décision de limiter ses fonctions de comptable à la seule SA [...] ; qu'il est établi par le cabinet d'expertise comptable du 6 juin 2011 que Mme W... s'est refusée à intervenir sur les dossiers du groupe [...], en raison selon l'intéressée, d'un contrat de travail qui ne la liait qu'à la société [...] et non aux autres sociétés du groupe ; qu'il résulte de ce même rapport que cette interprétation s'avère inadéquate avec la réalité juridique et économique du groupe et qu'elle avait pour rôle d'assurer le traitement comptable du groupe, compte tenu des relations comptables entre les sociétés et la connaissance de celles-ci par Mme W... ; qu'il résulte du rapport précité que l'attitude de la salariée a contraint le cabinet d'expertise comptable à retarder la sortie programmée des comptes et de la liasse fiscale, qui aura au moins pour conséquence d'entraîner des majorations ou pénalités liées à une déclaration finale et à un paiement final tardif de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice 2010 ; que ce même rapport met également en évidence la perturbation du service, la formation du personnel comptable dans l'urgence ayant été rendue nécessaire dans l'urgence pour pallier les refus d'exécution des tâches par la salariée ; qu'il résulte également du rapport du 14 juin 2011 du rapport du commissaire aux comptes que les comptes annuels pour l'exercice clos au 31 décembre 2010 présentent plusieurs anomalies relatives à l'omission de factures, en particulier celle mentionnée dans la lettre de licenciement ; que la cour observe qu'à l'exception du grief relatif au défaut de prise en compte de la facture de l'expert comptable et des propos diffamatoires et insultants reprochés dans la lettre de licenciement, les manquements allégués par l'employeur sont établis ; que la salariée ne saurait valablement invoquer le bien fondé de sa décision de limiter ses fonctions de comptable à la seule SA [...], alors qu'il résulte des pièces du dossier qu'elle exerçait des tâches de cette nature pour l'ensemble du groupe ; qu'il est également établi que les griefs retenus à son encontre, qui relèvent de la persistance d'un comportement fautif et n'ont été connus en détail qu'à la date des rapports précités, soit à l'issue de l'avertissement du 13 avril 2011 et sont distincts de ceux ayant déjà fait l'objet d'une précédente sanction ; que les manquements professionnels de la salariée, qui ont entraîné une perturbation notable de l'organisation du travail et ont eu des répercussions sur les procédures comptables, compte tenu de l'existence d'une précédente sanction, sont de nature à justifier son licenciement pour faute grave ; que par suite, le jugement est infirmé sur ce point ;

1°) ALORS QUE n'est pas fautif le refus du salarié d'exécuter des tâches qui n'entrent pas dans ses prérogatives contractuelles quand bien même il a accepté, pendant un temps, de les accomplir ; qu'en jugeant fautif le refus de Mme W..., par courrier du 3 mars 2011, d'effectuer la comptabilité des huit sociétés gérées par M. L... en plus de celle de la société [...] pour laquelle elle avait été engagée, au seul motif que par le passé, « elle exerçait des tâches de cette nature pour l'ensemble du groupe » ce qui ne permettait pas de retenir que ces tâches qui n'étaient pas stipulées à son contrat de travail, auraient relevé de ses fonctions contractuelles, la cour d'appel a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil et les articles L. 1221-1, L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°) ALORS QUE ne saurait caractériser une faute grave justifiant son licenciement, le refus du salarié d'accomplir certaines tâches en raison de la surcharge de travail qui en résulte ; qu'en jugeant que le refus de Mme W..., au-delà de ses tâches comptables pour le compte de la société [...], de réaliser la préparation de la comptabilité de huit autres sociétés, était constitutif d'une faute grave, sans avoir recherché si, comme elle le soutenait dans ses conclusions d'appel, son refus n'était pas justifié par la surcharge de travail que ces missions générait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-10830
Date de la décision : 01/07/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 03 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 jui. 2020, pourvoi n°19-10830


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10830
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