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17/06/2020 | FRANCE | N°19-80718

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 juin 2020, 19-80718


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° E 19-80.718 FS-D

N° 984

EB2
17 JUIN 2020

REJET

M. MOREAU conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 17 JUIN 2020

M. Q... H... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises des Yvelines, en date du 21 décembre 2018, qui, pour meurtres

aggravés, l'a condamné à réclusion criminelle à perpétuité.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° E 19-80.718 FS-D

N° 984

EB2
17 JUIN 2020

REJET

M. MOREAU conseiller le plus ancien faisant fonction de président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 17 JUIN 2020

M. Q... H... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises des Yvelines, en date du 21 décembre 2018, qui, pour meurtres aggravés, l'a condamné à réclusion criminelle à perpétuité.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Sur le rapport de M. Guéry, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Q... H..., les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. B... F..., partie civile, et les conclusions de Mme Philippe, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 20 mai 2020 où étaient présents M. Moreau, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Guéry, conseiller rapporteur, Mme Drai, M. de Larosière de Champfeu, Mme Slove, Mme Issenjou, M. Turbeaux, conseillers de la chambre, Mmes Carbonaro, Barbé, M. Mallard, conseillers référendaires, Mme Philippe, avocat général référendaire, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. Q... H... a été poursuivi pour avoir à [...], le [...], volontairement donné la mort à V... S..., avec cette circonstance que ce meurtre a été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime, et pour avoir à [...], le [...], volontairement donné la mort à T... F..., avec cette circonstance que ce meurtre a été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime.

3. Par arrêt du 18 mai 2017, la cour d'assises de la Moselle l'a déclaré coupable et l'a condamné à la peine de réclusion criminelle à perpétuité.

4. M. H... et le ministère public ont interjeté appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le cinquième moyen

5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il est fait grief au procès-verbal des débats de mentionner, à tort, que la cour et le jury « sont entrés dans la chambre des délibérations », et de ne pas faire état de la copie du dossier de la procédure, alors :

« 1°/ qu'à l'issue des débats, la cour et le jury doivent se retirer dans la chambre des délibérations et le président de la cour doit donner lecture du texte d'une instruction aux jurés qui doit être affichée « dans le lieu le plus apparent de la chambre des délibérations » ; qu'en l'espèce, le délibéré n'a pas eu lieu dans la chambre des délibérations, contrairement à ce que mentionne le procès-verbal des débats, mais dans la salle d'audience dans laquelle en outre, l'instruction aux jurés n'est pas affichée ; que dès lors la cour d'assises a méconnu les dispositions des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 353, 355, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ qu'à l'issue des débats, le dossier de la procédure doit être déposé entre les mains du greffier de la cour d'assises et seuls sont conservés, en vue de la délibération, la décision de renvoi, l'arrêt de la cour d'assises ayant statué en premier ressort et sa feuille de motivation ; que le procès-verbal des débats doit être complet et retracer l'intégralité des événements ; que se trouvait, dans la salle d'audience, outre le dossier de la procédure, une copie de ce dossier ; que le procès-verbal des débats s'abstient de toute mention sur le point de savoir si le président a conservé, en vue de la délibération, cette copie du dossier de la procédure ; qu'en l'absence de cette mention, la Cour de cassation n'est pas en mesure de vérifier que les dispositions des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 347, 591 et 593 du code de procédure pénale ont été respectées. »

Réponse de la Cour

7. Le procès-verbal des débats indique que le président a ordonné que le dossier de la procédure soit déposé entre les mains du greffier, à l'exception de la décision de renvoi et de l'arrêt de la cour d'assises ayant statué en premier ressort ainsi que de la feuille de motivation qui l'accompagne, qu'il a conservés en vue de la délibération et que le dossier a été remis au greffier.

8. Il mentionne par ailleurs que le président a donné lecture de l'instruction contenue en l'article 353 du code de procédure pénale puis que la cour et le jury de jugement ainsi que les jurés supplémentaires et l'assesseur suppléant, ces derniers autorisés à assister au délibéré mais ne pouvant y participer que s'il sont amenés à remplacer un juré titulaire empêché, sont entrés dans la chambre des délibérations.

9. Aucune contradiction ne peut être opposée à ces constatations formelles du procès-verbal si ce n'est au moyen d'une inscription de faux. La requête prévue par l'article 647 du code de procédure pénale a été rejetée par ordonnance du premier président de la Cour de cassation le 22 juillet 2019.

10. Aucun article du code de procédure pénale ne prévoit que la copie de la procédure obtenue par les avocats doive être remise, avant que la cour et le jury se retire, entre les mains du greffier.

11. Le moyen doit, en conséquence, être rejeté.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a répondu par l'affirmative aux questions n°2 et n°4 ainsi libellées « Le meurtre spécifié à la question n°1 a-t-il été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime ? », et « Le meurtre spécifié à la question n°3 a-t-il été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime ? », alors « qu'en application de l'article 349 du code de procédure pénale, la cour et le jury doivent, à peine de nullité, être interrogés sur toutes les circonstances constitutives de l'infraction ; que la question relative à la circonstance aggravante doit également énoncer les faits reprochés ; que les questions n°2 et n°4 relatives aux circonstances aggravantes, formulées abstraitement, n'interrogent pas la cour et le jury sur les faits imputables à l'accusé caractérisant le crime ayant précédé, accompagné ou suivi le meurtre, et constitutif de la circonstance aggravante ; que dès lors, la cour d'assises a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 295 et 304 de l'ancien code pénal devenu les articles 221-1 et 221-2 du code pénal, préliminaire, 349 et 593 du code de procédure pénale. »

13. La feuille de question indique que la cour et le jury ont répondu à la question n°2, ainsi libellée "Le meurtre spécifié à la question n°1 a-t-il été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime ?", et à la question n°4 ainsi rédigée « Le meurtre spécifié à la question n°3 a-t-il été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime ? ».

Réponse de la Cour

14. Il résulte du procès-verbal des débats qu'à l'issue de l'instruction à l'audience, le président a déclaré que les questions auxquelles la cour et le jury auraient à répondre seraient posées dans les termes de la décision de renvoi. Les parties n'ont présenté aucune observation.

15. Il appartenait à l'accusé ou à son avocat, s'ils entendaient contester la formulation des questions n° 2 et 4, d'élever un incident contentieux, dans les formes prévues par l'article 352 du code de procédure pénale ;

16. Le moyen doit en conséquence être écarté.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

17. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. H... coupable tout à la fois de meurtre commis à l'encontre d'V... S... avec la circonstance aggravante que ce meurtre était précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime et de meurtre commis à l'encontre de T... F... avec la circonstance aggravante que ce meurtre était précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime, alors « que des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent être retenus comme élément constitutif d'une infraction et circonstance aggravante d'une autre infraction ; qu'en retenant des faits identiques pour caractériser les infractions de meurtre et les circonstances aggravantes de crime précédant, accompagnant ou suivant chacune des infractions de meurtre, la cour d'assises a méconnu le principe ne bis in idem et les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 du protocole n°7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 295 et 304 de l'ancien code pénal devenus les articles 221-1 et 221-2 du code pénal, préliminaire, 6 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

18. La Cour et le jury ont répondu affirmativement à la question n°2 demandant si le meurtre commis sur la personne d'V... S... avait été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime et à la question n°4 demandant si le meurtre commis sur la personne de T... F... avait été précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime.

19. En posant ces questions, le président n'a pas méconnu le principe et les articles visés au moyen.

20. En effet, si un même fait ne peut être retenu comme constitutif à la fois d'un crime et d'une circonstance aggravante accompagnant une autre infraction, rien ne s'oppose à ce qu'une même circonstance soit relevée comme aggravant des crimes distincts.

21. Le moyen doit, en conséquence, être rejeté.

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

22. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. H... coupable de meurtres précédés, accompagnés ou suivis d'un autre crime, tandis que la feuille de motivation n'établit pas les éléments à charge qui ont convaincu la cour d'assises de la culpabilité de l'accusé, alors :

« 1°/ qu'il appartient à la cour d'assises de motiver sa décision en énonçant les principaux éléments à charge qui l'ont convaincu de la culpabilité de l'accusé ; que cette motivation ne peut pas résulter d'éléments à charge contradictoires ; que la feuille de motivation mentionne comme heure des décès 17 heures 15 et 17 heures 30 tandis qu'elle a également retenu que l'accusé ne se trouvait sur les lieux des crimes qu'à 17 heures 40, soit postérieurement aux décès ; qu'en déduisant la culpabilité de l'accusé par ces motifs contradictoires, la cour d'assises a méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 295 et 304 de l'ancien code pénal, 221-1 et 221-2 du code pénal, 353, 365-1 et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ que la cour et le jury doivent énoncer les principaux éléments à charge caractérisant l'ensemble des éléments constitutifs de l'infraction ; que le meurtre implique le fait de donner volontairement la mort ; que la feuille de motivation doit ainsi préciser les actes commis par l'accusé établissant qu'il a volontairement donné la mort ; que la feuille de motivation retient la présence de l'accusé et sa connaissance des lieux, éléments qui ne caractérisent pas un élément à charge établissant que l'accusé a eu un geste homicide et une intention homicide ; que la cour d'assises a ainsi méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 295 et 304 de l'ancien code pénal, 221-1 et 221-2 du code pénal, 353, 365-1 et 593 du code de procédure pénale ;

3°/ que la cour d'assises doit motiver la culpabilité au regard des principaux éléments à charge qui ne peuvent consister que dans les preuves rapportées contre l'accusé et établissant sa commission des faits faisant l'objet de l'accusation ; que les antécédents judiciaires d'une personne relatifs à des faits antérieurs ne relèvent pas de la culpabilité concernant des faits différents, commis sur d'autres victimes en d'autres lieux et à une autre date ; qu'en se fondant sur les antécédents judiciaires de l'accusé pour en déduire sa culpabilité, la cour d'assises a de nouveau méconnu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 295 et 304 de l'ancien code pénal, 221-1 et 221-2 du code pénal, 353, 365-1 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

23. La feuille de motivation précise que la culpabilité de l'accusé résulte des éléments qui établissent sa présence sur les lieux des faits aux horaires où les enfants y étaient présents, les confidences qu'il a faites à divers détenus, et au gendarme U... en 1992, comportant de nombreux détails correspondants aux éléments matériels recueillis, ses déclarations, mêmes rétractées, aux termes desquelles, d'une part, les enfants lui avaient jeté des pierres, d'autre part, il était monté sur le talus et avait vu un tiers frapper les enfants et avait touché aux corps.

24. Elle mentionne encore les déclarations des témoins MM. E... et K..., ayant pris en charge le soir des faits, à la tombée de la nuit, M. H..., après l'avoir découvert à proximité de la voie ferrée, fatigué et le visage en partie ensanglanté, à environ 4 kilomètres du lieu où les corps ont été retrouvés, la connaissance par l'accusé des lieux, puisqu'il travaillait à l'époque des faits pour une entreprise se trouvant à proximité du lieu de leur commission, et enfin les caractères communs pouvant être soulignés avec d'autres meurtres pour lesquels M. H... a été condamné.

25. En l'état de ces énonciations, la cour d'assises, statuant en appel, a caractérisé, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, les principaux éléments à charge qui l'ont convaincue de sa culpabilité.

26. Il en résulte que le moyen sera écarté.

27. Par ailleurs, la procédure est régulière et la peine a été régulièrement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept juin deux mille vingt.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 19-80718
Date de la décision : 17/06/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'assises des Yvelines, 21 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 jui. 2020, pourvoi n°19-80718


Composition du Tribunal
Président : M. Moreau (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.80718
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