La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/05/2020 | FRANCE | N°19-10613

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 mai 2020, 19-10613


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 mai 2020

Cassation partielle sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 405 F-D

Pourvoi n° D 19-10.613

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité

sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Rhône-Alpes, dont le siège est [...] , venant aux droits de l'URSSAF de l'Isère, a formé le pou...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 mai 2020

Cassation partielle sans renvoi

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 405 F-D

Pourvoi n° D 19-10.613

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2020

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Rhône-Alpes, dont le siège est [...] , venant aux droits de l'URSSAF de l'Isère, a formé le pourvoi n° D 19-10.613 contre l'arrêt rendu le 15 novembre 2018 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à la société Aoste, société en nom collectif, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dudit, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Rhône-Alpes, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société Aoste, après débats en l'audience publique du 13 février 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dudit, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 15 novembre 2018), à la suite d'un contrôle au sein de la société Aoste (la société) au titre des années 2009 à 2011, l'URSSAF de l'Isère, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Rhône-Alpes, (l'URSSAF) a notifié à cette dernière un redressement réintégrant dans l'assiette des cotisations sociales notamment le montant de la prime exceptionnelle versée en 2009.

2. La société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur cette branche qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le même moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler le redressement relatif à la prime exceptionnelle et à la réduction Fillon alors « que l'exonération de cotisations d'une prime exceptionnelle d'intéressement est subordonnée à la conclusion d'un accord d'intéressement entre le 4 décembre 2008 et le 30 juin 2009 ou en cas d'accord antérieur à la loi, à la conclusion, pendant cette période, d'un avenant à un accord d'intéressement modifiant le contenu de l'accord initial ; que l'avenant qui se borne à prévoir le versement d'une prime exceptionnelle d'intéressement sans modifier les termes de l'accord initial n'est pas de nature à justifier une exonération de cotisations ; qu'en jugeant, après avoir constaté que l'avenant du 5 juin 2009 se limitait à prévoir le principe du versement d'une prime exceptionnelle exonérée de cotisations (jugement p.3 § 10), que les primes versées en application de cet avenant pouvaient être exonérées, la cour d'appel a violé l'article 2.VI de la loi du 3 décembre 2008, ensemble les articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale et L. 3314-4, D. 3313-1, D. 3313-5 et D. 3313-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 2, VI de la loi n° 2008-1258 du 3 décembre 2008 :

5. Selon ce texte, dans les entreprises ayant conclu un accord d'intéressement, ou un avenant à un accord en cours, à compter de la publication de la loi susvisée et au plus tard le 30 juin 2009, et applicable dès cette même année, l'employeur peut verser à l'ensemble de ses salariés une prime exceptionnelle, exonérée de toutes cotisations et contributions d'origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l'exception des contributions définies aux articles L. 136-2 du code de la sécurité sociale et 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale.

6. Pour annuler le chef de redressement relatif à la prime exceptionnelle, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la société Aoste a ajouté à l'accord d'intéressement du 25 octobre 2007 un avenant en date du 5 juin 2009 prévoyant le versement d'une prime exceptionnelle exonérée de charges sociales à l'exception de la CSG et CRDS et que l'article 2, VI de la loi du 3 décembre 2008 ne prévoit nullement que pour être valide, l'avenant à un accord d'intéressement doit modifier les modalités de calcul fixées par cet accord.

7. Il ajoute que la circulaire DGT 2009.13 à laquelle se réfère l'URSSAF pour justifier son refus ne peut imposer, sous couvert d'interpellation, des obligations ou ajouter des conditions à l'application des lois et décrets et qu'une circulaire est dépourvue de toute valeur normative et doit se contenter d'interpréter stricto sensu le texte intéressé sans rien y ajouter ou même retrancher.

8. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que l'acte du 5 juin 2009 avait pour seul objet le versement de la prime exceptionnelle, de sorte qu'il ne pouvait être qualifié d' accord ou d'avenant au sens du texte susvisé, la cour d'appel a violé ce dernier.

9. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application des articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule le redressement opéré par l'URSSAF de Rhône-Alpes au titre de la prime exceptionnelle de l'année 2009, l'arrêt rendu le 15 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne, en conséquence, la société Aoste à payer à l'URSSAF de Rhône-Alpes la somme de 47 142 euros, outre les majorations de retard ;

Condamne la société Aoste aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Aoste et la condamne à payer à l'URSSAF de Rhône-Alpes la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé par M. Prétot, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller référendaire empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du vingt huit mai deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF de Rhône-Alpes

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 8 janvier 2016 en ce qu'il a déclaré recevable le recours formé par la société Aoste, annulé les redressements opérés par l'URSSAF Rhône Alpes à l'encontre de la société Aoste au titre de la prime exceptionnelle 2009 pour un montant de 47 142 euros et de la loi Fillon pour un montant de 74 973 € ainsi que les majorations de retard s'y rapportant et condamné l'URSSAF Rhône Alpes à payer à la société Aoste SNC la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, enfin y ajoutant d'AVOIR condamné l'URSSAF Rhône Alpes à payer à la société Aoste la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement du droit prévu à l'article R144-10 du code de la sécurité sociale, dans la limite du dixième montant mensuel du plafond prévu à l'article L.241-3, soit 331 €.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « attendu que les parties ne font que reprendre devant la cour leurs prétentions et moyens de première instance, attendu que le jugement déféré repose sur des motifs exacts et pertinents que la cour adopte, qu'en l'absence de moyens nouveaux et de preuves nouvelles apportant des éléments nouveaux, l'URSSAF ne produisant en l'espèce que de la jurisprudence, ce qui ne constitue pas des pièces et le courrier de la société Aoste du 25 janvier 2011, indifférent aux débats, le jugement sera confirmé ; y ajoutant, l'URSSAF sera condamnée à payer à la société Aoste qui a dû exposer des frais irrépétibles en appel la somme de 1500 € » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « l'URSSAF Rhône Alpes a considéré que cette prime exceptionnelle versée en 2009 devait être assujettie car l'avenant modifiant l'accord d'intéressement en vigueur n'avait pas été déposé ; la société Aoste fait valoir que l'URSSAF Rhône Alpes a ajouté une condition à l'article 2.VI de la loi 2008-1258 du 3 décembre 2008 ; aux termes de l'article 2.VI de la loi de 2008.1258 du 3 décembre 2009 ‘dans les entreprises ayant conclu un accord d'intéressement ou un avenant à un accord en cours à compter de la publication de la présente loi et, au plus tard, le 30 juin 2009 et applicable dès cette même année, l'employeur peut verser à ses salariés une prime exceptionnelle' ; cette prime est exonérée de toute cotisations et contributions d'origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi à l'exception des cotisations définies aux article L.136.2 du code de la sécurité sociale et 14 de l'ordonnance 96.50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale ; il est constant que la société Aoste a ajouté à l'accord d'intéressement du 25 octobre 2007 un avenant en date du 5 juin 2009 prévoyant le versement d'une prime exceptionnelle exonérée de charges sociales à l'exception de la CSG et CDRS ; pour réintégrer cette prime, l'inspecteur de l'URSSAF de l'Isère, devenue depuis URSSAF Rhône Alpes, a considéré que le certificat de dépôt pour cet avenant n'avait pas été délivré par la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) de Grenoble au motif que l'avenant ne modifiait pas l'accord initial ; l'article 2.VI de la loi du 3 décembre 2008 ne prévoit nullement que pour être valide l'avenant à un accord d'intéressement doit modifier les modalités de calcul fixées par cet accord ; la circulaire DGT 2009.13 à laquelle se réfère l'URSSAF pour justifier son refus ne peut imposer, sous couvert d'interpellation, des obligations ou ajouter des conditions à l'application des lois et décret ; il convient de rappeler à l'URSSAF qu'une circulaire est dépourvue de toute valeur normative et doit se contenter d'interjeter stricto sensu le texte intéressé sans rien y ajouter ou même retrancher ; ainsi qu'il l'a été précédemment constaté à l'article 2.VI de la loi du 3 décembre 2009 ne subordonne pas l'exonération des charges à une modification des modalités de calcul de l'accord d'intéressement ; l'URSSAF reconnait elle-même que cet avenant a bien été déposé à la DDTEFP ; elle ne peut se prévaloir refus d'enregistrement par cette administration au motif de l'absence de modification des modalités de calcul ; il convient en conséquence, d'annuler le redressement à hauteur de 47 142 € ainsi que les majorations de retard afférentes ; (
) sur l'article 700 du code de procédure civile : il est équitable d'allouer à la société AOSTE une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile » ;

1.ALORS QUE l'exonération de cotisations d'une prime exceptionnelle d'intéressement est subordonnée à la conclusion d'un accord d'intéressement entre le 4 décembre 2008 et le 30 juin 2009 ou en cas d'accord antérieur à la loi, à la conclusion, pendant cette période, d'un avenant à un accord d'intéressement modifiant le contenu de l'accord initial ; que l'avenant qui se borne à prévoir le versement d'une prime exceptionnelle d'intéressement sans modifier les termes de l'accord initial n'est pas de nature à justifier une exonération de cotisations ; qu'en jugeant, après avoir constaté que l'avenant du 5 juin 2009 se limitait à prévoir le principe du versement d'une prime exceptionnelle exonérée de cotisations (jugement p.3§10), que les primes versées en application de cet avenant pouvaient être exonérées, la cour d'appel a violé l'article 2.VI de la loi du 3 décembre 2008, ensemble les articles L.242-1 du code de la sécurité sociale et L.3314-4, D.3313-1, D.3313-5 et D.3313-6 du code du travail ;

2. ALORS QU'en toute hypothèse un avenant à un accord d'intéressement ne peut permettre une exonération de cotisations qu'à condition d'avoir été déposé auprès des services direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ; qu'en l'espèce, il était constant que l'avenant du 5 juin 2009 n'avait fait l'objet d'aucun dépôt auprès des services de l'administration ; qu'en jugeant cependant que les primes versées en application de cet avenant pouvaient être exonérées, la cour d'appel a violé l'article 2.VI de la loi du 3 décembre 2008, ensemble les articles L.242-1 du code de la sécurité sociale et L.3314-4, D.3313-1, D.3313-5 et D.3313-6 du code du travail ;

3. ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la lettre d'observations datée du 13 novembre 2012 précisait que lors de son contrôle l'inspecteur du recouvrement avait constaté qu'aucun certificat de dépôt n'avait été délivré par l'administration pour l'avenant du 5 juin 2009 ; que dans ses conclusions l'URSSAF Rhône Alpes expliquait qu'aucun dépôt régulier de cet avenant n'avait pu être effectué par la société contrôlée puisque la Direction Départementale du Travail de l'Emploi et de la Formation Professionnelle avait opposé un refus au dépôt de ce document (conclusions p.8§2) ; qu'en retenant cependant, pour annuler le redressement litigieux, que l'URSSAF reconnaissait que l'avenant du 5 juin 2009 avait bien été déposé à la DDTEFP, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-10613
Date de la décision : 28/05/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 15 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 mai. 2020, pourvoi n°19-10613


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.10613
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award