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27/05/2020 | FRANCE | N°18-19605

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 mai 2020, 18-19605


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 mai 2020

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 447 F-D

Pourvoi n° H 18-19.605

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2020

Mme I... H..., domiciliée [...] , a formé

le pourvoi n° H 18-19.605 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant à la s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 mai 2020

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 447 F-D

Pourvoi n° H 18-19.605

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2020

Mme I... H..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° H 18-19.605 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant à la société Office du fonctionnel, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Corre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de Mme H..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Office du fonctionnel, et après débats en l'audience publique du 10 mars 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Corre, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 mai 2018), Mme H... a été engagée le 17 juillet 2000 par la société Office du fonctionnel (la société ODF) en qualité d'assistante commerciale. En dernier lieu, elle exerçait à Paris les fonctions de chargée d'affaires. La société ODF a proposé à la salariée une modification du contrat de travail portant sur ses fonctions et son lieu de travail. A la suite de son refus de cette modification, Mme H... a été licenciée pour motif personnel le 3 juillet 2014.

2. Elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Mme H... fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement notifié le 3 juillet 2014 était fondé sur une cause réelle et sérieuse et de rejeter ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour violation de la priorité de réembauche, alors :

« 1° / que la rupture résultant du refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique relevant des dispositions des articles L 1222-6 et L 1233-3 du code du travail et de l'obligation de reclassement de l'article L 1233-4 dudit code ; qu'ayant retenu que le motif de la modification du contrat de travail refusée par l'exposante résidait dans la décision de l'employeur de réorganiser l'activité commerciale de l'entreprise non plus par secteurs géographiques mais par secteurs d'activités ''afin de répondre à l'évolution de la fonction commerciale et à la concentration des acteurs sur le marché'' et de regrouper tous les commerciaux à Saint Nicolas d'Aliermont en un lieu unique sous la direction du directeur des ventes ''afin de rationaliser les coûts de fonctionnement et permettre une plus grande cohésion de l'équipe'', ce dont il résultait que la rupture motivée par le refus d'accepter cette modification fondée sur un motif non inhérent à la salariée constituait un licenciement pour motif économique, la cour d'appel qui retient que le licenciement n'a pas une cause économique et décide qu'il repose sur une cause réelle et sérieuse dès lors que ''cette modification répond aux intérêts de l'entreprise et qu'elle n'a pas été imposée par malignité ou de mauvaise foi à la salariée, celle-ci ayant en outre disposé d'un délai raisonnable de réflexion et a pu poser des questions sur les conditions matérielles de ce changement de lieu de travail et obtenu des réponses de l'employeur à ce titre'' a violé les articles 1134 du code civil et L 1233-3 du code du travail dans leur rédaction applicable en la cause ;

2°/ qu'en jugeant que repose sur une cause réelle et sérieuse le licenciement de l'exposante consécutif à son refus d'accepter la modification de son contrat de travail pour un motif non inhérent à sa personne, dès lors que ''cette modification répond aux intérêts de l'entreprise et qu'elle n'a pas été imposée par malignité ou de mauvaise foi à la salariée, celle-ci ayant en outre disposé d'un délai raisonnable de réflexion et a pu poser des questions sur les conditions matérielles de ce changement de lieu de travail et obtenu des réponses de l'employeur à ce titre'', cependant que le bien fondé d'un tel licenciement suppose que la modification du contrat de travail ait été consécutive à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, toutes circonstances nullement invoquées par l'employeur et que ce dernier même contestait, la cour d'appel a violé l'article L 1233-3 du code du travail dans sa rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L.1233-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

4. La rupture résultant du refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail, proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique.

5. Pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la société ODF a décidé de réorganiser l'activité commerciale de l'entreprise non plus par secteurs géographiques mais par secteurs d'activités afin de répondre à l'évolution de la fonction commerciale et à la concentration des acteurs sur le marché, qu'elle a également décidé de regrouper tous les commerciaux à Saint Nicolas d'Aliermont (Seine-Maritime), en un lieu unique, afin de rationaliser les coûts de fonctionnement et permettre une plus grande cohésion de l'équipe. L'arrêt relève aussi que concernant l'activité économique de la société ODF, les rapports de gestion des exercices 2013 et 2014, le bilan et le compte de résultats de l'exercice 2014 révèlent que l'entreprise ne rencontrait pas de difficultés économiques, que la lettre de licenciement confirme cette situation économique de la société ODF en précisant la nécessité de maintenir sa compétitivité, étant relevé que le maintien de la compétitivité ne constitue pas en tant que tel un motif économique de licenciement à la différence de la sauvegarde de la compétitivité. L'arrêt ajoute qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments que le licenciement consécutif au refus de la salariée d'accepter la modification de son contrat de travail, et notamment la modification de son lieu de travail, n'a pas une cause économique, que le seul refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement et qu'il appartient à l'employeur de justifier qu'il s'est trouvé dans la nécessité de procéder à la modification du contrat de travail du salarié et ainsi de démontrer que cette modification répondait à l'intérêt de l'entreprise. L'arrêt retient également que la société ODF démontre en l'espèce la nécessité de procéder à la modification du lieu de travail de la salariée dans l'intérêt de l'entreprise et qu'elle n'a pas été imposée par malignité ou de mauvaise foi.

6. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le motif de la modification du contrat de travail refusée par la salariée résidait dans la volonté de l'employeur de réorganiser l'activité commerciale de l'entreprise et qu'il n'était pas allégué que cette réorganisation résultait de difficultés économiques ou de mutations technologiques ou qu'elle fût indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, en sorte que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute Mme H... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour violation de l'obligation de loyauté, l'arrêt rendu le 16 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur les points restant en litige, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Office du fonctionnel aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Office du fonctionnel et la condamne à payer à Mme H... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme H...

LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT INFIRMATIF ATTAQUÉ D'AVOIR dit que le licenciement notifié le 3 juillet 2014 à Mme I... H... est fondé sur une cause réelle et sérieuse et rejeté les demandes indemnitaires de l'exposante pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour violation de la priorité de réembauche ;

AUX MOTIFS QUE Sur la rupture du contrat de travail ; que l'article L. 1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à l'existence d'une cause réelle et sérieuse ; que l'article L. 1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que si un doute persiste, il profite au salarié ; qu'ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n' incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties ; qu'en application de l'article L. 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement doit comporter l'énoncé de faits précis et matériellement vérifiables, à défaut de quoi le licenciement doit être jugé sans cause réelle et sérieuse ; qu'il convient d'analyser les griefs reprochés à Mme I... H... qui sont exposés dans la lettre de licenciement notifiée le 3 juillet 2014, qui lie les parties et le juge ; qu'en l'occurrence, l'employeur reproche à la salariée d'avoir refusé la modification de son contrat de travail, laquelle était indispensable pour le bon fonctionnement et le développement de l'entreprise ; que la société ODF a proposé à la salariée, le 16 avril 2014, une modification de son contrat de travail consistant, outre l'attribution de nouvelles fonctions, un changement de lieu de travail dans un secteur géographique différent ; que la société ODF fait valoir que la modernisation de l'organisation commerciale en quatre pôles d'activités et le regroupement du service commercial à Saint Nicolas d'Aliermont (Seine Maritime) étaient indispensables au maintien de la compétitivité de l'entreprise et au bon fonctionnement de l'équipe commerciale ; qu'elle considère que cette modification ne reposait pas sur un motif économique, contrairement à ce que soutient la salariée et ce qu'a retenu le conseil de prud'homme, soulignant qu'elle n'a pas rencontré de difficultés économiques et que la réorganisation de l'activité en pôles d'activité répondait au souhait de maintenir la compétitivité, ce qui est le propre de toutes les entreprises commerciales, mais non de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise en l'absence de nécessité d'anticiper des difficultés économiques à venir ; que la société appelante souligne que le 1er octobre 2014 elle a engagé M. D... B... en qualité d'attaché commercial, cadre 8.1, affecté au pôle hôtellerie en charge du Moyen Orient et du Royaume Uni en vue de remplacer la salariée ; que Mme I... H..., pour sa part, estime qu'elle aurait dû être licenciée pour motif économique dès lors que la modification litigieuse n'est pas inhérente à sa personne mais à la volonté de l'entreprise de se réorganiser pour des raisons économiques ; qu'il n'est pas discuté en l'espèce que le changement de lieu de travail et d'affectation de la salariée constituait une modification de son contrat de travail ; que selon les dispositions de l'article L. 1222-6 du code du travail, « Lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs économiques énoncés à l'article L. 1233-3 , il en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. La lettre de notification informe le salarié qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus....A défaut de réponse dans le délai d'un mois.....le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée » ; qu'il résulte de l'article L.1222-6 du code du travail que la procédure qu'il prévoit est applicable lorsque l'employeur envisage la modification d'un élément essentiel du contrat de travail pour l'un des motifs énoncés à l'article L. 1233-3 du code du travail ; qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié et résultant d'une suppression ou d'une transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutive à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise ou, dans certaines conditions, à une cessation d'activité et à la nécessité de sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel l'entreprise appartient ; qu'en l'espèce, la société ODF a décidé de réorganiser l'activité commerciale de l'entreprise non plus par secteurs géographiques mais par secteurs d'activités afin de répondre à l'évolution de la fonction commerciale et à la concentration des acteurs sur le marché, la majorité des clients appartenant à des groupes ou à des centrales d'achats ; qu'elle a, également, décidé de regrouper tous les commerciaux à Saint Nicolas d'Aliermont (Seine Maritime), en un lieu unique, sous la direction du directeur des ventes, M. L... T... afin de rationaliser les coûts de fonctionnement et permettre une plus grande cohésion de l'équipe ; que, suite au départ en novembre 2013, du directeur commercial de l'entreprise, M. O... R..., ayant créé en mars 2014, une entreprise concurrente Haccess, et à ceux de sa compagne, Mme Q... G..., commerciale et de Mme C... A..., assistante commerciale, la société ODF établit que son directeur général, M. O... K... a assuré l'intérim entre Paris et Saint Nicolas d'Aliermont pour s'occuper de l'équipe commerciale restante, composée de Mme I... H... et d'une autre salariée partie en retraite au cours du premier trimestre 2014 ; que le 16 avril 2014, il a informé le personnel de la nécessité de regrouper l'équipe commerciale en un lieu unique, étant observé que l'établissement d'Aix en Provence avait fermé au mois de septembre 2012, Mme P... exerçant, seule, son activité de commerciale ; que concernant l'activité économique de la société ODF, les rapports de gestion des exercices 2013 et 2014, le bilan et le compte de résultats de l'exercice 2014 révèlent que l'entreprise ne rencontrait pas de difficultés économiques lors de la notification du licenciement de la salariée, qu'ainsi son chiffre d'affaires était stable sur les deux exercices, que la part des exportations était en hausse de plus de 6 %, que le résultat d'exploitation était passé de 169 351 € à 486 600 E, soit une hausse de plus de 187 %, que le résultat courant avant impôts était également en hausse de plus de 297 % et que le dernier exercice a dégagé un bénéfice de 149 495 € contre 85 798 € précédemment ; que la lettre de licenciement notifiée le 3 juillet à Mme I... H... confirme cette situation économique de la société ODF, en précisant la nécessité de maintenir sa compétitivité, étant relevé que le maintien de la compétitivité ne constitue pas en tant que tel un motif économique de licenciement à la différence de la sauvegarde de la compétitivité ; que la cour déduit de l'ensemble de ces éléments que le licenciement consécutif au refus de Mme I... H... d'accepter la modification de son contrat de travail, et notamment la modification de son lieu de travail, n'a pas une cause économique, par infirmation du jugement déféré ; que le seul refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'il appartient à l'employeur de justifier qu'il s'est trouvé dans la nécessité de procéder à la modification du contrat de travail du salarié et ainsi de démontrer que cette modification répondait à l'intérêt de l'entreprise : que la société ODF démontre, en l'espèce, la nécessité de procéder à la modification du lieu de travail de la salariée du fait du départ de son directeur commercial, de la création par celui-ci d'une entreprise concurrente sur Paris et de la nécessité de regrouper le service commercial sur le lieu de son principal établissement à Saint Nicolas d'Aliermont suite au départ volontaire de trois membres de son équipe sur cinq et à la fermeture de son local parisien, de sorte qu'elle justifie que cette modification répond aux intérêts de l'entreprise et qu'elle n'a pas été imposée par malignité ou de mauvaise foi à la salariée, celle-ci ayant en outre disposé d'un délai raisonnable de réflexion et ayant pu poser des questions sur les conditions matérielles de ce changement de lieu de travail et obtenu des réponses de l'employeur à ce titre ; qu'il en résulte que le licenciement notifié le 3 juillet 2014 à Mme I... H... repose sur une cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il alloue à la salariée des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le licenciement de Mme I... H... n'étant pas fondé sur un motif économique, la salariée ne peut prétendre à une indemnisation pour non-respect de la priorité de réembauche prévue à l'article L. 1235-13 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges dont la décision sera infirmée à ce titre.

ALORS D'UNE PART QUE la rupture résultant du refus par le salarié d'une modification de son contrat de travail proposée par l'employeur pour un motif non inhérent à sa personne, constitue un licenciement pour motif économique relevant des dispositions des articles L 1222-6 et L 1233-3 du code du travail et de l'obligation de reclassement de l'article L 1233-4 dudit code ; qu'ayant retenu que le motif de la modification du contrat de travail refusée par l'exposante résidait dans la décision de l'employeur de réorganiser l'activité commerciale de l'entreprise non plus par secteurs géographiques mais par secteurs d'activités « afin de répondre à l'évolution de la fonction commerciale et à la concentration des acteurs sur le marché » et de regrouper tous les commerciaux à Saint Nicolas d'Aliermont en un lieu unique sous la direction du directeur des ventes « afin de rationaliser les coûts de fonctionnement et permettre une plus grande cohésion de l'équipe », ce dont il résultait que la rupture motivée par le refus d'accepter cette modification fondée sur un motif non inhérent à la salariée constituait un licenciement pour motif économique, la cour d'appel qui retient que le licenciement n'a pas une cause économique et décide qu'il repose sur une cause réelle et sérieuse dès lors que « cette modification répond aux intérêts de l'entreprise et qu'elle n'a pas été imposée par malignité ou de mauvaise foi à la salariée, celle-ci ayant en outre disposé d'un délai raisonnable de réflexion et a pu poser des questions sur les conditions matérielles de ce changement de lieu de travail et obtenu des réponses de l'employeur à ce titre » a violé les articles 1134 du code civil et L 1233-3 du code du travail dans leur rédaction applicable en la cause ;

ALORS D'AUTRE PART et en tout état de cause QU' en jugeant que repose sur une cause réelle et sérieuse le licenciement de l'exposante consécutif à son refus d'accepter la modification de son contrat de travail pour un motif non inhérent à sa personne, dès lors que « cette modification répond aux intérêts de l'entreprise et qu'elle n'a pas été imposée par malignité ou de mauvaise foi à la salariée, celle-ci ayant en outre disposé d'un délai raisonnable de réflexion et a pu poser des questions sur les conditions matérielles de ce changement de lieu de travail et obtenu des réponses de l'employeur à ce titre », cependant que le bien fondé d'un tel licenciement suppose que la modification du contrat de travail ait été consécutive à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, toutes circonstances nullement invoquées par l'employeur et que ce dernier même contestait, la cour d'appel a violé l'article L 1233-3 du code du travail dans sa rédaction applicable en la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-19605
Date de la décision : 27/05/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 mai 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 mai. 2020, pourvoi n°18-19605


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.19605
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