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27/05/2020 | FRANCE | N°18-15769;18-15770;18-15771;18-15772;18-15773;18-15774

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 mai 2020, 18-15769 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 mai 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 465 F-D

Pourvois n°
N 18-15.769
P 18-15.770
Q 18-15.771
R 18-15.772
S 18-15.773
T 18-15.774 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCI

ALE, DU 27 MAI 2020

L'Agence française de développement, dont le siège est [...] , anciennement Agence de Papeete de la caisse centrale de coopération éco...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 mai 2020

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 465 F-D

Pourvois n°
N 18-15.769
P 18-15.770
Q 18-15.771
R 18-15.772
S 18-15.773
T 18-15.774 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 MAI 2020

L'Agence française de développement, dont le siège est [...] , anciennement Agence de Papeete de la caisse centrale de coopération économique, a formé les pourvois n° N 18-15.769, P 18-15.770, Q 18-15.771, R 18-15.772, S 18-15.773 et T 18-15.774 contre six arrêts rendus le 15 février 2018 par la cour d'appel de Papeete (chambre sociale), dans les litiges l'opposant respectivement :

1°/ à M. W... O..., domicilié [...] ,

2°/ à Mme E... N..., domiciliée [...] ,

3°/ à Mme J... H..., domiciliée [...] a,

4°/ à Mme V... F..., épouse B..., domiciliée [...] ,

5°/ à Mme D... X..., domiciliée [...] ,

6°/ à Mme P... R..., domiciliée [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de chacun de ses pourvois, un moyen unique de cassation, annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de l'Agence française de développement, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. O... et de Mmes N..., R..., F..., X... et H..., après débats en l'audience publique du 11 mars 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

En raison de leur connexité, les pourvois n° N 18-15.769, P 18-15.770, Q 18-15.771, R 18-15.772, S 18-15.773 et T 18-15.774 sont joints.

Sur le moyen unique des pourvois :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Papeete, 15 février 2018), que M. O... a été engagé par l'Agence française de développement (l'AFD) en Polynésie française à compter du 1er décembre 2006 en qualité de chargé d'étude principal, que Mme N... été engagée par l'agence de Papeete de la caisse centrale de coopération économique, devenue l'Agence française de développement, à compter du 4 novembre 1974 en qualité de sténo-dactylographe, que Mme H... a été engagée par l'agence de Papeete de la caisse centrale de coopération économique à compter du 16 avril 1984 en qualité de secrétaire sténo-dactylographe, que Mme F... a été engagée par l'agence de Papeete de la caisse centrale de coopération économique
en qualité d'agent comptable à l'institut d'émission d'outre-mer le 21 novembre 1980, que Mme X... a été engagée par l'agence de Papeete de l'Agence française de développement à compter du 18 janvier 2001 en qualité d'assistante sectorielle et que Mme R... a été engagée par l'agence de Papeete de la caisse centrale de coopération économique à compter du 2 août 1983 en qualité de secrétaire comptable ; qu'ils ont saisi le tribunal du travail le 16 juin 2014 afin d'obtenir l'application à leur contrat de travail de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 et le paiement de certaines sommes afférentes ;

Attendu que l'Agence française de développement fait grief aux arrêts de dire que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 s'appliquait aux contrats de travail la liant aux salariés et de la condamner au paiement de certaines sommes en application de cette convention, alors, selon le moyen :

1°/ que la question soumise au juge était de savoir si l'extension de la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) aux secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières », décidée par l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, atteignait l'agence de l'AFD de Papeete et ses salariés ; que, pour trancher cette question, la cour s'est notamment fondée sur les dispositions des articles R. 515-5 et R. 515-6 du code monétaire et financier, lesquelles ont modifié, par décret n° 2017-582 du 20 avril 2017 intervenu postérieurement au jugement de première instance, les dispositions antérieures résultant du décret n° 2014-1315 du 3 novembre 2014, telles qu'elles figuraient dans les articles R. 513-22 et R. 516-3 du même code ; qu'en se déterminant ainsi, au regard de dispositions inapplicables au litige, la cour a violé les textes susvisés ;

2°/ que chaque convention collective détermine son champ d'application professionnel ou interprofessionnel, défini en termes d'activités économiques ; que l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 n'a étendu la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) qu'aux seuls secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières » ; que l'AFD, dans les dispositions applicables au litige, est, en vertu de l'article R. 515-5 du code monétaire et financier, définie comme un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial » relevant de la catégorie des « établissements de crédit spécialisés », dont la « mission permanente d'intérêt public » consiste principalement à « contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger » et « au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie » ; qu'il résulte en outre de la qualification d'EPIC l'exercice à titre principal d'une mission de service public, précisément d'aide publique au développement ; que l'AFD n'est assimilable ni à une banque ni à une société financière, quand bien même elle est en droit, entre autres instruments [dons, expertises, assistances techniques, etc.], de recourir à des opérations bancaires « afférentes à [sa] mission » (art. l'article R. 513-22 du code monétaire et financier) ; qu'à la différence des banques, qu'elle ne concurrence pas, et dont elle ne peut réaliser toutes les opérations, elle n'a pas, comme établissement de crédit spécialisé, de capital social souscrit par des actionnaires, ne collecte pas de dépôts, ne met pas de moyens de paiement à disposition de clients, ne finance pas de crédits à des particuliers ou à des entreprises locales, n'a aucun but lucratif, tandis qu'à l'inverse elle garantit des prêts et bénéficie d'une dotation de l'État pour atteindre ses objectifs ; qu'il s'ensuit que l'AFD n'est pas une entreprise à laquelle la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) puisse être étendue en vertu de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 ; qu'en jugeant le contraire, au motif erroné qu'elle était « avant tout une banque spécialisée dans le financement de projets de développement », la cour a violé l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et les articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

3°/ que si le champ d'une convention collective s'apprécie « en termes d'activités économiques » (art. Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, al. 2), cette activité s'entend de l'activité « réelle et principale » qui est exercée par l'employeur et par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, la cour a elle-même constaté que l'AFD est un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial, ayant pour mission de service public de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement des départements et collectivités d'Outre-Mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ; à cette fin, elle finance des opérations de développement (
) ; elle peut conduire d'autres activités (
) se rattachant à sa mission » ; qu'elle a ainsi constaté que l'activité « réelle et principale » de l'AFD était bien une mission d'aide à la politique de développement de l'État français, les opérations bancaires auxquels elle recourt constituant des instruments financiers mis au service de cette activité ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD était assimilable à une banque, c'est-à-dire avait pour activité principale la réalisation d'opérations bancaires, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

4°/ que l'AFD avait clairement distingué dans ses écritures ses bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont situés dans une collectivité d'Outre-Mer, telle que Papeete ; qu'elle avait rappelé que si les contrats de droit étranger conclus à l'étranger pouvaient être gouvernés par des conventions collectives relevant du même droit, les contrats des personnels travaillant en métropole ainsi que dans les départements d'Outre-Mer et les collectivités d'Outre-Mer, et donc en particulier à Papeete, ne relevaient d'aucune convention collective, en raison de son statut spécifique, déterminé par voie réglementaire ; que la circonstance, dès lors, qu'à l'étranger des contrats, conclus selon le droit étranger, soient éventuellement gouvernés par des conventions collectives soumises elles-mêmes à un droit étranger, n'avait aucune incidence sur l'extension contestée à l'AFD d'une convention collective du secteur bancaire gouvernée par les règles du droit français ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD ne pouvait pas refuser « aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions », la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

Mais attendu que selon l'article Lp. 2323-2 du code du travail applicable en Polynésie française, lorsqu'une convention ou un accord professionnel fait l'objet d'un arrêté d'extension, ses dispositions sont applicables à ceux des services et établissements publics qui, en raison de l'activité exercée, se trouvent dans le champ d'application visé par l'arrêté d'extension, pour les catégories de personnel employées dans les conditions du droit privé ; qu'il résulte des termes de l'article R. 513-22 du code monétaire et financier, devenu l'article R. 515-5 du même code, que l'Agence française de développement, régie par les dispositions de ce code, était un établissement de crédit spécialisé jusqu'au 30 juin 2017 et qu'elle est désormais une société de financement ;

Et attendu qu'ayant relevé que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 avait été étendue à tous les employeurs et les travailleurs dudit secteur d'activité par arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, la cour d'appel a souverainement apprécié qu'il était établi que l'Agence française pour le développement exerçait des activités de nature bancaire et financière qui permettaient de l'assimiler à une banque et à une société financière au sens de ladite convention et en a exactement déduit que cette convention lui était applicable concernant les salariés employés dans les conditions du droit privé ;

D'où il suit que le moyen, qui en sa première branche critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne l'Agence française pour le développement aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'Agence française de développement à payer à Mmes N..., H..., F..., X..., R... et à M. O... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé et prononcé par M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, et Mme Pécaut-Rivolier, conseiller le plus ancien en ayant délibéré en remplacement du conseiller référendaire empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile, et par Mme Pontonnier, greffier de chambre, en l' audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Agence française de développement, demanderesse au pourvoi n° N 18-15.769

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française [20 octobre 1986] s'appliquait au contrat de travail liant l'Agence française de développement et M. W... O..., et dit que celle-là devait à celui-ci différentes sommes au titre de la majoration pour diplômes pour la période allant de juin 2009 à juin 2014, ladite majoration mensuelle de 40 points selon la valeur fixée conventionnellement pour le secteur des banques et sociétés financières à compter du mois de juillet 2014, au titre de la gratification annuelle fixe prévue par l'article 43 de la convention collective susvisée, pour la période de juin 2009 à juin 2014, et au titre de la gratification annuelle fixe due au titre du mois de juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française, l'AFD ne conteste pas que le contrat de travail liant les parties est régi par le code du travail de Polynésie française ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 « règle les rapports entre les entreprises adhérentes au Comité de Polynésie Française de l'Association Française des Banques et des sociétés financières et leur personnel travaillant de façon permanente dans le Territoire » ; que, par arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, ses stipulations ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et travailleurs du secteur d'activité des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD ne peut refuser aux salariés polynésiens l'application d'une convention collective en arguant que les salariés travaillant en métropole ne sont pas régis par une telle convention dans la mesure où le code du travail métropolitain ne s'applique pas à la Polynésie française qui, par l'effet de son statut et de la spécialité législative qui en découle, a compétence pour réglementer le droit social et qui possède un code du travail spécifique ; qu'elle ne saurait refuser aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions ; qu'il importe dès lors de rechercher si l'AFD est ou peut être assimilée à une banque ou à une société financière ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ne contient aucune définition d'une banque, ni d'une société financière ; que le code monétaire et financier n'emploie plus l'expression « société financière » mais consacre le titre 1er de son livre V aux prestataires de services bancaires qui, selon l'article L. 511-1, sont : I.- Les établissements de crédit (
) entreprises dont l'activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à l'article L. 312-2 et à octroyer des crédits mentionnés à l'article L. 313-1 ; II.- Les sociétés de financement (
) personnes morales, autres que des établissements de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites définies par leur agrément. Elles sont des établissements financiers au sens du 4 de l'article L. 511-21 » ; que, contrairement à ce que prétend l'AFD, aucun texte du code monétaire et financier ne l'exclut automatiquement du champ d'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD figure parmi les sociétés de financement et les articles R. 515-5 et R. 515-6 disposent que : elle « exerce une mission permanente d'intérêt public au sens de l'article L. 511-104. Elle peut effectuer les opérations de banque afférentes à cette mission dans les conditions définies par la présente section » ; elle est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial et « a pour mission de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de : a) Contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger ; b) Contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. A cette fin, elle finance des opérations de développement, dans le respect de l'environnement ; elle peut conduire d'autres activités et prestations de service se rattachant à sa mission. L'agence est en particulier chargée d'assurer, directement ou indirectement, des prestations d'expertise technique destinées aux bénéficiaires de ses concours. L'agence est soumise, pour celles de ses activités qui en relèvent, aux dispositions du présent code » ; que, par ailleurs, il résulte des éléments provenant du site internet de l'AFD, du site internet du Sénat et de la communication faite par la cour des comptes à la commission des finances de l'assemblée nationale versés aux débats par l'appelant, éléments que ne contredisent pas les pièces produites par l'intimée que : - les ressources d'origine budgétaire de l'AFD « sont devenues minoritaires par rapport aux ressources levées sur les marchés ; elle ne reçoit pas de subvention pour charge de service public et l'État finance intégralement toutes les actions qu'il demande à l'AFD de mener pour son compte ; elle réalise enfin des opérations privées en compte propre » ; - « L'AFD est traitée en comptabilité nationale comme une institution financière » ; - elle « conjugue les fonctions de banque et celles d'agence de mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de la France » ; - elle « n'est pas une agence de développement, mais avant tout une banque de développement (
) En tant qu'institution financière spécialisée (IFS), l'AFD est soumise aux dispositions du code monétaire et financier applicable aux établissements de crédit. Son double statut apporte des garanties très appréciables en termes d'utilisation de la ressource publique et de gestion des risques, dans la mesure où l'Agence est soumise aux contrôles et procédures propres au statut bancaire. En dépit de son nom, l'AFD est, tant au regard de son statut que de son résultat comptable, avant tout, une banque spécialisée dans le financement de projets de développement. A ce titre, l'AFD poursuit les objectifs d'une institution financière. Grâce à des ressources empruntées sur les marchés internationaux, notamment sous forme d'emprunts obligataires, elle finance des projets à des taux d'intérêt bonifiés ou non, ou parfois proches du marché, au prix de l'application d'une marge bancaire qui lui assure des ressources régulières. Établissement bancaire, l'AFD ne reçoit aucune subvention de fonctionnement de la part de l'État (
) » ; - elle a un « positionnement singulier associant plusieurs métiers, qui vont de l'activité bancaire à l'agence de dons, en passant par le bureau d'étude et d'assistance technique, la promotion des intérêts économiques ou diplomatiques français » ; - « Il est (
) fréquent que le public, les ONG et les parlementaires s'adressent à l'AFD comme à une agence de coopération pour découvrir ensuite qu'il s'agit aussi, voire d'abord, d'un établissement bancaire » ; que, pour réaliser ses objectifs, l'AFD reçoit des ressources publiques et se finance sur les marchés financiers internationaux ainsi que sur ses fonds propres ; que ses interventions dans les pays ultramarins consistent en : - des prêts : * « le financement de l'investissement du secteur public dans une démarche de partenariat, et notamment l'appui aux collectivités dans l'élaboration et la mise en oeuvre de leurs stratégies de développement (
) s'effectue sous forme de prêts bonifiés aux collectivités locales, aux établissements publics et aux sociétés d'économie mixte pour des opérations concernant des secteurs prioritaires pour l'emploi, le développement économique, la cohésion sociale et l'environnement ou sous forme de prêts non concessionnels. Par ailleurs, l'AFD peut accorder des prêts à court terme aux collectivités publiques, en préfinancement des subventions européennes ». * « le financement du secteur privé, en non concessionnel, par le biais de prêts directs et de refinancements du secteur bancaire » ; - des garanties : « l'AFD exerce une activité importante de garantie des prêts bancaires à moyen-long terme qui soutiennent l'innovation, la création et la croissance dans les collectivités du Pacifique au travers de la Sogefom dont elle est l'actionnaire majoritaire, ainsi qu'à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon au travers de deux fonds de garantie en compte propre (
) » ; que, dans ces conditions, il est suffisamment établi que l'AFD exerce des activités de nature bancaire et financière qui permettent de l'assimiler à une banque et à une société financière au sens de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que cette analyse est confirmée par le fait que le code NAF de l'AFD est « 6492Z Autre distribution de crédit » et que l'article 9 de l'accord d'établissement prévoit que la valeur du point permettant le calcul de la rémunération est révisée « par référence aux revalorisations des traitements décidées dans les banques en Polynésie française » ;

1° ALORS QUE la question soumise au juge était de savoir si l'extension de la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) aux secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financière », décidée par l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, atteignait l'agence de l'AFD de Papeete et ses salariés ; que, pour trancher cette question, la cour s'est notamment fondée sur les dispositions des articles R. 515-5 et R. 515-6 du code monétaire et financier, lesquelles ont modifié, par décret n° 2017-582 du 20 avril 2017 intervenu postérieurement au jugement de première instance, les dispositions antérieures résultant du décret n° 2014-1315 du 3 novembre 2014, telles qu'elles figuraient dans les articles R. 513-22 et R. 516-3 du même code ; qu'en se déterminant ainsi, au regard de dispositions inapplicables au litige, la cour a violé les textes susvisés ;

2° ALORS QUE chaque convention collective détermine son champ d'application professionnel ou interprofessionnel, défini en termes d'activités économiques ; que l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 n'a étendu la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) qu'aux seuls secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières » ; que l'AFD, dans les dispositions applicables au litige, est, en vertu de l'article R. 515-5 du code monétaire et financier, définie comme un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial » relevant de la catégorie des « établissements de crédit spécialisés », dont la « mission permanente d'intérêt public » consiste principalement à « contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger » et « au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie » ; qu'il résulte en outre de la qualification d'EPIC l'exercice à titre principal d'une mission de service public, précisément d'aide publique au développement ; que l'AFD n'est assimilable ni à une banque ni à une société financière, quand bien même elle est en droit, entre autres instruments [dons, expertises, assistances techniques, etc.], de recourir à des opérations bancaires « afférentes à [sa] mission » (art. l'article R. 513-22 du code monétaire et financier) ; qu'à la différence des banques, qu'elle ne concurrence pas, et dont elle ne peut réaliser toutes les opérations, elle n'a pas, comme établissement de crédit spécialisé, de capital social souscrit par des actionnaires, ne collecte pas de dépôts, ne met pas de moyens de paiement à disposition de clients, ne finance pas de crédits à des particuliers ou à des entreprises locales, n'a aucun but lucratif, tandis qu'à l'inverse elle garantit des prêts et bénéficie d'une dotation de l'État pour atteindre ses objectifs ; qu'il s'ensuit que l'AFD n'est pas une entreprise à laquelle la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) puisse être étendue en vertu de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 ; qu'en jugeant le contraire, au motif erroné qu'elle était « avant tout une banque spécialisée dans le financement de projets de développement », la cour a violé l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et les articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

3° ALORS QUE si le champ d'une convention collective s'apprécie « en termes d'activités économiques » (art. Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, al. 2), cette activité s'entend de l'activité « réelle et principale » qui est exercée par l'employeur et par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, la cour a elle-même constaté que l'AFD est un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial, ayant pour mission de service public de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement des départements et collectivités d'Outre-Mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ; à cette fin, elle finance des opérations de développement (
) ; elle peut conduire d'autres activités (
) se rattachant à sa mission » (arrêt, p. 8) ; qu'elle a ainsi constaté que l'activité « réelle et principale » de l'AFD était bien une mission d'aide à la politique de développement de l'État français, les opérations bancaires auxquels elle recourt constituant des instruments financiers mis au service de cette activité ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD était assimilable à une banque, c'est-à-dire avait pour activité principale la réalisation d'opérations bancaires, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

4° ALORS QUE l'AFD avait clairement distingué dans ses écritures ses bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont situés dans une collectivité d'Outre-Mer, telle que Papeete ; qu'elle avait rappelé que si les contrats de droit étranger conclus à l'étranger pouvaient être gouvernés par des conventions collectives relevant du même droit, les contrats des personnels travaillant en métropole ainsi que dans les départements d'Outre-Mer et les collectivités d'Outre-Mer, et donc en particulier à Papeete, ne relevaient d'aucune convention collective, en raison de son statut spécifique, déterminé par voie réglementaire ; que la circonstance, dès lors, qu'à l'étranger des contrats, conclus selon le droit étranger, soient éventuellement gouvernés par des conventions collectives soumises elles-mêmes à un droit étranger, n'avait aucune incidence sur l'extension contestée à l'AFD d'une convention collective du secteur bancaire gouvernée par les règles du droit français ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD ne pouvait pas refuser « aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions », la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier.
Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Agence française de développement, demanderesse au pourvoi n° P 18-15.770

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française [20 octobre 1986] s'appliquait au contrat de travail liant l'Agence française de développement et Mme E... N..., et dit que celle-là devait à celle-ci différentes sommes au titre de la majoration pour diplômes pour la période allant de juin 2009 à juin 2014, ladite majoration mensuelle de 30 points selon la valeur fixée conventionnellement pour le secteur des banques et sociétés financières à compter du mois de juillet 2014, au titre de la gratification annuelle fixe prévue par l'article 43 de la convention collective susvisée, pour la période de juin 2009 à juin 2014, et au titre de la gratification annuelle fixe due au titre du mois de juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française, l'AFD ne conteste pas que le contrat de travail liant les parties est régi par le code du travail de Polynésie française ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 « règle les rapports entre les entreprises adhérentes au Comité de Polynésie Française de l'Association Française des Banques et des sociétés financières et leur personnel travaillant de façon permanente dans le Territoire » ; que, par arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, ses stipulations ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et travailleurs du secteur d'activité des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD ne peut refuser aux salariés polynésiens l'application d'une convention collective en arguant que les salariés travaillant en métropole ne sont pas régis par une telle convention dans la mesure où le code du travail métropolitain ne s'applique pas à la Polynésie française qui, par l'effet de son statut et de la spécialité législative qui en découle, a compétence pour réglementer le droit social et qui possède un code du travail spécifique ; qu'elle ne saurait refuser aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions ; qu'il importe dès lors de rechercher si l'AFD est ou peut être assimilée à une banque ou à une société financière ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ne contient aucune définition d'une banque, ni d'une société financière ; que le code monétaire et financier n'emploie plus l'expression « société financière » mais consacre le titre 1er de son livre V aux prestataires de services bancaires qui, selon l'article L. 511-1, sont : I.- Les établissements de crédit (
) entreprises dont l'activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à l'article L. 312-2 et à octroyer des crédits mentionnés à l'article L. 313-1 ; II.- Les sociétés de financement (
) personnes morales, autres que des établissements de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites définies par leur agrément. Elles sont des établissements financiers au sens du 4 de l'article L. 511-21 » ; que, contrairement à ce que prétend l'AFD, aucun texte du code monétaire et financier ne l'exclut automatiquement du champ d'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD figure parmi les sociétés de financement et les articles R. 515-5 et R. 515-6 disposent que : elle « exerce une mission permanente d'intérêt public au sens de l'article L. 511-104. Elle peut effectuer les opérations de banque afférentes à cette mission dans les conditions définies par la présente section » ; elle est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial et « a pour mission de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de : a) Contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger ; b) Contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. A cette fin, elle finance des opérations de développement, dans le respect de l'environnement ; elle peut conduire d'autres activités et prestations de service se rattachant à sa mission. L'agence est en particulier chargée d'assurer, directement ou indirectement, des prestations d'expertise technique destinées aux bénéficiaires de ses concours. L'agence est soumise, pour celles de ses activités qui en relèvent, aux dispositions du présent code » ; que, par ailleurs, il résulte des éléments provenant du site internet de l'AFD, du site internet du Sénat et de la communication faite par la cour des comptes à la commission des finances de l'assemblée nationale versés aux débats par l'appelant, éléments que ne contredisent pas les pièces produites par l'intimée que : - les ressources d'origine budgétaire de l'AFD « sont devenues minoritaires par rapport aux ressources levées sur les marchés ; elle ne reçoit pas de subvention pour charge de service public et l'État finance intégralement toutes les actions qu'il demande à l'AFD de mener pour son compte ; elle réalise enfin des opérations privées en compte propre » ; - « L'AFD est traitée en comptabilité nationale comme une institution financière » ; - elle « conjugue les fonctions de banque et celles d'agence de mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de la France » ; - elle « n'est pas une agence de développement, mais avant tout une banque de développement (
) En tant qu'institution financière spécialisée (IFS), l'AFD est soumise aux dispositions du code monétaire et financier applicable aux établissements de crédit. Son double statut apporte des garanties très appréciables en termes d'utilisation de la ressource publique et de gestion des risques, dans la mesure où l'Agence est soumise aux contrôles et procédures propres au statut bancaire. En dépit de son nom, l'AFD est, tant au regard de son statut que de son résultat comptable, avant tout, une banque spécialisée dans le financement de projets de développement. A ce titre, l'AFD poursuit les objectifs d'une institution financière. Grâce à des ressources empruntées sur les marchés internationaux, notamment sous forme d'emprunts obligataires, elle finance des projets à des taux d'intérêt bonifiés ou non, ou parfois proches du marché, au prix de l'application d'une marge bancaire qui lui assure des ressources régulières. Établissement bancaire, l'AFD ne reçoit aucune subvention de fonctionnement de la part de l'État (
) » ; - elle a un « positionnement singulier associant plusieurs métiers, qui vont de l'activité bancaire à l'agence de dons, en passant par le bureau d'étude et d'assistance technique, la promotion des intérêts économiques ou diplomatiques français » ; - « Il est (
) fréquent que le public, les ONG et les parlementaires s'adressent à l'AFD comme à une agence de coopération pour découvrir ensuite qu'il s'agit aussi, voire d'abord, d'un établissement bancaire » ; que, pour réaliser ses objectifs, l'AFD reçoit des ressources publiques et se finance sur les marchés financiers internationaux ainsi que sur ses fonds propres ; que ses interventions dans les pays ultramarins consistent en : - des prêts : * « le financement de l'investissement du secteur public dans une démarche de partenariat, et notamment l'appui aux collectivités dans l'élaboration et la mise en oeuvre de leurs stratégies de développement (
) s'effectue sous forme de prêts bonifiés aux collectivités locales, aux établissements publics et aux sociétés d'économie mixte pour des opérations concernant des secteurs prioritaires pour l'emploi, le développement économique, la cohésion sociale et l'environnement ou sous forme de prêts non concessionnels. Par ailleurs, l'AFD peut accorder des prêts à court terme aux collectivités publiques, en préfinancement des subventions européennes ». * « le financement du secteur privé, en non concessionnel, par le biais de prêts directs et de refinancements du secteur bancaire » ; - des garanties : « l'AFD exerce une activité importante de garantie des prêts bancaires à moyen-long terme qui soutiennent l'innovation, la création et la croissance dans les collectivités du Pacifique au travers de la Sogefom dont elle est l'actionnaire majoritaire, ainsi qu'à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon au travers de deux fonds de garantie en compte propre (
) » ; que, dans ces conditions, il est suffisamment établi que l'AFD exerce des activités de nature bancaire et financière qui permettent de l'assimiler à une banque et à une société financière au sens de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que cette analyse est confirmée par le fait que le code NAF de l'AFD est « 6492Z Autre distribution de crédit » et que l'article 9 de l'accord d'établissement prévoit que la valeur du point permettant le calcul de la rémunération est révisée « par référence aux revalorisations des traitements décidées dans les banques en Polynésie française » ;

1° ALORS QUE la question soumise au juge était de savoir si l'extension de la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) aux secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financière », décidée par l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, atteignait l'agence de l'AFD de Papeete et ses salariés ; que, pour trancher cette question, la cour s'est notamment fondée sur les dispositions des articles R. 515-5 et R. 515-6 du code monétaire et financier, lesquelles ont modifié, par décret n° 2017-582 du 20 avril 2017 intervenu postérieurement au jugement de première instance, les dispositions antérieures résultant du décret n° 2014-1315 du 3 novembre 2014, telles qu'elles figuraient dans les articles R. 513-22 et R. 516-3 du même code ; qu'en se déterminant ainsi, au regard de dispositions inapplicables au litige, la cour a violé les textes susvisés ;

2° ALORS QUE chaque convention collective détermine son champ d'application professionnel ou interprofessionnel, défini en termes d'activités économiques ; que l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 n'a étendu la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) qu'aux seuls secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières » ; que l'AFD, dans les dispositions applicables au litige, est, en vertu de l'article R. 515-5 du code monétaire et financier, définie comme un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial » relevant de la catégorie des « établissements de crédit spécialisés », dont la « mission permanente d'intérêt public » consiste principalement à « contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger » et « au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie » ; qu'il résulte en outre de la qualification d'EPIC l'exercice à titre principal d'une mission de service public, précisément d'aide publique au développement ; que l'AFD n'est assimilable ni à une banque ni à une société financière, quand bien même elle est en droit, entre autres instruments [dons, expertises, assistances techniques, etc.], de recourir à des opérations bancaires « afférentes à [sa] mission » (art. l'article R. 513-22 du code monétaire et financier) ; qu'à la différence des banques, qu'elle ne concurrence pas, et dont elle ne peut réaliser toutes les opérations, elle n'a pas, comme établissement de crédit spécialisé, de capital social souscrit par des actionnaires, ne collecte pas de dépôts, ne met pas de moyens de paiement à disposition de clients, ne finance pas de crédits à des particuliers ou à des entreprises locales, n'a aucun but lucratif, tandis qu'à l'inverse elle garantit des prêts et bénéficie d'une dotation de l'État pour atteindre ses objectifs ; qu'il s'ensuit que l'AFD n'est pas une entreprise à laquelle la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) puisse être étendue en vertu de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 ; qu'en jugeant le contraire, au motif erroné qu'elle était « avant tout une banque spécialisée dans le financement de projets de développement », la cour a violé l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et les articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

3° ALORS QUE si le champ d'une convention collective s'apprécie « en termes d'activités économiques » (art. Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, al. 2), cette activité s'entend de l'activité « réelle et principale » qui est exercée par l'employeur et par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, la cour a elle-même constaté que l'AFD est un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial, ayant pour mission de service public de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement des départements et collectivités d'Outre-Mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ; à cette fin, elle finance des opérations de développement (
) ; elle peut conduire d'autres activités (
) se rattachant à sa mission » (arrêt, p. 8) ; qu'elle a ainsi constaté que l'activité « réelle et principale » de l'AFD était bien une mission d'aide à la politique de développement de l'État français, les opérations bancaires auxquels elle recourt constituant des instruments financiers mis au service de cette activité ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD était assimilable à une banque, c'est-à-dire avait pour activité principale la réalisation d'opérations bancaires, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

4° ALORS QUE l'AFD avait clairement distingué dans ses écritures ses bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont situés dans une collectivité d'Outre-Mer, telle que Papeete ; qu'elle avait rappelé que si les contrats de droit étranger conclus à l'étranger pouvaient être gouvernés par des conventions collectives relevant du même droit, les contrats des personnels travaillant en métropole ainsi que dans les départements d'Outre-Mer et les collectivités d'Outre-Mer, et donc en particulier à Papeete, ne relevaient d'aucune convention collective, en raison de son statut spécifique, déterminé par voie réglementaire ; que la circonstance, dès lors, qu'à l'étranger des contrats, conclus selon le droit étranger, soient éventuellement gouvernés par des conventions collectives soumises elles-mêmes à un droit étranger, n'avait aucune incidence sur l'extension contestée à l'AFD d'une convention collective du secteur bancaire gouvernée par les règles du droit français ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD ne pouvait pas refuser « aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions », la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier.

Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Agence française de développement, demanderesse au pourvoi n° Q 18-15.771

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française [20 octobre 1986] s'appliquait au contrat de travail liant l'Agence française de développement et Mme J... H..., et dit que celle-là devait à celle-ci différentes sommes au titre de la gratification annuelle fixe prévue par l'article 43 de la convention collective susvisée, pour la période de juin 2009 à juin 2014, et au titre de la gratification annuelle fixe due au titre du mois de juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française, l'AFD ne conteste pas que le contrat de travail liant les parties est régi par le code du travail de Polynésie française ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 « règle les rapports entre les entreprises adhérentes au Comité de Polynésie Française de l'Association Française des Banques et des sociétés financières et leur personnel travaillant de façon permanente dans le Territoire » ; que, par arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, ses stipulations ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et travailleurs du secteur d'activité des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD ne peut refuser aux salariés polynésiens l'application d'une convention collective en arguant que les salariés travaillant en métropole ne sont pas régis par une telle convention dans la mesure où le code du travail métropolitain ne s'applique pas à la Polynésie française qui, par l'effet de son statut et de la spécialité législative qui en découle, a compétence pour réglementer le droit social et qui possède un code du travail spécifique ; qu'elle ne saurait refuser aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions ; qu'il importe dès lors de rechercher si l'AFD est ou peut être assimilée à une banque ou à une société financière ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ne contient aucune définition d'une banque, ni d'une société financière ; que le code monétaire et financier n'emploie plus l'expression « société financière » mais consacre le titre 1er de son livre V aux prestataires de services bancaires qui, selon l'article L. 511-1, sont : I.- Les établissements de crédit (
) entreprises dont l'activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à l'article L. 312-2 et à octroyer des crédits mentionnés à l'article L. 313-1 ; II.- Les sociétés de financement (
) personnes morales, autres que des établissements de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites définies par leur agrément. Elles sont des établissements financiers au sens du 4 de l'article L. 511-21 » ; que, contrairement à ce que prétend l'AFD, aucun texte du code monétaire et financier ne l'exclut automatiquement du champ d'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD figure parmi les sociétés de financement et les articles R. 515-5 et R. 515-6 disposent que : elle « exerce une mission permanente d'intérêt public au sens de l'article L. 511-104. Elle peut effectuer les opérations de banque afférentes à cette mission dans les conditions définies par la présente section » ; elle est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial et « a pour mission de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de : a) Contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger ; b) Contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. A cette fin, elle finance des opérations de développement, dans le respect de l'environnement ; elle peut conduire d'autres activités et prestations de service se rattachant à sa mission. L'agence est en particulier chargée d'assurer, directement ou indirectement, des prestations d'expertise technique destinées aux bénéficiaires de ses concours. L'agence est soumise, pour celles de ses activités qui en relèvent, aux dispositions du présent code » ; que, par ailleurs, il résulte des éléments provenant du site internet de l'AFD, du site internet du Sénat et de la communication faite par la cour des comptes à la commission des finances de l'assemblée nationale versés aux débats par l'appelant, éléments que ne contredisent pas les pièces produites par l'intimée que : - les ressources d'origine budgétaire de l'AFD « sont devenues minoritaires par rapport aux ressources levées sur les marchés ; elle ne reçoit pas de subvention pour charge de service public et l'État finance intégralement toutes les actions qu'il demande à l'AFD de mener pour son compte ; elle réalise enfin des opérations privées en compte propre » ; - « L'AFD est traitée en comptabilité nationale comme une institution financière » ; - elle « conjugue les fonctions de banque et celles d'agence de mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de la France » ; - elle « n'est pas une agence de développement, mais avant tout une banque de développement (
) En tant qu'institution financière spécialisée (IFS), l'AFD est soumise aux dispositions du code monétaire et financier applicable aux établissements de crédit. Son double statut apporte des garanties très appréciables en termes d'utilisation de la ressource publique et de gestion des risques, dans la mesure où l'Agence est soumise aux contrôles et procédures propres au statut bancaire. En dépit de son nom, l'AFD est, tant au regard de son statut que de son résultat comptable, avant tout, une banque spécialisée dans le financement de projets de développement. A ce titre, l'AFD poursuit les objectifs d'une institution financière. Grâce à des ressources empruntées sur les marchés internationaux, notamment sous forme d'emprunts obligataires, elle finance des projets à des taux d'intérêt bonifiés ou non, ou parfois proches du marché, au prix de l'application d'une marge bancaire qui lui assure des ressources régulières. Établissement bancaire, l'AFD ne reçoit aucune subvention de fonctionnement de la part de l'État (
) » ; - elle a un « positionnement singulier associant plusieurs métiers, qui vont de l'activité bancaire à l'agence de dons, en passant par le bureau d'étude et d'assistance technique, la promotion des intérêts économiques ou diplomatiques français » ; - « Il est (
) fréquent que le public, les ONG et les parlementaires s'adressent à l'AFD comme à une agence de coopération pour découvrir ensuite qu'il s'agit aussi, voire d'abord, d'un établissement bancaire » ; que, pour réaliser ses objectifs, l'AFD reçoit des ressources publiques et se finance sur les marchés financiers internationaux ainsi que sur ses fonds propres ; que ses interventions dans les pays ultramarins consistent en : - des prêts : * « le financement de l'investissement du secteur public dans une démarche de partenariat, et notamment l'appui aux collectivités dans l'élaboration et la mise en oeuvre de leurs stratégies de développement (
) s'effectue sous forme de prêts bonifiés aux collectivités locales, aux établissements publics et aux sociétés d'économie mixte pour des opérations concernant des secteurs prioritaires pour l'emploi, le développement économique, la cohésion sociale et l'environnement ou sous forme de prêts non concessionnels. Par ailleurs, l'AFD peut accorder des prêts à court terme aux collectivités publiques, en préfinancement des subventions européennes ». * « le financement du secteur privé, en non concessionnel, par le biais de prêts directs et de refinancements du secteur bancaire » ; - des garanties : « l'AFD exerce une activité importante de garantie des prêts bancaires à moyen-long terme qui soutiennent l'innovation, la création et la croissance dans les collectivités du Pacifique au travers de la Sogefom dont elle est l'actionnaire majoritaire, ainsi qu'à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon au travers de deux fonds de garantie en compte propre (
) » ; que, dans ces conditions, il est suffisamment établi que l'AFD exerce des activités de nature bancaire et financière qui permettent de l'assimiler à une banque et à une société financière au sens de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que cette analyse est confirmée par le fait que le code NAF de l'AFD est « 6492Z Autre distribution de crédit » et que l'article 9 de l'accord d'établissement prévoit que la valeur du point permettant le calcul de la rémunération est révisée « par référence aux revalorisations des traitements décidées dans les banques en Polynésie française » ;

1° ALORS QUE la question soumise au juge était de savoir si l'extension de la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) aux secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financière », décidée par l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, atteignait l'agence de l'AFD de Papeete et ses salariés ; que, pour trancher cette question, la cour s'est notamment fondée sur les dispositions des articles R. 515-5 et R. 515-6 du code monétaire et financier, lesquelles ont modifié, par décret n° 2017-582 du 20 avril 2017 intervenu postérieurement au jugement de première instance, les dispositions antérieures résultant du décret n° 2014-1315 du 3 novembre 2014, telles qu'elles figuraient dans les articles R. 513-22 et R. 516-3 du même code ; qu'en se déterminant ainsi, au regard de dispositions inapplicables au litige, la cour a violé les textes susvisés ;

2° ALORS QUE chaque convention collective détermine son champ d'application professionnel ou interprofessionnel, défini en termes d'activités économiques ; que l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 n'a étendu la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) qu'aux seuls secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières » ; que l'AFD, dans les dispositions applicables au litige, est, en vertu de l'article R. 515-5 du code monétaire et financier, définie comme un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial » relevant de la catégorie des « établissements de crédit spécialisés », dont la « mission permanente d'intérêt public » consiste principalement à « contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger » et « au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie » ; qu'il résulte en outre de la qualification d'EPIC l'exercice à titre principal d'une mission de service public, précisément d'aide publique au développement ; que l'AFD n'est assimilable ni à une banque ni à une société financière, quand bien même elle est en droit, entre autres instruments [dons, expertises, assistances techniques, etc.], de recourir à des opérations bancaires « afférentes à [sa] mission » (art. l'article R. 513-22 du code monétaire et financier) ; qu'à la différence des banques, qu'elle ne concurrence pas, et dont elle ne peut réaliser toutes les opérations, elle n'a pas, comme établissement de crédit spécialisé, de capital social souscrit par des actionnaires, ne collecte pas de dépôts, ne met pas de moyens de paiement à disposition de clients, ne finance pas de crédits à des particuliers ou à des entreprises locales, n'a aucun but lucratif, tandis qu'à l'inverse elle garantit des prêts et bénéficie d'une dotation de l'État pour atteindre ses objectifs ; qu'il s'ensuit que l'AFD n'est pas une entreprise à laquelle la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) puisse être étendue en vertu de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 ; qu'en jugeant le contraire, au motif erroné qu'elle était « avant tout une banque spécialisée dans le financement de projets de développement », la cour a violé l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et les articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

3° ALORS QUE si le champ d'une convention collective s'apprécie « en termes d'activités économiques » (art. Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, al. 2), cette activité s'entend de l'activité « réelle et principale » qui est exercée par l'employeur et par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, la cour a elle-même constaté que l'AFD est un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial, ayant pour mission de service public de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement des départements et collectivités d'Outre-Mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ; à cette fin, elle finance des opérations de développement (
) ; elle peut conduire d'autres activités (
) se rattachant à sa mission » (arrêt, p. 8) ; qu'elle a ainsi constaté que l'activité « réelle et principale » de l'AFD était bien une mission d'aide à la politique de développement de l'État français, les opérations bancaires auxquels elle recourt constituant des instruments financiers mis au service de cette activité ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD était assimilable à une banque, c'est-à-dire avait pour activité principale la réalisation d'opérations bancaires, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

4° ALORS QUE l'AFD avait clairement distingué dans ses écritures ses bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont situés dans une collectivité d'Outre-Mer, telle que Papeete ; qu'elle avait rappelé que si les contrats de droit étranger conclus à l'étranger pouvaient être gouvernés par des conventions collectives relevant du même droit, les contrats des personnels travaillant en métropole ainsi que dans les départements d'Outre-Mer et les collectivités d'Outre-Mer, et donc en particulier à Papeete, ne relevaient d'aucune convention collective, en raison de son statut spécifique, déterminé par voie réglementaire ; que la circonstance, dès lors, qu'à l'étranger des contrats, conclus selon le droit étranger, soient éventuellement gouvernés par des conventions collectives soumises elles-mêmes à un droit étranger, n'avait aucune incidence sur l'extension contestée à l'AFD d'une convention collective du secteur bancaire gouvernée par les règles du droit français ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD ne pouvait pas refuser « aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions », la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier.

Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Agence française de développement, demanderesse au pourvoi n° R 18-15.772

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française [20 octobre 1986] s'appliquait au contrat de travail liant l'Agence française de développement et Mme V... B..., et dit que celle-là devait à celle-ci différentes sommes au titre de la majoration pour diplômes pour la période allant de juin 2009 à juin 2014, ladite majoration mensuelle de 30 points selon la valeur fixée conventionnellement pour le secteur des banques et sociétés financières à compter du mois de juillet 2014, au titre de la gratification annuelle fixe prévue par l'article 43 de la convention collective susvisée, pour la période de juin 2009 à juin 2014, et au titre de la gratification annuelle fixe due au titre du mois de juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française, l'AFD ne conteste pas que le contrat de travail liant les parties est régi par le code du travail de Polynésie française ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 « règle les rapports entre les entreprises adhérentes au Comité de Polynésie Française de l'Association Française des Banques et des sociétés financières et leur personnel travaillant de façon permanente dans le Territoire » ; que, par arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, ses stipulations ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et travailleurs du secteur d'activité des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD ne peut refuser aux salariés polynésiens l'application d'une convention collective en arguant que les salariés travaillant en métropole ne sont pas régis par une telle convention dans la mesure où le code du travail métropolitain ne s'applique pas à la Polynésie française qui, par l'effet de son statut et de la spécialité législative qui en découle, a compétence pour réglementer le droit social et qui possède un code du travail spécifique ; qu'elle ne saurait refuser aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions ; qu'il importe dès lors de rechercher si l'AFD est ou peut être assimilée à une banque ou à une société financière ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ne contient aucune définition d'une banque, ni d'une société financière ; que le code monétaire et financier n'emploie plus l'expression « société financière » mais consacre le titre 1er de son livre V aux prestataires de services bancaires qui, selon l'article L. 511-1, sont : I.- Les établissements de crédit (
) entreprises dont l'activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à l'article L. 312-2 et à octroyer des crédits mentionnés à l'article L. 313-1 ; II.- Les sociétés de financement (
) personnes morales, autres que des établissements de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites définies par leur agrément. Elles sont des établissements financiers au sens du 4 de l'article L. 511-21 » ; que, contrairement à ce que prétend l'AFD, aucun texte du code monétaire et financier ne l'exclut automatiquement du champ d'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD figure parmi les sociétés de financement et les articles R. 515-5 et R. 515-6 disposent que : elle « exerce une mission permanente d'intérêt public au sens de l'article L. 511-104. Elle peut effectuer les opérations de banque afférentes à cette mission dans les conditions définies par la présente section » ; elle est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial et « a pour mission de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de : a) Contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger ; b) Contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. A cette fin, elle finance des opérations de développement, dans le respect de l'environnement ; elle peut conduire d'autres activités et prestations de service se rattachant à sa mission. L'agence est en particulier chargée d'assurer, directement ou indirectement, des prestations d'expertise technique destinées aux bénéficiaires de ses concours. L'agence est soumise, pour celles de ses activités qui en relèvent, aux dispositions du présent code » ; que, par ailleurs, il résulte des éléments provenant du site internet de l'AFD, du site internet du Sénat et de la communication faite par la cour des comptes à la commission des finances de l'assemblée nationale versés aux débats par l'appelant, éléments que ne contredisent pas les pièces produites par l'intimée que : - les ressources d'origine budgétaire de l'AFD « sont devenues minoritaires par rapport aux ressources levées sur les marchés ; elle ne reçoit pas de subvention pour charge de service public et l'État finance intégralement toutes les actions qu'il demande à l'AFD de mener pour son compte ; elle réalise enfin des opérations privées en compte propre » ; - « L'AFD est traitée en comptabilité nationale comme une institution financière » ; - elle « conjugue les fonctions de banque et celles d'agence de mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de la France » ; - elle « n'est pas une agence de développement, mais avant tout une banque de développement (
) En tant qu'institution financière spécialisée (IFS), l'AFD est soumise aux dispositions du code monétaire et financier applicable aux établissements de crédit. Son double statut apporte des garanties très appréciables en termes d'utilisation de la ressource publique et de gestion des risques, dans la mesure où l'Agence est soumise aux contrôles et procédures propres au statut bancaire. En dépit de son nom, l'AFD est, tant au regard de son statut que de son résultat comptable, avant tout, une banque spécialisée dans le financement de projets de développement. A ce titre, l'AFD poursuit les objectifs d'une institution financière. Grâce à des ressources empruntées sur les marchés internationaux, notamment sous forme d'emprunts obligataires, elle finance des projets à des taux d'intérêt bonifiés ou non, ou parfois proches du marché, au prix de l'application d'une marge bancaire qui lui assure des ressources régulières. Établissement bancaire, l'AFD ne reçoit aucune subvention de fonctionnement de la part de l'État (
) » ; - elle a un « positionnement singulier associant plusieurs métiers, qui vont de l'activité bancaire à l'agence de dons, en passant par le bureau d'étude et d'assistance technique, la promotion des intérêts économiques ou diplomatiques français » ; - « Il est (
) fréquent que le public, les ONG et les parlementaires s'adressent à l'AFD comme à une agence de coopération pour découvrir ensuite qu'il s'agit aussi, voire d'abord, d'un établissement bancaire » ; que, pour réaliser ses objectifs, l'AFD reçoit des ressources publiques et se finance sur les marchés financiers internationaux ainsi que sur ses fonds propres ; que ses interventions dans les pays ultramarins consistent en : - des prêts : * « le financement de l'investissement du secteur public dans une démarche de partenariat, et notamment l'appui aux collectivités dans l'élaboration et la mise en oeuvre de leurs stratégies de développement (
) s'effectue sous forme de prêts bonifiés aux collectivités locales, aux établissements publics et aux sociétés d'économie mixte pour des opérations concernant des secteurs prioritaires pour l'emploi, le développement économique, la cohésion sociale et l'environnement ou sous forme de prêts non concessionnels. Par ailleurs, l'AFD peut accorder des prêts à court terme aux collectivités publiques, en préfinancement des subventions européennes ». * « le financement du secteur privé, en non concessionnel, par le biais de prêts directs et de refinancements du secteur bancaire » ; - des garanties : « l'AFD exerce une activité importante de garantie des prêts bancaires à moyen-long terme qui soutiennent l'innovation, la création et la croissance dans les collectivités du Pacifique au travers de la Sogefom dont elle est l'actionnaire majoritaire, ainsi qu'à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon au travers de deux fonds de garantie en compte propre (
) » ; que, dans ces conditions, il est suffisamment établi que l'AFD exerce des activités de nature bancaire et financière qui permettent de l'assimiler à une banque et à une société financière au sens de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que cette analyse est confirmée par le fait que le code NAF de l'AFD est « 6492Z Autre distribution de crédit » et que l'article 9 de l'accord d'établissement prévoit que la valeur du point permettant le calcul de la rémunération est révisée « par référence aux revalorisations des traitements décidées dans les banques en Polynésie française » ;

1° ALORS QUE la question soumise au juge était de savoir si l'extension de la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) aux secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financière », décidée par l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, atteignait l'agence de l'AFD de Papeete et ses salariés ; que, pour trancher cette question, la cour s'est notamment fondée sur les dispositions des articles R. 515-5 et R. 515-6 du code monétaire et financier, lesquelles ont modifié, par décret n° 2017-582 du 20 avril 2017 intervenu postérieurement au jugement de première instance, les dispositions antérieures résultant du décret n° 2014-1315 du 3 novembre 2014, telles qu'elles figuraient dans les articles R. 513-22 et R. 516-3 du même code ; qu'en se déterminant ainsi, au regard de dispositions inapplicables au litige, la cour a violé les textes susvisés ;

2° ALORS QUE chaque convention collective détermine son champ d'application professionnel ou interprofessionnel, défini en termes d'activités économiques ; que l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 n'a étendu la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) qu'aux seuls secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières » ; que l'AFD, dans les dispositions applicables au litige, est, en vertu de l'article R. 515-5 du code monétaire et financier, définie comme un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial » relevant de la catégorie des « établissements de crédit spécialisés », dont la « mission permanente d'intérêt public » consiste principalement à « contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger » et « au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie » ; qu'il résulte en outre de la qualification d'EPIC l'exercice à titre principal d'une mission de service public, précisément d'aide publique au développement ; que l'AFD n'est assimilable ni à une banque ni à une société financière, quand bien même elle est en droit, entre autres instruments [dons, expertises, assistances techniques, etc.], de recourir à des opérations bancaires « afférentes à [sa] mission » (art. l'article R. 513-22 du code monétaire et financier) ; qu'à la différence des banques, qu'elle ne concurrence pas, et dont elle ne peut réaliser toutes les opérations, elle n'a pas, comme établissement de crédit spécialisé, de capital social souscrit par des actionnaires, ne collecte pas de dépôts, ne met pas de moyens de paiement à disposition de clients, ne finance pas de crédits à des particuliers ou à des entreprises locales, n'a aucun but lucratif, tandis qu'à l'inverse elle garantit des prêts et bénéficie d'une dotation de l'État pour atteindre ses objectifs ; qu'il s'ensuit que l'AFD n'est pas une entreprise à laquelle la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) puisse être étendue en vertu de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 ; qu'en jugeant le contraire, au motif erroné qu'elle était « avant tout une banque spécialisée dans le financement de projets de développement », la cour a violé l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et les articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

3° ALORS QUE si le champ d'une convention collective s'apprécie « en termes d'activités économiques » (art. Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, al. 2), cette activité s'entend de l'activité « réelle et principale » qui est exercée par l'employeur et par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, la cour a elle-même constaté que l'AFD est un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial, ayant pour mission de service public de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement des départements et collectivités d'Outre-Mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ; à cette fin, elle finance des opérations de développement (
) ; elle peut conduire d'autres activités (
) se rattachant à sa mission » (arrêt, p. 8) ; qu'elle a ainsi constaté que l'activité « réelle et principale » de l'AFD était bien une mission d'aide à la politique de développement de l'État français, les opérations bancaires auxquels elle recourt constituant des instruments financiers mis au service de cette activité ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD était assimilable à une banque, c'est-à-dire avait pour activité principale la réalisation d'opérations bancaires, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

4° ALORS QUE l'AFD avait clairement distingué dans ses écritures ses bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont situés dans une collectivité d'Outre-Mer, telle que Papeete ; qu'elle avait rappelé que si les contrats de droit étranger conclus à l'étranger pouvaient être gouvernés par des conventions collectives relevant du même droit, les contrats des personnels travaillant en métropole ainsi que dans les départements d'Outre-Mer et les collectivités d'Outre-Mer, et donc en particulier à Papeete, ne relevaient d'aucune convention collective, en raison de son statut spécifique, déterminé par voie réglementaire ; que la circonstance, dès lors, qu'à l'étranger des contrats, conclus selon le droit étranger, soient éventuellement gouvernés par des conventions collectives soumises elles-mêmes à un droit étranger, n'avait aucune incidence sur l'extension contestée à l'AFD d'une convention collective du secteur bancaire gouvernée par les règles du droit français ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD ne pouvait pas refuser « aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions », la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier.
Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Agence française de développement, demanderesse au pourvoi n° S 18-15.773

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française [20 octobre 1986] s'appliquait au contrat de travail liant l'Agence française de développement et Mme D... X..., et dit que celle-là devait à celle-ci différentes sommes au titre de la majoration pour diplômes pour la période allant de juin 2009 à juin 2014, ladite majoration mensuelle de 40 points selon la valeur fixée conventionnellement pour le secteur des banques et sociétés financières à compter du mois de juillet 2014, au titre de la gratification annuelle fixe prévue par l'article 43 de la convention collective susvisée, pour la période de juin 2009 à juin 2014, et au titre de la gratification annuelle fixe due au titre du mois de juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française, l'AFD ne conteste pas que le contrat de travail liant les parties est régi par le code du travail de Polynésie française ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 « règle les rapports entre les entreprises adhérentes au Comité de Polynésie Française de l'Association Française des Banques et des sociétés financières et leur personnel travaillant de façon permanente dans le Territoire » ; que, par arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, ses stipulations ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et travailleurs du secteur d'activité des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD ne peut refuser aux salariés polynésiens l'application d'une convention collective en arguant que les salariés travaillant en métropole ne sont pas régis par une telle convention dans la mesure où le code du travail métropolitain ne s'applique pas à la Polynésie française qui, par l'effet de son statut et de la spécialité législative qui en découle, a compétence pour réglementer le droit social et qui possède un code du travail spécifique ; qu'elle ne saurait refuser aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions ; qu'il importe dès lors de rechercher si l'AFD est ou peut être assimilée à une banque ou à une société financière ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ne contient aucune définition d'une banque, ni d'une société financière ; que le code monétaire et financier n'emploie plus l'expression « société financière » mais consacre le titre 1er de son livre V aux prestataires de services bancaires qui, selon l'article L. 511-1, sont : I.- Les établissements de crédit (
) entreprises dont l'activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à l'article L. 312-2 et à octroyer des crédits mentionnés à l'article L. 313-1 ; II.- Les sociétés de financement (
) personnes morales, autres que des établissements de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites définies par leur agrément. Elles sont des établissements financiers au sens du 4 de l'article L. 511-21 » ; que, contrairement à ce que prétend l'AFD, aucun texte du code monétaire et financier ne l'exclut automatiquement du champ d'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD figure parmi les sociétés de financement et les articles R. 515-5 et R. 515-6 disposent que : elle « exerce une mission permanente d'intérêt public au sens de l'article L. 511-104. Elle peut effectuer les opérations de banque afférentes à cette mission dans les conditions définies par la présente section » ; elle est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial et « a pour mission de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de : a) Contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger ; b) Contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. A cette fin, elle finance des opérations de développement, dans le respect de l'environnement ; elle peut conduire d'autres activités et prestations de service se rattachant à sa mission. L'agence est en particulier chargée d'assurer, directement ou indirectement, des prestations d'expertise technique destinées aux bénéficiaires de ses concours. L'agence est soumise, pour celles de ses activités qui en relèvent, aux dispositions du présent code » ; que, par ailleurs, il résulte des éléments provenant du site internet de l'AFD, du site internet du Sénat et de la communication faite par la cour des comptes à la commission des finances de l'assemblée nationale versés aux débats par l'appelant, éléments que ne contredisent pas les pièces produites par l'intimée que : - les ressources d'origine budgétaire de l'AFD « sont devenues minoritaires par rapport aux ressources levées sur les marchés ; elle ne reçoit pas de subvention pour charge de service public et l'État finance intégralement toutes les actions qu'il demande à l'AFD de mener pour son compte ; elle réalise enfin des opérations privées en compte propre » ; - « L'AFD est traitée en comptabilité nationale comme une institution financière » ; - elle « conjugue les fonctions de banque et celles d'agence de mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de la France » ; - elle « n'est pas une agence de développement, mais avant tout une banque de développement (
) En tant qu'institution financière spécialisée (IFS), l'AFD est soumise aux dispositions du code monétaire et financier applicable aux établissements de crédit. Son double statut apporte des garanties très appréciables en termes d'utilisation de la ressource publique et de gestion des risques, dans la mesure où l'Agence est soumise aux contrôles et procédures propres au statut bancaire. En dépit de son nom, l'AFD est, tant au regard de son statut que de son résultat comptable, avant tout, une banque spécialisée dans le financement de projets de développement. A ce titre, l'AFD poursuit les objectifs d'une institution financière. Grâce à des ressources empruntées sur les marchés internationaux, notamment sous forme d'emprunts obligataires, elle finance des projets à des taux d'intérêt bonifiés ou non, ou parfois proches du marché, au prix de l'application d'une marge bancaire qui lui assure des ressources régulières. Établissement bancaire, l'AFD ne reçoit aucune subvention de fonctionnement de la part de l'État (
) » ; - elle a un « positionnement singulier associant plusieurs métiers, qui vont de l'activité bancaire à l'agence de dons, en passant par le bureau d'étude et d'assistance technique, la promotion des intérêts économiques ou diplomatiques français » ; - « Il est (
) fréquent que le public, les ONG et les parlementaires s'adressent à l'AFD comme à une agence de coopération pour découvrir ensuite qu'il s'agit aussi, voire d'abord, d'un établissement bancaire » ; que, pour réaliser ses objectifs, l'AFD reçoit des ressources publiques et se finance sur les marchés financiers internationaux ainsi que sur ses fonds propres ; que ses interventions dans les pays ultramarins consistent en : - des prêts : * « le financement de l'investissement du secteur public dans une démarche de partenariat, et notamment l'appui aux collectivités dans l'élaboration et la mise en oeuvre de leurs stratégies de développement (
) s'effectue sous forme de prêts bonifiés aux collectivités locales, aux établissements publics et aux sociétés d'économie mixte pour des opérations concernant des secteurs prioritaires pour l'emploi, le développement économique, la cohésion sociale et l'environnement ou sous forme de prêts non concessionnels. Par ailleurs, l'AFD peut accorder des prêts à court terme aux collectivités publiques, en préfinancement des subventions européennes ». * « le financement du secteur privé, en non concessionnel, par le biais de prêts directs et de refinancements du secteur bancaire » ; - des garanties : « l'AFD exerce une activité importante de garantie des prêts bancaires à moyen-long terme qui soutiennent l'innovation, la création et la croissance dans les collectivités du Pacifique au travers de la Sogefom dont elle est l'actionnaire majoritaire, ainsi qu'à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon au travers de deux fonds de garantie en compte propre (
) » ; que, dans ces conditions, il est suffisamment établi que l'AFD exerce des activités de nature bancaire et financière qui permettent de l'assimiler à une banque et à une société financière au sens de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que cette analyse est confirmée par le fait que le code NAF de l'AFD est « 6492Z Autre distribution de crédit » et que l'article 9 de l'accord d'établissement prévoit que la valeur du point permettant le calcul de la rémunération est révisée « par référence aux revalorisations des traitements décidées dans les banques en Polynésie française » ;

1° ALORS QUE la question soumise au juge était de savoir si l'extension de la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) aux secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financière », décidée par l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, atteignait l'agence de l'AFD de Papeete et ses salariés ; que, pour trancher cette question, la cour s'est notamment fondée sur les dispositions des articles R. 515-5 et R. 515-6 du code monétaire et financier, lesquelles ont modifié, par décret n° 2017-582 du 20 avril 2017 intervenu postérieurement au jugement de première instance, les dispositions antérieures résultant du décret n° 2014-1315 du 3 novembre 2014, telles qu'elles figuraient dans les articles R. 513-22 et R. 516-3 du même code ; qu'en se déterminant ainsi, au regard de dispositions inapplicables au litige, la cour a violé les textes susvisés ;

2° ALORS QUE chaque convention collective détermine son champ d'application professionnel ou interprofessionnel, défini en termes d'activités économiques ; que l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 n'a étendu la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) qu'aux seuls secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières » ; que l'AFD, dans les dispositions applicables au litige, est, en vertu de l'article R. 515-5 du code monétaire et financier, définie comme un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial » relevant de la catégorie des « établissements de crédit spécialisés », dont la « mission permanente d'intérêt public » consiste principalement à « contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger » et « au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie » ; qu'il résulte en outre de la qualification d'EPIC l'exercice à titre principal d'une mission de service public, précisément d'aide publique au développement ; que l'AFD n'est assimilable ni à une banque ni à une société financière, quand bien même elle est en droit, entre autres instruments [dons, expertises, assistances techniques, etc.], de recourir à des opérations bancaires « afférentes à [sa] mission » (art. l'article R. 513-22 du code monétaire et financier) ; qu'à la différence des banques, qu'elle ne concurrence pas, et dont elle ne peut réaliser toutes les opérations, elle n'a pas, comme établissement de crédit spécialisé, de capital social souscrit par des actionnaires, ne collecte pas de dépôts, ne met pas de moyens de paiement à disposition de clients, ne finance pas de crédits à des particuliers ou à des entreprises locales, n'a aucun but lucratif, tandis qu'à l'inverse elle garantit des prêts et bénéficie d'une dotation de l'État pour atteindre ses objectifs ; qu'il s'ensuit que l'AFD n'est pas une entreprise à laquelle la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) puisse être étendue en vertu de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 ; qu'en jugeant le contraire, au motif erroné qu'elle était « avant tout une banque spécialisée dans le financement de projets de développement », la cour a violé l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et les articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

3° ALORS QUE si le champ d'une convention collective s'apprécie « en termes d'activités économiques » (art. Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, al. 2), cette activité s'entend de l'activité « réelle et principale » qui est exercée par l'employeur et par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, la cour a elle-même constaté que l'AFD est un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial, ayant pour mission de service public de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement des départements et collectivités d'Outre-Mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ; à cette fin, elle finance des opérations de développement (
) ; elle peut conduire d'autres activités (
) se rattachant à sa mission » (arrêt, p. 8) ; qu'elle a ainsi constaté que l'activité « réelle et principale » de l'AFD était bien une mission d'aide à la politique de développement de l'État français, les opérations bancaires auxquels elle recourt constituant des instruments financiers mis au service de cette activité ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD était assimilable à une banque, c'est-à-dire avait pour activité principale la réalisation d'opérations bancaires, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

4° ALORS QUE l'AFD avait clairement distingué dans ses écritures ses bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont situés dans une collectivité d'Outre-Mer, telle que Papeete ; qu'elle avait rappelé que si les contrats de droit étranger conclus à l'étranger pouvaient être gouvernés par des conventions collectives relevant du même droit, les contrats des personnels travaillant en métropole ainsi que dans les départements d'Outre-Mer et les collectivités d'Outre-Mer, et donc en particulier à Papeete, ne relevaient d'aucune convention collective, en raison de son statut spécifique, déterminé par voie réglementaire ; que la circonstance, dès lors, qu'à l'étranger des contrats, conclus selon le droit étranger, soient éventuellement gouvernés par des conventions collectives soumises elles-mêmes à un droit étranger, n'avait aucune incidence sur l'extension contestée à l'AFD d'une convention collective du secteur bancaire gouvernée par les règles du droit français ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD ne pouvait pas refuser « aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions », la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier.
Moyen produit par la SCP L. Poulet-Odent, avocat aux Conseils, pour l'Agence française de développement, demanderesse au pourvoi n° T 18-15.774

Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française [20 octobre 1986] s'appliquait au contrat de travail liant l'Agence française de développement et Mme P... R..., et dit que celle-là devait à celle-ci différentes sommes au titre de la majoration pour diplômes pour la période allant de juin 2009 à juin 2014, ladite majoration mensuelle de 20 points selon la valeur fixée conventionnellement pour le secteur des banques et sociétés financières à compter du mois de juillet 2014, au titre de la gratification annuelle fixe prévue par l'article 43 de la convention collective susvisée, pour la période de juin 2009 à juin 2014, et au titre de la gratification annuelle fixe due au titre du mois de juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE, s'agissant de l'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française, l'AFD ne conteste pas que le contrat de travail liant les parties est régi par le code du travail de Polynésie française ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française du 20 octobre 1986 « règle les rapports entre les entreprises adhérentes au Comité de Polynésie Française de l'Association Française des Banques et des sociétés financières et leur personnel travaillant de façon permanente dans le Territoire » ; que, par arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, ses stipulations ont été rendues obligatoires pour tous les employeurs et travailleurs du secteur d'activité des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD ne peut refuser aux salariés polynésiens l'application d'une convention collective en arguant que les salariés travaillant en métropole ne sont pas régis par une telle convention dans la mesure où le code du travail métropolitain ne s'applique pas à la Polynésie française qui, par l'effet de son statut et de la spécialité législative qui en découle, a compétence pour réglementer le droit social et qui possède un code du travail spécifique ; qu'elle ne saurait refuser aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions ; qu'il importe dès lors de rechercher si l'AFD est ou peut être assimilée à une banque ou à une société financière ; que la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ne contient aucune définition d'une banque, ni d'une société financière ; que le code monétaire et financier n'emploie plus l'expression « société financière » mais consacre le titre 1er de son livre V aux prestataires de services bancaires qui, selon l'article L. 511-1, sont : I.- Les établissements de crédit (
) entreprises dont l'activité consiste, pour leur propre compte et à titre de profession habituelle, à recevoir des fonds remboursables du public mentionnés à l'article L. 312-2 et à octroyer des crédits mentionnés à l'article L. 313-1 ; II.- Les sociétés de financement (
) personnes morales, autres que des établissements de crédit, qui effectuent à titre de profession habituelle et pour leur propre compte des opérations de crédit dans les conditions et limites définies par leur agrément. Elles sont des établissements financiers au sens du 4 de l'article L. 511-21 » ; que, contrairement à ce que prétend l'AFD, aucun texte du code monétaire et financier ne l'exclut automatiquement du champ d'application de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que l'AFD figure parmi les sociétés de financement et les articles R. 515-5 et R. 515-6 disposent que : elle « exerce une mission permanente d'intérêt public au sens de l'article L. 511-104. Elle peut effectuer les opérations de banque afférentes à cette mission dans les conditions définies par la présente section » ; elle est un établissement public de l'État à caractère industriel et commercial et « a pour mission de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de : a) Contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger ; b) Contribuer au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie. A cette fin, elle finance des opérations de développement, dans le respect de l'environnement ; elle peut conduire d'autres activités et prestations de service se rattachant à sa mission. L'agence est en particulier chargée d'assurer, directement ou indirectement, des prestations d'expertise technique destinées aux bénéficiaires de ses concours. L'agence est soumise, pour celles de ses activités qui en relèvent, aux dispositions du présent code » ; que, par ailleurs, il résulte des éléments provenant du site internet de l'AFD, du site internet du Sénat et de la communication faite par la cour des comptes à la commission des finances de l'assemblée nationale versés aux débats par l'appelant, éléments que ne contredisent pas les pièces produites par l'intimée que : - les ressources d'origine budgétaire de l'AFD « sont devenues minoritaires par rapport aux ressources levées sur les marchés ; elle ne reçoit pas de subvention pour charge de service public et l'État finance intégralement toutes les actions qu'il demande à l'AFD de mener pour son compte ; elle réalise enfin des opérations privées en compte propre » ; - « L'AFD est traitée en comptabilité nationale comme une institution financière » ; - elle « conjugue les fonctions de banque et celles d'agence de mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de la France » ; - elle « n'est pas une agence de développement, mais avant tout une banque de développement (
) En tant qu'institution financière spécialisée (IFS), l'AFD est soumise aux dispositions du code monétaire et financier applicable aux établissements de crédit. Son double statut apporte des garanties très appréciables en termes d'utilisation de la ressource publique et de gestion des risques, dans la mesure où l'Agence est soumise aux contrôles et procédures propres au statut bancaire. En dépit de son nom, l'AFD est, tant au regard de son statut que de son résultat comptable, avant tout, une banque spécialisée dans le financement de projets de développement. A ce titre, l'AFD poursuit les objectifs d'une institution financière. Grâce à des ressources empruntées sur les marchés internationaux, notamment sous forme d'emprunts obligataires, elle finance des projets à des taux d'intérêt bonifiés ou non, ou parfois proches du marché, au prix de l'application d'une marge bancaire qui lui assure des ressources régulières. Établissement bancaire, l'AFD ne reçoit aucune subvention de fonctionnement de la part de l'État (
) » ; - elle a un « positionnement singulier associant plusieurs métiers, qui vont de l'activité bancaire à l'agence de dons, en passant par le bureau d'étude et d'assistance technique, la promotion des intérêts économiques ou diplomatiques français » ; - « Il est (
) fréquent que le public, les ONG et les parlementaires s'adressent à l'AFD comme à une agence de coopération pour découvrir ensuite qu'il s'agit aussi, voire d'abord, d'un établissement bancaire » ; que, pour réaliser ses objectifs, l'AFD reçoit des ressources publiques et se finance sur les marchés financiers internationaux ainsi que sur ses fonds propres ; que ses interventions dans les pays ultramarins consistent en : - des prêts : * « le financement de l'investissement du secteur public dans une démarche de partenariat, et notamment l'appui aux collectivités dans l'élaboration et la mise en oeuvre de leurs stratégies de développement (
) s'effectue sous forme de prêts bonifiés aux collectivités locales, aux établissements publics et aux sociétés d'économie mixte pour des opérations concernant des secteurs prioritaires pour l'emploi, le développement économique, la cohésion sociale et l'environnement ou sous forme de prêts non concessionnels. Par ailleurs, l'AFD peut accorder des prêts à court terme aux collectivités publiques, en préfinancement des subventions européennes ». * « le financement du secteur privé, en non concessionnel, par le biais de prêts directs et de refinancements du secteur bancaire » ; - des garanties : « l'AFD exerce une activité importante de garantie des prêts bancaires à moyen-long terme qui soutiennent l'innovation, la création et la croissance dans les collectivités du Pacifique au travers de la Sogefom dont elle est l'actionnaire majoritaire, ainsi qu'à Mayotte et à Saint-Pierre et Miquelon au travers de deux fonds de garantie en compte propre (
) » ; que, dans ces conditions, il est suffisamment établi que l'AFD exerce des activités de nature bancaire et financière qui permettent de l'assimiler à une banque et à une société financière au sens de la convention collective du travail du personnel des banques et des sociétés financières de la Polynésie française ; que cette analyse est confirmée par le fait que le code NAF de l'AFD est « 6492Z Autre distribution de crédit » et que l'article 9 de l'accord d'établissement prévoit que la valeur du point permettant le calcul de la rémunération est révisée « par référence aux revalorisations des traitements décidées dans les banques en Polynésie française » ;

1° ALORS QUE la question soumise au juge était de savoir si l'extension de la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) aux secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financière », décidée par l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988, atteignait l'agence de l'AFD de Papeete et ses salariés ; que, pour trancher cette question, la cour s'est notamment fondée sur les dispositions des articles R. 515-5 et R. 515-6 du code monétaire et financier, lesquelles ont modifié, par décret n° 2017-582 du 20 avril 2017 intervenu postérieurement au jugement de première instance, les dispositions antérieures résultant du décret n° 2014-1315 du 3 novembre 2014, telles qu'elles figuraient dans les articles R. 513-22 et R. 516-3 du même code ; qu'en se déterminant ainsi, au regard de dispositions inapplicables au litige, la cour a violé les textes susvisés ;

2° ALORS QUE chaque convention collective détermine son champ d'application professionnel ou interprofessionnel, défini en termes d'activités économiques ; que l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 n'a étendu la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) qu'aux seuls secteurs d'activité des « banques » et des « sociétés financières » ; que l'AFD, dans les dispositions applicables au litige, est, en vertu de l'article R. 515-5 du code monétaire et financier, définie comme un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial » relevant de la catégorie des « établissements de crédit spécialisés », dont la « mission permanente d'intérêt public » consiste principalement à « contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement de l'État à l'étranger » et « au développement des départements et des collectivités d'outre-mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie » ; qu'il résulte en outre de la qualification d'EPIC l'exercice à titre principal d'une mission de service public, précisément d'aide publique au développement ; que l'AFD n'est assimilable ni à une banque ni à une société financière, quand bien même elle est en droit, entre autres instruments [dons, expertises, assistances techniques, etc.], de recourir à des opérations bancaires « afférentes à [sa] mission » (art. l'article R. 513-22 du code monétaire et financier) ; qu'à la différence des banques, qu'elle ne concurrence pas, et dont elle ne peut réaliser toutes les opérations, elle n'a pas, comme établissement de crédit spécialisé, de capital social souscrit par des actionnaires, ne collecte pas de dépôts, ne met pas de moyens de paiement à disposition de clients, ne finance pas de crédits à des particuliers ou à des entreprises locales, n'a aucun but lucratif, tandis qu'à l'inverse elle garantit des prêts et bénéficie d'une dotation de l'État pour atteindre ses objectifs ; qu'il s'ensuit que l'AFD n'est pas une entreprise à laquelle la convention collective du travail du secteur des banques et des sociétés financières de Polynésie française (20 octobre 1986) puisse être étendue en vertu de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 ; qu'en jugeant le contraire, au motif erroné qu'elle était « avant tout une banque spécialisée dans le financement de projets de développement », la cour a violé l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et les articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

3° ALORS QUE si le champ d'une convention collective s'apprécie « en termes d'activités économiques » (art. Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, al. 2), cette activité s'entend de l'activité « réelle et principale » qui est exercée par l'employeur et par le salarié lui-même ; qu'en l'espèce, la cour a elle-même constaté que l'AFD est un « établissement public de l'État à caractère industriel et commercial, ayant pour mission de service public de réaliser des opérations financières de toute nature en vue de contribuer à la mise en oeuvre de la politique d'aide au développement des départements et collectivités d'Outre-Mer ainsi que de la Nouvelle-Calédonie ; à cette fin, elle finance des opérations de développement (
) ; elle peut conduire d'autres activités (
) se rattachant à sa mission » (arrêt, p. 8) ; qu'elle a ainsi constaté que l'activité « réelle et principale » de l'AFD était bien une mission d'aide à la politique de développement de l'État français, les opérations bancaires auxquels elle recourt constituant des instruments financiers mis au service de cette activité ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD était assimilable à une banque, c'est-à-dire avait pour activité principale la réalisation d'opérations bancaires, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier ;

4° ALORS QUE l'AFD avait clairement distingué dans ses écritures ses bureaux situés à l'étranger et ceux qui sont situés dans une collectivité d'Outre-Mer, telle que Papeete ; qu'elle avait rappelé que si les contrats de droit étranger conclus à l'étranger pouvaient être gouvernés par des conventions collectives relevant du même droit, les contrats des personnels travaillant en métropole ainsi que dans les départements d'Outre-Mer et les collectivités d'Outre-Mer, et donc en particulier à Papeete, ne relevaient d'aucune convention collective, en raison de son statut spécifique, déterminé par voie réglementaire ; que la circonstance, dès lors, qu'à l'étranger des contrats, conclus selon le droit étranger, soient éventuellement gouvernés par des conventions collectives soumises elles-mêmes à un droit étranger, n'avait aucune incidence sur l'extension contestée à l'AFD d'une convention collective du secteur bancaire gouvernée par les règles du droit français ; qu'en jugeant dès lors que l'AFD ne pouvait pas refuser « aux salariés polynésiens le droit de bénéficier d'une convention collective applicable en Polynésie française alors qu'elle consent ce bénéfice aux salariés travaillant à l'étranger dont le contrat de travail peut être régi par les accords collectifs du pays où ils exercent leurs fonctions », la cour a privé sa décision de base légale au regard de l'article Lp. 2312-1 du code du travail de Polynésie française, ensemble de l'arrêté n° 212 CM du 1er mars 1988 et des articles L. 513-1, R. 513-22 et R. 513-23 dans leur version applicable au litige, et R. 516-3 du code monétaire et financier.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-15769;18-15770;18-15771;18-15772;18-15773;18-15774
Date de la décision : 27/05/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Papeete, 15 février 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 mai. 2020, pourvoi n°18-15769;18-15770;18-15771;18-15772;18-15773;18-15774


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP L. Poulet-Odent, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.15769
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