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25/03/2020 | FRANCE | N°18-18910

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 25 mars 2020, 18-18910


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 mars 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 246 F-D

Pourvoi n° B 18-18.910

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 MARS 2020

La société Transports G... P... et fils, société à r

esponsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 18-18.910 contre l'arrêt rendu le 19 avril 2018 par la cour d'appel de Rou...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 mars 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 246 F-D

Pourvoi n° B 18-18.910

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 MARS 2020

La société Transports G... P... et fils, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 18-18.910 contre l'arrêt rendu le 19 avril 2018 par la cour d'appel de Rouen (chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à la société G... travaux publics, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fevre, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Transports G... P... et fils, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société G... travaux publics, après débats en l'audience publique du 4 février 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fevre, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 19 avril 2018), statuant en matière de référé, la société Transports G... P... et fils (la société Transports G...), ayant pour activité le transport routier, la location de matériels liés aux travaux publics et la vente de matériaux de chantier, a, par un acte du 26 juin 2014, cédé son activité « travaux publics » à la SAS G... travaux publics (la société G... TP).

2. Invoquant la violation de la clause de non-concurrence figurant dans l'acte de cession, la société Transports G... a obtenu, par une ordonnance sur requête, la désignation d'un huissier de justice aux fins de constat et d'investigations dans les locaux de la société G... TP sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile. Cette dernière a demandé la rétractation de l'ordonnance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. La société Transports G... fait grief à l'arrêt de rétracter l'ordonnance sur requête et de dire que la société Transports G... devra restituer, à la société G... TP, l'intégralité des documents auxquels elle a pu avoir accès, alors :

« 1°/ que le juge des référés ne peut exiger de celui qui sollicite la production forcée de pièces qu'il rapporte préalablement la preuve que sa demande a précisément pour objet de fournir ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter la société Transports G... de sa demande de constat tendant à déterminer si la société G... TP se livrait à des actes de concurrence déloyale, qu'elle se fondait sur ''des affirmations de son dirigeant non étayées ou des éléments partiels'', la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard des articles 11 et 145 du code de procédure civile, ensemble l'article 10 du code civil ;

2°/ que, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ; qu'en l'espèce, l'ordonnance sur requête sollicitée par la société Transports G... devait permettre la désignation d'un huissier de justice devant être chargé, notamment, de se rendre dans les locaux de la société G... TP et de vérifier, par tous moyens, si cette dernière exerçait, exploitait, dirigeait directement ou indirectement une activité de transport public en contravention de la clause de non concurrence conclue avec la société Transports G... ; qu'en refusant cependant le bénéfice de l'article 145 du code de procédure civile, au motif inopérant qu'elle ne démontrait pas suffisamment la violation de la clause de concurrence en litige, la cour d'appel a paralysé le mécanisme de l'ordonnance sur requête et a, ce faisant, violé l'article 145 du code de procédure. »

Réponse de la Cour

4. Ayant exactement énoncé qu'il incombe au juge saisi de la demande de rétractation d'une ordonnance sur requête ayant autorisé une mesure d'instruction en application de l'article 145 du code de procédure civile de vérifier que la mesure sollicitée est fondée sur des motifs légitimes susceptibles de justifier une dérogation au principe de la contradiction ainsi que les circonstances justifiant cette dérogation, la cour d'appel, qui a relevé que ces circonstances ne pouvaient résulter d'une pétition de principe de risque de destruction de documents et de disparition des informations, a, par ces seuls motifs, justifié sa décision.

5. Le moyen, qui critique des motifs surabondants, est donc inopérant.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Transports G... P... et fils aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Transports G... P... et fils et la condamne à payer à la société G... Travaux publics la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour la société Transports G... P... et fils

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête en date du 4 octobre 2016 et d'avoir dit que la société Transports G... P... et Fils devait restituer, à la société G... Travaux Publics, l'intégralité des documents auxquels elle a pu avoir accès, d'avoir dit qu'elle devrait détruire toutes archives quel que soit le mode de conservation, d'avoir dit qu'il serait enjoint à l'huissier instrumentaire d'avoir à restituer toutes les copies quel que soit le support qui aurait pu être faites dans le cadre de ses investigations et, enfin, d'avoir dit qu'aucun usage ne pourrait être autorisé concernant les documents recueillis à cette occasion ;

Aux motifs que « pour qu'il soit fait droit à la demande de mesure d'instruction sur le fondement des articles 145 et 493 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi de la requête, de vérifier que la mesure sollicitée est fondée sur des motifs légitimes, et que les circonstances imposent qu'elle ne soit pas contradictoirement ordonnée ; que le juge saisi d'une demande de rétractation de l'ordonnance rendue doit procéder aux mêmes vérifications ; que la société G... TP estime que la requête par laquelle la SARL Transports G... P... et Fils a saisi le président du tribunal de commerce il ne répond pas aux exigences des textes en ce qu'elle s'appuie sur une présentation tronquée des actes juridiques signés entre les parties et ne contient pas de motivation factuelle pour justifier l'exception au principe du contradictoire, l'ordonnance ayant en outre été prise alors qu'une procédure judiciaire était en cours entre les parties ; qu'il est indiqué dans la requête de la SARL Transports G... P... et Fils qu'un protocole d'accord est intervenu en date du 24 mars 2014 entre la société GPLH TP, la sarl G... et leur holding commune, la société Holding G..., ainsi que les quatre frères de la famille G..., dont MM K... et P... G... associés au sein de ces trois sociétés ; que le protocole prévoyait la cession à venir de la branche d'activité etquot;travaux publicsetquot; au profit d'une etquot;société future de travaux publicsetquot; constituée par M. K... G... sous le nom de etquot;G... travaux publicsetquot;, et incluait une clause de non concurrence aux termes de laquelle cette société s'interdisait expressément « la faculté d'exploiter, diriger, directement ou indirectement, aucune activité de transports publics pour une durée de cinq ans à compter de l'entrée en jouissance, dans un rayon de 100 km à vol d'oiseau du fonds exploité par la holding » ; que dans l'acte de cession de branche d'activité en date du 26 juin 2014, la clause de non concurrence a été modifiée, en ce qu'elle interdit désormais à la société G... TP, cessionnaire, la faculté d'exploiter, diriger, directement ou indirectement, aucune activité de transport publics pendant une durée de 5 années à compter de l'entrée en jouissance dans un rayon de 100 km à vol d'oiseau du fonds exploité par la société holding, à l'exclusion de la location de matériel, le cessionnaire étant autorisé à exercer librement l'activité. de location de matériel de chantier et de location de matériel de transport ; que si l'exception à la clause de non concurrence ne figure pas à la requête de la SARL Transports G... P... et Fils, la société G... Travaux Publics ne peut valablement faire valoir que la religion du juge aurait été trompée par la présentation d'une clause tronquée, dès lors que l'acte de cession en date du 26 juin 2014 était annexé à la requête aux fins de constat, de sorte que le président du tribunal de commerce a nécessairement pu en prendre connaissance ; que s'agissant des motifs de la requête, la SARL Transports G... P... et Fils fait état d'un contexte laissant craindre une concurrence déloyale à savoir que le dirigeant s'est aperçu depuis le début de l'année 2016 que la société G... TP avait réussi à débaucher l'un de ses salariés et qu'elle avait acquis au moins un véhicule de transports publics (camion grue) dont elle a joint des photographies captées sur la page « facebook » de la société G... TP, la SARL Transports G... P... et Fils faisant valoir que certains de ces clients travaillaient désormais avec la société G... TP, notamment la société Eurovia avec laquelle elle a réalisé un chiffre d'affaire de 97.600,50 euros HT ; qu'elle a joint à sa requête des documents photographiques et le chiffre d'affaire qu'elle a réalisé avec la société Eurovia en 2015 ; que ces éléments sont insuffisants à caractériser le motif légitime pour la SARL Transports G... P... et Fils à demander, non contradictoirement, de faire établir un constat, alors que la société requérante se fonde sur des affirmations de son dirigeant non étayées ou des éléments partiels - s'agissant du chiffre d'affaire réalisé avec un seul de ses clients, et que le document photographique produit n'est pas de nature à laisser supposer que la société G... Travaux Publics a pu se livrer à des actes de concurrence déloyale s'agissant de la photo d'un camion grue qui peut servir dans le cadre de l'activité de travaux publics ou de la location de véhicule autorisée par la clause susvisée ; qu'enfin, les circonstances justifiant qu'il soit dérogé au principe de la contradiction doivent être caractérisées dans la requête et l'ordonnance, autrement que par une pétition de principe de risque de destruction des documents et de disparition des informations ; qu'en conséquence, il y a lieu de faire droit aux demandes de la société G... Travaux Publics tendant à la rétractation de l'ordonnance du 28 juillet 2017 avec toutes ses conséquences, la SARL Transports G... P... et Fils étant déboutée de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions » ;

Alors que le juge des référés ne peut exiger de celui qui sollicite la production forcée de pièces qu'il rapporte préalablement la preuve que sa demande a précisément pour objet de fournir ; qu'en se bornant à retenir, pour débouter la société Transports G... P... et Fils de sa demande de constat tendant à déterminer si la SAS G... TP se livrait à des actes de concurrence déloyale, qu'elle se fondait sur « des affirmations de son dirigeant non étayées ou des éléments partiels » (arrêt attaqué, page 6), la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard des articles 11 et 145 du code de procédure civile, ensemble l'article 10 du code civil ;

Alors, en tout état de cause, que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ; qu'en l'espèce, l'ordonnance sur requête sollicitée par l'exposante devait permettre la désignation d'un huissier de justice devant être chargé, notamment, de se rendre dans les locaux de la société G... TP et de vérifier, par tous moyens, si cette dernière exerçait, exploitait, dirigeait directement ou indirectement une activité de transport public en contravention de la clause de non concurrence conclue avec la société Transports G... P... et Fils ; qu'en refusant cependant le bénéfice de l'article 145 du code de procédure civile, au motif inopérant qu'elle ne démontrait pas suffisamment la violation de la clause de concurrence en litige, la cour d'appel a paralysé le mécanisme de l'ordonnance sur requête et a, ce faisant, violé l'article 145 du code de procédure civile.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 19 avril 2018


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 25 mar. 2020, pourvoi n°18-18910

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Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 25/03/2020
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18-18910
Numéro NOR : JURITEXT000042054146 ?
Numéro d'affaire : 18-18910
Numéro de décision : 42000246
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2020-03-25;18.18910 ?
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