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18/03/2020 | FRANCE | N°18-24371

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2020, 18-24371


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mars 2020

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 346 F-D

Pourvoi n° N 18-24.371

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MARS 2020

Mme E... V..., épouse U..., domic

iliée [...] , a formé le pourvoi n° N 18-24.371 contre l'arrêt rendu le 13 septembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre), dans l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mars 2020

Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 346 F-D

Pourvoi n° N 18-24.371

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MARS 2020

Mme E... V..., épouse U..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° N 18-24.371 contre l'arrêt rendu le 13 septembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines, dont le siège est département des affaires juridiques, service contrôle législation, 78085 Versailles cedex, défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme U..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines, après débats en l'audience publique du 11 février 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, M. Ricour, conseiller, M. Liffran, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 13 septembre 2018), Mme U..., engagée le 22 mars 1979 par la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines en qualité d'agent technique et qui occupait en dernier lieu les fonctions de « conseiller maîtrise des risques », a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 26 mars 2014.

2. Contestant cette mesure, elle a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en ses première, troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l'arrêt de dire le licenciement justifié et de rejeter ses demandes d'indemnités compensatrice de préavis, de congés payés afférents et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ qu'il appartient à l'employeur d'établir qu'il n'existe pas de poste compatible avec l'état de santé du salarié inapte au sein des sociétés dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'à défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ; qu'en jugeant que les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) ne constituent pas un groupe au sein duquel l'employeur est tenu de rechercher un reclassement pour la raison qu'il s'agit d'entités juridiques distinctes, autonomes n'ayant entre elles aucun lien capitalistique, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser l'impossibilité entre les différentes caisses d'une permutation de tout ou partie du personnel, violant ainsi l'article L. 1226-2 du code du travail ;

2°/ que l'exposante avait soutenu que toutes les CPAM sont liées par la même activité, partagent la même réglementation, les mêmes systèmes informatiques, la même carte des métiers, les mêmes règles de fonctionnement en interne et une même organisation ; qu'en jugeant que les caisses ne constituaient pas le périmètre du reclassement, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, ces éléments tenant à l'activité et à l'organisation des CPAM de nature à caractériser la permutabilité des salariés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;

3°/ que l'exposante avait également fait état de l'existence d'une bourse aux emplois garantissant à tous les organismes membres de l'UCANSS une mobilité effective des personnels, par laquelle les salariés pouvaient demander une mutation d'une caisse à l'autre et avait visé une délibération de l'UCANSS en date du 19 décembre 1996 posant le principe de la mobilité entre organismes ; qu'en jugeant que les caisses ne constituaient pas le périmètre du reclassement, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, ces éléments de nature à caractériser la permutabilité des salariés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la modification issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

4. Selon ce texte, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. La recherche de reclassement doit s'apprécier au sein de l'entreprise et, le cas échéant, à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel.

5. Pour dire le licenciement fondé et débouter la salariée de ses demandes au titre de la rupture, l'arrêt retient que la circonstance qu'il existe une convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale qui prévoit, notamment dans sa partie intitulée « Recrutement », la possibilité du choix pour « un agent d'une offre d'emploi entraînant un changement volontaire d'organisme employeur », avec notamment maintien du niveau de rémunération, n'implique pas que les organismes de sécurité sociale concernés forment nécessairement un groupe, une même convention collective pouvant concerner des entités juridiquement distinctes, n'ayant pas d'autre lien entre elles que la spécificité de leur métier. L'arrêt ajoute que la circonstance qu'il existe une CNAMTS jouant un rôle de coordination entre les caisses de sécurité sociale n'est pas davantage déterminante, ce rôle, à caractère administratif essentiellement, n'ayant aucunement pour effet de priver l'une quelconque des caisses de ses prérogatives, spécialement en matière de personnel, et qu'il est constant que les caisses de sécurité sociale constituent des entités juridiques distinctes, autonomes, n'ayant entre elles aucun lien capitalistique d'aucune sorte. L'arrêt en déduit qu'il ne peut être considéré que les caisses de sécurité sociale constituent un « groupe » au sens de l'obligation pour un employeur de rechercher, dans le cadre d'un licenciement pour inaptitude, un poste dans l'ensemble du groupe.

6. En se déterminant ainsi, par des motifs tirés de l'autonomie et de l'absence de liens capitalistiques entre des entités juridiques distinctes impropres à caractériser l'impossibilité de permutation de tout ou partie du personnel entre les caisses primaires d'assurance maladie, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation de ces caisses permettaient d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit le licenciement fondé et déboute Mme U... de ses demandes d'indemnités compensatrice de préavis, de congés payés afférents et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 13 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines et la condamne à payer à Mme U... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme U...

Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit le licenciement justifié et d'AVOIR en conséquence débouté la salariée de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

AUX MOTIFS propres QU'en application de l'article L. 1226-2 du code du travail, lorsque le salarié est déclaré inapte à son poste par le médecin du travail, l'employeur est tenu de lui proposer, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail ; que l'employeur ne peut prononcer le licenciement que s'il justifie soit de l'impossibilité où il se trouve de proposer un emploi dans les conditions prévues ci-dessus, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions ; [
] ; que sur l'inaptitude, Mme U... fonde essentiellement son argumentation sur la circonstance que le médecin du travail a modifié la rédaction de l'avis d'inaptitude à la suite d'un courrier de la direction de la CPAM ; mais cette argumentation est dépourvue de toute portée ; qu'en effet, il n'est pas contesté que le médecin du travail a modifié le deuxième avis d'inaptitude ; qu'outre que c'est à ce médecin qu'incombe, seul, la responsabilité de la formulation des avis qu'il émet, la cour ne peut que constater que le premier des deuxièmes avis ne faisait pas sens et c'est à juste titre que la CPAM a sollicité qu'il soit précisé ; qu'en effet, dans la rédaction initiale, le deuxième avis plaçait la CPAM dans une situation schizophrénique qui ne permettait en aucune manière le reclassement de la salariée, puisque les termes en étaient intrinsèquement contradictoires ; que le deuxième second avis, en revanche, obligeait l'employeur à procéder à des recherches effectives de reclassement ; que sur ce point, il est constant que la CPAM a proposé trois postes en son sein, ce qu'elle se devait de faire malgré les préconisations du médecin du travail, car telle est l'obligation qui pèse sur elle en l'état du droit ; que la défense de Mme U... n'est donc aucunement fondée à le reprocher à la CPAM ; que Mme U... a refusé ces trois propositions, ce que l'on peut aisément comprendre, mais cela ne laissait plus comme possibilité que la recherche d'un reclassement extérieur à l'entreprise ; que dans cette perspective, Mme U... reproche à a CPAM de ne s'être adressée qu'à huit caisses primaires d'assurance maladie de la région parisienne et non à l'ensemble des caisses primaires d'assurance maladie ; qu'or, selon Mme U..., le reclassement doit s'effectuer dans le groupe auquel l'entreprise employeur appartient, parmi les entreprises « dont les activités ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel » (en gras dans l'original des conclusions), dans toute l'étendue géographique du groupe et non uniquement au niveau local ; que Mme U... souligne que le « critère déterminant pour la caractérisation est la permutabilité du personnel » (en gras dans l'original des conclusions) ; que Mme U... considère ainsi que toutes les caisses primaires d'assurance maladie sont liées par la même activité, remplissent toutes la même mission de service public, font partie de l'union des caisses nationales de sécurité sociales (UCANSS), qui dispose d'une ‘Bourse aux emplois ; qu'elle souligne l'existence d'une délibération du conseil d'administration de l'UCANSS, en date du 19 décembre 1996, selon laquelle « (t)oute mobilité de salariés entre les organismes des régimes relevant du régime général (...) est considérée comme une mutation aux conditions de l'organisme preneur, sachant que la mutation est la situation d'un salarié qui change volontairement d'organisme preneur pour pourvoir un poste vacant », et « au regard des modalités de calcul des indemnités légales et conventionnelles de licenciement, les régimes susvisés sont considérés comme un seul employeur » ; que Mme U... relève, par ailleurs, que la convention collective nationale des personnels des organismes de sécurités sociale « prévoit également la mobilité intra-groupe des salariés, entre les différents organismes de sécurité sociale dans ses articles 14 à 18 » et qu'elle-même a pu être « détachée sur des travaux nationaux à la CNAMTS » ; que d'ailleurs, selon Mme U..., cette caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés définit les orientations stratégiques de pilote le réseau des organismes chargés de les mettre en oeuvre, en l'espèce plus d'une centaine de caisses d'assurance maladie ; qu'enfin, Mme U... précise qu'elle a elle-même pu identifier neuf offres de poste, contemporaines de son licenciement, qui ne lui ont pas été proposées ; que la CPAM conteste que la notion de ‘groupe' soit applicable aux caisses primaires d'assurance maladie, qui sont des entités juridiques autonomes, avec lesquelles elle n'a « aucun lien capitaliste » ; que la cour constate, s'agissant des offres de poste identifiées par Mme U..., que :
- l'une concerne non pas un contrat à durée déterminée mais un stage et n'avait donc pas à être proposée ; qu'en tout état de cause, elle émane de la caisse primaire du Val d'Oise (voir la discussion ci-après) ; - qu'une autre émane de la CPAM 78 et n'avait pas à être soumise à Mme U... dès lors que, comme indiqué plus haut, d'autres propositions lui avaient été faites dans cet espace ; - que les autres émanent de la CNAMTS ; que la question est donc de savoir s'il doit être considéré que les caisses de sécurité sociale doivent être considérées comme un groupe ; qu'à cet égard, la cour ne peut que constater que la circonstance qu'il existe une convention collective nationale du personnel des organismes de sécurité sociale et que celle-ci prévoit, notamment dans sa partie intitulée ‘Recrutement', la possibilité du choix pour « un agent d'une offre d'emploi entraînant un changement volontaire d'organisme employeur », avec notamment maintien du niveau de rémunération, en particulier, il n'en résulte pas nécessairement que les organismes de sécurité sociale concernés forment nécessairement un groupe : une même convention collective peut concerner des entités juridiquement distinctes, n'ayant pas d'autre lien entre elles que la spécificité de leur métier ; que la circonstance qu'il existe une CNAMTS jouant un rôle de coordination entre les caisses de sécurité sociale n'est pas davantage déterminante : ce rôle, à caractère administratif essentiellement, n'a aucunement pour effet de priver l'une quelconque des caisses de ses prérogatives, spécialement en matière de personnel ; qu'en revanche, il est constant que les caisses de sécurité sociale constituent des entités juridiques distinctes, autonomes, n'ayant entre elles aucun lien capitalistique d'aucune sorte ; que dès lors, il ne peut être considéré que les caisses de sécurité sociale constituent un ‘groupe' au sens de l'obligation pour un employeur de rechercher, dans le cadre d'un licenciement pour inaptitude, un poste dans l'ensemble du groupe ; qu'en l'espèce, la CPAM a contacté plusieurs caisses primaires d'assurance maladie d'Ile de France et n'a reçu que des réponses négatives, ce dont elle ne peut être blâmée ; que la cour considère qu'il résulte de tout ce qui précède que la CPAM a respecté son obligation de reclassement.

AUX MOTIFS adoptés QUE la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée : « ...par un courrier recommandé en date du 24 février 2014, vous avez été convoquée à un entretien préalable à un licenciement pour inaptitude physique au travail, le 7 mars 2014. Or vous avez envoyé un mail le 28 février 2014, indiquant que compte tenu de votre état de santé et de votre arrêt de travail jusqu'au 18 mars 2014, vous n'étiez pas en mesure de vous présenter à cet entretien. Aussi, par un courrier en date du 7 mars 2014, cet entretien a été reporté au 21 mars 2014. Vous avez envoyé un nouveau mail le 18 mars 2014, indiquant que vous ne serez pas présente à cet entretien pour les motifs précités et en raison de la prolongation d'arrêt de travail jusqu'au 17 avril 2014. En conséquence, vous ne vous êtes pas présentée à cet entretien, qui avait pour but de vous rappeler les éléments suivants : Lors d'une première visite médicale le 23 décembre 2013, le docteur Y... a rendu un premier avis ainsi libellé: « Une inaptitude pourrait être envisagée lors de la reprise le 17 janvier 2014. » Le 17 janvier 2014, vous êtes reçue pour un second examen médical, par le médecin du travail qui a conclu : « Inaptitude définitive à tout poste dans l‘entreprise (après étude de poste faite le 30.12.2013.Serait apte à des postes d'analyse de procédure de travail hors CPAM 78. ». Par courrier du 7 février 2014, trois propositions de reclassement vous ont été soumises, soit : - Un poste de chargée d'étude GDR ; - Un poste de chargée d'études documentaires et réglementaires ; - Un poste de chargée d'études à la Direction des Prestations. Les propositions de reclassement ont également été soumises au Médecin du travail pour avis, par un autre courrier en date du 7 février 2014. Par retour de courrier, le 14 février 2014, le Docteur Y... a émis un avis négatif sur les propositions : « les trois postes proposés à Madame U... dans votre courrier du 7 février 2014 ne peuvent convenir ; l'état de santé de cet agent ne permet un maintien à la CPAM des YVELINES. ». En outre, par email du 17 février 2014, vous avez décliné les trois propositions de reclassement. De plus, un courriel a été adressé à divers organismes limitrophes du département des Yvelines afin de recherches d'autres possibilités de reclassement ; mais la requête s'est avérée infructueuse. Par conséquent, je suis au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour inaptitude physique médicalement constatée par le médecin du travail sans autre reclassement possible que ceux qui vous ont été proposés et que vous avez refusés. Selon l'article 54 de la Convention Collective nationale du personnel des Organismes de Sécurité Sociale vous êtes tenue d'effectuer un préavis de 6 mois. Cependant, conformément à l'article L. 1226-4 du Code du travail, en cas de licenciement pour inaptitude, le préavis n'est pas exécuté et le contrat de travail est rompu à la date de notification du licenciement. Le préavis est néanmoins pris en compte pour le calcul de l'indemnité mentionnée à l'article L. 1234-9 ; par dérogation à l'article L. 1235-5, l'inexécution du préavis ne donne pas lieu au versement d'une indemnité compensatrice. Ainsi, votre licenciement prendra effet à la date de notification de cette lettre... » ; que l'article L. 1235-1 du Code du travail qui fait injonction au « juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. » ; que la cause du licenciement évoquée doit être réelle, ce qui implique à la fois que le motif existe, qu'il soit exact et qu'il présente un caractère d'objectivité excluant les préjugés et les convenances personnelles ; que le motif du licenciement doit être sérieux et présente une gravité suffisante rendant impossible sans dommage pour l'entreprise, la poursuite du contrat de travail ; que l'article L. 1226-2 du Code du travail : « Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. » ; que l'inaptitude de Madame U... a été démontrée par le médecin du travail, au cours des deux visites médicales conformément à la procédure de licenciement pour inaptitude ; qu'il n'est pas démontré que l'inaptitude de Madame U... était due aux conditions de travail de l'équipe, que c'était plutôt elle qui les avait dégradées par son comportement, comme l'a démontré l'enquête du CHSCT ; que Madame U... repose sa demande sur le défaut de reclassement, qu'elle tente de démontrer que les CPAM faisant partie de l'Union des Caisses Nationales de Sécurité Sociale UC ANS, forment un Groupe et qu'en conséquence, la CPAM des YVELINES aurait dû rechercher le reclassement de la salariée au niveau de ce groupe ; que pour qu'un Groupe existe, les entreprises qui le composent soient liées par des critères d'activité, d'organisation et de lieu d'exploitation autorisant la permutation du personnel ; que les CPAM sont des organismes de droit privé juridiquement et économiquement distincts, autonomes sur le plan financier et dans la gestion du personnel ; que la CPAM 78 a cependant étendu ses recherches de reclassement dans les CPAM limitrophes ; que 3 postes ont été proposés au sein de la CPAM 78, que Madame U... les a refusés.

1° ALORS QU'il appartient à l'employeur d'établir qu'il n'existe pas de poste compatible avec l'état de santé du salarié inapte au sein des sociétés dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'à défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ; qu'en jugeant que les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) ne constituent pas un groupe au sein duquel l'employeur est tenu de rechercher un reclassement pour la raison qu'il s'agit d'entités juridiques distinctes, autonomes n'ayant entre elles aucun lien capitalistique, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser l'impossibilité entre les différentes caisses d'une permutation de tout ou partie du personnel, violant ainsi l'article L. 1226-2 du code du travail.

2° ALORS QUE par motifs adoptés, la cour a constaté que la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Yvelines a étendu ses recherches de reclassement dans les CPAM limitrophes, de sorte que l'employeur considérait que le périmètre de reclassement ne pouvait pas être circonscrit à la seule caisse des Yvelines et que la permutabilité des salariés au sein des caisses était possible ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article L. 1226-2 du code du travail.

3° ALORS QUE l'exposante avait soutenu que toutes les CPAM sont liées par la même activité, partagent la même réglementation, les mêmes systèmes informatiques, la même carte des métiers, les mêmes règles de fonctionnement en interne et une même organisation ; qu'en jugeant que les caisses ne constituaient pas le périmètre du reclassement, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, ces éléments tenant à l'activité et à l'organisation des CPAM de nature à caractériser la permutabilité des salariés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail.

4° ALORS QUE l'exposante avait également fait état de l'existence d'une bourse aux emplois garantissant à tous les organismes membres de l'UNCANSS une mobilité effective des personnels, par laquelle les salariés pouvaient demander une mutation d'une caisse à l'autre et avait visé une délibération de l'UNCANSS en date du 19 décembre 1996 posant le principe de la mobilité entre organismes ; qu'en jugeant que les caisses ne constituaient pas le périmètre du reclassement, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, ces éléments de nature à caractériser la permutabilité des salariés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail.

5° ALORS QUE l'exposante avait identifié neuf postes de reclassement en région parisienne dont les offres d'emploi avaient été publiées entre le 16 et le 27 janvier 2014 ; qu'en omettant de rechercher, comme elle y était invitée, si ces offres pouvaient correspondre au profil de l'exposante, ce qui aurait attesté de la permutabilité des salariés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail.

6° ALORS QUE l'exposante avait invoqué avoir déjà été détachée pour des travaux nationaux à la CNAMTS les 16 et 17 mars 2010, ce qui attestait de la permutabilité des salariés ; qu'en omettant d'examiner ce point, comme elle y était pourtant invitée, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail.

7° ALORS qu'en jugeant que l'existence d'une convention collective nationale du personnel des organismes de la sécurité sociale instituant le maintien de la rémunération en cas de mobilité ne permet pas de caractériser l'existence d'un groupe, pour la raison qu'une même convention peut concerner des entités juridiquement distinctes, n'ayant pas d'autres liens entre elle que la spécificité de leur métier, quand une disposition conventionnelle organisant la mobilité des salariés est de nature à caractériser leur permutabilité, la cour d'appel a statué par des motifs erronés en violation de l'article L. 1226-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-24371
Date de la décision : 18/03/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 13 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2020, pourvoi n°18-24371


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.24371
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