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11/03/2020 | FRANCE | N°18-26138

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 mars 2020, 18-26138


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 mars 2020

Cassation sans renvoi

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 325 F-D

Pourvoi n° G 18-26.138

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 MARS 2020

Le comité d'établissement FNAC La Valenti

ne, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° G 18-26.138 contre l'arrêt rendu le 18 octobre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 mars 2020

Cassation sans renvoi

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 325 F-D

Pourvoi n° G 18-26.138

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 MARS 2020

Le comité d'établissement FNAC La Valentine, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° G 18-26.138 contre l'arrêt rendu le 18 octobre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre civile C), dans le litige l'opposant à la société Relais Fnac, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat du comité d'établissement FNAC La Valentine, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Relais Fnac, après débats en l'audience publique du 5 février 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 octobre 2018), statuant en la forme des référés, le comité d'établissement Fnac la Valentine de la société Relais Fnac a, par délibération du 27 janvier 2017, désigné un expert-comptable pour l'assister dans l'examen des comptes annuels 2016.

2. L'employeur a saisi le président du tribunal de grande instance pour demander l'annulation de la délibération.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Le comité d'établissement fait grief à l'arrêt d'annuler la délibération du 27 janvier 2017 alors « qu'en retenant, pour annuler la délibération du comité d'établissement du 27 janvier 2017 désignant un expert pour l'assister dans l'examen des comptes annuels, que le comité d'établissement ne pouvait solliciter un expert-comptable dans le cadre de la consultation annuelle sur la situation économique et financière qu'à condition que le chef d'établissement dispose de pouvoirs suffisants en la matière, qu'en l'espèce ce dernier avait des pouvoirs restreints et que cette « limitation » de pouvoirs était opposable au comité d'établissement qui ne pouvait dès lors avoir d'attributions consultatives en matière économique et financière au sens des articles L. 2325-35 et L. 2323-12, quand la mise en place d'un comité d'établissement supposait que cet établissement disposait nécessairement d'une autonomie suffisante pour la conduite de l'activité économique, et justifiait de pouvoirs suffisants du chef d'établissement et du recours à un expert-comptable, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35, L. 2327-15, L. 2327-2 et L. 2323-12 du code du travail dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 2323-12, L. 2325-35, L. 2325-36 et L. 2327-15 du code du travail alors applicables :

4. Pour annuler la délibération du comité d'établissement, la cour d'appel retient que le comité d'établissement ne peut solliciter un expert-comptable que dans le cadre de la consultation annuelle prévue par l'article L. 2325-35, à condition que le chef d'établissement dispose de pouvoirs suffisants en la matière et qu'en l'espèce, la société Relais Fnac justifie que la comptabilité et le budget de ses différents établissements étaient établis au niveau central, sans que le chef d'établissement n'ait de pouvoir propre sur le plan économique, financier, ou social, et que dès lors, le comité d'établissement ne peut avoir d'attributions consultatives en matière économique et financière.

5. Cependant, aux termes de l'article L. 2327-15 du code du travail alors applicable, les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise dans la limite des pouvoirs confiés au chef d'établissement. Il en résulte que la mise en place d'un tel comité suppose que l'établissement dispose d'une autonomie suffisante en matière de gestion du personnel et de conduite de l'activité économique de l'établissement.

6. Par ailleurs, en application des articles L. 2323-12, L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail alors applicables, le droit du comité central d'entreprise d'être assisté pour l'examen annuel de la situation économique et financière de l'entreprise ne prive pas le comité d'établissement du droit d'être assisté par un expert comptable afin de lui permettre de connaître la situation économique, sociale et financière de l'établissement dans l'ensemble de l'entreprise et par rapport aux autres établissements avec lesquels il doit pouvoir se comparer.

7. Dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DIT n'y avoir lieu à annulation de la délibération du comité d'établissement Fnac La Valentine en date du 27 janvier 2017 ;

Condamne la société Relais Fnac aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Relais Fnac et la condamne à payer au comité d'établissement Fnac La Valentine la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour le comité d'établissement FNAC La Valentine

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la délibération du comité d'établissement Fnac La Valentine en date du 27 janvier 2017 désignant le cabinet d'expertise ECO pour l'assister dans l'examen des comptes annuels clos le 31 décembre 2016, dit que les honoraires du cabinet ECO relatifs à l'exécution de la délibération susvisée seront à la charge du comité d'établissement, condamné ce dernier à payer à la société Relais Fnac 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande du comité d'établissement sur ce même fondement, et condamné ce dernier aux dépens de première instance et d'appel.

AUX MOTIFS QUE la délibération litigieuse a été prise en application de l'article L. 2325-35 du code du travail qui donne pouvoir au comité d'entreprise de se faire assister d'un expert-comptable de son choix en vue de la consultation annuelle sur la situation économique et financière prévue par l'article L. 2323-12 du même code ; que la discussion porte sur la répartition des attributions entre comité d'établissement et comité central d'entreprise pour ce type de consultation périodique avec recours à un expert-comptable ; que l'article L. 2327-15 du code du travail dispose que le comité d'établissement a les mêmes attributions que le comité d'entreprise, dans la limite des pouvoirs confiés au chef d'établissement, et qu'il est consulté sur les mesures d'adaptation des projets décidés au niveau de l'entreprise spécifiques à l'établissement et qui relèvent de la compétence du chef d'établissement ; que s'agissant du comité d'entreprise, l'article L. 2327-2 du même code précise qu'il exerce les attributions économiques qui concernent la marche générale de l'entreprise et qui excèdent les pouvoirs des chefs d'établissement ; qu'aux termes de l'article L. 2323-12 du code du travail, la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l'entreprise porte également sur la politique de recherche et de développement technologique de l'entreprise, y compris l'utilisation du crédit d'impôt pour les dépenses de recherche et sur l'utilisation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi ; qu'il résulte de ces textes que le comité d'établissement ne peut solliciter un expert-comptable que dans le cadre de la consultation annuelle prévue par l'article L. 2325-35, à condition que le chef d'établissement dispose de pouvoirs suffisants en la matière, et non simplement pour analyser les comptes de l'établissement La Valentine en dehors d'un projet spécifique à l'établissement ; que la société Relais Fnac justifie que la comptabilité et le budget de ses différents établissements sont établis au niveau central, que le chef d'établissement du magasin La Valentine a un pouvoir d'engagement financier limité à 2500 € et que les recrutements, quelle qu'en soit la nature, doivent être validés au niveau de l'entreprise ; que le chef d'établissement n'a ainsi aucun pouvoir propre sur le plan économique, financier ou social, et n'exerce qu'une simple fonction d'encadrement sur site ; que cette limitation de pouvoir est opposable au comité d'établissement qui ne peut dès lors avoir d'attributions consultatives en matière économique et financière au sens des articles L. 2325-35 et L. 2323-12 du code du travail ; et que comme il n'est pas justifié d'une consultation du comité d'établissement La Valentine sur un projet spécifique, la délibération du 27 janvier 2017 désignant un expert-comptable doit être annulée pour excès de pouvoir du comité d'établissement, les honoraires de l'expert restant à la charge du comité d'établissement ; que l'ordonnance déférée sera en conséquence infirmée ; que l'action de la société Relais Fnac étant fondée, il serait inéquitable de laisser à sa charge la totalité des frais, non compris dans les dépens, qu'elle a exposés dans le cadre de la procédure ; qu'il convient de lui allouer à ce titre la somme de 1000 € qu'elle réclame ; que le comité d'établissement Fnac La Valentine sera en revanche débouté de sa demande sur ce même fondement et supportera les dépens de première instance et d'appel.

1°) ALORS QU'en retenant, pour annuler la délibération du comité d'établissement du 27 janvier 2017 désignant un expert pour l'assister dans l'examen des comptes annuels, que le comité d'établissement ne pouvait solliciter un expert-comptable dans le cadre de la consultation annuelle sur la situation économique et financière qu'à condition que le chef d'établissement dispose de pouvoirs suffisants en la matière, qu'en l'espèce ce dernier avait des pouvoirs restreints et que cette « limitation » de pouvoirs était opposable au comité d'établissement qui ne pouvait dès lors avoir d'attributions consultatives en matière économique et financière au sens des articles L. 2325-35 et L. 2323-12, quand la mise en place d'un comité d'établissement supposait que cet établissement disposait nécessairement d'une autonomie suffisante pour la conduite de l'activité économique, et justifiait de pouvoirs suffisants du chef d'établissement et du recours à un expert-comptable, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35, L. 2327-15, L. 2327-2 et L. 2323-12 du code du travail dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce.

2°) ALORS QUE, subsidiairement, il résulte des articles L. 2327-15, L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail pris dans leur rédaction applicable au litige, que le comité d'établissement a le droit d'être assisté par un expert-comptable chargé de lui fournir tous éléments d'ordre économique, social et financier nécessaires à la compréhension des documents comptables de l'établissement, peu important que la comptabilité soit établie au niveau de l'entreprise et que les comptes spécifiques à l'établissement n'y aient pas été différenciés ; qu'en retenant toutefois, pour annuler la délibération du comité d'établissement du 27 janvier 2017, que la comptabilité et le budget des établissements de la société Relais Fnac étaient établis au niveau central, ce dont elle a déduit que le chef d'établissement n'avait aucun pouvoir propre sur le plan économique et financier, la cour d'appel a violé les articles L. 2327-15, L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail.

3°) ALORS QUE, subsidiairement, en retenant que le chef d'établissement du magasin La Valentine avait un pouvoir d'engagement financier limité à 2.500 € et que les recrutements devaient être validés au niveau de l'entreprise, ce dont il résultait qu'il n'avait aucun pouvoir propre sur le plan économique, financier et social, sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur le fait que l'autorité administrative avait considéré que « les directeurs de chacun des 51 magasins [de l'entreprise] dispos[ai]ent par délégation de pouvoirs de leur niveau supérieur régional respectif, d'une totale liberté d'embauche [et] d'exercice d'un pouvoir disciplinaire concernant les salariés de leur établissement », et que ces magasins, dont celui de La Valentine, constituaient des établissements distincts (conclusions d'appel p. 19), que les directeurs de magasins devaient se comporter comme de véritables chefs d'entreprise et étaient garants de l'atteinte des résultats économiques (conclusions d'appel p. 22), que lesdits résultats étaient présentés chaque mois au comité d'établissement ce qui démontrait une gestion au niveau de chaque magasin (conclusions d'appel p. 22), et que cette autonomie constatée par les tribunaux de grande instance de Rouen, Rennes et par la cour d'appel de Rouen (conclusions d'appel p. 23 et 24) existait également au niveau de l'établissement concerné, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;

4°) ALORS QU'il résulte de l'article L. 2327-15 du code du travail pris dans sa rédaction applicable au litige que, s'agissant des consultations annuelles visées à l'article L. 2323-6, les comités d'établissement ont les mêmes attributions que les comités d'entreprise, et que s'agissant des consultations ponctuelles, le comité d'établissement est consulté si le projet décidé au niveau de l'entreprise fait l'objet d'une déclinaison particulière au niveau de l'établissement ; que par application combinée des articles L. 2323-6 et L. 2325-35 du code du travail pris dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce, le comité d'entreprise peut se faire assister d'un expert-comptable de son choix en vue de la consultation annuelle portant sur la situation économique et financière de l'entreprise ; qu'en décidant toutefois que le comité d'établissement ne pouvait solliciter un expert-comptable pour analyser les comptes de l'établissement La Valentine en dehors d'un projet spécifique à l'établissement et qu'il n'était pas justifié d'une consultation du comité d'établissement La Valentine sur un projet spécifique, ce dont il s'inférait que, selon la cour, l'expertise ne pouvait intervenir que dans le cadre d'une consultation périodique sur un projet particulier décliné au niveau de l'établissement, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35, L. 2327-15, L. 2327-2 et L. 2323-12 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-26138
Date de la décision : 11/03/2020
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 mar. 2020, pourvoi n°18-26138


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.26138
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