LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
CF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 11 mars 2020
Cassation partielle
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 248 FS-P+B
Pourvois n°
D 18-22.960
F 18-22.962 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 MARS 2020
Le comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France, dont le siège est [...], a formé le pourvoi n° D 18-22.960 contre un arrêt n° RG : 18/00771 rendu le 17 juillet 2018 par la cour d'appel d'Amiens (chambre économique), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Electrolux Home Products France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société [...], société civile professionnelle, dont le siège est [...], représentée par M. C... G..., prise en qualité de commissaire à l'exécution du plan et de mandataire judiciaire de la Société ardennaise industrielle et de la société Electrolux Home Products France,
3°/ à la société V et V associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est 1 rue [...] présentée par M. Stéphane Vermue, prise en qualité d'administrateur judiciaire des sociétés Electrolux Home Products France et Société ardennaise industrielle,
4°/ à la Société ardennaise industrielle, société par actions simplifiée,
5°/ au comité d'entreprise de la Société ardennaise industrielle,
ayant tous deux leur siège 6-8 [...] 6°/ au procureur général près la Cour d'appel d'Amiens, domicilié en s[...] défendeurs à la cassation.
La société Electrolux Home Products France, société par actions simplifiée,
a formé le pourvoi n° F 18-22.962 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Philippe Angel-Denis Hazane, société civile professionnelle, en la personne de M. Denis Hazane, prise en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la Société ardennaise industrielle et de la société Electrolux Home Products France,
2°/ à la société VetV associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est 8 impass[...] personne de M. Stéphane Vermue, prise en qualité d'administrateur judiciaire au redressement de la Société ardennaise industrielle et de la société Electrolux Home Products France,
3°/ à la Société ardennaise industrielle, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est ZAC des [...] au comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France, dont le siège est 46 rue F[...] au comité d'entreprise de la Société ardennaise industrielle, dont le siège est ZAC des [...] endeurs à la cassation.
Le demandeur au pourvoi n° D 18-22.960 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi n° F 18-22.962 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat du comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Electrolux Home Products France, de Me Le Prado, avocat de la société Philippe Angel-Denis Hazane, ès qualités, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société V et V associés, ès qualités, et l'avis de M. Richard de la Tour, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 4 février 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Vallansan, M. Remeniéras, Mmes Graff-Daudret, Vaissette, Fontaine, Fevre, MM. Riffaud, Mollard, conseillers, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, M. Blanc, Mme Kass-Danno, conseillers référendaires, M. Richard de la Tour, premier avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Joint les pourvois n° 18-22.960 et 18-22.962, qui attaquent le même arrêt ;
Donne acte au comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France (la société EHP) du désistement de son pourvoi n° 18-22.960 en ce qu'il est dirigé contre le procureur général près la cour d'appel d'Amiens ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société EHP, désireuse de transférer en Pologne son activité d'assemblage de machines à laver avec chargement par le haut réalisée jusqu'alors à Revin, a signé, le 2 septembre 2013, avec la société Selni, une lettre d'intention prévoyant la création de deux nouvelles lignes de fabrication sur le site de Revin, l'une pour des moteurs universels, l'autre pour des petits moteurs, et le maintien temporaire de l'activité de production de machines à laver ; que le 27 novembre 2013, la société EHP a créé la Société ardennaise industrielle (la société SAI) pour mettre en oeuvre ce projet ; que le 19 juin 2014, la société EHP a cédé à la société Selni les actions de la société SAI au prix de un euro et les sociétés EHP et SAI ont conclu un traité d'apport partiel d'actifs qui faisait référence à la reconversion industrielle du site à échéance de deux années, aux termes duquel la société EHP apportait à la société SAI la « branche d'activité » du site de Revin pour un euro ; que, dans le cadre d'un accord de conciliation conclu entre les sociétés EHP, SAI et Selni et homologué par le président du tribunal de commerce le 30 octobre 2014, la société EHP a conclu, le 31 octobre 2014, avec la société SAI un contrat de transition de services aux termes duquel la première facturait à la seconde des prestations de comptabilité, de gestion administrative, de service de paie des salariés et de télécommunications ; que le même jour, deux promesses synallagmatiques de vente ont été conclues entre les sociétés EHP, SAI et Selni aux termes desquelles la société EHP s'engageait à vendre à la société SAI, qui s'engageait à acquérir, les deux nouvelles lignes de production de moteurs que la société EHP s'engageait à faire fabriquer à un certain prix qui donnerait lieu à une créance de la société EHP envers la société SAI que la société EHP s'engageait à céder à la société Selni pour un euro ; que par un jugement du 3 janvier 2018, le tribunal de commerce de Compiègne a ouvert le redressement judiciaire de la société SAI et désigné la société VetV associés, en la personne de M. Vermue, administrateur, et la société Angel-G... mandataire judiciaire ; que le 2 février 2018, le mandataire judiciaire a saisi ce tribunal aux fins de voir étendre à la société EHP le redressement judiciaire de la société SAI ; que le tribunal, après s'être déclaré compétent, a fait droit à la demande le 23 février 2018 ; que la cour d'appel d'Amiens, après avoir annulé le jugement, a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société EHP et étendu le redressement judiciaire de la société SAI à la société EHP ;
Sur la recevabilité du pourvoi n° 18-22.960, examinée d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu l'article L. 661-1 I 3° du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que les décisions statuant sur l'extension d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ne sont susceptibles d'appel ou de pourvoi en cassation que de la part du débiteur visé par l'extension, du mandataire judiciaire ou du liquidateur, de l'administrateur ou du ministère public ; qu'il n'est dérogé à cette règle, comme à toute autre règle interdisant ou différant un recours, qu'en cas d'excès de pouvoir ;
Attendu qu'aucun des griefs du pourvoi ne caractérisant un excès de pouvoir, le pourvoi formé par le comité d'entreprise de la société EHP est irrecevable ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° 18-22.962 :
Attendu que la société EHP fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'incompétence alors, selon le moyen, que l'article L. 721-8 du code de commerce soumet à la compétence de tribunaux de commerce spécialement désignés les procédures collectives concernant notamment des entreprises exerçant une activité commerciale et réalisant un chiffres d'affaires net d'au moins 40 millions d'euros ; que cette règle s'applique en cas d'extension à une entreprise répondant à ces critères d'une procédure collective et ce, quand bien même le débiteur faisant l'objet de ladite procédure ne remplirait aucune des conditions posées par ce texte ; qu'en l'espèce, la société EHP a contesté la compétence du tribunal de commerce de Compiègne pour prononcer l'extension, à son encontre, de la procédure collective de la société SAI ; qu'en rejetant cette exception d'incompétence, après avoir néanmoins constaté que la société EHP avait réalisé un chiffre d'affaires de 290 millions d'euros, excédant largement le seuil de 40 millions d'euros qui déclenche la compétence d'un tribunal de commerce spécialisé, la cour d'appel a violé le texte précité ;
Mais attendu que si l'article L. 721-8, 1°, du code de commerce prévoit que des tribunaux de commerce spécialement désignés connaissent, lorsque le débiteur exerce une activité commerciale ou artisanale, et qu'il est, notamment, une entreprise dépassant certains seuils, des procédures de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaires mentionnées au livre VI, il résulte de l'article L. 621-2, alinéa 5, du même code, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 12 mars 2014, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-7, que le tribunal ayant ouvert la procédure initiale reste compétent pour une demande d'extension quelle que soit l'entreprise visée par la demande ; que le tribunal de commerce de Compiègne ayant ouvert la procédure initiale contre la société SAI, l'arrêt retient exactement que, nonobstant le montant du chiffre d'affaires réalisé par la société EHP, ce tribunal demeurait compétent pour statuer sur la demande d'extension de la procédure à cette société ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, relevé d'office, après avertissement délivré aux parties :
Vu les articles L. 621-2 et L. 631-22 du code de commerce ;
Attendu qu'un jugement qui adopte le plan de cession partielle des actifs d'un débiteur fait obstacle à l'extension à un tiers, pour confusion des patrimoines ou fictivité, de la procédure collective de ce débiteur ;
Attendu qu'en étendant le redressement judiciaire de la société SAI à la société EHP alors qu'en l'état des conclusions de la société EHP qui mentionnaient l'adoption par le tribunal, le 16 mai 2018, d'un plan de cession partielle des actifs de la société SAI, il lui incombait de relever, au besoin d'office, après avoir recueilli les observations des parties, le moyen d'ordre public tiré de l'obstacle ainsi fait à toute décision d'extension, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
Déclare irrecevable le pourvoi formé par le comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il étend à la société Electrolux Home Products France la procédure de redressement judiciaire ouverte le 8 janvier 2018 à l'encontre de la Société ardennaise industrielle, dit que les opérations se poursuivront sous patrimoine commun, maintient les organes de la procédure, dit que les créanciers de la société Electrolux Home Products France devront déclarer leurs créances dans un délai de deux mois à compter de la publication au BODACC du présent arrêt et ordonne les publicités prescrites par l'article R. 621-8 du code de commerce, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 17 juillet 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Met hors de cause, sur sa demande, la société VetV associés, en sa qualité d'administrateur de la Société ardennaise industrielle et de la société Electrolux Home Products France, dont la présence devant la cour de renvoi n'est plus nécessaire à la solution du litige ;
Condamne le comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France aux dépens du pourvoi n° D 18-22.960 ;
Condamne la société Philippe Angel-C... Hazane, en la personne de M. G..., en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la Société ardennaise industrielle et de la société Electrolux Home Products France, aux dépens du pourvoi n° 18-22.962 ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi n° D 18-22.960 par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour le comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence, d'avoir étendu à la société Electrolux Home Products France la procédure de redressement judiciaire ouverte le 8 janvier 2018 à l'encontre de la société ardennaise industrielle, et d'avoir dit que les opérations se poursuivraient sous patrimoine commun ;
AUX MOTIFS QUE, sur la compétence du tribunal de commerce de Compiègne, en application de l'article L. 621-2 in fine du code de commerce dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014, le tribunal ayant ouvert la procédure initiale reste compétent pour ces demandes ; que la loi n°2015-990 du 6 août 2015 a institué des tribunaux de commerce spécialement désignés pour connaître des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire mentionnées au livre VI du code de commerce lorsque, notamment, le débiteur est une entreprise dont le montant net de chiffre d'affaires est d'au moins quarante millions d'euros (article 721-18 [721-8] du code de commerce) ; que la même loi a modifié l'article L. 662-8 du code de commerce qui dispose désormais : le tribunal est compétent pour connaître de toute procédure concernant une société qui détient ou contrôle, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, une société pour laquelle une procédure est en cours devant lui ; qu'il est également compétent pour connaître de toute procédure concernant une société qui est détenue ou contrôlée, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, par une société pour laquelle une procédure est en cours devant lui ; qu'il peut désigner un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire communs à l'ensemble des procédures ; que par dérogation à la première phrase du premier alinéa, toute procédure en cours concernant une société détenue ou contrôlée, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, par une société pour laquelle une procédure est ouverte devant un tribunal de commerce spécialisé est renvoyée devant ce dernier ; qu'il convient de relever que la loi récente n'a pas modifié l'article L621-2 du code de commerce et qu'elle ne comporte aucune disposition contraire à ce texte s'agissant de l'extension d'une procédure collective à une autre entreprise ; que par ailleurs, envisageant des difficultés pratiques dans la répartition des compétences entre les tribunaux de commerce et les tribunaux de commerce spécialisés, la loi nouvelle a confirmé la compétence des premiers pour connaître de toute procédure susceptible d'être menée à l'encontre d'une société en lien capitalistique ou de contrôle (au sens des articles L. 233-1 et L 233-3) avec une société à l'encontre de laquelle une procédure est déjà en cours, à la seule exception de la situation dans laquelle, au sein d'un groupe de sociétés (au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3) une procédure collective est ouverte devant un tribunal spécialisé à l'encontre d'une « société-mère » alors qu'une procédure collective est en cours devant un tribunal non spécialisé à l'encontre d'une « société-fille » ;
qu'aucune disposition du droit européen ne contredit ces dispositions procédurales de droit interne, étant observé que la référence jurisprudentielle proposée par l'appelante concerne la répartition de compétences entre des juridictions de deux Etats différents ; qu'or, en l'espèce, aucun lien capitalistique ou de contrôle n'unit la société EHP à la société SAI au moment où le tribunal de commerce de Compiègne statue à l'encontre de la première ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société EHP, nonobstant le montant du chiffre d'affaires réalisé par celle-ci ;
ALORS QU' en application de l'article L. 621-2 du code de commerce, à la demande de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du débiteur ou du ministère public, la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale ; que le tribunal ayant ouvert la procédure initiale reste compétent pour ces demandes, sauf lorsque la personne morale à qui est étendue la procédure collective est une entreprise telle que visée par l'article L. 721-8 du code de commerce ; qu'en application de ce texte, des tribunaux de commerce spécialement désignés connaissent, lorsque le débiteur exerce une activité commerciale ou artisanale, des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire, notamment lorsque le débiteur est une entreprise dont le montant net du chiffre d'affaires est d'au moins millions d'euros ; qu'en application de ces dispositions, un tribunal de commerce non spécialement désigné, initialement saisi d'une procédure collective, et la cour d'appel dont il dépend, ne sont pas compétents pour ordonner l'extension de la procédure à l'encontre d'une entreprise dont le chiffre d'affaires net est d'au moins 40 millions d'euros ; que dans un tel cas, en application de l'article 79 du code de procédure civile, la cour d'appel doit se déclarer incompétente et renvoyer le dossier à la cour d'appel dont relève la juridiction normalement compétente ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que le chiffre d'affaires net de la société Electrolux Home Products était supérieur à 40 millions d'euros ; que dès lors, en application de l'article D. 721-19 du code de commerce et de l'annexe 7-1-1, seul le tribunal de commerce spécialisé, en l'occurrence celui de Lille-Métropole, et la cour d'appel de Douai étaient compétents pour connaître de la demande d'extension de la procédure collective à l'encontre de la société Electrolux Home Products ; qu'en jugeant néanmoins le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 621-2, L. 721-8, D. 721-19 et l'annexe 7-1-1 du code de commerce, ainsi que l'article 79 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige issue du décret n°75-1123 du 9 décembre 1975.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire) :IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir étendu à la société Electrolux Home Products France la procédure de redressement judiciaire ouverte le 8 janvier 2018 à l'encontre de la société ardennaise industrielle et d'avoir dit que les opérations se poursuivraient sous patrimoine commun ;
AUX MOTIFS QUE, en application de l'article L. 621-2 alinéa 2, du code de commerce, à la demande de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du débiteur ou du ministère public, la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale ; qu'en l'espèce, la constitution de la société SAI trouve son origine dans la décision du groupe Electrolux de cesser la production à Revin de machines à laver à chargement par le dessus pour regrouper cette production sur le site d'Olawa en Pologne ; qu'il est constant en effet que cet arrêt d'activité en France a été annoncé par la société EHP aux instances représentatives des salariés en 2012 ; que dans le contexte social et économique d'alors, l'autorité politique nationale a exprimé la volonté de favoriser des projets industriels de nature à éviter la destruction d'emplois à court terme et c'est ainsi que le groupe Electrolux et la société Selni sont entrées en contact pour envisager la possibilité d'une reconversion du site industriel de Revin ; qu'il convient de souligner à titre liminaire qu'il n'appartient pas à la présente juridiction d'émettre quelque appréciation sur les choix économiques faits par le groupe Electrolux ou sur le positionnement politique de l'autorité publique ; qu'inversement, ces mêmes choix économiques et positionnement politique ne sont pas de nature à faire obstacle à l'analyse juridique à laquelle il incombe à la cour de procéder ; qu'il ressort suffisamment des écritures des parties que la décision d'extension à la société EHP de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société SAI dépend uniquement du caractère véritable ou fictif de SAI en tant que société au sens des articles 1832 et suivants du code civil ; que de fait, aucun élément du dossier ne permet de retenir une confusion entre les patrimoines des deux entreprises ; que la société SAI a été constituée par la société EHP le 27 novembre 2013 sous la forme d'une société par actions simplifiée, avec un unique actionnaire, un capital social de 5 000 euros immédiatement libéré, un siège social situé à Compiègne dans un centre d'affaires et avec pour objet social « le commerce et l'industrie de tous métaux, l'achat, la vente, la fabrication de tous matériels, machines, outillages, instruments, appareils et autres articles divers et spécialement machines à laver, moteurs électriques » et, généralement, toutes opérations industrielles y afférentes ; que cette constitution fait directement suite à une lettre d'intention signée entre la société Electrolux France et la société Selni le 2 septembre 2013 aux termes de laquelle, la première souhaitant arrêter la production de machines à laver sur le site de Revin à échéance fin 2016 et la seconde souhaitant développer la fabrication et la vente de moteurs électriques notamment au groupe Electrolux, Selni proposait de s'engager à maintenir 230 emplois sur le site de Revin par l'installation d'une nouvelle activité de production de moteurs à la faveur d'un engagement d'Electrolux de fournir l'immobilier du site et certains équipements, de financer la fabrication de deux lignes de production et de fournir un soutien en personnel pour le démarrage de l'activité et un soutien financier à travers les accords commerciaux, les deux parties prévoyant en outre la signature d'un contrat de fourniture à long terme portant sur 1,2 millions de moteurs par an de Selni à Electrolux ; qu'il est admis par les parties que le seul objet de la constitution de SAI par EHP était de poursuivre l'activité d'assemblage de machines à laver pendant une durée de deux années afin de permettre l'installation de cette nouvelle activité industrielle ; que s'il n'est pas discutable que ce rapprochement d'Electrolux et de Selni satisfaisait la préoccupation des pouvoirs publics d'éviter une destruction d'emplois industriels à court terme, il n'apparaît pas qu'il imposait par lui-même la création par EHP d'une nouvelle société ; que dans ce contexte, doivent être analysés les éléments susceptibles de caractériser une société fictive ; qu'il ressort des éléments du dossier que si elle a été formellement constituée au mois de novembre 2013, SAI qui n'était alors dotée que d'un apport en capital de 5 000 euros ne pouvait avoir de réalité concrète avant de disposer de l'apport indispensable à son activité et de salariés ; que ce n'est que le 19 juin 2014 que EHP et SAI ont signé un traité d'apport et le transfert des contrats de travail des salariés de EHP repris par SAI a pris effet rétroactivement au 1 septembre 2014 ; qu'en outre, ainsi qu'il ressort du rappel des faits ci-dessus, c'est principalement au cours de l'automne 2014 qu'a été signée la majeure partie des contrats prévus dans le cadre du projet de reconversion industrielle, exception faite du contrat de cession des actions de SAI à la société Selni, formalisé le 19 juin 2014 ; que de fait, jusqu'à l'été 2014, l'activité sociale de SAI a consisté uniquement dans des démarches administratives relatives à sa substitution à EHP en qualité d'exploitant du site d'installations classées ; que si l'absence d'activité et de consistance réelle jusqu'au mois de juin 2014 ne suffit pas à démontrer le caractère fictif de SAI au regard du temps nécessaire à la mise en place du projet, elle conduit en revanche à prendre en considération, au premier chef, l'ensemble des actions entreprises par les protagonistes au cours de l'année 2014 pour apprécier la réalité de SAI en tant que société ; qu'au regard des éléments constitutifs d'une société, les éléments du dossier conduisent à analyser l'objet de la décision de EHP de faire société, la réalité des apports effectués par l'associé unique, l'autonomie de SAI par rapport à son créateur et les éléments d'une fraude ; que sur l'objet de la décision de EHP de faire société : il ressort du premier rapport du cabinet KPMG, sollicité d'abord par EHP puis désigné comme technicien dans le cadre d'un mandat ad hoc sollicité par la société SAI au mois de mars 2014 que la création de SAI s'inscrit dans une réflexion stratégique menée par le groupe Electrolux depuis 2012 sur le devenir de la production de machines à laver à chargement par le haut à Revin dans le contexte d'une contraction du marché, qui avait abouti à une décision d'arrêter cette fabrication en France et de la concentrer sur un établissement situé en Pologne ; que les éléments du dossier montrent clairement que cette décision d'arrêter cette production à Revin n'a jamais été remise en cause au cours de l'élaboration du projet qui a donné lieu à la création de la société SAI, dont elle constituait l'hypothèse de départ et donc la base de réflexion de l'ensemble des intervenants ; que de fait, à l'issue de la période de deux années annoncée dès les premiers échanges entre les différents acteurs, l'outil de production/d'assemblage des machines à laver a effectivement été transféré par EHP sur son site de production situé en Pologne ; que la constitution de la société SAI n'avait donc pas pour objet le transfert d'une branche d'activité, au sens commun du terme, mais l'organisation de la cessation, à bref délai, d'une partie de l'activité de EHP en France ; que le traité d'apport partiel d'actif en date du 19 juin 2014 rappelle que l'activité développée sur le site de Revin n'est plus viable et cessera au plus tard à la fin de l'année 2016 et que l'objectif du projet est de permettre à la société Selni de développer une nouvelle activité ; qu'il indique que la société bénéficiaire exploitera l'activité d'assemblage de machines à laver dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de fabrication avec une société du groupe Electrolux ; que par ailleurs, si, pour satisfaire des considérations sociales, EHP et/ou les autres sociétés du groupe Electrolux ont pris divers engagements financiers envers la société Selni, significatifs dans leur montant, pour permettre la création sur le même site d'une activité industrielle nouvelle, il est manifeste que EHP n'entendait pas participer en qualité d'associé à cette activité nouvelle, le contrat de cession des actions de la société SAI à Selni étant concomitant du traité d'apport partiel ; que de fait, le protocole d'accord signé le 30 avril 2014 a été conclu entre la société Electrolux France et la société Selni, sans la participation de SAI, pourtant déjà constituée, alors même qu'il prévoit divers engagements à contracter par celle-ci, ce qui corrobore le caractère « transparent » de SAI dans les rapports entre le groupe Electrolux et la société Selni ; qu'il s'induit que la constitution d'une société nouvelle par EHP ne correspond pas à l'engagement de l'associé dans la mise en oeuvre d'un projet autonome et durable, qui constitue l'affectio societatis y compris dans les sociétés à associé unique ; que sur la réalité de l'apport de la société EHP à la société SAI : la société Electrolux fait valoir qu'après avoir constitué la société SAI en lui fournissant tous les attributs de la personnalité morale, elle a apporté à la nouvelle société une branche d'activité lui permettant de fonctionner et de se développer en toute autonomie ; qu'elle réfute l'allégation selon laquelle le traité d'apport conclu le 19 juin 2014 ne correspondrait pas à un apport réel ; qu'une branche d'activité est définie comme un ensemble d'éléments d'actif et de passif qui constitue une exploitation autonome, identifiable au sein de l'ensemble de l'activité de l'entreprise et susceptible de fonctionner par ses propres moyens ; que contrairement à un simple apport d'éléments d'actif, l'apport d'une branche d'activité autonome, caractéristique d'une scission de l'activité de la société Apporteuse au sens des articles L. 236-1 et suivants du code de commerce, emporte transmission universelle de patrimoine et donc transmission du passif afférent aux éléments d'actif ; qu'en l'espèce, même si la cour ne dispose pas des éléments comptables relatifs à l'activité globale de la société EHP, il ne fait pas de doute que constituée de deux établissements, l'un commercial, l'autre industriel, la société EHP dispose de deux branches d'activités distinctes correspondant à l'un et l'autre de ses établissements respectivement ; que pour autant, il convient d'analyser si le contrat intitulé « traité d'apport partiel d'actif » conclu entre EHP et SAI le 9 juin 2014 correspond à la transmission d'une branche autonome d'activité ; que par cet accord, EHP a transmis à SAI à titre d'actif des immobilisations corporelles (terrain et construction) et financières et des stocks et encours pour un montant total de 20 490 607 euros et, à titre de passif des provisions pour risques (départs en retraite et médailles du travail), et des dettes d'exploitation (dettes fournisseurs et dettes fiscales et sociales) et diverses autres dettes dont un billet à ordre long terme de 1,5 millions d'euros, pour un montant total de 20 490 606 euros, soit une valeur nette retenue de un euro (Pièce de l'appelante) ; qu'il convient de relever que le commissaire aux apports a retenu pour postulat que le traité d'apport partiel d'actif portait sur l'ensemble des droits et obligations relatifs à l'exploitation de la branche complète et autonome d'activité de production sur le site de Revin, sans relever que le transfert de l'outil de production était expressément exclu de l'apport ; qu'indépendamment des modalités d'évaluation des divers éléments inclus dans le traité d'apport et qui seront examinées ci-après, il a conclu que les apports ne sont pas surévalués « compte tenu des engagements donnés par EHP pour : - le financement de nouvelles activités, - la prise en charge des coûts de restructuration sociale, et - la garantie en matière d'environnement » ; que ces seuls éléments mettent en évidence,
d'une part qu'un élément d'actif aussi essentiel à l'activité de production que l'outil de production lui-même qui ne peut certainement pas être rattaché à la branche commerciale de l'activité de EHP est dissocié de ce que EHP présente comme une branche d'activité autonome, d'autre part que le contenu de l'apport a été défini en fonction du projet de création d'une nouvelle activité industrielle (nécessairement extérieure à la branche d'activité alléguée) que le groupe Electrolux s'engageait par ailleurs à soutenir ; qu'ils établissent l'absence d'autonomie des éléments apportés par EHP à SAI, au sein de l'activité globale de EHP ; que le 27 juin 2014, l'administration fiscale, sollicitée par EHP notamment sur ce point, a informé l'apporteur qu'en l'absence d'apport de la ligne de production des machines à laver, il ne pouvait être considéré que le traité avait pour objet la cession d'une branche complète d'activité (Pièce 18 de l'appelante) ; que s'il n'est pas contestable qu'une entité économique autonome puisse être transmise sans transfert de la propriété de l'outil de production, force est de constater qu'en l'espèce, la mise à disposition de SAI de la ligne d'assemblage de machines à laver était très provisoire, prolongée de mars à décembre 2016 à la seule discrétion de EHP et que ce caractère très temporaire conjugué à l'arrêt progressif des commandes de machines à laver de la part d'Electrolux Appliances AB faisait échec, ab initio, à la notion de transfert de branche d'activité ; que dans ces circonstances, la transmission à SAI d'un passif de 20 millions d'euros environ n'est pas justifié par l'apport d'éléments d'actif pour un montant quasi équivalent ; qu'au surplus, la valorisation même des éléments d'actif et de passif inclus dans le traité d'apport partiel d'actif est sujette à questionnement ; qu'en effet, il ne ressort pas des travaux du commissaire aux apports que le « détourage » du bilan à partir duquel la société EHP a inclus dans le traité d'apport des éléments d'actif et de passif, ait fait l'objet d'une analyse critique de sorte que l'affectation de ces éléments à l'activité du site de Revin résulte d'une décision unilatérale de la société EHP à une époque où elle avait un contrôle complet de sa société fille ; qu'à cet égard, la production du listing des comptes clients apportés à SAI ne lève pas les interrogations du mandataire judiciaire qui souligne que la somme correspondante de 17 millions environ ne se retrouve pas dans les comptes de SAI ; que par ailleurs, s'il rappelle que les éléments apportés doivent être évalués à leur valeur vénale dès lors que la bénéficiaire doit passer sous le contrôle d'un tiers, le commissaire aux apports retient les seules valeurs comptables sans justification, ni analyse ; qu'en outre, alors que le diagnostic qualité des sols et des eaux souterraines réalisé au mois de mars 2014, en révélant la présence de métaux lourds et d'hydrocarbures au-delà des seuils hauts des anomalies naturelles, démontre le principe d'un passif environnemental nécessairement transmis à SAI par l'apport des actifs immobiliers et par le transfert de l'autorisation d'exploiter, le commissaire aux apports a certes admis que ce passif affectait l'évaluation des actifs apportés, mais a validé l'évaluation de l'apport net à un euro sans le moindre éléments d'appréciation sur le montant prévisible de ce passif environnemental ; mais plus encore, que le commissaire aux apports a cru pouvoir appuyer son avis sur le « financement [par EHP] de nouvelles activités » alors que le financement des deux lignes de production de moteurs qui consiste en un engagement hors bilan, n'a donné lieu trois mois après son rapport qu'à une promesse synallagmatique de vente prévoyant que SAI serait débitrice de EHP à hauteur du coût de fabrication de ces deux lignes de production, soit 15,2 millions d'euros, EHP s'engageant à céder cette créance à Selni pour un euro, ce dont il ressort que ce financement ne profite qu'indirectement à la société SAI ; qu'enfin, il est constant que le traité d'apport omet la transmission de droit à SAI du passif social résultant, après transfert des contrats de travail des salariés de EHP à SAI, des accords collectifs conclus les 6 juin, 1er octobre et 27 octobre 2014 et pourtant certain dans son principe à tout le moins à la date de l'apport ; que si, sur ce point, la société EHP reproche au mandataire judiciaire de SAI de ne pas prendre en considération la convention de garantie signée le 19 juin 2014 par laquelle EHP s'est engagée à payer entre les mains des pré-retraités et autres salariés non couverts par le contrat d'assurance de pré-retraite et appelés à quitter la société SAI jusqu'au mois d'avril 2016, les indemnités résultant de l'accord collectif conclu par SAI au mois d'octobre 2014, cette convention conclue au seul bénéfice des salariés concernés laisse ce passif social à la charge de SAI ; que c'est ainsi que EHP a déclaré au passif de la procédure collective de SAI une créance correspondant aux sommes versées de ce chef, soit une créance échue de 921 000 euros et une créance à échoir de 12 millions d'euros ; que si la société EHP fait justement valoir que l'ensemble des contrats et engagements conclus par les sociétés du groupe Electrolux sont indivisibles du traité d'apport, force est de constater que les contrats commerciaux conclus entre SAI et la société Electrolux Appliances AB comme l'engagement de EHP de financer la fabrication de deux nouvelles lignes de production n'améliorent pas le bilan de SAI ; que dans ces circonstances, le fait que SAI ait pu réaliser deux exercices bénéficiaires tient principalement aux accords commerciaux passés hors traité d'apport, à tel enseigne que c'est l'arrêt des commandes de moteurs universels par Electrolux Appliances AB au début de l'année 2017 (quelle qu'en soit la cause) qui a précipité SAI dans les difficultés, celle-ci ne disposant pas des moyens de fonctionner par elle-même ; que sans qu'il soit besoin de discuter plus avant les moyens de fait avancés par les parties, il s'induit de l'ensemble de ces éléments que l'apport réalisé par EHP à SAI a été déficitaire pour la seconde en ce qu'elle a consisté en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis ; qu'il ne saurait être tiré aucune conclusion de l'absence d'opposition au traité d'apport, si ce n'est la confiance des créanciers dans la présentation par EHP du projet de reconversion industrielle et dans les engagements pris par le groupe Electrolux ; que sur EHP, maître de l'affaire : le maître de l'affaire est l'entité qui, indépendamment des structures juridiques mises en place, dispose de la totale maîtrise de l'activité contrôlée et prive celle-ci de tout pouvoir décisionnel réel ; que la notion de maître de l'affaire est distincte, par nature de celle de gérance de fait et du lien de dépendance économique qui peut lier une sociétéfille à la société-mère ; qu'en l'espèce, il est constant que du mois de novembre 2013, date de sa création par EHP et le mois de juin 2014, SAI n'a eu d'autre activité sociale que les démarches administratives destinées à permettre le transfert de l'activité industrielle convenu entre EHP et Selni ; que dirigée par le président de EHP, entièrement détenue par EHP et dépourvue de tout moyen matériel, SAI n'est pas partie au protocole conclu le 30 avril 2014 qui définit pourtant les conditions dans lesquelles elle va devoir opérer, qu'il s'agisse de la mise à disposition des outils de production par EHP ou de la commercialisation de sa production à venir à Electrolux Appliances AB ; qu'au mois de mars 2014, SAI a déposé devant le président du tribunal de commerce de Compiègne une requête aux fins de désignation d'un mandataire ad hoc au visa de l'article L .611-3 du code de commerce à laquelle il a été fait droit le 21 mars 2014, le mandataire ad hoc recevant pour mission de : « -réaliser un diagnostic de la situation économique, financière et commerciale des difficultés et des solutions pour assurer la reconversion pérenne de l'activité de production du site de Revin qui sera apportée à la Société ardennaise industrielle, - assister la Requérante dans le cadre de ses négociations avec les parties intéressées » ; qu'or, il est manifeste qu'à cette époque SAI, dépourvue de la moindre activité et de la moindre autonomie de décision en ce qu'elle était totalement contrôlée par EHP, n'était assurément pas débitrice au sens de l'article L. 611-3 et qu'elle n'était pas en situation de rencontrer la moindre difficulté au sens du même texte ; que de fait, ainsi qu'il vient d'être dit, SAI ne participait pas aux négociations en cours entre EHP et Selni ; qu'il s'induit que, sous couvert de son président, ès qualités de président de SAI, c'est en réalité EHP qui a pris l'initiative de cette requête et, de fait, c'est EHP qui pouvait nourrir quelques interrogations sur les données économiques, financières et commerciales d'un projet commun avec Selni ; que dans le même temps, le cabinet KPMG ne s'est d'ailleurs pas trompé sur l'identité du véritable maître de l'opération puisque tout en adressant un rapport à monsieur de Noinville en sa qualité de président de SAI (par ailleurs président de EHP), il indique « notre intervention a été diligentée par Electrolux Home Products France qui nous a interrogé sur la pérennité de l'activité du site de Revin au vu des prévisions établies par les parties et des engagements en cours de négociation » (Pièce 4 de l'appelante page 5) ; qu'à cet égard, il est significatif de relever que le cabinet KPMG a rédigé un rapport qui consiste à présenter les options stratégiques ouvertes à la société EHP relativement à la production de machines à laver à chargement par le haut, la situation de la société Selni et les forces/faiblesses, risques/opportunités du projet de partenariat EHP/Selni ; qu'à nouveau sollicité par le mandataire ad hoc, le cabinet KPMG mentionne dans un second rapport que les données sur lesquelles il a travaillé relèvent de la seule responsabilité de EHP et de Selni, confirmant l'inexistence en fait de la société SAI à cette époque (pièce 5 de l'appelante page 1) ; que de même, au mois d'août 2014, SAI dont le capital avait déjà été cédé par EHP à Selni sous diverses conditions suspensives et qui était encore dirigée par le président de EHP a déposé une requête aux fins de désignation d'un conciliateur de justice, à laquelle il a été fait droit le 29 août 2014 par une ordonnance confiant au conciliateur la mission « d'assister la Requérante dans le cadre de la finalisation de l'opération de cession de son capital au repreneur » ; qu'il est patent qu'à cette époque où SAI n'avait aucune activité autonome (les salariés ne lui seront transférés qu'au 1 septembre et rétroactivement) et se trouvait de fait sous la direction de EHP, seule cette dernière, cédante du capital de SAI, se trouvait dans une situation de « finalisation de l'opération de cession » et pouvait avoir intérêt à éclaircir les intentions et aptitudes réelles de son cocontractant ; que la suppression du lien capitalistique entre EHP et SAI n'a donc pas affecté, en fait, le comportement de EHP comme maître de l'affaire ; qu'il est enfin significatif de noter que si le jugement rendu le 30 octobre 2014 portant homologation du protocole de conciliation conclu entre EHP, SAI et Selni le 3 octobre, a été rendu sur la requête de SAI, la rectification d'une omission de statuer, sollicitée aussi en apparence par SAI, consiste à faire ajouter que le billet à ordre long terme émis par SAI à l'ordre de EHP bénéficiera du privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce, soit une disposition rendue dans le seul intérêt de EHP ; qu'il apparaît donc qu'au cours de l'année 2014, c'est EHP qui a en réalité agi en justice, à trois reprises, sous couvert de la société SAI et dans son propre intérêt (pièces 3, 10, 14) ; que les deux premières années d'activité de la société SAI ont été consacrées à la reprise à l'identique de l'activité menée par EHP sur le site de Revin, sous la réserve d'une réduction importante d'effectif ; qu'après avoir cédé le capital de SAI à la société Selni, la société EHP a poursuivi sa gestion administrative de l'entreprise via un contrat de transition de services aux termes duquel EHP maintenait ses outils de gestion au sein de la société SAI et assurait les tâches de comptabilité, d'administration, de paie et d'informatique moyennant le prix de 17 450 euros par mois ; que ces modalités qui favorisent et confirment la parfaite continuité de l'activité de SAI par rapport à l'activité précédente de EHP permettaient en outre à cette dernière de conserver une connaissance quotidienne de l'activité de SAI (pièce 27 de l'appelante) ; qu'au-delà des actions précitées, mises en oeuvre par EHP et faisant fi de la personnalité morale de SAI, c'est la conception globale de l'opération qui caractérise la volonté de EHP de demeurer le maître de l'affaire ; qu'en effet, l'opération menée consistant principalement à maintenir très provisoirement sur le site de Revin l'activité d'assemblage des machines à laver à la faveur d'une réduction des effectifs, d'un prêt à long terme de 1,5 millions d'euros et d'un engagement commercial d'Electrolux Appliances AB d'acquérir ces machines et à financer la fabrication et l'installation de deux nouvelles lignes de production, l'une relative à des moteurs universels, l'autre relative à des petits moteurs BLDC présentés comme innovants par Selni, à la faveur d'un engagement commercial d'Electrolux Appliances AB portant sur l'acquisition de 1,2 moteurs universels par an pendant cinq ans, il ressort des pièces du dossier que : - EHP a conservé la propriété et la maîtrise de la ligne d'assemblage des machines à laver qu'elle a mise à disposition de SAI dans un premier temps jusqu'au mois de mars 2016 puis jusqu'à la fin de l'année 2016 avant de la récupérer pour la transférer dans son établissement polonais, conformément au projet initial de délocalisation, cet outil industriel étant déterminant de l'activité de SAI ; - les sociétés du groupe Electrolux ont défini les modalités de l'arrêt progressif de l'assemblage des machines à laver en termes de délai et de quantités, un contrat de fourniture signé le 31 octobre 2014 déterminant les seuls débouchés commerciaux possibles pour SAI dans ce contexte ; - s'engageant à financer la fabrication des deux lignes de production appelées à permettre le maintien d'une activité industrielle sur le site de Revin, EHP qui a unilatéralement choisi le fabriquant a conservé la totale maîtrise de l'outil de production nécessaire à l'activité de SAI ; - s'il ne prévoit pas d'exclusivité, le contrat d'achat de produits finis conclus entre SAI et Electrolux Appliances AB le 31 octobre 2014 prévoit la vente d'une quantité de moteurs universels équivalente à la capacité totale de production envisagée sur une période de cinq ans ; qu'il ressort de façon manifeste et explicite de l'ensemble des protocoles et contrats versés aux débats que la création de SAI et la reconversion de son activité s'inscrivent dans une opération globale convenue par le groupe Electrolux et la société Selni, au sein de laquelle la cession du capital de SAI, les apports faits par EHP, les engagements sociaux pris par EHP et les accords industriels et commerciaux pris par telle société du groupe Electrolux sont liés et interdépendants ; que dans ce contexte, l'ensemble des autorités et intervenants extérieurs a souligné de façon particulièrement claire que l'activité de SAI et sa pérennité étaient directement dépendantes des engagements financiers, sociaux, industriels et commerciaux pris par les sociétés du groupe Electrolux : - le commissaire aux apports conclut le 31 juillet 2014 que les apports ne sont pas surévalués,
s'il est tenu comptes « des engagements donnés par EHP pour le financement des nouvelles activités, la prise en charge des coûts de restructuration sociale et la garantie en matière d'environnement » ; - le rapport du cabinet SECAFI présenté au comité central d'entreprise de EHP le 15 juillet 2014 souligne l'importance des engagements industriels et commerciaux pris par le groupe pour permettre le maintien d'une activité industrielle à Revin ; - le rapport KPMG relève qu' « afin de sécuriser le business plan » le groupe Electrolux s'est engagé sur les volumes et marges unitaires sur la production des machines à laver, sur la fourniture de prestations de support technique pendant la période transitoire, sur les volumes et les marges unitaires sur le contrat de moteurs universels pour une période de sept ans, sur la couverture d'éventuels surcoûts liés à la structure pendant la période transitoire, sur la couverture des coûts sociaux liés à la reconversion, sur la prise en charge des investissements industriels ; - le rapport de maître Lessertois, conciliateur en date du octobre 2014 mentionne qu' « il n'en reste pas moins que la reconversion industrielle du site de REVIN constitue un projet ambitieux qui nécessite une surface économique et financière importante ; Ce constat a amené le Groupe Electrolux à prévoir un grand nombre d'apports, de garanties et d'engagements pour répondre aux besoins identifiés et contribuer à la mise en oeuvre et à la réussite de cette opération » ; que s'il ne peut être reproché aux sociétés du groupe Electrolux d'avoir conservé la main sur tous les aspects industriels et commerciaux au regard des sommes engagées, il ressort néanmoins de ces éléments que SAI ne disposait d'aucune marge d'autonomie économique dans la gestion de son activité entièrement contrôlée en amont comme en aval par le groupe Electrolux ; que si la société EHP fait valoir à juste titre qu'elle n'est pas partie à certains des contrats nécessaires à l'activité de SAI qui ont été conclus par la société Electrolux Appliances AB, il ressort suffisamment des pièces du dossier que le projet mis en oeuvre par EHP à travers la création de SAI puis le traité d'apport partiel d'actif et la cession du capital à Selni, s'inscrit dans une démarche concertée au sein du groupe Electrolux, à telle enseigne par exemple que la société Electrolux France SAS est mentionnée comme partie au contrat de cession des actions de SAI entre EHP et Selni ; que selon les termes du contrat de cession d'actions, EHP s'est en outre expressément engagée pour le compte de ses sociétés affiliées et à remettre au cessionnaire les contrats attendus de la société Electrolux Appliances AB relativement à la convention de fourniture de machines à laver et au contrat cadre portant sur la fabrication des moteurs universels, de sorte que ces contrats sont directement opposables à EHP. (pièce 11 de l'appelante) ; qu'en outre, il ressort suffisamment du rapport KPMG que la société Selni qui se trouvait en cours d'exécution d'un plan de redressement au moment des négociations avec EHP, grâce notamment à l'utilisation de fonds publics ou parapublics, n'était pas en capacité de proposer un autre concours qu'un projet de développement et de commercialisation à terme d'un petit moteur BLDC présenté comme innovant ; que la société Selni, au-delà de l'entre-gens manifeste de ses dirigeants, n'était donc pas en capacité de prendre la direction effective du projet industriel confié à SAI ainsi que le mentionne EHP elle-même dans un courrier adressé à l'administration fiscale au mois de mai 2014 (pièce 17 de l'appelante) ; que si elle a incontestablement permis d'éviter un risque de destruction à court terme d'emplois industriels sur le site de Revin lié à la décision du groupe Electrolux d'arrêter la fabrication en France des machines à laver à chargement par le dessus, la constitution de la société SAI dans le cadre du projet ici examiné, a permis, de fait, à EHP d'opérer cette délocalisation en transférant sur SAI les contraintes environnementales auxquelles elle aurait dû faire face si le site avait été purement et simplement fermé ; que par ailleurs, ainsi qu'il ressort des échanges de courriers entre l'administration fiscale et la société EHP aux mois de mai et juin 2014 : - le passif social supporté par EHP aux termes du traité d'apport partiel d'actif correspondant à des frais de restructuration bénéficiait de l'exception au principe de non déductibilité (art 39 5° alinéa 33 du code général des impôts), - l'investissement de 15 millions d'euros dans les lignes de production de moteurs destinées à SAI et devant donner lieu à une cession à Selni pour un euro, a été admis comme pouvant donner lieu à une déduction fiscale au profit de EHP ; que l'administration fiscale a en effet retenu les explications de EHP selon lesquelles la perte consistant à l'abandon promis de cet outil industriel pour un euro au profit d'un tiers, avait une contrepartie commerciale pour EHP en ce qu'évitant un mouvement social d'envergure et un blocage prévisible du site de production, cet investissement évitait un impact sur le volume des ventes en France et des coûts marketing et de communication nécessaires à la restauration de l'image de la marque auprès du grand public, cette contrepartie étant évaluée à 16 millions d'euros par EHP (pièce 18 de l'appelante) ; que cet investissement était donc consenti aussi dans l'intérêt direct de EHP et non pas dans le seul objectif de maintenir l'emploi sur le site de Revin ; qu'enfin, il est manifeste que la définition par EHP des spécificités de l'outil industriel ainsi financé en fonction du cahier des charges de la société Electrolux Appliances AB et la signature d'un contrat de fourniture sur cinq ans aux prix et conditions pré-établies par celle-ci avec la société SAI créée en France fournissaient au groupe Electrolux un avantage commercial non négligeable au regard du caractère stratégique du marché français (cf rapport SECAFI pièce 24 de l'intimé) ; qu' il s'induit de l'ensemble de ces éléments de fait, qu'en créant la société SAI dans le cadre du projet ici analysé, la société EHP a agi comme maître de l'affaire au mieux de ses intérêts propres, indépendamment de la convergence de ce projet avec les orientations des pouvoirs publics ; que sur les éléments de fraude : si la notion de fraude peut recouvrer diverses réalités, constitue notamment une fraude le fait de se prévaloir de faits dont le caractère inexact est avéré, de détourner des moyens juridiques ou de dissimuler l'objectif véritable d'une entreprise ; qu'au contraire, la fraude n'implique pas nécessairement le secret ; qu'en l'espèce, s'il peut être entendu que l'intervention de l'autorité politique a incité le groupe Electrolux à examiner les possibilités de trouver un repreneur pour le site industriel de Revin, il doit néanmoins être relevé d'une part, que la décision du groupe Electrolux d'arrêter la production de machines à laver à Revin est antérieure aux échanges tenus avec l'autorité publique, d'autre part que, s'il peut prendre en compte des circonstances ou opportunités conjoncturelles, un groupe industriel et commercial tel qu'Electrolux prend légitimement ses décisions stratégiques dans le seul intérêt de ses composants ; que par ailleurs, les avis émis par les différents autorités et organes institutionnels, administratifs et politiques sur les démarches entreprises par le groupe Electrolux ne peuvent être invoqués utilement au-delà de leur objet spécifique respectif, tel s'agissant de l'autorité préfectorale, de la possibilité de changer l'exploitant du site industriel puis de modifier l'activité industrielle au regard des règles environnementales, tel s'agissant de l'autorité politique, de la sauvegarde à court terme d'emplois industriels, tel enfin s'agissant des institutions représentatives des salariés d'EHP, de la protection des droits collectifs des salariés ; que ces avis ne sont pas de nature à exclure une fraude dans la constitution fictive d'une société ; que les éléments versés aux débats montrent d'ailleurs que la construction du projet présenté par EHP a suscité des interrogations au regard de la pérennité de l'activité de SAI, voire des actions judiciaires alors même que les conditions du plan de sauvegarde de l'emploi élaboré par EHP étaient reconnues comme individuellement très favorables.(pièces 24 et 36 de l'intimé, 10 de l'appelante) ; qu'il ressort des éléments versés aux débats que EHP a présenté son projet à l'ensemble des autorités sollicitées comme le transfert d'une branche d'activité autorisant ainsi le transfert d'un passif alors que l'objet de l'apport réalisé à SAI ne pouvait être qualifié comme tel, ainsi qu'il est développé ci-dessus, EHP étant informée à tout le moins depuis le 3 juin 2014, soit avant la signature du traité d'apport partiel d'actif et du contrat de cession des actions de SAI, que cette présentation était erronée (pièce 18 de l'appelante) ; que cette présentation était manifestement trompeuse en ce qu'elle laissait croire à une certaine autonomie industrielle et commerciale de SAI et, loin de la corriger, EHP l'a maintenue dans tous les actes de mise en oeuvre de son projet tant auprès des autorités publiques qu'envers les salariés La société EHP fait valoir que la création de SAI ne saurait être frauduleuse en ce qu'elle a été « avalisée » par la justice et elle renvoie au jugement rendu le 30 octobre 2014 qui, statuant sur requête de la société SAI, a homologué l'accord de conciliation conclu le 3 octobre 2014 entre EHP, SAI et Selni ; qu'il est constant que l'homologation d'un protocole de conciliation selon les modalités de l'article L. 611-9 du code de commerce, n'a d'effet qu'entre les signataires du protocole et dans la seule limite des créances qui y sont mentionnées ; que la société EHP admet dans ses écritures (page 50) avoir été à l'initiative de la désignation d'un mandataire ad hoc puis d'un conciliateur, confirmant ainsi le caractère frauduleux de la demande présentée au nom de SAI ; qu'en outre, la lecture des articles L. 611-3 s'agissant de la désignation d'un mandataire ad hoc et de l'article L. 611-7 s'agissant de celle d'un conciliateur, éclairée par la dernière production de pièces de l'appelante, met en évidence qu'une requête aux fins de désignation judiciaire d'un mandataire ad hoc ou d'un conciliateur suppose l'existence d'un débiteur et de créanciers et celle de difficultés rencontrées par l'entreprise du débiteur ; que s'il entre dans la mission de l'autorité judiciaire de favoriser la prévention des difficultés des entreprises, il ne lui appartient pas « d'avaliser » les projets industriels et commerciaux élaborés par les acteurs économiques ;qu'à la date de dépôt de ces deux requêtes, la société EHP qui était simplement en négociation avec un possible partenaire pour élaborer un projet industriel, ne pouvait avancer aucune difficulté en relation avec une ou des dettes identifiables ;
que la référence par EHP à l'alinéa 2 de l'article L. 611-7 est particulièrement mal venue dès lors que la mission de conciliation sollicitée ne tendait pas à la sauvegarde de l'entreprise mais consistait à une assistance dans la mise en oeuvre de la décision stratégique d'une entreprise parfaitement saine ; que ces initiatives procédurales constituent dans leur formulation comme sur le fond un détournement d'actions judiciaires, EHP disposant de tout moyen technique, notamment du concours du cabinet KPMG qu'elle avait déjà sollicité par elle-même pour s'assurer du sérieux du partenariat qu'elle envisageait avec Selni ; que le fait que EHP se prévale, dans le cadre de la présente instance, d'un « aval » judiciaire corrobore cette analyse ; qu'il est patent que c'est - en fait - l'interruption des commandes de moteurs universels émanant de la société Electrolux Appliances AB qui a précipité SAI dans les difficultés quelques mois à peine après l'arrêt de l'assemblage des machines à laver ; que la société EHP impute la responsabilité de cette situation à la société Selni dont elle dénonce en substance l'absence d'implication véritable dans le projet, un désintérêt pour l'avenir de SAI, sa société-fille et une incompétence dans l'animation du projet industriel confié à celle-ci ; que dans le cadre du présent débat, il n'appartient pas à la cour d'apprécier les responsabilités dans la rupture du partenariat entre le groupe Electrolux et la société Selni ; que pour autant, il faut relever que, dès l'origine du projet, les techniciens appelés à émettre un avis ont souligné non seulement l'extrême fragilité de la société Selni mais aussi le caractère très déséquilibré des engagements de EHP et de Selni respectivement, qui n'était sans doute pas de nature à mobiliser une attention constructive de la part de Selni pour autant que la pérennité de celle-ci soit admise (cf rapports KPMG, rapport SECAFI) ; qu'il convient de rappeler que dès la lettre d'intention du mois de septembre 2013, EHP prévoyait de vérifier la pertinence du business plan proposé par Selni ; que dans ce contexte, EHP et plus généralement le groupe Electrolux ont délibérément privilégié les engagements hors traité d'apport à SAI qui les assuraient de conserver la maîtrise économique totale du projet dans leur intérêt propre, même en cas de défaillance du partenaire Selni dont l'occurrence ne pouvait être écartée, plutôt que de doter d'emblée la société SAI des moyens de prospérer par elle-même dans cette reconversion industrielle ; qu'or, il est patent que EHP a très largement mis en avant ses engagements hors traité d'apport au motif d'une volonté de maintenir l'emploi industriel sur le site de Revin, pour obtenir une adhésion générale au projet, occultant l'impossibilité pour SAI de mener, seule au sein du groupe Selni, le projet de reconversion industrielle (pièces 6, 9, 11, 13, 15, 17, 26 de l'appelante) ; que la rupture du partenariat Electrolux-Selni apparaît ainsi comme un risque connu ab initio et assumé par EHP à la faveur de l'articulation opérée entre la constitution de SAI et les contrats mis en oeuvre par ailleurs ; qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société SAI créée par EHP qui est délibérément demeuré le maître de l'affaire est une société fictive ; qu'il convient, partant, d'étendre à la société Electrolux Home Products France la procédure de redressement judiciaire ouverte le 8 janvier 2018 à l'encontre de la Société ardennaise industrielle ; qu'il n'y a lieu de statuer sur le surplus des demandes ;
1°) ALORS QUE le comité d'entreprise de la société Electrolux Home Products France faisait valoir que tous les faits retenus par le tribunal pour juger la société SAI fictive étaient contemporains de la reconversion industrielle du site de Revin par l'achat de ce site par le groupe Selni en avril 2014, qu'à chaque étape du projet plusieurs administrations ont validé le processus qui prévoyait la création de la société SAI, que le tribunal de commerce de Compiègne avait également validé le projet le 30 octobre 2014 en homologuant le protocole de conciliation conclu entre la société Electrolux Home Products, la société SAI et la société Selni le 3 octobre 2014 ; que le comité d'entreprise ajoutait que les éléments retenus par le jugement dont appel pour considérer la société SAI fictive et l'opération frauduleuse étaient connus lorsque le tribunal de commerce de Compiègne a homologué le protocole de conciliation ; que le comité d'entreprise en déduisait que la cour d'appel ne pouvait retenir ni la fraude de l'opération ni la fictivité de la société SAI (concl., p. 14 et 15) ; qu'en s'abstenant de motiver sa décision par des considérations de nature à justifier que les éléments cidessus invoqués par le comité d'entreprise ne soient pas considérés comme pertinents, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU' un jugement adoptant un plan de cession partielle des actifs d'un débiteur fait obstacle à l'extension à un tiers pour confusion des patrimoines, de la procédure collective de ce débiteur ; que cette règle s'applique également en cas d'extension pour fictivité ; qu'en étendant à la société EHP la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société SAI quand il était constant, acquis au débat et non discuté que par jugement du 16 mai 2018, le tribunal de commerce de Compiègne avait adopté un plan de cession partielle de la société SAI à la société Delta Dore, la cour d'appel a violé les articles L. 621-2 et L. 631-22 du code de commerce ;
3°) ALORS QU' une société est fictive si les personnes qui se présentent comme ses associés et dirigeants ne sont que des prête-noms ou les comparses du véritable maître de l'affaire et sont dépourvues d'indépendance et de toute autonomie ; que pour étendre à la société EHP la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société SAI sur le fondement de la fictivité de la société SAI, la cour d'appel a considéré que la société EHP était le maître de l'affaire ; qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que la société EHP avait, par acte du 19 juin 2014, cédé les actions de la société SAI à la société Selni, sans établir que la société Selni ait été elle-même fictive et/ou prête-nom ou comparse de la société EHP, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
4°) ALORS QU' qu'une société est fictive si elle est dépourvue de toute autonomie décisionnelle à l'égard du maître de l'affaire qui la contrôle et la dirige, soit personnellement, soit par l'intermédiaire de comparses ; qu'en estimant que la société EHP était maître de l'affaire, sans considération pour la circonstance que les dirigeants de la société SAI étaient les dirigeants de la société Selni et géraient la société SAI en toute indépendance et autonomie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
5°) ALORS QU' en considérant qu'après avoir cédé le capital de la société SAI à la société Selni, la société EHP avait poursuivi sa gestion administrative de l'entreprise via un contrat de transition de services aux termes duquel EHP avait maintenu ses outils de gestion au sein de la société SAI et assuré les tâches de comptabilité, administration, de paie et d'informatique et que ces modalités avaient favorisé et confirmé la continuité de l'activité de la société SAI par rapport à l'activité précédente de la société EHP et permis à EHP de conserver une connaissance quotidienne de l'activité de la société SAI, sans rechercher si le contrat de transition de services aux termes duquel la société EHP s'était engagée à fournir certains services administratif à la société SAI était temporaire puisqu'il devait prendre fin au 31 mars 2015 et avait pour finalité d'assurer une bonne transition de l'activité du site de Revin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
6°) ALORS QUE la fraude suppose une intention frauduleuse ; qu'en déduisant l'existence d'une fraude du fait que la société EHP avait présenté le projet litigieux comme le transfert d'une branche d'activité, ses initiatives procédurales constituaient des détournements d'actions judiciaires car fondées sur des textes non applicables, la fragilité de la société Selni et le caractère déséquilibré des engagements des sociétés EHP et Selni avaient justifié l'absence d'intervention constructive de la société Selni et la société EHP avait privilégié des engagements hors traité d'apports, ce qui était impropre à caractériser une intention frauduleuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
7°) ALORS QUE l'existence ou l'absence d'affectio societatis ne peut s'apprécier que dans la personne des associés ; qu'en qualifiant la société SAI de fictive au motif que la constitution d'une société nouvelle par EHP ne correspondait pas à l'engagement de l'associé dans la mise en oeuvre d'un projet autonome et durable qui constitue l'affectio societatis y compris dans les sociétés à associé unique, après avoir constaté que la société EHP avait cédé les actions de la société SAI à la société Selni, par acte du 19 juin 2014, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 621-1 alinéa 2, du code de commerce et 1832 du code civil ;
8°) ALORS QUE l'associé d'une société unipersonnelle n'est pas dépourvu d'affectio societatis du seul fait qu'il a créé celle-ci dans le seul but de transférer les biens qui lui auront été apportés à un tiers ; qu'en retenant que la constitution d'une société nouvelle par EHP ne correspondait pas à l'engagement de l'associé dans la mise en oeuvre d'un projet autonome et durable qui constitue l'affectio societatis y compris dans les sociétés à associé unique, la cour d'appel a violé l'article 1832 du code civil ;
9°) ALORS QUE le capital social est constitué des apports en société ; qu'en considérant que l'apport à la société SAI n'était pas réel, après avoir constaté que le capital de la société SAI avait été entièrement et immédiatement libéré le jour de sa constitution, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des articles L. 621-2 du code de commerce et 1832 du code civil ;
10°) ALORS QU' en retenant que les biens apportés par la société EHP à la SAI ne constituaient pas une branche d'activité, pour en déduire que l'apport réalisé par la société EHP à la société SAI consistait en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 621-2 du code de commerce et 1832 du code civil ;
11°) ALORS QU' en considérant, pour retenir que l'apport réalisé par EHP à SAI consistait en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis, que la convention de garantie laissait le passif social à la charge de la société SAI puisque la société EHP avait déclaré une créance de 921.00 euros et une créance de 12 millions d'euros au passif de la procédure collective de la société SAI, sans rechercher si ces créances correspondaient, non pas au passif social de la société SAI mais, pour la première, à une répétition de l'indu et, pour la seconde, à la réparation d'un préjudice résultant des fautes des dirigeants de la société SAI, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
12°) ALORS QU' en considérant qu'un passif environnemental affectait l'évaluation des actifs apportés, pour retenir que l'apport réalisé par la société EHP à la société SAI consistait en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis, sans rechercher si ce passif environnemental était seulement éventuel, de sorte qu'il n'avait pas à être pris en compte dans l'évaluation de l'apport de la société EHP à la société SAI, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce.
Moyens produits au pourvoi n° F 18-22.962 par la la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Electrolux Home Products France
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société EHP ;
aux motifs que «sur la compétence du tribunal de commerce de Compiègne : en application de l'article L. 621-2 in fine du code de commerce dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014, le tribunal ayant ouvert la procédure initiale reste compétent pour ces demandes. La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a institué des tribunaux de commerce spécialement désignés pour connaître des procédures de sauvegarde, de redressements judiciaires et de liquidations judiciaires mentionnés au Livre VI du code de commerce lorsque, notamment, le débiteur est une entreprise dont le montant net de chiffre d'affaires est d'au moins 40.000.000 € (article L.721-8 du code de commerce). La même loi a modifié l'article L. 662-8 du code de commerce qui dispose désormais : le tribunal est compétent pour connaître de toute procédure concernant une société qui détient ou contrôle, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, une société pour laquelle une procédure est en cours devant lui ; il est également compétent pour connaître de toute procédure concernant une société qui est détenue ou contrôlée, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, par une société pour laquelle une procédure est en cours devant lui ; il peut désigner un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire communs à l'ensemble des procédures ; par dérogation à la première phrase du premier alinéa, toute procédure en cours concernant une société détenue ou contrôlée, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, par une société pour laquelle une procédure est ouverte devant un tribunal de commerce spécialisé est renvoyée devant ce dernier. Il convient de relever que la loi récente n'a pas modifié l'article L. 621-2 du code de commerce et qu'elle ne comporte aucune disposition contraire à ce texte s'agissant de l'extension d'une procédure collective à une autre entreprise. Par ailleurs, envisageant des difficultés pratiques dans la répartition des compétences entre les tribunaux de commerce et les tribunaux de commerce spécialisés, la loi nouvelle a confirmé la compétence des premiers pour connaître de toute procédure susceptible d'être menée à l'encontre d'une société en lien capitalistique ou de contrôle (au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3) avec une société à l'encontre de laquelle une procédure est déjà en cours, à la seule exception de la situation dans laquelle, au sein d'un groupe de sociétés (au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3) une procédure collective est ouverte devant un tribunal spécialisé à l'encontre d'une société mère alors qu'une procédure collective est en cours devant un tribunal non spécialisé à l'encontre d'une société fille. Aucune disposition du droit européen ne contredit ces dispositions procédurales de droit interne, étant observé que la référence jurisprudentielle proposée par l'appelante concerne la répartition de compétences entre des juridictions de deux Etats différents. Or en l'espèce, aucun lien capitalistique ou de contrôle n'unit la société EHP à la société SAI au moment où le tribunal de commerce de Compiègne statue à l'encontre de la première. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société EHP, nonobstant le montant du chiffre d'affaires réalisé par celle-ci » ;
alors que l'article L. 721-8 du code de commerce soumet à la compétence de tribunaux de commerce spécialement désignés les procédures collectives concernant notamment des entreprises exerçant une activité commerciale et réalisant un chiffres d'affaires net d'au moins 40 millions d'euros ; que cette règle s'applique en cas d'extension à une entreprise répondant à ces critères d'une procédure collective et ce, quand bien même le débiteur faisant l'objet de ladite procédure ne remplirait aucune des conditions posées par ce texte ; qu'en l'espèce, la société EHP a contesté la compétence du tribunal de commerce de Compiègne pour prononcer l'extension, à son encontre, de la procédure collective de la société SAI ; qu'en rejetant cette exception d'incompétence, après avoir néanmoins constaté que la société EHP avait réalisé un chiffre d'affaires de 290 millions d'euros, excédant largement le seuil de 40 millions d'euros qui déclenche la compétence d'un tribunal de commerce spécialisé, la cour d'appel a violé le texte précité.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir étendu à la société Electrolux Home Products France la procédure de redressement judiciaire ouverte le 8 janvier 2018 à l'encontre de la société Ardennaise Industrielle ;
aux motifs que «en application de l'article L. 621-2 alinéa 2 du code de commerce, à la demande de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du débiteur ou du ministère public, la procédure ouverte peut être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale. En l'espèce, la constitution de la société SAI trouve son origine dans la décision du groupe Electrolux de cesser la production à Revin de machines à laver à chargement par le dessus pour regrouper cette production sur le site d'Olawa en Pologne. Il est constant en effet que cet arrêt d'activité en France a été annoncé par la société EHP aux instances représentatives des salariés en 2012. Dans le contexte social et économique d'alors, l'autorité politique nationale a exprimé sa volonté de favoriser des projets industriels de nature à éviter la destruction d'emplois à court terme et c'est ainsi que le groupe Electrolux et la société Selni sont entrés en contact pour envisager la possibilité d'une reconversion du site industriel de Revin. Il convient de souligner à titre liminaire qu'il n'appartient pas à la présente juridiction d'émettre quelque appréciation sur les choix économiques faits par le groupe Electrolux ou sur le positionnement politique de l'autorité publique. Inversement, ces mêmes choix économiques et positionnements politiques ne sont pas de nature à faire obstacle à l'analyse juridique à laquelle il incombe à la cour de procéder. Il ressort suffisamment des écritures des parties que la décision d'extension à la société EHP de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société SAI dépend uniquement du caractère véritable ou fictif de SAI en tant que société au sens des articles 1832 et suivants du code civil. De fait, aucun élément du dossier ne permet de retenir une confusion entre les patrimoines des deux entreprises. La société SAI a été constituée par la société EHP le 27 novembre 2013 sous la forme d'une société par actions simplifiée, avec un unique actionnaire, un capital social de 5.000 € immédiatement libéré, un siège social situé à Compiègne dans un centre d'affaires et avec pour objet social « le commerce et l'industrie de tous métaux, l'achat, la vente, la fabrication de tout matériel, machines, outillage, instruments, appareils et autres articles divers et spécialement machines à laver, moteurs électriques » et, généralement, toutes opérations industrielles y afférentes. Cette constitution fait directement suite à une lettre d'intention signée entre la société Electrolux France et la société Selni le 2 septembre 2013 aux termes de laquelle, la première souhaitant arrêter la production de machines à laver sur le site de Revin à échéance fin 2016 et la seconde souhaitant développer la fabrication et la vente de moteurs électriques notamment au groupe Electrolux, Selni proposait de s'engager à maintenir 230 emplois sur le site de Revin par l'installation d'une nouvelle activité de production de moteurs à la faveur d'un engagement d'Electrolux de fournir l'immobilier du site et certains équipements, de financer la fabrication de deux lignes de production et de fournir un soutien en personnel pour le démarrage de l'activité et un soutien financier à travers les accords commerciaux, les deux parties prévoyant en outre la signature d'un contrat de fourniture à long terme portant sur 1,2 millions de moteurs par an de Selni à Electrolux. Il est admis par les parties que le seul objet de la constitution de SAI par EHP était de poursuivre l'activité d'assemblage de machines à laver pendant une durée de 2 années afin de permettre l'installation de cette nouvelle activité industrielle. S'il n'est pas discutable que ce rapprochement d'Electrolux et de Selni satisfaisait la préoccupation des pouvoirs publics d'éviter une destruction d'emplois industriels à court terme, il n'apparaît pas qu'il imposait par lui-même la création par EHP d'une nouvelle société. Dans ce contexte, doivent être analysés les éléments susceptibles de caractériser une société fictive. Il ressort des éléments du dossier que si elle a été formellement constituée au mois de septembre 2013, SAI qui n'était alors dotée que d'un apport en capital de 5.000 € ne pouvait avoir de réalité concrète avant de disposer de l'apport indispensable à son activité et de salariés. Ce n'est que le 19 juin 2014 que EHP et SAI ont signé un traité d'apport et le transfert des contrats de travail des salariés de EHP repris par SAI a pris effet rétroactivement au 1er septembre 2014. En outre, ainsi qu'il ressort du rappel des faits ci-dessus, c'est principalement au cours de l'automne 2014 qu'a été signée la majeure partie des contrats prévus dans le cadre du projet de reconversion industrielle, exception faite du contrat de cession des actions de SAI à la société Selni, formalisé le 19 juin 2014. De fait, jusqu'à l'été 2014, l'activité sociale de SAI a consisté uniquement dans des démarches administratives relatives à sa substitution à EHP en qualité d'exploitant du site d'installation classée. Si l'absence d'activité et de consistance réelle jusqu'au mois de juin 2014 ne suffit pas à démontrer le caractère fictif de SAI au regard du temps nécessaire à la mise en place du projet, elle conduit en revanche à prendre en considération, au premier chef, l'ensemble des actions entreprises par les protagonistes au cours de l'année 2014 pour apprécier la réalité de SAI en tant que société. Au regard des éléments constitutifs d'une société, les éléments du dossier conduisent à analyser l'objet de la décision de EHP de faire société, la réalité des apports effectués par l'associé unique, l'autonomie de SAI par rapport à son créateur et les éléments d'une fraude. – Objet de la décision de EHP de faire société :
il ressort du premier rapport du cabinet KPMG, sollicité d'abord par EHP puis désigné comme technicien dans le cadre d'un mandat ad hoc sollicité par la société SAI au mois de mars 2014 que la création de SAI s'inscrit dans une réflexion stratégique menée par le groupe Electrolux depuis 2012 sur le devenir de la production de machines à laver à chargement par le haut à Revin dans le contexte d'une contraction du marché qui avait abouti à une décision d'arrêter cette fabrication en France et de la concentrer sur un établissement situé en Pologne. Les éléments du dossier montrent clairement que cette décision d'arrêter cette production à Revin n'a jamais été remise en cause au cours de l'élaboration du projet qui a donné lieu à la création de la société SAI, dont elle constituait l'hypothèse de départ et donc la base de réflexion de l'ensemble des intervenants. De fait, à l'issue de la période de 2 années annoncée dès les premiers échanges entre les différents acteurs, l'outil de production/d'assemblage des machines à laver a effectivement été transféré par EHP sur son site de production situé en Pologne. La constitution de la société SAI n'avait donc pas pour objet le transfert d'une branche d'activité au sens commun du terme, mais l'organisation de la cessation à bref délai d'une partie de l'activité de EHP en France ; le traité d'apport partiel d'actif en date du 19 juin 2014 rappelle que l'activité développée sur le site de Revin n'est plus viable et cessera au plus tard à la fin de l'année 2016 et que l'objectif du projet est de permettre à la société Selni de développer une nouvelle activité ; il indique que la société bénéficiaire exploitera l'activité d'assemblage de machines à laver dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de fabrication avec une société du groupe Electrolux. Par ailleurs, si, pour satisfaire à des considérations sociales, EHP et/ou les autres sociétés du groupe Electrolux ont pris divers engagements financiers envers la société Selni, significatifs dans leur montant, pour permettre la création sur le même site d'une activité industrielle nouvelle, il est manifeste que EHP n'entendait pas participer en qualité d'associée à cette activité nouvelle, le contrat de cession des actions de la société SAI à Selni étant concomitant du traité d'apport partiel. De fait, le protocole d'accord signé le 30 avril 2014 a été conclu entre la société Electrolux France et la société Selni, sans la participation de SAI, pourtant déjà constituée, alors même qu'il prévoit divers engagements à contracter par celle-ci, ce qui corrobore le caractère « transparent » de SAI dans les rapports entre le groupe Electrolux et la société Selni. Il s'ensuit que la constitution d'une société nouvelle par EHP ne correspond pas à l'engagement de l'associé dans la mise en oeuvre d'un projet autonome et durable, qui constitue l'affectio societatis y compris dans les sociétés à associé unique. – Réalité de l'apport de la société EHP à la société SAI : la société Electrolux fait valoir qu'après avoir constitué la société SAI en lui fournissant tous les attributs de la personnalité morale, elle a apporté à la nouvelle société une branche d'activité lui permettant de fonctionner et de se développer en toute autonomie. Elle réfute l'allégation selon laquelle le traité d'apport conclu le 19 juin 2014 ne correspondrait pas à un apport réel. Une branche d'activité est définie comme un ensemble d'éléments d'actif et de passif qui constitue une exploitation autonome, identifiable au sein de l'ensemble de l'activité de l'entreprise et susceptible de fonctionner par ses propres moyens. Contrairement à un simple apport d'éléments d'actif, l'apport d'une branche d'activité autonome, caractéristique d'une scission de l'activité de la société apporteuse au sens des articles L. 236-1 et suivants du code de commerce, emporte transmission universelle de patrimoine et donc transmission du passif afférent aux éléments d'actifs. En l'espèce, même si la cour ne dispose pas des éléments comptables relatifs à l'activité globale de la société EHP, il ne fait pas de doute que constituée de deux établissements, l'un commercial, l'autre industriel, la société EHP dispose de deux branches d'activité distinctes correspondant à l'un et l'autre de ses établissements respectivement. Pour autant, il convient d'analyser si le contrat intitulé « traité d'apport partiel d'actifs » conclu entre EHP et SAI le 9 juin 2014 correspond à la transmission d'une branche autonome d'activité. Par cet accord, EHP a transmis à SAI à titre d'actif des immobilisations corporelles (terrains et constructions) et financières et des stocks et encours pour un montant total de 20.490.607 € et, à titre de passif des provisions pour risques (départs en retraite et médailles du travail), et des dettes d'exploitation (dettes fournisseurs et dettes fiscales et sociales) et diverses autres dettes dont un billet à ordre long terme de 1,5 millions d'€, pour un montant total de 20.490.606 €, soit une valeur nette retenue de 1 € (pièce 8 de l'appelante). Il convient de relever que le commissaire aux apports a retenu pour postulat que le traité d'apport partiel d'actifs portait sur l'ensemble des droits et obligations relatif à l'exploitation de la branche complète et autonome d'activité de production sur le site de Revin, sans relever que le transfert de l'outil de production était expressément exclu de l'apport ; indépendamment des modalités d'évaluation des divers éléments inclus dans le traité d'apport et qui seront examinées ci-après, il a conclu que les apports ne sont pas surévalués « compte tenu des engagements donnés par EHP pour : - le financement de nouvelles activités, - la prise en charge des coûts de restructuration sociale, et – la garantie en matière d'environnement ». Ces seuls éléments mettent en évidence, d'une part, qu'un élément d'actif aussi essentiel à l'activité de production que l'outil de production lui-même qui ne peut certainement pas être rattaché à la branche commerciale de l'activité de EHP est dissocié de ce que EHP présente comme une branche d'activité autonome, d'autre part que le contenu de l'apport a été défini en fonction du projet de création d'une nouvelle activité industrielle (nécessairement extérieure à la branche d'activité alléguée) que le groupe Electrolux s'engageait par ailleurs à soutenir. Ils établissent l'absence d'autonomie des éléments apportés par EHP à SAI, au sein de l'activité globale de EHP. Le 27 juin 2014, l'administration fiscale, sollicitée par EHP notamment sur ce point, a informé l'apporteur qu'en l'absence d'apport de la ligne de production des machines à laver, il ne pouvait être considéré que le traité avait pour objet la cession d'une branche complète d'activité (pièce 18 de l'appelante). S'il n'est pas contestable qu'une entité économique autonome puisse être transmise sans transfert de la propriété de l'outil de production, force est de constater qu'en l'espèce, la mise à disposition de SAI de la ligne d'assemblage de machines à laver était très provisoire, prolongée de mars à décembre 2016 à la seule discrétion de EHP et que ce caractère très temporaire conjugué à l'arrêt progressif des commandes de machines à laver de la part d'Electrolux Appliances AB faisaient échec, ab initio, à la notion de transfert de branche d'activité. Dans ces circonstances, la transmission à SAI d'un passif de 20.000.000 € environ n'est pas justifiée par l'apport d'éléments d'actif pour un montant quasi équivalent. Au surplus, la valorisation même des éléments d'actif et de passif inclus dans le traité d'apport partiel d'actif est sujette à questionnement. En effet, il ne ressort pas des travaux du commissaire aux apports que le « détourage » du bilan à partir duquel la société EHP a inclus dans le traité d'apport des éléments d'actif et de passif, ait fait l'objet d'une analyse critique de sorte que l'affectation de ces éléments à l'activité du site de Revin résulte d'une décision unilatérale de la société EHP à une époque où elle avait un contrôle complet de sa société fille ; à cet égard, la production du listing des comptes clients apportés à SAI ne lève pas les interrogations du mandataire judiciaire qui souligne que la somme correspondante de 17.000.000 € environ ne se retrouve pas dans les comptes de SAI. Par ailleurs, s'il rappelle que les éléments apportés doivent être évalués à leur valeur vénale dès lors que la bénéficiaire doit passer sous le contrôle d'un tiers, le commissaire aux apports retient les seules valeurs comptables sans justification, ni analyse. En outre, alors que le diagnostic qualité des sols et des eaux souterraines réalisé au mois de mars 2014, en révélant la présence de métaux lourds et d'hydrocarbures au-delà des seuils hauts des anomalies naturelles, démontre le principe d'un passif environnemental nécessairement transmis à SAI par l'apport des actifs immobiliers et par le transfert de l'autorisation d'exploiter, le commissaire aux apports a certes admis que ce passif affectait l'évaluation des actifs apportés, mais a validé l'évaluation de l'apport net à 1 € sans le moindre élément d'appréciation sur le montant prévisible de ce passif environnemental. Mais plus encore, le commissaire aux apports a cru pouvoir appuyer son avis sur le « financement (par EHP) de nouvelles activités » alors que le financement des deux lignes de production de moteurs qui consiste en un engagement hors bilan, n'a donné lieu trois mois après son rapport qu'à une promesse synallagmatique de vente prévoyant que SAI serait débitrice de EHP à hauteur du coût de fabrication de ces deux lignes de production, soit 15,2 millions d'€, EHP s'engageant à céder cette créance à Selni pour 1 €, ce dont il ressort que ce financement ne profite qu'indirectement à la société SAI. Enfin, il est constant que le traité d'apport omet la transmission de droit à SAI du passif social résultant, après transfert des contrats de travail des salariés de EHP à SAI, des accords collectifs conclus les 6 juin, 1er octobre et 27 octobre 2014 et pourtant certain dans son principe à tout le moins à la date de l'apport. Si sur ce point, la société EHP reproche au mandataire judiciaire de SAI de ne pas prendre en considération la convention de garantie signée le 19 juin 2014 par laquelle EHP s'est engagée à payer entre les mains des préretraités et autres salariés non couverts par le contrat d'assurance de préretraite et appelés à quitter la société SAI jusqu'au mois d'avril 2016, les indemnités résultant de l'accord collectif conclu par SAI au mois d'octobre 2014, cette convention conclue au seul bénéfice des salariés concernés laisse ce passif social à la charge de SAI ; c'est ainsi que EHP a déclaré au passif de la procédure collective de SAI une créance correspondant aux sommes versées de ce chef, soit une créance échue de 921.000 € et une créance à échoir de 12.000.000 €. Si la société EHP fait justement valoir que l'ensemble des contrats et engagements conclus par les sociétés du groupe Electrolux sont indivisibles du traité d'apport, force est de constater que les contrats commerciaux conclus entre SAI et la société Electrolux Appliances AB comme l'engagement de EHP de financer la fabrication de deux nouvelles lignes de production n'améliorent pas le bilan de SAI. Dans ces circonstances, le fait que SAI ait pu réaliser deux exercices bénéficiaires tient principalement aux accords commerciaux hors traité d'apport, à telle enseigne que c'est l'arrêt des commandes de moteurs universels par Electrolux Appliances AB au cours de l'année 2017 (quelle qu'en soit la cause) qui a précipité SAI dans les difficultés, celle-ci ne disposant pas des moyens de fonctionner par elle-même. Sans qu'il soit besoin de discuter plus avant les moyens de fait avancés par les parties, il s'induit de l'ensemble de ces éléments que l'apport réalisé par EHP à SAI a été déficitaire pour la seconde en ce qu'elle a consisté en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis. Il ne saurait être tiré aucune conclusion de l'absence d'opposition au traité d'apport, si ce n'est la confiance des créanciers dans la présentation par EHP du projet de reconversion industrielle et dans les engagements pris par le groupe Electrolux. – EHP, maître de l'affaire : le maître de l'affaire est l'entité qui, indépendamment de structures juridiques mises en place, dispose de la totale maîtrise de l'activité contrôlée et prive celle-ci de tout pouvoir décisionnel réel. La notion de maître de l'affaire est distincte, par nature, de celle de gérance de fait et du lien de dépendance économique qui peut lier une société fille à la société mère. En l'espèce, il est constant que du mois de novembre 2013, date de sa créance par EHP et le mois de juin 2014, SAI n'a eu d'autre activité sociale que les démarches administratives destinées à permettre le transfert de l'activité industrielle convenue entre EHP et Selni.
Dirigée par le président de EHP, entièrement détenue par EHP et dépourvue de tout moyen matériel, SAI n'est pas partie au protocole conclu le 30 avril 2014 qui définit pourtant les conditions dans lesquelles elle va devoir opérer, qu'il s'agisse de la mise à disposition des outils de production par EHP ou de la commercialisation de sa production à venir à Electrolux Appliances AB. Au mois de mars 2014, SAI a déposé devant le président du tribunal de commerce de Compiègne une requête aux fins de désignation d'un mandataire ad hoc au visa de l'article L. 611-3 du code de commerce à laquelle il a été fait droit le 21 mars 2014, le mandataire ad hoc recevant pour mission de « - réaliser un diagnostic de la situation économique, financière et commerciale des difficultés et des solutions pour assurer la reconversion pérenne de l'activité de production du site de Revin qui sera apportée à la société Ardennaise Industrielle, - assister la requérante dans le cadre de ces négociations avec les parties intéressées ». Or, il est manifeste qu'à cette époque SAI, dépourvue de la moindre activité et de la moindre autonomie de décision en ce qu'elle était totalement contrôlée par EHP, n'était assurément pas débitrice au sens de l'article L. 611-3 et qu'elle n'était pas en situation de rencontrer la moindre difficulté au sens du même texte. De fait, ainsi qu'il vient d'être dit, SAI ne participait pas aux négociations en cours entre EHP et Selni. Il s'induit que, sous couvert de son président, ès qualités de président de SAI, c'est en réalité EHP qui a pris l'initiative de cette requête et, de fait, c'est EHP qui pouvait nourrir quelques interrogations sur les données économiques, financières et commerciales d'un projet commun avec Selni. Dans le même temps, le cabinet KPMG ne s'est d'ailleurs pas trompé sur l'identité du véritable maître de l'opération puisque tout en adressant un rapport à M. de Noinville en sa qualité de président de SAI (par ailleurs président de EHP), il indique « Notre intervention a été diligentée par Electrolux Home Products France qui nous a interrogée sur la pérennité de l'activité du site de Revin au vu des prévisions établies par les parties et des engagements en cours de négociation » (pièce 4 de l'appelante p. 5). A cet égard, il est significatif de relever que le cabinet KPMG a rédigé un rapport qui consiste à présenter les options stratégiques ouvertes à la société EHP relativement à la production de machines à laver à chargement par le haut, la situation de la société Selni et les forces/faiblesses, risques/opportunité du projet de partenariat EHP/Selni. A nouveau sollicité par le mandataire ad hoc, le cabinet KPMG mentionne dans un second rapport que les données sur lesquelles il a travaillé relèvent de la seule responsabilité de EHP et de Selni confirmant l'inexistence en fait de la société SAI à cette époque (pièce 5 de l'appelante, p. 1). De même, au mois d'août 2014, SAI dont le capital avait déjà été cédé par EHP à Selni sous diverses conditions suspensives et qui était encore dirigée par le président de EHP a déposé une requête aux fins de désignation d'un conciliateur de justice, à laquelle il a été fait droit le 29 août 2014 par une ordonnance confiant au conciliateur la mission « d'assister la requérante dans le cadre de la finalisation de l'opération de cession de son capital au repreneur ». Il est patent qu'à cette époque où SAI n'avait aucune activité autonome (les salariés ne lui seront transférés qu'au 1er novembre rétroactivement) et se trouvait de fait sous la direction de EHP, seule cette dernière, cédante du capital de SAI, se trouvait dans une situation de « finalisation de l'opération de cession » et pouvait avoir intérêt à éclaircir les intentions et aptitudes réelles de son cocontractant. La suppression du lien capitalistique entre EHP et SAI n'a donc pas affecté, en fait, le comportement de EHP comme maître de l'affaire. Il est enfin significatif de noter que si le jugement rendu le 30 octobre 2014 portant homologation du protocole de conciliation conclu entre EHP, SAI et Selni le 3 octobre, a été rendu sur la requête de SAI, la rectification d'une omission de statuer, sollicitée aussi en apparence par SAI, consiste à faire ajouter que le billet à ordre long terme émis par SAI à l'ordre de EHP bénéficiera du privilège de l'article L. 611-11 du code de commerce, soit une disposition rendue dans le seul intérêt de EHP. Il apparaît donc qu'au cours de l'année 2014, c'est EHP qui a en réalité agi en justice, à trois reprises, sous couvert de la société SAI et dans son propre intérêt (pièces 3, 10, 14). Les deux premières années d'activité de la société SAI ont été consacrées à la reprise à l'identique de l'activité menée par EHP sur le site de Revin, sous la réserve d'une réduction importante d'effectifs. Après avoir cédé le capital de SAI à la société Selni, la société EHP a poursuivi sa gestion administrative de l'entreprise via un contrat de transition de services aux termes duquel EHP maintenait ses outils de gestion au sein de la société SAI et assurait les tâches de comptabilité, d'administration, de paie et d'informatique moyennant le prix de 17.450 € par mois. Ces modalités qui favorisent et confirment la parfaite continuité de l'activité de SAI par rapport à l'activité précédente de EHP permettait en outre à cette dernière de conserver une connaissance quotidienne de l'activité de SAI (pièce 27 de l'appelante). Au-delà des actions précitées, mises en oeuvre par EHP et faisant fi de la personnalité morale de SAI, c'est la conception globale de l'opération qui caractérise la volonté de EHP de demeurer le maître de l'affaire. En effet, l'opération menée consistant principalement à maintenir très provisoirement sur le site de Revin l'activité d'assemblage des machines à lever à la faveur d'une réduction des effectifs, d'un prêt à long terme de 1,5 millions d'€ et d'un engagement commercial d'Electrolux Appliances AB d'acquérir ces machines et à financer la fabrication et l'installation de deux nouvelles lignes de production, l'une relative à des moteurs universels, l'autre relative à des petits moteurs BLDC présentés comme innovants par Selni, à la faveur d'un engagement commercial d'Electrolux Appliances AB portant sur l'acquisition de 1,2 moteurs universels par an pendant 5 ans, il ressort des pièces du dossier que : - EHP a conservé la propriété et la maîtrise de la ligne d'assemblage des machines à laver qu'elle a mise à disposition de SAI dans un premier temps jusqu'au mois de mars 2016 puis jusqu'à la fin de l'année 2016 avant de la récupérer pour la transférer dans son établissement polonais, conformément au projet initial de délocalisation, cet outil industriel étant déterminant de l'activité de SAI, - les sociétés du groupe Electrolux ont défini les modalités de l'arrêt progressif de l'assemblage des machines à laver en termes de délais et de quantités, un contrat de fourniture signé le 31 octobre 2014 déterminant les seuls débouchés commerciaux possibles pour SAI dans ce contexte, - s'engageant à financer la fabrication des deux lignes de production appelées à permettre le maintien d'une activité industrielle sur le site de Revin, EHP qui a unilatéralement choisi le fabricant a conservé la totale maîtrise de l'outil de production nécessaire à l'activité de SAI, - s'il ne prévoit pas l'exclusivité, le contrat d'achat de produits finis conclu entre SAI et Electrolux Appliances AB le 31 octobre 2014 prévoit la vente d'une quantité de moteurs universels équivalente à la capacité totale de production envisagée sur une période de 5 ans. Il ressort de façon manifeste et explicite de l'ensemble des protocoles et contrats versés aux débats que la création de SAI et la reconversion de son activité s'inscrivent dans une opération globale convenue par le groupe Electrolux et la société Selni, au sein de laquelle la cession du capital de SAI, les apports faits par EHP, les engagements sociaux pris par EHP et les accords industriels et commerciaux pris par telle société du groupe Electrolux sont liés et interdépendants. Dans ce contexte, l'ensemble des autorités et intervenants extérieurs a souligné de façon particulière claire que l'activité de SAI et sa pérennité étaient directement dépendantes des engagements financiers, sociaux, industriels et commerciaux pris par les sociétés du groupe Electrolux : - le commissaire aux apports conclut le 31 juillet 2014 que les apports ne sont pas surévalués, s'il est tenu compte « des engagements donnés par EHP pour le financement des nouvelles activités, la prise en charge des coûts de restructuration sociale et la garantie en matière d'environnement », - le rapport du cabinet Secafi présenté au comité central d'entreprise de EHP le 15 juillet 2014 souligne l'importance des engagements industriels et commerciaux pris par le groupe pour permettre le maintien d'une activité industrielle à Revin, - le rapport KPMG relève que « afin de sécuriser le business plan » le groupe Electrolux s'est engagé sur les volumes et marges unitaires sur la production des machines à laver, sur la fourniture de prestations de supports techniques pendant la période transitoire, sur les volumes et marges unitaires sur le contrat de moteurs universels pour une période de 7 ans, sur la couverture d'éventuels surcoûts liés à la structure pendant la période transitoire, sur la couverture des coûts sociaux liés à la reconversion, sur la prise en charge des investissements industriels, - le rapport de Me Lessertois, conciliateur en date du 23 octobre 2014 mentionne que « il n'en reste pas moins que la reconversion industrielle du site de Revin constitue un projet ambitieux qui nécessite une surface économique et financière importante ; ce constat a amené le groupe Electrolux à prévoir un grand nombre d'apports, de garanties et d'engagements pour répondre aux besoins identifiés et contribuer à la mise en oeuvre et à la réussite de cette opération ». S'il ne peut être reproché aux sociétés du groupe Electrolux d'avoir conservé la main sur tous les aspects industriels et commerciaux au regard des sommes engagées, il ressort néanmoins de ces éléments que SAI ne disposait d'aucune marge d'autonomie économique dans la gestion de son activité entièrement contrôlée en amont comme en aval par le groupe Electrolux. Si la société EHP fait valoir à juste titre qu'elle n'est pas partie à certains des contrats nécessaires à l'activité de SAI qui ont été conclus par la Electrolux Appliances AB, il ressort suffisamment des pièces du dossier que le projet mis en oeuvre par EHP à travers la création de SAI puis le traité d'apport partiel d'actif et la cession du capital à Selni, s'inscrit dans une démarche concertée au sein du groupe Electrolux, à telle enseigne par exemple que la société Electrolux France SA est mentionnée comme partie au contrat de cession des actions de SAI entre EHP et Selni. Selon les termes du contrat de cession d'actions, EHP s'est en outre expressément engagée pour le compte de ses sociétés affiliées et à remettre au cessionnaire les contrats attendus de la Electrolux Appliances AB relativement à la convention de fourniture de machines à laver et au contrat cadre portant sur la fabrication des moteurs universels, de sorte que ces contrats sont directement opposables à EHP (pièce 11 de l'appelante). En outre, il ressort suffisamment du 31 sur 77 rapport KPMG que la société Selni qui se trouvait en cours d'exécution d'un plan de redressement au moment des négociations avec EHP, grâce notamment à l'utilisation de fonds publics ou parapublics, n'était pas en capacité de proposer un autre concours qu'un projet de développement et de commercialisation à terme d'un petit moteur BLDC présenté comme innovant ; la société Selni, au-delà de l'entregent manifeste de ses dirigeants, n'était donc pas en capacité de prendre la direction effective du projet industriel confié à SAI ainsi que le mentionne EHP elle-même dans un courrier adressé à l'administration fiscale au mois de mai 2014 (pièce 17 de l'appelante). Si elle a incontestablement permis d'éviter un risque de destruction à court terme d'emplois industriels sur le site de Revin lié à la décision du groupe Electrolux d'arrêter la fabrication en France des machines à laver à chargement par le dessus, la constitution de la société SAI dans le cadre du projet ici examiné, a permis, de fait, à EHP d'opérer cette délocalisation entre transférant sur SAI les contraintes environnementales auxquelles elle aurait dû faire face si le site avait été purement et simplement fermé. Par ailleurs, ainsi qu'il ressort des échanges de courriers entre l'administration fiscale et la société EHP aux mois de mai et juin 2014 : - le passif social supporté par EHP aux termes du traité d'apport partiel d'actifs correspondant à des frais de restructuration bénéficiait de l'exception au principe de non-déductibilité (article 39 5° al. 33 du code général des impôts), - l'investissement de 15.000.000 € dans les lignes de production de moteurs destinés à SAI et devant donner lieu à une cession à Selni pour 1 €, a été admis comme pouvant donner lieu à une déduction fiscale au profit de EHP ; l'administration fiscale a en effet retenu les explications de EHP selon lesquelles la perte consistant à l'abandon promis de cet outil industriel pour 1 € au profit d'un tiers, avait une contrepartie commerciale pour EHP en ce qu'évitant un mouvement social d'envergure et un blocage prévisible du site de production, cet investissement a évité un impact sur le volume des ventes en France et des coûts marketing et de communication nécessaires à la restauration de l'image de la marque auprès du grand public, cette contrepartie étant évaluée à 16.000.000 € par EHP (pièce 18 de l'appelante) ; cet investissement était donc consenti aussi dans l'intérêt direct de EHP et non pas dans le seul objectif de maintenir l'emploi sur le site de Revin. Enfin, il est manifeste que la définition par EHP des spécificités de l'outil industriel ainsi financé en fonction du cahier des charges de la société Electrolux Appliances AB et la signature d'un contrat de fourniture sur 5 ans aux prix et conditions préétablis par celle-ci avec la société SAI créée en France fournissaient au groupe Electrolux un avantage commercial non négligeable au regard du caractère stratégique du marché français (cf. rapport Secafi, pièce 24 de l'intimée). Il s'induit de l'ensemble de ces éléments de fait qu'en créant la société SAI dans le cadre du projet ici analysé, la société EHP a agi comme maître de l'affaire au mieux de ses intérêts propres, indépendamment de la convergence de ce projet avec les orientations des pouvoirs publics. – Eléments de fraude : si la notion de fraude peut recouvrer diverses réalités, constitue notamment une fraude le fait se prévaloir de faits dont le caractère inexact est avéré, de détourner des moyens juridiques ou de dissimuler l'objectif véritable d'une entreprise. Au contraire, la fraude n'implique pas nécessairement le secret. En l'espèce, s'il peut être entendu que l'intervention de l'autorité politique a incité le groupe Electrolux à examiner les possibilités de trouver un repreneur pour le site industriel de Revin, il doit néanmoins être relevé d'une part, que la décision du groupe Electrolux d'arrêter la production de machines à laver à Revin est antérieure aux échanges tenus avec l'autorité publique, d'autre part que, s'il peut prendre en compte des circonstances ou opportunités conjoncturelles, un groupe industriel et commercial tel qu'Electrolux prend légitimement ses décisions stratégiques dans le seul intérêt de ses composants. Par ailleurs, les avis émis par les différents autorités et organes institutionnels,
administratifs et politiques sur les démarches entreprises par le groupe Electrolux ne peuvent être invoqués utilement au-delà de leur objet spécifique respectif, tels s'agissant de l'autorité préfectorale, de la possibilité de changer d'exploitant du site industriel puis de modifier l'activité industrielle au regard des règles environnementales, tels s'agissant de l'autorité politique, de la sauvegarde à court terme d'emplois industriels, tels enfin s'agissant des institutions représentatives des salariés d'EHP, de la protection des droits collectifs des salariés ; ces avis ne sont pas de nature à exclure une fraude dans la constitution fictive d'une société ; les éléments versés aux débats montrent d'ailleurs que la construction du projet présenté par EHP a suscité des interrogations au regard de la pérennité de l'activité de SAI, voire des actions judiciaires alors même que les conditions du plan de sauvegarde de l'emploi élaboré par EHP étaient reconnues comme individuellement très favorables (pièces 24 et 36 de l'intimée, 10 de l'appelante). Il ressort des éléments versés aux débats que EHP a présenté son projet à l'ensemble des autorités sollicitées comme le transfert d'une branche d'activité autorisant ainsi le transfert d'un passif alors que l'objet de l'apport réalisé à SAI ne pouvait être qualifié comme tel, ainsi qu'il est développé ci-dessus, EHP étant informée à tout le moins depuis le 3 juin 2014, soit avant la signature du traité d'apport partiel d'actifs et du contrat de cession des actions de SAI, que cette présentation était erronée (pièce 18 de l'appelante). Cette présentation était manifestement trompeuse en ce qu'elle laissait croire à une certaine autonomie industrielle et commerciale de SAI et, loin de la corriger, EHP l'a maintenue dans tous les actes de mise en oeuvre de son projet tant auprès des autorités publiques qu'envers les salariés. La société EHP fait valoir que la création de SAI ne saurait être frauduleuse en ce qu'elle a été « avalisée » par la justice et elle renvoie au jugement rendu le 30 octobre 2014 qui, statuant sur requête de la société SAI, a homologué l'accord de conciliation conclu le 3 octobre 2014 entre EHP, SAI et Selni. Il est constant que l'homologation d'un protocole de conciliation selon les modalités de l'article L. 611-9 du code de commerce, n'a d'effet qu'entre les signataires du protocole et dans la seule limite des créances qui y sont mentionnées. La société EHP admet dans ses écritures (page 50) avoir été à l'initiative de la désignation d'un mandataire ad hoc puis d'un conciliateur, confirmant ainsi le caractère frauduleux de la demande présentée au nom de SAI. En outre, la lecture des articles L. 611-3 s'agissant de la désignation d'un mandataire ad hoc et de l'article L. 611-7 s'agissant de celle d'un conciliateur, éclairée par la dernière production de pièces de l'appelante, met en évidence qu'une requête aux fins de désignation judiciaire d'un montant ad hoc ou d'un conciliateur suppose l'existence d'un débiteur et de créanciers et celle de difficultés rencontrées par l'entreprise du débiteur. S'il entre dans la mission de l'autorité judiciaire de favoriser la prévention des difficultés des entreprises, il ne lui appartient pas « d'avaliser » les projets industriels et commerciaux élaborés par des acteurs économiques. A la date de dépôt de ces deux requêtes, la société EHP qui était simplement en négociation avec un possible partenaire pour élaborer un projet industriel, ne pouvait avancer aucune difficulté en relation avec une ou des dettes identifiables. La référence par EHP à l'alinéa 2 d l'article L. 611-7 est particulièrement malvenue dès lors que la mission de conciliation sollicitée ne tendait pas à la sauvegarde de l'entreprise mais consistait à une assistance dans la mise en oeuvre de la décision stratégique d'une entreprise parfaitement saine. Ces initiatives procédurales constituent dans leur formulation comme sur le fond un détournement d'action judiciaire, EHP disposant de tous moyens techniques, notamment du concours du cabinet KPMG qu'elle avait déjà sollicité par ellemême, pour s'assurer du sérieux du partenariat qu'elle envisageait avec Selni. Le fait que EHP se prévale, dans le cadre de la présente instance, d'un « aval » judiciaire corrobore cette analyse. Il et patent que – en fait – l'interruption des commandes de moteurs universels émanant de la Electrolux Appliances AB qui a précipité SAI dans les difficultés quelques mois à peine après l'arrêt de l'assemblage des machines à laver. La société EHP impute la responsabilité de cette situation à la société Selni dont elle dénonce en substance l'absence d'implication véritable dans le projet, un désintérêt pour l'avenir de la SAI, sa société fille et une incompétence dans l'élaboration du projet industriel confié à celle-ci. Dans le cadre du présent débat, il n'appartient pas à la cour d'apprécier les responsabilités dans la rupture du partenariat entre le groupe Electrolux et la société Selni. Pour autant, il faut relever que, dès l'origine du projet, les techniciens appelés à émettre un avis ont souligné non seulement l'extrême fragilité de la société Selni mais aussi le caractère très déséquilibré des engagements de EHP et de Selni respectivement, qui n'étaient sans doute pas de nature à mobiliser une attention constructive de la part de Selni pour autant que la pérennité de celle-ci soit admise (cf. rapports KPMG, rapport Secafi). Il convient de rappeler que dès la lettre d'intention du mois de septembre 2013, EHP prévoyait de vérifier la pertinence du business plan proposé par Selni. Dans ce contexte, EHP et plus généralement le groupe Electrolux ont délibérément privilégié les engagements hors traité d'apport à SAI qui les assuraient de conserver la maîtrise économique totale du projet dans leur intérêt propre, même en cas de défaillance du partenaire Selni dont en l'occurrence ne pouvait être écartée, plutôt que de doter d'emblée la société SAI des moyens de prospérer par elle-même dans cette reconversion industrielle. Or, il est patent qu'EHP a très largement mis en avant ses engagements hors traité d'apport au motif d'une volonté de maintenir l'emploi industriel sur le site de Revin, pour obtenir une adhésion générale au projet, occultant l'impossibilité pour SAI de mener seule au sein du groupe Selni le projet de reconversion industrielle (pièces 6, 11, 13, 15, 17, 26 de l'appelante). La rupture du partenariat Electrolux Selni apparait ainsi comme un risque connu ab initio et assumé par EHP à la faveur de l'articulation opérée entre la constitution de SAI et les contrats mis en oeuvre par ailleurs. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la société SAI créée par EHP qui est délibérément demeurée le maître de l'affaire est une société fictive. Il convient, partant, d'étendre à la société Electrolux Home Products France la procédure de redressement judiciaire ouverte le 8 janvier 2018 à l'encontre de la société Ardennaise Industrielle » ;
alors 1°/ qu'un jugement adoptant un plan de cession partielle des actifs d'un débiteur fait obstacle à l'extension à un tiers pour confusion des patrimoines, de la procédure collective de ce débiteur ; que cette règle s'applique également en cas d'extension pour fictivité ; qu'en étendant à la société EHP la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société SAI quand il était constant, acquis au débat et non discuté que par jugement du 16 mai 2018, le tribunal de commerce de Compiègne avait adopté un plan de cession partielle de la société SAI à la société Delta Dore, la cour d'appel a violé les articles L. 621-2 et L. 631-22 du code de commerce ;
alors 2°/ qu'une société est fictive si les personnes qui se présentent comme ses associés et dirigeants ne sont que des prête-noms ou les comparses du véritable maître de l'affaire et sont dépourvues d'indépendance et de toute autonomie ; que pour étendre à la société EHP la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'encontre de la société SAI sur le fondement de la fictivité de la société SAI, la cour d'appel a considéré que la société EHP aurait été maître de l'affaire ; qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que la société EHP avait, par acte du 19 juin 2014, cédé les actions de la société SAI à la société Selni, sans établir que la société Selni aurait été elle-même fictive et/ou prête-nom ou comparse de la société EHP, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
alors 3°/ qu'une société est fictive si elle est dépourvue de toute autonomie décisionnelle à l'égard du maître de l'affaire qui la contrôle et la dirige, soit personnellement, soit par l'intermédiaire de comparses ; qu'en estimant que la société EHP aurait été maître de l'affaire sans considération pour la circonstance que les dirigeants de la société SAI étaient les dirigeants de la société Selni et géraient la société SAI en toute indépendance et autonomie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
alors 4°/ qu'en considérant qu' après avoir cédé le capital de la société SAI à la société Selni, la société EHP aurait poursuivi sa gestion administrative de l'entreprise via un contrat de transition de services aux termes duquel EHP aurait maintenu ses outils de gestion au sein de la société SAI et aurait assuré les tâches de comptabilité, administration, de paie et d'informatique et que ces modalités auraient favorisé et confirmé la continuité de l'activité de la société SAI par rapport à l'activité précédente de la société EHP et auraient permis à l'exposante de conserver une connaissance quotidienne de l'activité de la société SAI, sans répondre aux conclusions de l'exposante qui faisaient valoir que le contrat de transition de services aux termes duquel la société EHP s'était engagée à fournir certains services administratif à la société SAI était purement temporaire puisqu'il devait prendre fin au 31 mars 2015 et avait pour finalité d'assurer une bonne transition de l'activité du site de Revin, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
alors 5°/ qu'il n'est pas permis au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que selon la pièce 17 de l'exposante, courrier adressé à l'administration fiscale, la société EHP faisait état de ce que la société Selni était une « entreprise ayant un projet d'activité industrielle à long terme actuellement en phase de développement » et qu'elle était « spécialisée dans la conception, la fabrication et la distribution de moteurs électriques, pour l'industrie des gros appareils ménagers, et particulièrement les machines à laver, basée à Nevers (...) » ; qu'en considérant que la société EHP aurait mentionné dans ce courrier que la société Selni n'était pas en capacité de prendre la direction effective du projet industriel confié à la société SAI, la cour d'appel a dénaturé cette pièce, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
alors, 6°/ que la constatation d'une fraude est subordonnée à la caractérisation d'une intention frauduleuse ; qu'en déduisant l'existence d'une fraude commise par la société EHP de ce que la société EHP aurait à tort présenté le projet litigieux comme le transfert d'une branche d'activité, que les initiatives procédurales de la société EHP constitueraient des détournements d'actions judiciaires car fondées sur des textes qui n'auraient pas été applicables, que la fragilité de la société Selni et le caractère déséquilibré des engagements des sociétés EHP et Selni auraient justifié l'absence d'intervention constructive de la société Selni et que la société EHP avait privilégié des engagements hors traité d'apports, motifs impropres à caractériser une intention frauduleuse de la part de la société EHP, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
alors, subsidiairement, 7°/ que l'existence ou l'absence d'affectio societatis ne peut s'apprécier que dans la personne des associés ; qu'en retenant, pour considérer que la société SAI serait une société fictive et étendre la procédure collective de la société SAI à la société EHP, que la constitution d'une société nouvelle par EHP n'aurait pas correspondu à l'engagement de l'associé dans la mise en oeuvre d'un projet autonome et durable qui constitue l'affectio societatis y compris dans les sociétés à associé unique, après avoir constaté que la société EHP avait cédé les actions de la société SAI à la société Selni, par acte du 19 juin 2014, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 621-1 alinéa 2 du code de commerce et 1832 du code civil ;
alors subsidiairement, 8°/ que l'associé d'une société unipersonnelle n'est pas dépourvu d'affectio societatis du seul fait qu'il a créé celle-ci dans le seul but de transférer les biens qui lui auront été apportés à un tiers ; qu'en retenant que la constitution d'une société nouvelle par EHP n'aurait pas correspondu à l'engagement de l'associé dans la mise en oeuvre d'un projet autonome et durable qui constitue l'affectio societatis y compris dans les sociétés à associé unique, la cour d'appel a violé l'article 1832 du code civil ;
alors, subsidiairement, 9°/ que le capital social est constitué des apports en société ; qu'en considérant que l'apport à la société SAI n'aurait pas été réel, après avoir constaté que le capital social de la société SAI avait été entièrement et immédiatement libéré le jour de sa constitution, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 621-2 du code de commerce et 1832 du code civil ;
alors, subsidiairement, 10°/ qu'il n'est pas permis au juge de dénaturer les conclusions des parties ; que la société EHP faisait valoir qu' « il n'est pas (
) requis que l'apport porte sur une « branche complète et autonome d'activité », qu' « il est parfaitement possible de soumettre un apport partiel d'actifs ne portant pas sur une branche d'activité au régime des scissions », que « les développements du mandataire judiciaire sur la prétendue absence de transmission d'une branche d'activité n'ont (
) aucune pertinence » et que « le fait que les actifs apportés ne pourraient pas être considérés comme participant d'une « branche d'activité » » ne présentait « aucun intérêt » ; qu'en considérant que la société Electrolux aurait fait valoir qu'elle avait apporté une branche d'activité à la société SAI et qu'il aurait convenu d'analyser si le contrat intitulé « traité d'apport partiel d'actif » conclu le 9 juin 2014 correspondait à la transmission d'une branche autonome d'activité, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposante, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
alors, subsidiairement, 11°/ qu'en retenant que les biens apportés par la société EHP à la SAI ne constituaient pas une branche d'activité pour en déduire que l'apport réalisé par la société EHP à la société SAI aurait consisté en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 621-2 du code de commerce et 1832 du code civil ;
alors, subsidiairement, 12°/ qu'en considérant que la valorisation même des éléments d'actif et de passif inclus dans le traité d'apport partiel d'actif est « sujette à questionnement », la cour d'appel s'est prononcée par un motif dubitatif, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-2 du code de commerce ;
alors, subsidiairement, 13°/ qu'il n'est pas permis aux juges, lorsque les termes des conventions sont clairs et précis, de dénaturer les obligations qui en résultent et de modifier les stipulations qu'elles renferment ; que la convention de garantie du 19 juin 2014 stipulait expressément « le promettant s'engage à la demande du stipulant à verser directement dans les mains de chaque salarié les indemnités garanties applicables à ce salarié et payables au salarié en application de l'accord collectif » et « directement aux tiers concernés (...) les sommes correspondant aux mesures d'accompagnement bénéficiant à chaque salarié en application de l'accord collectif », « le promettant s'engage à la demande du stipulant à verser directement dans les mains des organismes sociaux les cotisations afférentes aux sommes visées » et que cette convention resterait « en vigueur jusqu'au paiement par le promettant de toutes les indemnités garanties et cotisations dues en vertu de l'accord collectif » ; qu'en considérant, pour retenir que l'apport réalisé par EHP à SAI aurait consisté en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis, que la convention de garantie du 19 juin 2014 aurait laissé le passif social à la charge de la société SAI, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en violation de l'article 1192 du code civil ;
alors, subsidiairement, 14°/ qu'en considérant, pour retenir que l'apport réalisé par EHP à SAI aurait consisté en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis, que la convention de garantie aurait laissé le passif social à la charge de la société SAI puisque la société EHP avait déclaré une créance de 921.00 euros et une créance de 12 millions d'euros au passif de la procédure collective de la société SAI, sans répondre au moyen tiré de ce que ces créances correspondaient, non pas au passif social de la société SAI mais, pour la première, à une répétition de l'indu et, pour la seconde, à la réparation d'un préjudice résultant des fautes des dirigeants de la société SAI, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
alors, subsidiairement, 15°/ qu'en considérant qu'un passif environnemental aurait affecté l'évaluation des actifs apportés, pour retenir que l'apport réalisé par la société EHP à la société SAI aurait consisté en un transfert de passif non justifié et supérieur à l'actif transmis, sans répondre au moyen tiré de ce que ce passif environnemental n'était, au mieux, qu'éventuel, de sorte qu'il n'avait pas à être pris en compte dans l'évaluation de l'apport de la société EHP à la société SAI, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.