La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/02/2020 | FRANCE | N°18-26762

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 27 février 2020, 18-26762


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 février 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 253 F-D

Pourvoi n° M 18-26.762

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 FÉVRIER 2020

La société MDC exploitation, société par actions simplifiée, don

t le siège est [...] , a formé le pourvoi n° M 18-26.762 contre l'ordonnance rendue le 13 décembre 2018 par le premier président de la cour d'appel d...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 février 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 253 F-D

Pourvoi n° M 18-26.762

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 FÉVRIER 2020

La société MDC exploitation, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° M 18-26.762 contre l'ordonnance rendue le 13 décembre 2018 par le premier président de la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 7), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Marly, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, [...],

3°/ au président du tribunal de commerce de Paris, domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société MDC exploitation, et l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 22 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'ordonnance d'un premier président de cour d'appel attaquée (Paris, 13 décembre 2018), qu'en raison d'un conflit entre associés de la société MDC exploitation, dont le président est M. I... et dont M. O... est directeur général, et qui est détenue par parts égales par la société Marly, dont M. O... est président, et la société Caviar et conserves, dont le président est M. I..., par acte du 30 octobre 2018, la société Marly a fait assigner la société MDC exploitation devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris à fin, principalement, de voir nommer un administrateur provisoire avec pour mission d'assumer la gestion administrative de la société et d'en assurer le contrôle de gestion en exerçant les pouvoirs du président ; que par requête du 16 novembre 2018, la société MDC exploitation a saisi le premier président de la cour d'appel de Paris d'une demande de renvoi devant une autre juridiction de même nature pour cause de suspicion légitime au motif que M. O... a été juge consulaire au tribunal de commerce de Paris de 1991 à 2004, président de ce tribunal de 2000 à 2004, et président de la Conférence générale des tribunaux de commerce de 2001 à 2002 ;

Attendu qu'il y a lieu de statuer par une décision non spécialement motivée sur les deuxième, troisième et quatrième branches du moyen, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Attendu que la société MDC exploitation fait ensuite grief à l'ordonnance de rejeter sa demande tendant au renvoi du litige l'opposant à la société Marly devant une autre juridiction que le tribunal de commerce de Paris, pour cause de suspicion légitime, alors, selon le moyen, qu'est de nature à faire naître un doute sur l'impartialité d'un tribunal de commerce la circonstance que le dirigeant de l'une des sociétés parties à un litige a exercé des fonctions de juge au sein de ce tribunal, peu important que lesdites fonctions aient cessé au moment de l'introduction du litige ; qu'en retenant qu'une telle circonstance ne serait pas de nature à mettre en cause objectivement l'impartialité du tribunal de commerce de Paris, par la considération que les fonctions de l'intéressé avaient cessé quatorze ans avant l'introduction du litige, et en en déduisant qu'il ne serait pas fait état de faits suffisamment précis et corroborés pour que soit établi le bien-fondé de la suspicion légitime alléguée, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 341 et 342 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant souverainement relevé que M. O... a bien exercé des fonctions consulaires au sein du tribunal de commerce de Paris, mais qu'il a cessé ces fonctions il y a quatorze ans, que M. O... a par ailleurs des fonctions dans les deux sociétés en litige, et retenu que la demande ne faisait pas état de faits suffisamment précis et corroborés pour que soit établi le bien fondé de la suspicion légitime alléguée, la cour d'appel en a déduit à bon droit que l'impartialité du tribunal de commerce de Paris ne pouvait être mise en cause ;

D'où il suit que le moyen est mal fondé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société MDC exploitation aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société MDC exploitation

Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée D'AVOIR rejeté la demande de monsieur K... I..., président de la société MDC Exploitation, tendant au renvoi du litige opposant la société MDC Exploitation à la société Marly devant une autre juridiction que le tribunal de commerce de Paris, pour cause de suspicion légitime ;

AUX MOTIFS QUE considérant les motifs de la requête à laquelle il était expressément renvoyé ; que monsieur B... O... avait bien exercé des fonctions consulaires au sein du tribunal de commerce de Paris mais qu'il avait cessé ses fonctions il y avait 14 ans de sorte que l'impartialité du tribunal de commerce de Paris ne pouvait être objectivement mise en cause ; que monsieur O... exerçait des fonctions dans les deux sociétés en qualité de directeur général de MDC Exploitation et président de la société Marly, que la demande initiale ne tendait qu'à la nomination d'un administrateur provisoire ayant pour mission d'assurer la gestion administrative, la comptabilité, le secrétariat juridique et la gestion des payes ; que la demande ne faisait pas état de faits suffisamment précis et corroborés pour que soit établi le bien-fondé de la suspicion légitime alléguée ; qu'en conséquence, vu les articles 341 et suivants du code de procédure civile, ensemble l'article L. 111-6 du code de l'organisation judiciaire, aucun des éléments apportés au soutien de la requête ne constituait un des motifs énumérés par l'article L. 111-6 du code de l'organisation judiciaire, qui énonçait dans sa version en vigueur au 20 novembre 2016 que : « Sous réserve de dispositions particulières à certaines juridictions, la récusation d'un juge peut être demandée : / 1° Si lui-même ou son conjoint a intérêt personnel à la contestation ; / 2° Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une des parties ; / 3° Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ; / 4° S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ; / 5° S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ; / 6° Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ; 7° S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ; / 8° S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ; / 9° S'il existe un conflit d'intérêts, au sens de l'article 7-1 de l'ordonnance n°58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature (
) » ; qu'il résultait de cette disposition que la requête de monsieur K... I..., président de la société MDC Exploitation, n'était pas justifiée (ordonnance, pp. 1 et 2) ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QU'est de nature à faire naître un doute sur l'impartialité d'un tribunal de commerce la circonstance que le dirigeant de l'une des sociétés parties à un litige a exercé des fonctions de juge au sein de ce tribunal, peu important que lesdites fonctions aient cessé au moment de l'introduction du litige ; qu'en retenant qu'une telle circonstance ne serait pas de nature à mettre en cause objectivement l'impartialité du tribunal de commerce de Paris, par la considération que les fonctions de l'intéressé avaient cessé quatorze ans avant l'introduction du litige, et en en déduisant qu'il ne serait pas fait état de faits suffisamment précis et corroborés pour que soit établi le bienfondé de la suspicion légitime alléguée, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 341 et 342 du code de procédure civile ;

ALORS, EN DEUXIÈME LIEU ET EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QU'est de nature à faire naître un doute sur l'impartialité d'un tribunal de commerce la circonstance que le dirigeant de l'une des sociétés parties à un litige a exercé des fonctions de juge au sein de ce tribunal et l'a présidé ; qu'en se bornant, pour retenir l'absence de faits établissant la suspicion légitime, à relever l'ancienneté de la cessation des fonctions de juge consulaire de monsieur O... et en ne recherchant pas, comme l'y avait invité la société MDC Exploitation (requête, pp. 2 et 3), si en sus desdites fonctions occupées pendant une longue période au sein du tribunal de commerce de Paris, monsieur O... n'avait pas exercé la présidence de ce tribunal pendant plusieurs années, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 341 et 342 du code de procédure civile ;

ALORS, EN TROISIÈME LIEU, QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial, peu important l'objet du litige ; qu'en se fondant néanmoins, pour apprécier l'impartialité du tribunal de commerce et en déduire l'absence de faits établissant la suspicion légitime, sur l'objet du litige, tendant en l'occurrence à la nomination d'un administrateur provisoire chargé de tâches de gestion au sein de la société MDC Exploitation, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 341 et 342 du code de procédure civile ;

ALORS, EN QUATRIÈME LIEU, QUE les dispositions du code de procédure civile et du code de l'organisation judiciaire relatives à la suspicion légitime n'épuisent pas nécessairement l'exigence d'impartialité requise de toute juridiction ; qu'en retenant au contraire que seule la caractérisation de l'un des cas visés à l'article L. 111-6 du code de l'organisation judiciaire aurait été de nature à fonder la requête en suspicion légitime, et qu'en l'absence d'une telle caractérisation, la requête devrait être rejetée, le premier président a violé ce dernier texte et les articles 341 et 342 du code de procédure civile, par fausse interprétation.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-26762
Date de la décision : 27/02/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 27 fév. 2020, pourvoi n°18-26762


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.26762
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award